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« Principalement » et non plus « exclusivement » fiscal : le nouvel abus de droit et ses risques

« Principalement » et non plus « exclusivement » fiscal : le nouvel abus de droit et ses risques

Temps de lecture estimé : 8 min
Une nouvelle notion de « l’abus de droit », dit « mini-abus de droit », entre en vigueur au 1er janvier 2020 et fait planer un nouveau risque de redressement fiscal sur certains actes patrimoniaux. L’administration fiscale pourra requalifier sur la base du nouvel article L64 A du LPF (Livre des Procédures Fiscales) les opérations patrimoniales considérées comme à but « principalement » fiscal et non plus « exclusivement » fiscal, comme le voulait jusqu’ici l’usage de l’abus de droit. Quelles conséquences ?

La Loi de Finances pour 2019 (Loi n°2018-1317, 28 décembre 2018, article 109), en élargissant la définition de l’abus de droit,  a mis les conseils vent debout et fragilisé le socle de sécurité juridique encadrant les opérations que le fisc pouvait remettre en question sur ce terrain.

qu’est ce que l’abus de droit ?

Évoquons tout d’abord un bref rappel de la notion d’abus de droit et de sa perception par le législateur et l’administration fiscale.

La procédure d’abus de droit codifiée jusqu’à présent par l’article L64 du Livre des procédures fiscales, permet à l’administration d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, afin d’en restituer le véritable caractère.

L’abus de droit, tel qu’il était défini, renvoyait  à deux types d’actes :

  • les actes ayant un caractère fictif (abus de droit par simulation)
  • les actes constitutifs de fraude à la loi.

Le premier, la fictivité, s’établit selon un examen des faits. Comme le précise l’administration fiscale : « en pratique la fictivité juridique est constituée par la différence objective existant entre l’apparence juridique crée par l’acte en cause et la réalité, en particulier économique sous-jacente à cet acte. » (BOFIP : BOI-CF-IOR-30-20190802)

 Le second, la fraude à la loi, nécessite la réunion de deux conditions :

  • que le contribuable ait cherché le bénéfice d’une application littérale des textes (la loi et les textes réglementaires  tels que les décrets pris en Conseil d’Etat, décret simple ou arrêté) ou  des décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par les auteurs.
  • et que l’acte n’ait pu être inspiré par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités, si ces actes n’avaient pas été passés. D’où la qualification d’opération à but « exclusivement » fiscal.

Apportons quelques précisions sur le sujet :

L’exercice d’une option permise par le législateur n’est pas en soi constitutive d’un abus de droit mais les conditions qui ont permis de se trouver en situation d’exercer cette option peuvent l’être et fonder un redressement sur cet article (CE arrêt du 3 Février 1984, n°38320).

Notons qu’un redressement de l’administration fiscale sur le fondement de l’abus de droit peut concerner tout type d’impôts, exception faite de l’impôt sur les sociétés  dont le but principalement fiscal est codifié par un autre article (voir encadré infra).

En outre, c’est bien à l’administration fiscale de rapporter la preuve que les conditions concourant à l’abus de droit sont réunies.

Concernant les sanctions, outre le fait que l’acte soit déclaré non opposable à l’administration fiscale et entraine le paiement de l’impôt éludé, ainsi que des intérêts de retard, si l’opération est qualifiée d’abus de droit au sens de l’article L64 du LPF par l’administration fiscale, le contribuable se voit également appliquer des majorations :

  • de 80 % du montant de l’impôt éludé lorsqu’il est établi que le contribuable a eu l’initiative principale du ou des actes constitutifs d’abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire.
  • Si tel n’est pas le cas, la majoration est ramenée à 40%.

Ces pénalités sont prévues à l’article 1729 du code général des impôts et applicables d’office. 

qu’est ce que le nouvel abus de droit, dit « mini-abus de droit » ?

Dans le cadre du nouvel abus de droit prévu par la Loi de Finances 2019, l’article L64 du Livre des Procédures Fiscales a été complété d’un article L64 A qui permet de fonder un redressement lorsqu’un acte est réalisé dans un but principalement fiscal.

Cet article fait suite à une première tentative du législateur invalidée par le Conseil Constitutionnel fin 2013 (1). Dans cette nouvelle version (précisons que le Conseil Constitutionnel n’a pas été cette fois saisi), il est indiqué un motif « principalement fiscal ».

Les termes choisis pour la rédaction de ce dispositif appelé « mini abus de droit » appellent plusieurs remarques :

  • Les termes « principalement fiscal » renvoient à une notion relativement large et imprécise, rendant les cas de requalifications incertains.
  • La charge de la preuve n’a pas été inversée par le nouvel article de loi. C’est toujours l’administration fiscale qui doit rapporter la preuve que l’opération est constitutive d’un abus de droit à but principalement fiscal.
  • La nouvelle définition de l’abus de droit n’est assortie d’aucune pénalité automatique. Cependant, l’administration a la possibilité d’appliquer les pénalités de droit commun, notamment dans le cadre de manœuvres frauduleuses ou de manquement délibéré.
  • L’article L. 64 A s’applique aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 portant sur des actes passés ou réalisés à compter du 1er janvier 2020 (conformément à l’article 109 II A de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018).

Les deux types d’abus de droit concernant les contribuables (personnes physiques)

Articles de loi Mise en application Fondement Sanctions
L64 LPFPour les actes en vigueur, notification de redressement actuelle.- Fictivité
- Fraude à la loi
Impôt éludé, intérêt de retard.
Majorations automatiques 40% ou 80% selon les conditions
L64 A LPF « mini abus de droit »Pour les actes passés à compter du 1er janvier 2020, rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021- Fraude à la loiImpôt éludé, intérêt de retard.
Possible pénalité de droit commun à justifier (40% ou 80%)

Que pouvons-nous craindre ?

L’inquiétude majeure vient du motif « principalement » fiscal. Ce terme renferme en lui-même une notion imprécise, qui laisse à l’administration fiscale une latitude contraire au principe de sécurité juridique du contribuable.  La boîte de «  Pandore » semble ouverte …

Sur le fond, la Doctrine, incarnée notamment par Frédérique Douet ou encore l’éminent Olivier Fouquet, a multiplié les allocutions écrites et orales s’inquiétant de l’imprécision dans  l’écriture du texte. Olivier Fouquet, membre du Conseil d’Etat, déclare ainsi dans un article du 31 janvier 2019 que « cet accroissement considérable de l’insécurité juridique résultant d’une interprétation extensive de l’abus de droit est préoccupante (…). ».

Que mettre sous le vocable « principalement », puisque la plupart des opérations sont, au moins pour partie, motivées par des raisons fiscales ?

En début d’année beaucoup de conseils se sont émus au sujet de la donation de la nue-propriété de biens immobiliers, laquelle permet de réduire l’assiette fiscale de la donation (droits calculés sur la seule valeur de la nue-propriété définie selon l’article 669 du CGI) et d’économiser par la suite de l’impôt de succession (au décès de l’usufruitier, la pleine propriété se reconstitue dans les mains du nu-propriétaire sans supplément d’imposition, article 1133 du CGI).

Compte tenu de la nouvelle rédaction de l’abus de droit et du nouveau dispositif applicable en 2020, doit-on considérer ce but comme principalement fiscal ?

Le discours de la DGFIP (ministère de l’Action et des Comptes publics), dans son communiqué de presse du 19 janvier dernier, s’est voulu rassurant. Néanmoins un communiqué de presse n’a pas en soi de valeur juridique.

La réponse ministérielle du 13 juin dernier posée par Catherine Procaccia (question numéro 09965) serait néanmoins de nature à rassurer puisqu’elle précise :

 « l’intention du législateur n’est pas de restreindre le recours aux démembrements de propriété dans les opérations de transmissions anticipées de patrimoine, lesquelles sont, depuis de nombreuses années, encouragées par d’autres dispositions fiscales. À cet égard, il peut être constaté notamment que les articles 669 et 1133 du code général des impôts (CGI) (…) n’ont pas été modifiés. Ainsi, la nouvelle définition de l’abus de droit telle que prévue à l’article L. 64 A du LPF n’est pas de nature à entraîner la remise en cause des transmissions anticipées de patrimoine et notamment celles pour lesquelles le donateur se réserve l’usufruit du bien transmis, sous réserve bien entendu que les transmissions concernées ne soient pas fictives. »

La DGFIP a promis des éclaircissements que les conseils attendent et appellent de leurs vœux.

