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Loi Pacte : principales mesures concernant le patrimoine des particuliers

Loi Pacte : principales mesures concernant le patrimoine des particuliers

Temps de lecture estimé : 7 min
Au terme d’un long travail parlementaire (plus de 12 mois de débats), la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite « loi PACTE », a été publiée au Journal Officiel de la République Française le 23 mai 2019. Cette loi contient notamment de nombreuses évolutions en faveur de la modernisation des outils de gestion de patrimoine des français et de nombreuses mesures de soutien aux PME-ETI.

Nous vous présentons une synthèse de ces principales mesures en abordant dans un premier temps les dispositions concernant les supports de gestion du patrimoine privé.

Mesures en faveur de l’assurance vie

Mise en place d’une mesure de transférabilité partielle

La loi PACTE instaure un principe de transférabilité des contrats d’assurance vie ou de capitalisation au sein du même assureur, sans perte d’antériorité fiscale.

  • En pratique, le souscripteur d’un contrat d’assurance vie ou de capitalisation a désormais la possibilité de transférer un ancien contrat vers un nouveau au sein de la même compagnie d’assurance, sous réserve que ce nouveau contrat soit en tout ou partie investi en unités de comptes ou en fonds Euro croissance. Cette transformation, qui peut se réaliser soit par voie d’avenant, soit dans le cadre d’une nouvelle souscription, n’emporte pas les conséquences fiscales d’un dénouement.
  • A la différence de l’ancien dispositif « Fourgous » (qui permettait la transformation d’un contrat mono support en un contrat multi support sans perte d’antériorité fiscale), cette transformation n’est pas subordonnée au respect d’un pourcentage minimum d’unités de comptes au sein du nouveau contrat.

Le transfert d’un contrat vers un autre assureur demeure une opération assimilée à un rachat taxable, entraînant le dénouement du contrat suivi d’une nouvelle souscription.

A ce stade, nous ne connaissons pas encore les modalités pratiques que vont adopter les assureurs dans le cadre de ces nouvelles dispositions.

Ouverture des contrats de droit français à certains fonds professionnels de Private Equity

Les unités de comptes éligibles aux contrats d’assurance vie de droit français pourront être constituées de certains fonds de Private Equity ouverts à des investisseurs professionnels.

  • Ces fonds s’entendent notamment des FPCI (fonds professionnels de capital investissement), des SLP (sociétés de libre partenariat) ou des OPPCI (organismes professionnels de placements collectifs immobiliers).
  • Un décret, non paru à ce jour, doit notamment fixer les conditions à remplir pour pouvoir souscrire ces nouveaux supports (conditions tenant notamment à la situation financière, aux connaissances ou à l’expérience en matière financière du détenteur du contrat).

Pour favoriser la souscription de fonds de “Private Equity” par les investisseurs éligibles et ainsi lever la contrainte de liquidité reposant sur l’assureur, la loi PACTE assouplie également les conditions de délivrance en nature.

  • Dorénavant, lorsque le souscripteur d’un contrat d’assurance opte irrévocablement pour la remise de titres éligibles en cas de rachat (sous réserve de l’accord de l’assureur), cette option sera réputée s’appliquer au bénéficiaire du contrat, sauf mention expresse contraire.
  • Le règlement du contrat par la remise de titres reste subordonné au respect de nombreuses conditions.

Mesures diverses

Les versements sur un contrat d’assurance vie par un résident de France devront désormais obligatoirement être réalisés en numéraire, y compris pour des contrats de droit luxembourgeois.

Un abattement temporaire de 9 200 € (contribuable soumis à imposition commune) ou de 4 600 € (contribuable seul) est instauré sur les gains réalisés en cas de rachat total ou partiel d’un contrat d’assurance vie de plus de 8 ans en vue d’alimenter un Plan d’Epargne Retraite (PER, cf. infra)

  • Ces rachats doivent être réalisés avant le 1er janvier 2023 par un souscripteur à plus de 5 ans de l’âge de l’ouverture de ses droits à retraite, et les sommes reçues au titre de ce rachat devront être intégralement versées sur un PER avant le 31 décembre de l’année du rachat.
  • Cet abattement est fonction de la situation familiale du souscripteur et sera cumulable avec l’abattement de droit commun du même montant déjà applicable en cas de rachat sur un contrat d’assurance vie de plus de 8 ans.

Les compagnies d’assurance seront soumises à de nouvelles obligations de transparence s’agissant notamment des participations aux bénéfices (PAB) attribuées ou des frais appliqués sur les unités de comptes proposées.

A compter du 1er janvier 2020, les assureurs auront l’obligation de proposer pour les contrats conclus à compter de cette même date des unités de compte socialement responsables. A compter de 2022, cette obligation s’étendra aux unités de compte vertes et solidaires.

assouplissement des règles de fonctionnement du pea et du pea-pme

Fusion des plafonds de versement du PEA et du PEA-PME

Depuis le 24 mai 2019, les plafonds des versements sur un PEA et un PEA-PME sont fusionnés en un plafond commun, fixé à 225 000 €. Mais pour favoriser le PEA-PME, le plafond individuel du PEA demeure fixé à 150 000 €.

En pratique, les versements non utilisés sur un PEA peuvent être utilisés sur un PEA-PME, mais l’inverse n’est pas possible.