Pour autant, on peut d’ores et déjà rappeler que les schémas de cessions à soi-même de biens immobiliers détenus en direct et vendus à une structure sociétaire (SCI IR ou IS par exemple), détenue principalement ou totalement par les vendeurs semblent faire partie des schémas possiblement remis en cause, tant il peut sembler visible dans beaucoup de structurations que le but pourrait être principalement fiscal.

On a donc vu beaucoup de conseils valider des opérations de cessions de biens immobiliers à soi-même pour une passation des opérations et d’acquisition auprès du notaire avant la fin de l’année 2019. L’acte étant passé avant l’année 2020, le redressement ne pourra être fondé sur le motif « principalement » fiscal. Dans l’attente des précisions et commentaires de l’administration, l’année 2020 devrait appeler les conseils à la prudence sur ce type de dispositifs.

Les schémas de donation avant cession, bien connus et, jusqu’à présent, validés en jurisprudence font aussi partie des schémas qui pourraient tomber sous les feux de l’administration. On pourrait encore citer l’apport de biens à communauté puis la donation aux enfants de ces derniers.

En pratique, pour les opérations à venir, les conseils seraient amenés à préciser l’objectif de l’acte dans une clause de déclaration d’intention et motiver ce dernier par d’autres finalités que des considérations fiscales.

Mais finalement, le but inavoué de l’Etat ne serait-il pas de favoriser le recours au rescrit fiscal lui permettant de se prononcer en amont sur les opérations envisagées par le contribuable ou de favoriser la saisine du comité de l’abus de droit ? Autant d’orientations sibyllines au nom de la lutte contre la fraude fiscale.

à noter : une troisième définition de l’abus de droit concernant l’impôt sur les sociétés

La Loi de Finances pour 2019 a insérée une troisième définition de l’abus de droit à l’article 205-A du Code général des impôts  en matière d’impôt sur les sociétés uniquement.

En transposant la Directive européenne « ATAD (2), l’article 205-A du CGI vient étendre cette notion à l’ensemble de l’impôt sur les sociétés alors qu’elle ne concernait en droit français que le régime des sociétés mères. Il institue ainsi une clause « anti-abus » générale en matière d’impôt sur les sociétés.

La notion d’abus de droit semble donc s’inscrire partout.

Les nouveaux élargissements de la notion d’abus de droit sont compris par les professionnels du droit comme une potentielle source d’insécurité juridique. Aussi, certains conseils n’excluent pas une action en justice quant à la constitutionnalité du dispositif  du «mini abus de droit ».

L’Etat de droit nous semble appeler une clarification qui serait bienvenue tant pour les conseils que pour le contribuable. Gageons que l’administration fiscale va préciser assez rapidement les contours du terme « principalement fiscal » pour circonscrire au mieux les opérations à venir et garantir aux contribuables, comme aux professionnels du droit, un environnement fiscal plus serein.

Auteur
Sabine Petitgirard 

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 1, juriste fiscaliste patrimonial private banking, spécialisé en gestion de patrimoine.

Loi Pacte : principales mesures concernant le patrimoine des particuliers

Loi Pacte : principales mesures concernant le patrimoine des particuliers

Temps de lecture estimé : 7 min
Au terme d’un long travail parlementaire (plus de 12 mois de débats), la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi PACTE », a été publiée au Journal Officiel de la République Française le 23 mai 2019. Cette loi contient notamment de nombreuses évolutions en faveur de la modernisation des outils de gestion de patrimoine des français et de nombreuses mesures de soutien aux PME-ETI.

Nous vous présentons une synthèse de ces principales mesures en abordant dans un premier temps les dispositions concernant les supports de gestion du patrimoine privé.

Mesures en faveur de l’assurance vie

Mise en place d’une mesure de transférabilité partielle

La loi PACTE instaure un principe de transférabilité des contrats d’assurance vie ou de capitalisation au sein du même assureur, sans perte d’antériorité fiscale.

  • En pratique, le souscripteur d’un contrat d’assurance vie ou de capitalisation a désormais la possibilité de transférer un ancien contrat vers un nouveau au sein de la même compagnie d’assurance, sous réserve que ce nouveau contrat soit en tout ou partie investi en unités de comptes ou en fonds Euro croissance. Cette transformation, qui peut se réaliser soit par voie d’avenant, soit dans le cadre d’une nouvelle souscription, n’emporte pas les conséquences fiscales d’un dénouement.
  • A la différence de l’ancien dispositif « Fourgous » (qui permettait la transformation d’un contrat mono support en un contrat multi support sans perte d’antériorité fiscale), cette transformation n’est pas subordonnée au respect d’un pourcentage minimum d’unités de comptes au sein du nouveau contrat.

Le transfert d’un contrat vers un autre assureur demeure une opération assimilée à un rachat taxable, entraînant le dénouement du contrat suivi d’une nouvelle souscription.

A ce stade, nous ne connaissons pas encore les modalités pratiques que vont adopter les assureurs dans le cadre de ces nouvelles dispositions.

Ouverture des contrats de droit français à certains fonds professionnels de Private Equity

Les unités de comptes éligibles aux contrats d’assurance vie de droit français pourront être constituées de certains fonds de Private Equity ouverts à des investisseurs professionnels.

  • Ces fonds s’entendent notamment des FPCI (fonds professionnels de capital investissement), des SLP (sociétés de libre partenariat) ou des OPPCI (organismes professionnels de placements collectifs immobiliers).
  • Un décret, non paru à ce jour, doit notamment fixer les conditions à remplir pour pouvoir souscrire ces nouveaux supports (conditions tenant notamment à la situation financière, aux connaissances ou à l’expérience en matière financière du détenteur du contrat).

Pour favoriser la souscription de fonds de « Private Equity » par les investisseurs éligibles et ainsi lever la contrainte de liquidité reposant sur l’assureur, la loi PACTE assouplie également les conditions de délivrance en nature.

  • Dorénavant, lorsque le souscripteur d’un contrat d’assurance opte irrévocablement pour la remise de titres éligibles en cas de rachat (sous réserve de l’accord de l’assureur), cette option sera réputée s’appliquer au bénéficiaire du contrat, sauf mention expresse contraire.
  • Le règlement du contrat par la remise de titres reste subordonné au respect de nombreuses conditions.

Mesures diverses

Les versements sur un contrat d’assurance vie par un résident de France devront désormais obligatoirement être réalisés en numéraire, y compris pour des contrats de droit luxembourgeois.

Un abattement temporaire de 9 200 € (contribuable soumis à imposition commune) ou de 4 600 € (contribuable seul) est instauré sur les gains réalisés en cas de rachat total ou partiel d’un contrat d’assurance vie de plus de 8 ans en vue d’alimenter un Plan d’Epargne Retraite (PER, cf. infra)

  • Ces rachats doivent être réalisés avant le 1er janvier 2023 par un souscripteur à plus de 5 ans de l’âge de l’ouverture de ses droits à retraite, et les sommes reçues au titre de ce rachat devront être intégralement versées sur un PER avant le 31 décembre de l’année du rachat.
  • Cet abattement est fonction de la situation familiale du souscripteur et sera cumulable avec l’abattement de droit commun du même montant déjà applicable en cas de rachat sur un contrat d’assurance vie de plus de 8 ans.

Les compagnies d’assurance seront soumises à de nouvelles obligations de transparence s’agissant notamment des participations aux bénéfices (PAB) attribuées ou des frais appliqués sur les unités de comptes proposées.

A compter du 1er janvier 2020, les assureurs auront l’obligation de proposer pour les contrats conclus à compter de cette même date des unités de compte socialement responsables. A compter de 2022, cette obligation s’étendra aux unités de compte vertes et solidaires.

assouplissement des règles de fonctionnement du pea et du pea-pme

Fusion des plafonds de versement du PEA et du PEA-PME

Depuis le 24 mai 2019, les plafonds des versements sur un PEA et un PEA-PME sont fusionnés en un plafond commun, fixé à 225 000 €. Mais pour favoriser le PEA-PME, le plafond individuel du PEA demeure fixé à 150 000 €.

En pratique, les versements non utilisés sur un PEA peuvent être utilisés sur un PEA-PME, mais l’inverse n’est pas possible.

  • Par exemple, un contribuable titulaire d’un PEA sur lequel il a versé 10.000 € peut abonder un PEA-PME jusqu’à 215.000 €.
  • En revanche, un investisseur titulaire d’un PEA-PME alimenté avec 10.000 € ne pourra verser sur son PEA que 150.000 € (il lui restera alors un reliquat de versements de 65.000 € qu’il ne pourra placer que sur son PEA-PME).

Le titulaire d’un PEA ou d’un PEA-PME qui aurait sciemment dépassé ces seuils de versements est passible d’une amende fiscale égale à 2% du montant des versements surnuméraires (outre les autres sanctions, notamment la clôture des plans).

Création d’un pea « jeune majeur »

Depuis le 24 mai 2019, un jeune de 18 à 25 ans rattaché au foyer fiscal de ses parents peut ouvrir un PEA dont le plafond de versement est fixé à 20.000 € jusqu’à la fin de son rattachement (les versements effectués par ce majeur rattaché ne s’imputent pas sur le plafond de versement du ou des PEA de ses parents).

Un majeur rattaché au foyer fiscal de ses parents ne peut pas ouvrir un PEA-PME.

Le titulaire d’un PEA « jeune majeur » qui aurait sciemment dépassé le seuil de 20.000 € est passible d’une amende fiscale égale à 2% du montant des versements surnuméraires.

Assouplissements des règles de retrait partiel

A compter du 24 mai 2019, un retrait partiel sur un PEA ou sur un PEA-PME de plus de 5 ans n’entraîne ni la clôture du plan, ni le blocage de nouveaux versements.

  • Pour rappel, jusqu’au 23 mai 2019, un retrait partiel opéré sur un PEA de plus de 5 ans et de moins de 8 ans entraînait la clôture du plan, tandis qu’un retrait réalisé sur un plan de plus de 8 ans empêchait d’effectuer de nouveaux versements.

Compte tenu des modifications apportées par la loi PACTE, et des assouplissements apportés par la loi de finances pour 2019, le régime applicable en cas de retraits partiels est le suivant :

Elargissement des instruments éligibles au pea-pme

Depuis le 24 mai 2019, l’univers d’investissement du PEA-PME est élargi aux :

  • Minibons
  • Titres participatifs
  • Obligations à taux fixe émises par des PME-ETI dans le cadre d’une offre de financement participatif
  • Obligations remboursables en actions (ORA) non cotées, émises par des PME-ETI.
    • Auparavant, seules les OCA (obligations convertibles) ou les ORA cotées émises par des PME-ETI étaient éligibles au PEA-PME
    • Les OCA non cotées demeurent exclus du PEA-PME.

Par ailleurs, est instauré un complexe dispositif d’imposition partielle des produits procurés par des placements effectués en ORA non cotées sur un PEA-PME (coupons et plus-values générées par la cession de l’ORA ou de l’action reçue lors du remboursement de l’obligation).

création du « plan d’épargne retraite » (per)

La loi PACTE instaure un « Plan d’Epargne Retraite » (PER), dont l’objet est de permettre à son titulaire le paiement de rentes viagères ou le versement d’un capital à compter de sa retraite.

Ce PER sera composé de trois compartiments distincts :

  • un compartiment individuel, qui sera alimenté avec les versements volontaires du titulaire (venant se substituer aux dispositifs PERP et Madelin) – 1er compartiment
  • un compartiment collectif facultatif (équivalent au PERCO), qui sera alimenté avec les sommes versées au titre de l’épargne salariale (intéressement et participation), la monétisation de certains jours de CET et les versements volontaires – 2e compartiment
  • un compartiment collectif obligatoire (équivalent aux actuels dispositifs articles 39 et 83) qui sera notamment alimenté avec les cotisations obligatoires salariées et employeurs au titre des plans d’épargne retraite d’entreprise (PERE) – 3e compartiment

Avant la retraite du titulaire, les sommes logées sur un PER seront bloquées.

  • Elles pourront toutefois être débloquées par anticipation en capital dans certaines situations (décès du conjoint ou partenaire de PACS du titulaire, invalidité, surendettement, acquisition de la résidence principale [uniquement pour les sommes logées sur le 1er et le 2e compartiment], …)
  • Le décès du titulaire entraîne la clôture du PER

Au jour de la liquidation des droits à la retraite, les droits correspondants aux 1er et 2e compartiments pourront en principe être délivrés, au choix du titulaire, sous la forme d’un capital ou sous la forme de rentes viagères (le cas échéant réversibles). Les droits correspondants au 3e compartiment ne pourront être délivrés que sous forme de rentes viagères.

Le PER doit entrer en vigueur à une date fixée par décret (non paru à ce jour) et au plus tard le 1er janvier 2020. Par ailleurs, certaines mesures d’application doivent être prises par ordonnances dans les 12 mois de la publication de la loi PACTE. Ces ordonnances devront notamment prévoir le régime fiscal applicable au PER : il s’agira de définir les modalités de déductibilités des versements volontaires et obligatoires et les modalités d’imposition des rentes viagères ou des prestations en capital (en cas de déblocages anticipés ou à l’occasion de la retraite) qui demeurent, à ce stade, inconnues. Devront aussi être précisées les règles d’articulation du PER avec les dispositifs existants (PERP, PERCO,…).

En conclusion

La loi Pacte modifie donc significativement les principaux supports de gestion de patrimoine des français : l’assurance-vie, le PEA et les supports d’épargne retraite. Elle apporte des assouplissements importants pour favoriser leur développement. Les décrets à paraître restent néanmoins très attendus pour connaître les détails d’application et d’imposition de ces nouvelles mesures.

Auteur
François Soubiran 

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

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La déclaration d’impôt sur les revenus 2020 en 7 points

La déclaration d’impôt sur les revenus 2020 en 7 points

Temps de lecture estimé : 6 min

Grande nouveauté : la déclaration d’impôt 2020 devient automatique pour un grand nombre de contribuables aux revenus récurrents et pré-déclarés. En ligne depuis le 20 avril, la déclaration sur les revenus 2020 n’en demeure pas moins complexe. Elle permet la première régularisation du prélèvement à la source institué en 2019 et reste impactée par les mesures dites « anti-optimisation » prises dans le cadre de l’année blanche.

Tour d’horizon en 7 points.

Entre limitation de certaines déductions pour travaux fonciers ou épargne-retraite, particularités de certains crédits d’impôt comme le CITE (Crédit d’Impôt Transition Energétique), régularisations de réduction d’impôt pour certaines dépenses ou dons, la déclaration fiscale est loin d’être simplifiée.

Avant d’établir la déclaration d’impôt 2020, 7 points spécifiques sont à connaître.

1- la déclaration automatique de revenus

Comme tous les ans, la déclaration est pré-remplie. Une nouveauté importante est apportée cette année : lorsqu’il n’est pas nécessaire de la modifier, la déclaration de revenus est automatique sans avoir à la signer ni à la transmettre.

2- première année de régularisation pour le prélèvement à la source (pas)

L’impôt a été payé pour la première fois à la source sur les revenus de 2019, l’année même de leur perception. Le prélèvement à la source est calculé sur la base d’un taux moyen d’imposition tenant compte des revenus de 2018. Il ne prend pas en compte les gains réels perçus en 2019 et leurs variations annuelles (cas par exemple des loyers, des bénéfices professionnels, des plus-values exceptionnelles). La déclaration des revenus réellement perçus reste indispensable pour le calcul de l’impôt dû.

L’année 2020 est la première année de cette régularisation :

  • si l’impôt définitif est supérieur aux prélèvements à la source de 2019 : le solde est à régler en septembre 2020.
  • si l’impôt définitif est inférieur aux prélèvements à la source 2019 : le solde est restitué.

3- immobilier

déduction des travaux limitée en 2019

Attention aux travaux de réparation, d’entretien et d’amélioration réalisés en 2019 et à leur déduction.

Du fait de l’année blanche sur l’impôt sur le revenu en 2018, ces travaux normalement déductibles font l’objet d’une mesure dite « anti-optimisation ».

Seule la moyenne des travaux réalisés en 2018 et en 2019 est déductible des revenus fonciers 2019. Cela revient à dire que seuls 50 % des travaux réalisés en 2018 et 50 % des travaux réalisés en 2019 sont déductibles des loyers perçus en 2019.