  • Par exemple, un contribuable titulaire d’un PEA sur lequel il a versé 10.000 € peut abonder un PEA-PME jusqu’à 215.000 €.
  • En revanche, un investisseur titulaire d’un PEA-PME alimenté avec 10.000 € ne pourra verser sur son PEA que 150.000 € (il lui restera alors un reliquat de versements de 65.000 € qu’il ne pourra placer que sur son PEA-PME).

Le titulaire d’un PEA ou d’un PEA-PME qui aurait sciemment dépassé ces seuils de versements est passible d’une amende fiscale égale à 2% du montant des versements surnuméraires (outre les autres sanctions, notamment la clôture des plans).

Création d’un pea « jeune majeur »

Depuis le 24 mai 2019, un jeune de 18 à 25 ans rattaché au foyer fiscal de ses parents peut ouvrir un PEA dont le plafond de versement est fixé à 20.000 € jusqu’à la fin de son rattachement (les versements effectués par ce majeur rattaché ne s’imputent pas sur le plafond de versement du ou des PEA de ses parents).

Un majeur rattaché au foyer fiscal de ses parents ne peut pas ouvrir un PEA-PME.

Le titulaire d’un PEA « jeune majeur » qui aurait sciemment dépassé le seuil de 20.000 € est passible d’une amende fiscale égale à 2% du montant des versements surnuméraires.

Assouplissements des règles de retrait partiel

A compter du 24 mai 2019, un retrait partiel sur un PEA ou sur un PEA-PME de plus de 5 ans n’entraîne ni la clôture du plan, ni le blocage de nouveaux versements.

  • Pour rappel, jusqu’au 23 mai 2019, un retrait partiel opéré sur un PEA de plus de 5 ans et de moins de 8 ans entraînait la clôture du plan, tandis qu’un retrait réalisé sur un plan de plus de 8 ans empêchait d’effectuer de nouveaux versements.

Compte tenu des modifications apportées par la loi PACTE, et des assouplissements apportés par la loi de finances pour 2019, le régime applicable en cas de retraits partiels est le suivant :

Elargissement des instruments éligibles au pea-pme

Depuis le 24 mai 2019, l’univers d’investissement du PEA-PME est élargi aux :

  • Minibons
  • Titres participatifs
  • Obligations à taux fixe émises par des PME-ETI dans le cadre d’une offre de financement participatif
  • Obligations remboursables en actions (ORA) non cotées, émises par des PME-ETI.
    • Auparavant, seules les OCA (obligations convertibles) ou les ORA cotées émises par des PME-ETI étaient éligibles au PEA-PME
    • Les OCA non cotées demeurent exclus du PEA-PME.

Par ailleurs, est instauré un complexe dispositif d’imposition partielle des produits procurés par des placements effectués en ORA non cotées sur un PEA-PME (coupons et plus-values générées par la cession de l’ORA ou de l’action reçue lors du remboursement de l’obligation).

création du « plan d’épargne retraite » (per)

La loi PACTE instaure un « Plan d’Epargne Retraite » (PER), dont l’objet est de permettre à son titulaire le paiement de rentes viagères ou le versement d’un capital à compter de sa retraite.

Ce PER sera composé de trois compartiments distincts :

  • un compartiment individuel, qui sera alimenté avec les versements volontaires du titulaire (venant se substituer aux dispositifs PERP et Madelin) – 1er compartiment
  • un compartiment collectif facultatif (équivalent au PERCO), qui sera alimenté avec les sommes versées au titre de l’épargne salariale (intéressement et participation), la monétisation de certains jours de CET et les versements volontaires – 2e compartiment
  • un compartiment collectif obligatoire (équivalent aux actuels dispositifs articles 39 et 83) qui sera notamment alimenté avec les cotisations obligatoires salariées et employeurs au titre des plans d’épargne retraite d’entreprise (PERE) – 3e compartiment

Avant la retraite du titulaire, les sommes logées sur un PER seront bloquées.

  • Elles pourront toutefois être débloquées par anticipation en capital dans certaines situations (décès du conjoint ou partenaire de PACS du titulaire, invalidité, surendettement, acquisition de la résidence principale [uniquement pour les sommes logées sur le 1er et le 2e compartiment], …)
  • Le décès du titulaire entraîne la clôture du PER

Au jour de la liquidation des droits à la retraite, les droits correspondants aux 1er et 2e compartiments pourront en principe être délivrés, au choix du titulaire, sous la forme d’un capital ou sous la forme de rentes viagères (le cas échéant réversibles). Les droits correspondants au 3e compartiment ne pourront être délivrés que sous forme de rentes viagères.

Le PER doit entrer en vigueur à une date fixée par décret (non paru à ce jour) et au plus tard le 1er janvier 2020. Par ailleurs, certaines mesures d’application doivent être prises par ordonnances dans les 12 mois de la publication de la loi PACTE. Ces ordonnances devront notamment prévoir le régime fiscal applicable au PER : il s’agira de définir les modalités de déductibilités des versements volontaires et obligatoires et les modalités d’imposition des rentes viagères ou des prestations en capital (en cas de déblocages anticipés ou à l’occasion de la retraite) qui demeurent, à ce stade, inconnues. Devront aussi être précisées les règles d’articulation du PER avec les dispositifs existants (PERP, PERCO,…).

En conclusion

La loi Pacte modifie donc significativement les principaux supports de gestion de patrimoine des français : l’assurance-vie, le PEA et les supports d’épargne retraite. Elle apporte des assouplissements importants pour favoriser leur développement. Les décrets à paraître restent néanmoins très attendus pour connaître les détails d’application et d’imposition de ces nouvelles mesures.

Auteur
François Soubiran 

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

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