A noter 

Les contribuables qui ont souhaité maintenir des travaux en 2018 ont pu les déduire des revenus fonciers 2018, même si l’effet de cette déduction a été limité par l’année blanche. Un déficit a pu être créé au titre de 2018 et utilisable sur les dix années suivantes.
Ces travaux déduits à 100 % sur les revenus fonciers de 2018 sont également déductibles à 50 % sur les revenus fonciers de 2019, soit une déduction de 150 %.

Si ces travaux ont été réalisés sur des immeubles acquis en 2019 ou s’il s’agit de travaux d’urgence ou de force majeure, ils restent totalement déductibles en 2019.

un nouveau régime de défiscalisation denormandie

Une nouvelle déduction immobilière a vu le jour en 2019 : le dispositif Denormandie. Ce régime s’applique aux rénovations immobilières dont les travaux de type énergétique (les travaux éligibles sont élargis à partir de 2020) représentent au moins 25 % du montant total de l’investissement.
L’immeuble doit être situé dans une zone spécifique (liste établie par décret de 245 communes dit « Action cœur de ville » ou sous-convention d’opération de revitalisation du territoire (ORT)).

L’investissement est limité à un plafond global de 300.000 € et de 5.500 €/m2. La réduction d’impôt est de 12 %, 18 % ou 21 %, selon la durée d’engagement de location du bien à titre de résidence principale sur 6, 9 ou 12 ans. Des conditions de loyers et de ressources des locataires sont également à respecter.

4- épargne-retraite : perp et article 83

A la suite de l’année blanche sur les revenus 2018, les versements réalisés en 2019 sur les supports d’épargne-retraite PERP (Plan d’épargne-retraite populaire) et contrat « article 83 » font l’objet d’une mesure « anti-optimisation ».

Si ces versements ont été réduits en 2018 comparativement à 2017 et 2019, la déduction des versements réalisés en 2019 est limitée à la moyenne des versements réalisés en 2018 et 2019.

Si aucun versement n’a été réalisé en 2018 mais que ces supports ont été alimentés en 2017, les versements réalisés en 2019 sont alors déductibles à 50 % seulement de leur montant.

Dans les autres cas (pas de versement en 2018 ni en 2017 ou versements en 2018 supérieurs à ceux de 2017 ou pour les contrats ouverts en 2019), les versements de 2019 sont déductibles dans leur totalité.

5- cimr 2020 (crédit d’impôt modernisation du recouvrement)

Le Crédit d’Impôt Modernisation du Recouvrement (CIMR) accordé en 2019 dans le cadre de l’année blanche efface l’impôt sur les revenus récurrents et non exceptionnels de 2018.

Les indépendants ou entrepreneurs individuels peuvent bénéficier d’un complément de CIMR en 2020 lorsque leurs bénéfices professionnels réalisés en 2019 (BA Bénéfices Agricoles, BIC Bénéfices Industriels et Commerciaux et BNC Bénéfices Non Commerciaux) sont supérieurs à ceux de 2018 ou aux bénéfices les plus élevés de 2015, 2016 ou 2017.

En savoir plus : Bofip.impots.gouv.fr « IR- Prélèvement à la source – Mesures transitoires – CIMR »

6- réductions et crédits d’impôt

régularisation des avances de janvier 2020

Afin de ne pas attendre le mois de septembre de chaque année pour bénéficier des réductions et crédits d’impôt liés à certaines dépenses ou certains dons, une avance est versée en janvier. Cette avance est égale à 60 % des réductions et crédits d’impôt déclarés l’année précédente.

La déclaration d’impôt permet de connaître le montant des dépenses et des dons réellement effectués au titre de l’année précédente et de calculer le complément de réduction d’impôt à percevoir ou à restituer :

  • Si les réductions et crédits d’impôt au titre des dépenses et dons réalisés en 2019 sont supérieurs ou égaux à ceux effectués en 2018, le complément est perçu en fin juillet ou début août 2020.
  • Dans le cas inverse, une restitution est exigée et rajoutée à l’impôt à payer en septembre 2020 au titre des revenus 2019.

dernière année pour le cite (crédit d’impôt transition energétique)

2019 est la dernière année avant la limitation du CITE et sa transformation en prime forfaitaire.

Les investissements énergétiques réalisés sur la résidence principale, construite depuis plus de 2 ans, ouvrent droit à une réduction d’impôt de 15 % à 30 % suivant la nature des travaux. La base de dépenses déductible est limitée à 8.000 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et 16.000 € pour un couple marié ou pacsé sur une durée de 5 ans.

De nouvelles dépenses sont éligibles en 2019 (chaudière à très haute performance énergétique hors fioul, remplacement de fenêtres, équipements de chauffage à source d’énergie renouvelable, dépose d’une cuve à fioul) et surtout ces dépenses sont prises en compte sans conditions de ressources.

A partir du 1er janvier 2020, le CITE sera progressivement transformé en prime forfaitaire allouée sous conditions de revenus.

7- plus-values sur valeurs mobilières

pea et pea-pme

Les PEA et PEA-PME ont été profondément remaniés dans leur fonctionnement par la loi Pacte et également dans leur fiscalité.

Depuis le 1er janvier 2019, les retraits réalisés sur un plan de moins de 5 ans sont imposés au taux fixe de 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu (sauf option pour le barème progressif). A ce taux s’ajoutent les contributions et prélèvements sociaux de 17,2 %.

plus-value de cession d’actifs numériques

Autre nouveauté en 2019 : les plus-values sur actifs numériques (crypto monnaie) réalisées par des personnes physiques à titre occasionnel et non professionnel sont imposées au PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique) de 30 %, composé du taux d’impôt de 12,8 % et des contributions et prélèvements sociaux de 17,2 %.

Lorsque les cessions annuelles de ces actifs numériques restent inférieures à 305 €, les plus-values sont exonérées.

 

En résumé

La déclaration d’impôt sur les revenus 2020 est simplifiée pour un grand nombre de contribuables. Les personnes percevant des revenus réguliers et connus de l’administration fiscale disposent cette année d’une déclaration en ligne non seulement pré-remplie mais également automatique.

2020 est aussi la première année de régularisation du prélèvement à la source. Les déclarations de revenus professionnels, de revenus fonciers, de plus-values sur valeurs mobilières mais également des dépenses ouvrant droit à réduction d’impôt nécessitent toujours et d’autant plus une attention et un conseil avisé.

 

Auteurs
Anne Brouard

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

IFI : le point sur l’immobilier professionnel

IFI : le point sur l’immobilier professionnel

Temps de lecture estimé : 8 min

Depuis l’instauration de l’IFI, Impôt sur la Fortune Immobilière, succédant à l’ISF au 1er janvier 2018, le champ de l’imposition sur la fortune est réduit aux biens immobiliers détenus directement ou par l’intermédiaire de société.

Qu’en est-il de l’immobilier d’entreprise ? Les règles d’imposition de ces biens immobiliers professionnels diffèrent-elles de celles de l’ISF ? Sont-ils imposables ou s’agit-il d’actif professionnel exonéré et dans quels cas ?

Au 1er janvier 2018, l’ISF a été remplacé par l’IFI, Impôt sur la Fortune Immobilière. Comme son nom l’indique, le champ d’application de cette nouvelle imposition est limité aux biens et titres immobiliers.

Est ainsi imposable, tout contribuable, résidant fiscal en France (à raison de ses biens immobiliers situés en France et hors de France), ou non résident (à raison de la valeur de ses biens et droits immobiliers situés en France), qui seul ou avec son foyer fiscal (conjoint, partenaire de Pacs, concubin notoire, enfants mineurs) détient un patrimoine immobilier net supérieur à 1 300 000 €.

Les actifs immobiliers pris en compte sont ceux détenus directement par les membres du foyer fiscal mais également ceux détenus indirectement au sein de sociétés dont le contribuable ou un membre de son foyer fiscal est associé ou par l’intermédiaire de fonds de placement (SCPI, OPCI).

Les biens immobiliers de jouissance (résidence principale – celle-ci bénéficiant d’un abattement – résidence secondaire) sont imposables mais aussi les biens immobiliers de rapport (immeubles locatifs) détenus directement ou indirectement, leur gestion relevant d’une activité civile.

Qu’en est-il des biens immobiliers professionnels ?

Avant 2018, l’ISF prévoyait un régime spécifique pour l’exonération des actifs professionnels. L’IFI a repris ce principe mais de manière différente.

Dans le cadre de l’ISF, les critères d’exonération concernaient principalement la situation professionnelle du contribuable (entrepreneur individuel, conditions spécifiques pour les actionnaires de sociétés à l’IR et de sociétés à l’IS).

L’IFI prévoit deux régimes distincts concernant les biens immobiliers professionnels :

  • le premier concerne le bien lui-même et ses conditions pour être hors champ de l’IFI et donc non imposable (article 965 du CGI).
  • le deuxième concerne le contribuable au regard de l’exercice de son activité professionnelle (entrepreneur individuel, société à l’IR ou à l’IS) et prévoit la situation où le bien immobilier est détenu hors société (article 975 du CGI).

Ces deux régimes s’appliquent indépendamment.

La non-imposition des biens immobiliers professionnels détenus en sociétés et hors champ de l’ifi : article 965 du cgi

Le nouvel article 965 du CGI (créé par la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017) définit l’assiette imposable de l’IFI.

Dans le cas où les biens immobiliers sont détenus en société dont le redevable est associé, la valeur imposable à l’IFI est celle des parts de la société pour leur fraction représentative des biens immobiliers détenus directement ou indirectement.

Pour calculer cette fraction, on applique à la valeur des parts un coefficient correspondant au rapport entre la valeur vénale des biens immobiliers imposables détenus directement ou indirectement  par la société et la valeur vénale de l’actif total de la société.

Ce même article prévoit néanmoins deux situations dans lesquelles les biens immobiliers n’entrent pas dans le calcul de ce coefficient et donc de la fraction des parts sociales imposables à l’IFI.

Ces cas de non-imposition concernent donc uniquement des biens immobiliers détenus en société.

Biens immobiliers détenus dans une société ayant une activité économique et dont le redevable détient moins de 10 % du capital

Lorsque le bien immobilier est détenu dans une société ayant une activité économique (industrielle, commerciale, artisanale, agricole, libérale) dont le redevable détient directement ou indirectement, seul ou avec son foyer fiscal, moins de 10 % du capital et des droits de vote, sa valeur est exclue du champ imposable de l’IFI pour ce redevable.

Si la société n’a pas d’activité économique opérationnelle, le contribuable est alors imposable sur la valeur immobilière des parts sociales sauf s’il peut démontrer qu’il ne dispose pas des informations nécessaires à l’estimation de la fraction imposable de ses parts et à condition qu’il ne contrôle pas la société et qu’il détienne directement ou indirectement, seul ou avec son foyer fiscal, moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société détenant les biens immobiliers concernés.

Biens immobiliers détenus dans une société et affectés à l’activité économique de cette société ou d’une société du groupe

Cas d’une seule société :

Les biens immobiliers détenus directement par une société dont le redevable est associé ou actionnaire n’entrent pas dans le calcul de la fraction imposable des parts de cette société à l’IFI si ces biens sont affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de cette même société.

Le contribuable doit simplement être associé de la société mais aucune condition de détention minimale de capital n’est exigée. Cette « non-imposition » à l’IFI tient donc principalement à la détention du bien en société et à l’affectation du bien à l’activité économique de cette même société.

Cas des groupes de sociétés :

Dans les groupes de sociétés, les biens immobiliers peuvent être détenus à plusieurs niveaux (holding, filiales). Les biens immobiliers ne sont alors hors champ de l’IFI que dans les situations suivantes :

  • lorsque le bien immobilier est détenu par une filiale détenue directement ou indirectement par la société dans laquelle le redevable détient ses parts et que ce bien est affecté à l’activité économique de cette filiale (CGI art. 965, 2°-a) ;
  • lorsque le bien immobilier est détenu par une société du groupe mais affecté à l’activité économique d’une autre société du même groupe (CGI art. 965,2°-b), les possibilités de non-imposition sont alors limitées aux seuls cas où le bien immobilier est affecté :
    • à l’exploitation de la société du groupe qui exerce l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et dans laquelle le redevable détient sa participation directement ou indirectement ;
    • à l’activité économique de la société même qui détient le bien ;
    • à l’activité économique d’une société du groupe contrôlée par la société qui exerce l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale dont le redevable est directement ou indirectement associé. Ce contrôle se caractérise par la détention, directement ou par personne interposée, de la majorité des droits de vote ou du pouvoir de décision.

Dans l’organigramme ci-dessus, si le bien professionnel détenu par la société B est affecté à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société C, il est exclu du champ de l’IFI pour le calcul de la valeur imposable des parts sociales de A à l’IFI car la société C est contrôlée par la société A.

Si le bien professionnel détenu par la société B est affecté à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société D, il reste imposable car la société D n’est pas contrôlée par la société A.

En savoir plus
Legifrance.gouv.fr – Article 965 du CGI

L’exonération des biens immobiliers pour caractère professionnel : article 975 du cgi

Un autre régime d’exonération des biens à caractère professionnel existant du temps de l’ISF et codifié à l’article 975 du CGI a également été maintenu dans le cadre de l’IFI et actualisé en conséquence. Il concerne :

  • les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI, lorsque ces biens sont affectés à l’activité principale industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale du redevable.

Cette situation concerne principalement l’entrepreneur individuel détenant en direct un bien immobilier et affectant exclusivement ce bien à son activité professionnelle principale. Ce bien est alors exonéré au titre des biens professionnels. Le régime de l’article 965 du CGI n’aurait pas permis d’exclure ce bien de l’IFI puisque les cas de non-imposition qu’il prévoit ne visent que les biens détenus en société.

  • les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI et affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale d’une société de personnes soumise à l’IR (sociétés de l’article 8 et 8 ter du CGI) et dans laquelle le redevable exerce son activité professionnelle principale.

Un bien immobilier affecté exclusivement à l’activité économique d’une SNC dans laquelle le contribuable exerce son activité principale est donc exonéré d’IFI.

  • Les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI et affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale d’une société de personnes soumise à l’IS à condition que :
    • le redevable exerce dans cette société une fonction de direction (gérant nommé dans les statuts pour une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions ou associé en nom d’une société de personnes ou président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions) ;
    • cette fonction de direction doit être effectivement exercée et donner lieu à une rémunération dite normale au regard des rémunérations de même type. Cette rémunération doit également représenter plus de la moitié des revenus professionnels du contribuable ;
    • le redevable doit détenir plus de 25 % des droits de vote au capital de la société, seul ou par l’intermédiaire de son conjoint, de leurs ascendants, descendants ou de leurs frères et sœurs, directement ou indirectement dans la limite d’un seul niveau d’interposition. Cette condition de détention de 25 % du capital n’est pas exigée pour les gérants majoritaires de SARL, pour les associés de sociétés de personne ou sociétés civiles soumises à l’IS, pour les gérants de société en commandite par actions ;
    • si la détention de 25 % du capital n’est pas réalisée, l’exonération est également accordée si le redevable exerce bien une fonction de direction et lorsque la valeur des titres de la société qu’il détient représente plus de 50 % de la valeur brute de son patrimoine total.

Enfin, l’article 975 du CGI prévoit le cas important, car fréquent, où le bien immobilier n’est pas détenu par la société professionnelle du contribuable mais affecté à l’activité économique de cette société.

Dans la situation ci-dessus, le bien immobilier est détenu directement par le redevable qui satisfait aux conditions précédentes de l’article 975 du CGI. Ce bien est affecté à l’activité économique de la société. Il bénéficie de l’exonération au titre des biens professionnels à hauteur de la participation du redevable au capital de la société A.

Ce dernier point prévu par l’article 975 du CGI est d’application importante puisqu’il concerne les cas fréquents de détention de l’immobilier professionnel hors société. Son usage est d’autant plus important que l’article 965 du CGI ne prévoit pas cette situation et ne vise, pour les cas de non-imposition, que les biens immobiliers détenus en société.

En savoir plus
Legifrance.gouv.fr – Article 975 du CGI

En conclusion, il existe deux régimes distincts (article 965 du CGI et article 975 du CGI) permettant d’exclure du champ imposable de l’IFI les biens immobiliers à usage professionnel.

Certains contribuables peuvent être non imposables sur leur bien immobilier professionnel au titre des deux régimes.

D’autres contribuables qui n’étaient pas exonérés dans le cadre de l’ISF peuvent le devenir dans celui de l’IFI, principalement par l’application de l’article 965 du CGI.

Ceci peut être le cas d’une société à l’IS ayant une activité économique et détenant un bien immobilier affecté à cette activité. Si l’associé ne détient pas 25 % du capital et n’exerce pas de fonction de direction dans cette société, il ne peut être exonéré d’IFI au titre de l’article 975 du CGI mais, par application de l’article 965 du CGI, ce bien n’entrera pas dans le calcul de la fraction imposable à l’IFI de ses parts de société.

Sources

  • Code Général des Impôts
    • Article 964
    • Article 965
    • Article 975
  • Loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, art. 31
  • BOI-PAT-IFI
    • BOI-PAT-IFI-10
    • BOI-PAT-IFI-20-20 et sous-chapitres
    • BOI-PAT-IFI-30 et sous-chapitres

Auteur
Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

PLF 2020 : les nouvelles dispositions patrimoniales du Projet de Loi de Finances

PLF 2020 : les nouvelles dispositions patrimoniales du Projet de Loi de Finances

Temps de lecture estimé : 6 min

Présenté le 27 septembre en Conseil des Ministres, le Projet de Loi de Finances 2020 ne modifie pas en profondeur le cadre fiscal de la gestion de patrimoine comme ce fût le cas les années précédentes avec l’instauration du prélèvement à la source, du PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique) ou encore de l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière).
L’essentiel des dispositions visent à améliorer le pouvoir d’achat des ménages les plus modestes et à poursuivre la réduction de l’IS (Impôt sur les Sociétés) des entreprises françaises.
Baisse de l’IR, suppression de la taxe d’habitation mais revalorisation de la taxe foncière, CITE, AAH, APL et primes d’activité… Nous avons réalisé pour vous une synthèse des mesures patrimoniales du PLF 2020.

Ces dispositions ne seront définitives qu’après le vote de la Loi de Finances et sa promulgation au Journal Officiel le 31 décembre 2019.

impôt sur le revenu

réduction de l’ir pour les premières tranches du barème

Pour les revenus perçus en 2020, le taux d’imposition de la première tranche du barème passera de 14 % actuellement à 11 %.

Pour les autres tranches, les modifications concerneront les seuils. Les plafonds des trois premières tranches seront abaissés. Les contribuables imposés aux deux dernières tranches, au taux de 41 % et de 45 %, s’en trouveront de facto plus imposés.
Ces seuils seront revalorisés annuellement sur l’inflation.

Mais la modification du barème de l’IR n’est pas si simple dans son application car elle devra tenir compte du prélèvement à la source (PAS).

Le taux du prélèvement à la source déjà calculé à partir de la déclaration d’impôt réalisée en 2019 et applicable sur les revenus de septembre 2019 à août 2020 devra être recalculé sur un nouveau barème pour que la réduction de l’IR prévue puisse avoir son effet sur les revenus des contribuables concernés dès le mois de janvier 2020.

Le véritable barème de l’IR sur les revenus 2020 sera applicable pour la déclaration d’impôt qui sera déposée au printemps 2020 et produira ses effets sur le calcul du taux de PAS 2020 applicable sur les revenus de septembre 2020 à août 2021.

synthèse des barèmes applicables

Barème actuel servant de calcul au taux de PAS (prélèvement à la source) applicable sur les revenus perçus de septembre 2019 à décembre 2019

BAREME IR 2019 sur les revenus 2018
servant actuellement de calcul au taux du PAS 2019 applicable de septembre à décembre 2019
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 9 964 €0 %
De 9 964 € à 27 519 €14 %
De 27 519 € à 73 779 €30 %
De 73 779 € à 156 244 €41 %
Supérieurs à 156 244 €45 %

Barème 2019 revu pour recalculer le taux de PAS applicable sur les revenus perçus de janvier 2020 à août 2020

BAREME IR 2019 revu pour calculer le nouveau taux de PAS applicable sur les revenus de janvier à août 2020
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 9 964 €0 %
De 9 964 € à 25 405 €11 %
De 25 405 € à 72 643 €30 %
De 72 643 € à 156 244 €41 %
Supérieurs à 156 244 €45 %

Barème 2020 permettant de calculer le taux de PAS applicable sur les revenus perçus de septembre 2020 à août 2021

BAREME IR 2020 sur les revenus 2020
permettant le calcul du taux de PAS 2020 applicable de septembre à août 2021
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 10 064 €0 %
De 10 064 € à 25 659 €11 %
De 25 659 € à 73 369 €30 %
De 73 369 € à 157 806 €41 %
Supérieurs à 157 806 €45 %

L’économie d’impôt moyenne en 2020 est estimée à 350 € par an pour un foyer fiscal imposé à la première tranche, 180 € s’il est imposé à la deuxième tranche.
L’économie globale (ou le coût pour l’Etat) serait de l’ordre de 5 milliards d’euros.

nouveau calcul de la décote de l’ir

La décote permet d’effacer partiellement ou totalement l’impôt à payer pour les contribuables redevable d’un impôt sur le revenu faible (IR inférieur à 2627 € pour un couple et 1595 € pour une personne seule en 2019).

Le calcul actuel de la décote est le suivant :
1 970 € pour un couple marié (1 196 € pour une personne seule) – 75 % de l’IR calculé selon le barème.

Compte tenu de la baisse du taux de la première tranche du barème, le projet de Loi de Finances 2020 prévoit de revoir le calcul de la décote de la manière suivante :
1 286 € pour un couple marié (777 € pour une personne seule) – 45,25 % de l’IR calculé selon le barème.

modification du plafonnement du quotient familial

Le montant du plafonnement du quotient familial de 1 551 € en 2019 est porté à 1 567 €.

dispense de déclaration : déclaration tacite

Les contribuables qui n’auront pas de changement en terme de composition et de revenus seront dispensés d’établir une déclaration d’impôt annuel. L’absence de déclaration sera considérée comme une déclaration tacite du même type de revenus que l’année précédente.
Cette situation concernera les redevables percevant des revenus connus de l’administration et prélevés à la source tels que des salaires ou des pensions et retraites. La perception de bénéfices industriels ou commerciaux, de bénéfices non commerciaux, de bénéfices agricoles ou plus largement de revenus fonciers nécessiteront une déclaration annuelle, leur montant étant variable.
La déclaration tacite devrait concerner néanmoins selon le Ministère du Budget environ 12 millions de ménages.

exonération d’ir et de cotisations sociales reconduites pour 2020 sur :

  • les heures supplémentaires (même régime que 2019),
  • la prime exceptionnelle : instaurée en fin d’année 2019, cette prime peut être versée par l’employeur aux salariés en bénéficiant d’une exonération d’IR et de cotisations sociales (à condition que le montant de la prime individuelle soit au maximum de 1 000 € et la rémunération mensuelle du salarié concerné soit inférieur à 3 fois le SMIC, environ 3 600 €).
    Cette mesure est reconduite pour 2020 mais néanmoins subordonnée à la mise en place d’un accord d’intéressement dans l’entreprise.

suppression de la taxe d’habitation

Il est prévu en 2020 une suppression de la taxe d’habitation pour les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 27 000 € pour une personne seule, 43 000 € pour un couple. 80 % des ménages seraient concernés. Pour les 20 % des foyers restants, la suppression de la taxe se fera par tiers de 2021 à 2023.

Attention néanmoins, cette suppression ne concerne que la résidence principale. Les résidences secondaires restent imposables.

Le gain moyen par foyer fiscal serait évalué à 723 € par an.

Parallèlement, l’Etat prévoit de lancer à partir de 2020 la révision des valeurs cadastrales servant de base de calcul à la taxe foncière, ces valeurs datant de 1970.
Déjà intervenue ponctuellement en 2019 pour certains contribuables, cette réévaluation se poursuivra progressivement jusqu’en 2026.
On peut donc s’attendre à une augmentation de la taxe foncière.

revalorisation des retraites et de certaines prestations sociales

  • La retraite de base sera revalorisée en 2020 sur la base de l’inflation pour les retraités dont la retraite brute globale (retraite de base + retraite complémentaire) est inférieure à 2 000 € par mois. Dans les autres cas, la retraite de base sera revalorisée de 0,3 %,
  • L’AAH (Allocation Adulte Handicapée) sera revalorisée de 0,3 %, son plafond étant de 900 € par mois.
  • L’APL (Aide Personnalisée aux Logements) sera également revalorisée de 0,3 % et les conditions de revenus pour en bénéficier seront prises en compte sur la base des revenus de l’année en cours et non plus des deux dernières années.
  • La prime d’activité (remplaçant depuis le 1er janvier 2016 le RSA (Revenu de Solidarité Active) et la prime pour l’emploi) sera revalorisée de 0,3 %.

mesures en faveur de la transition énergétique

refonte du cite (crédit d’impôt pour la transition énergétique)

Ce crédit d’impôt permet actuellement de bénéficier d’une réduction d’IR égale à 30 % des dépenses énergétiques réalisées prises en compte dans la limite de 8 000 € pour une personne seule, 16 000 € pour un couple, plafond apprécié sur une période de 5 années consécutives.

Ce crédit d’impôt sera conditionné à des montants de revenus et transformé progressivement en 2020 et 2021 en prime forfaitaire (distribuée par l’ANAH – Agence Nationale de l’Habitat). Cette prime sera recentrée afin de bénéficier pour 40 % aux ménages les plus modestes. 20 % des ménages les plus aisés seront exclus du dispositif.

primes de conversion et bonus automobile pour véhicules électriques

La prime de conversion sera recentrée sur les véhicules les moins polluants avec conditions de revenus des ménages pouvant en bénéficier.

Le bonus automobile visant à développer le parc de véhicules électriques devrait bénéficier d’une augmentation de 50 % des ressources allouées.

En savoir plus :

baisse de l’is pour les sociétés

L’Impôt sur les Sociétés baissera progressivement, de manière différenciée pour les grandes entreprises (Chiffre d’affaires supérieur à 25 milliards €) et pour les petites et moyennes entreprises (PME), mais avec un objectif de taux d’IS unique abaissé à 25 % en 2022.

evolution du taux d’is

2019202020212022
Grandes entreprises
CA > 25 Milliards €

33,33 %28 % jusqu’à 500 000 € de bénéfice

31 % au-delà
27,5 %25 %
PME31 %28 %26,5 %25 %

En savoir plus :

Pas de réforme en profondeur donc pour le PLF 2020 concernant la fiscalité des ménages et des sociétés mais une poursuite des mesures fiscales visant à améliorer le pouvoir d’achat des ménages modestes et à réduire l’IS des entreprises.
Il faut dire que de grandes réformes patrimoniales ont déjà été réalisées en 2018 et 2019 avec l’instauration du PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique), du PAS (Prélèvement A la Source), de l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière), la modification de la fiscalité des retraits d’assurance-vie ou avec la loi PACTE (création du PER, modification du PEA).
Ceci n’exclut pas que les futures réformes de fonds (système de retraites, adaptation du régime des transmissions à titre gratuit à l’augmentation de l’espérance de vie, financement de la dépendance …) restent toujours d’actualité et les futurs chantiers à venir.

 

Sources :

Auteur

Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

IR 2018 : Année blanche mais pas pour tous les revenus

IR 2018 : Année blanche mais pas pour tous les revenus

Temps de lecture estimé : 10 min

La déclaration en ligne d’impôt sur le revenu 2018 sera close le 22 mai, 29 mai ou 5 juin 2019 selon le département de résidence. Mais à quoi sert-elle puisque 2018 est fiscalement une année blanche du fait de l’institution du prélèvement à la source ? Tous les revenus imposables de 2018 sont-ils exonérés ? Quels revenus resteront imposables ?
Depuis le 1er janvier 2019, l’impôt sur le revenu des personnes physiques est prélevé à la source et payé l’année même de perception des revenus concernés. Avant cette date, l’impôt sur les revenus était réglé l’année suivant leur perception.

Dès lors, pour éviter que 2019 soit une année où se cumule le paiement de deux impôts  sur les revenus (2018 et 2019), un crédit d’impôt spécifique a été mis en place, le CIMR (Crédit d’Impôt Modernisation du Recouvrement) venant s’imputer sur l’impôt sur les revenus perçus en 2018.

2018 a pu être qualifiée ainsi d’année fiscale blanche. Attention néanmoins, certains revenus resteront imposables.

L’application du CIMR dépendra en effet de la nature des revenus perçus et de leur montant.

Application du cimr selon la nature des revenus

Les revenus dont l’imposition sera compensée par le cimr

Concernant la nature des revenus, seuls les revenus dits courants, c’est à dire perçus habituellement, et entrant dans le champ du prélèvement à la source, pourront bénéficier du CIMR et ne supporteront donc pas d’imposition au titre de 2018.  Sont ainsi concernés :

Les traitements et salaires & les pensions et rentes

Sont concernées les traitements et salaires (et revenus de remplacement : allocations chômage, indemnités maladie), et des pensions et rentes, sans limitation de montant du moment qu’ils sont courants et correspondent à l’activité habituelle, et ce même en cas d’accroissement de cette activité. Les salaires 2018 peuvent donc être plus importants qu’en 2017 tout en bénéficiant du CIMR (cas des heures supplémentaires, du passage d’une activité à temps partiel à temps plein…).

Les bénéfices professionnels

Il s’agit des bénéfices agricoles, industriels et commerciaux, non commerciaux avec une limitation en montant.

Les revenus fonciers non exceptionnels

C’est-à-dire les loyers et fermages annuels échus et payés en 2018, avec les limitations que nous verrons infra concernant entre autre la déduction des charges.

Direction Générale des Finances Publiques
«  2018 Année Blanche, votre déclaration de revenus expliquée en vidéo »

Salariés

Retraités

Les revenus 2018 restant imposables

Les autres revenus perçus en 2018 resteront imposables. Il s’agit  :

Des revenus ne relevant pas du prélèvement à la source

En effet, ces revenus ne subissent pas de double imposition. il s’agit principalement des revenus de capitaux mobiliers (dividendes, intérêts et part imposable des rachats partiels d’assurance-vie), des plus-values sur cession de valeurs mobilières et des plus-values immobilières, des gains de stock-option et d’attribution d’actions gratuites.

Des revenus dits exceptionnels

Il s’agit de revenus perçus de manière non habituelle :

Les traitements, salaires, pensions et rentes

Les traitements, salaires, pensions et rentes, à caractère exceptionnel sont précisément listés (II C de l’article 60 de la loi n° 2016-1917 modifiée par la loi N°2017-1775 du 28 décembre 2017 mentionnent 15 types de revenus). Il s’agit entre autres des indemnités de rupture du contrat de travail (sauf indemnités compensatrices de congés, de préavis, de fin de CDD), des indemnités de cessation de fonction de mandataires sociaux et dirigeants, des indemnités de clientèle et de cessation d’activités.

Les bénéfices professionnels exceptionnels

Ces bénéfices concernent les produits non récurrents de l’activité telles que les plus-values professionnelles, les subventions d’équipement, les indemnités pour perte de clientèle.

Les revenus fonciers exceptionnels

Il s’agit principalement de ceux n’ayant pas la nature de loyer ni de fermage habituels (indemnités de pas de porte, subventions ou indemnités d’assurance), les revenus payés en 2018 mais dont l’échéance normale est en 2017 ou 2019, les majorations de loyers perçues en 2018 en cas de rupture d’un engagement de dispositif fiscal (Besson, De Robien, Borloo, Cosse).

Application du cimr selon le montant des revenus

Le bénéfice du CIMR sera limité d’autre part à certains montants de revenus, principalement pour les bénéfices professionnels et les revenus fonciers.

Le cimr sur les bénéfices professionnels

Les bénéfices agricoles (BA), bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et bénéfices non commerciaux (BNC) ne seront effacés par le CIMR qu’en fonction du montant du bénéfice imposable le plus élevé des trois dernières années (2015 à 2017).

Si le bénéfice net perçu en 2018 est supérieur au bénéfice imposable le plus élevé de 2015, 2016 ou 2017, la différence entre ces deux bénéfices, c’est à dire le « surplus » de bénéfice de 2018, n’entre pas dans le calcul du CIMR et est donc imposable (cette méthode de calcul ne concerne pas les créations d’activité en 2018 pour lesquelles s’appliquent des règles spécifiques).

Si le bénéfice professionnel 2018 a subi ce plafonnement, il sera alors possible de bénéficier d’un CIMR complémentaire en 2019 sous certaines conditions :

  • si le bénéfice imposable de 2019 est supérieur au bénéfice imposable de 2018, il est alors possible de bénéficier d’un CIMR complémentaire en 2019 égal à la fraction du CIMR dont il n’a pas été possible de bénéficier en 2018 du fait du plafonnement.
  • si le bénéfice imposable de 2019 est inférieur au bénéfice imposable de 2018 mais supérieur au plus élevé des bénéfices imposables de 2015, 2016 ou 2017, le CIMR complémentaire au titre de 2019 est alors égal à la différence entre le CIMR calculé sur le bénéfice imposable de 2019 et le CIMR déjà obtenu en 2018.
  • si le bénéfice imposable de 2019 est inférieur aux bénéfices imposables de 2018 mais aussi au bénéfice imposable le plus élevé de 2015, 2016 ou 2017, aucun CIMR complémentaire n’est accordé, sauf à démontrer par voie de réclamation que la hausse ponctuelle du bénéfice de 2018 est due à un surcroît d’activité régulière.

Ce mécanisme dit « anti-abus » vise à éviter que le bénéfice soit artificiellement accru en 2018, année du bénéfice du CIMR.

Direction Générale des Finances Publiques
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Le cimr sur les revenus fonciers

Les revenus fonciers nets pris en compte dans le calcul du CIMR sont les revenus fonciers récurrents et non exceptionnels.

Ces revenus doivent également faire l’objet d’un retraitement concernant certaines charges déductibles :

  • la partie des provisions pour charges non déductibles, déduites en 2017 et normalement réintégrées en 2018 n’entre pas dans le calcul du CIMR. Il est donc nécessaire de déduire cette réintégration pratiquée sur les revenus fonciers nets pour le calcul du CIMR.
  • certaines charges foncières dites « récurrentes » sont déductibles en 2018 uniquement si leur date d’échéance est en 2018 et non pas en fonction de leurs dates de paiement. Sont concernées les primes d’assurance, les provisions pour charges de copropriété, les taxes foncières et taxes annexes, les intérêts des dettes contractées pour la conservation, l’acquisition, la construction, réparation ou amélioration du bien, les frais d’administration et de gestion.

Les autres charges foncières sont dites « pilotables » car dépendant d’une décision du propriétaire ou copropriétaire. Il s’agit des dépenses pour travaux de réparation, d’entretien, d’amélioration sur les locaux d’habitation (hors travaux pour construction, reconstruction et agrandissement). Ces dépenses réalisées et payées en 2018 restent intégralement déductibles en 2018 et ne subissent donc aucun retraitement à ce titre.

Leur montant conditionne néanmoins la déductibilité de ces mêmes dépenses en 2019 par un mécanisme de lissage dit « anti-abus ».

Les revenus fonciers de 2018 étant en effet peu ou pas imposés grâce au bénéfice du CIMR, il aurait été tentant de reporter en 2019 les dépenses déductibles pour ce type de travaux.

Pour éviter ce phénomène de report, un mécanisme de lissage a été mis en place pour l’imposition des revenus fonciers de 2019 : les dépenses déductibles pour travaux ne sont déductibles en 2019 qu’à hauteur de la moyenne de ces dépenses supportées en 2018 et 2019.

Ne pas avoir réalisé de travaux déductibles en 2018 réduit donc la possibilité de déduire les travaux pratiqués en 2019 à la moitié de leur montant.

A noter néanmoins que les travaux d’urgence pour force majeure, les travaux décidés d’office par le syndic de copropriété et les travaux effectués sur un immeuble acquis en 2019 ou inscrits en 2019 au titre des monuments historiques ne sont pas concernés par ce mécanisme « anti-abus ».

Enfin, lorsque ces dépenses de travaux ont été engagées par la copropriété et payées dans les provisions pour charge, un mécanisme similaire de lissage, tenant compte de la spécificité de déduction de ces charges, est également applicable.

Ainsi, les provisions pour charge au titre de dépenses pour travaux de 2018 donneront droit pour 50 % de leur montant à une déduction sur les revenus fonciers perçus en 2019. Pour l’année suivante, les provisions pour charges de copropriété pour dépenses de travaux de 2019 viendront diminuer pour 50 % de leur montant les provisions pour charges déductibles de 2020.

Le tableau suivant reprend de manière synthétique et non exhaustive les types de revenus entrant dans le calcul du CIMR ou non et leurs limites de montants.

Traitements et salaires, pensions et rentes viagères

Revenus 2018 pris en compte dans le CIMR et dont l’imposition est effacée

Type de revenus
Traitements et salaires (et revenus de remplacement), pensions et rentes viagères, entrant dans le champ du prélèvement à la source et de caractère habituel.

Montant des revenus
Pas de limitation de montant.

Revenus 2018 imposables n’entrant pas dans le calcul du CIMR

Type de revenus
Traitements et salaires, pensions ou rentes viagères à caractère exceptionnel :

15 types de revenus sont listés au II C Art. 60 Loi n°2016-1917 modifiée par Loi N°2017-1775. On peut citer principalement :

  • indemnités de rupture du contrat de travail (sauf indemnités de congés, de préavis, de rupture de CDD et de fin de mission)
  • indemnités de cessation des fonctions de mandataires sociaux et dirigeants
Bénéfices professionnels

Revenus 2018 pris en compte dans le CIMR et dont l’imposition est effacée

Type de revenus
Bénéfices professionnels (BA, BIC, BNC)

Montant des revenus
Dans la limite du bénéfice imposable le plus élevé de 2015, 2016 ou 2017

Revenus 2018 imposables n’entrant pas dans le calcul du CIMR

Type de revenus
La partie du bénéfice professionnel de 2018 excédant le bénéfice imposable le plus élevé de 2015, 2016 ou 2017 reste imposable. Possibilité de bénéficier dans ce cas d’un CIMR complémentaire en 2019 sous conditions.

Les bénéfices exceptionnels par nature telles que les plus-values professionnelles, les subventions d’équipement.

Revenus fonciers

Revenus 2018 pris en compte dans le CIMR et dont l’imposition est effacée

Type de revenus
Revenus fonciers nets non exceptionnels : les loyers et fermages annuels échus et payés en 2018.

Montant des revenus

  • Montant retraité de certaines provisions pour charges et de certaines charges foncières dites « récurrentes ».
  • Charges dites « pilotables » : dépenses pour travaux déductibles, pas de retraitement pour le CIMR 2018 mais impact sur les revenus fonciers 2019 : Mécanisme « anti-abus ».

Revenus 2018 imposables n’entrant pas dans le calcul du CIMR

Type de revenus
Les revenus fonciers perçus en 2018 et considérés comme exceptionnels :

  • revenu n’ayant pas la nature de loyer ou de fermage : indemnité de pas de porte,
  • subventions ou indemnités d’assurance,
  • revenu perçu en 2018 mais dont l’échéance normale est 2017 ou 2019,
  • revenu dont l’échéance est en 2018 mais couvrant une période de location excédant 12 mois,
  • revenu consistant en la remise d’immeuble ou de titre de propriété ou de jouissance
  • majoration de revenus fonciers perçues en 2018 en cas de rupture d’un engagement de dispositif fiscal (Besson, De Robien, Borloo, Cosse).
Autres revenus

Revenus 2018 pris en compte dans le CIMR et dont l’imposition est effacée

Type de revenus
Aucun autre type de revenu.

Revenus 2018 imposables n’entrant pas dans le calcul du CIMR

Type de revenus
Revenus n’entrant pas dans le champ du prélèvement à la source :

  • revenus de capitaux mobiliers : dividendes, intérêts, part imposable des rachats de contrat d’assurance-vie,
  • plus-values de cession de valeurs mobilières,
  • plus-values de cession immobilières,
  • autres revenus hors champs du prélèvement à la source et listés à l’article 204 D du CGI et au BOI-IR-PAS-10-20-20180515.
La déclaration des revenus de 2018 reste ainsi nécessaire pour calculer le montant du CIMR venant en déduction de l’impôt sur le revenu et permettant de l’effacer totalement ou partiellement.

2018 n’est donc pas nécessairement une année fiscale blanche pour tous les contribuables.

Sources :

  • Art. 60 Loi n°2016-1917 modifiée par Loi N°2017-1775
  • BOI-IR-PAS-50 ; BOI-IR-PAS-50-10 et sous-chapitres
  • Article 204 D du CGI et BOI-IR-PAS-10-20-20180515

Auteur
Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.