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SCPI, OPCI, SCI : principes et conjoncture de la « pierre papier »

SCPI, OPCI, SCI : principes et conjoncture de la « pierre papier »

Temps de lecture estimé : 11 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Les SCPI, OPCI, SCI, encore connues sous le nom de « pierre papier », font face à un environnement difficile en 2023 : le point sur ces supports d’investissement.    

 

Les SCPI, OPCI et SCI permettent d’investir en immobilier sans acquérir directement des immeubles physiques mais en devenant associé ou détenteur de parts d’une structure qui va elle-même procéder à ces acquisitions et gérer les biens. Ces investissements sont ainsi qualifiés de « pierre papier » : « pierre » car in fine les fonds sont investis dans de l’immobilier physique et « papier » car les investisseurs acquièrent des parts sociales et non l’immobilier directement. Les avantages de ces supports sont nombreux : ticket d’entrée relativement faible comparativement à l’immobilier en direct, forte diversification des investissements, gestion totalement déléguée, et rendements réguliers et plus élevés que les taux d’intérêt obligataires ces dix dernières années. Ces atouts ont fait de la « pierre papier » un investissement privilégié des investisseurs recherchant principalement des revenus réguliers. L’univers de taux bas que nous avons connu ces dernières années a néanmoins fait oublier les risques et inconvénients de ce type d’investissement, avant que ce début d’année 2023 ne nous les rappelle. Explications.

SOMMAIRE

  • Qu’est-ce que la pierre-papier non cotée : SCPI, OPCI, SCI ?
  • SCPI, OPCI, SCI : comparaison avec l’immobilier en direct
  • Quels rendements et quels risques dans l’environnement actuel ?

Qu’est-ce que la pierre-papier non cotée : SCPI, OPCI, SCI ?

SCPI, OPCI, SCI, voyons les principales différences de ces supports.

Les SCPI, l’investissement « pierre papier » le plus connu

Premiers supports types « pierre papier » créés, les SCPI sont aujourd’hui largement développées et représentent plus de 89 milliards d’euros au 31/12/2022. Mais de quoi s ‘agit-il exactement et comment fonctionnent-elles ?

 

Qu’est-ce que les SCPI ?

Juridiquement la SCPI est régie par les articles 1845 du code civil et suivants, tout comme les sociétés civiles dans leur ensemble. Au sens de la  Directive AIFM (directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs), la SCPI entre dans la catégorie des FIA (fond d’investissement alternatif), c’est-à-dire des fonds autres que les OPCVM (Organismes de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières) conformes à la Directive 2009/65/CE (Directive OPCVM IV).

Une société civile de placement immobilier (SCPI) est donc un véhicule de placement collectif qui collecte des fonds auprès des particuliers afin d’acquérir un patrimoine immobilier et de gérer sa mise en location (revenus). Le capital social d’une SCPI est au minimum de 760.000 €.

Dans le cadre de sa gestion immobilière, la SCPI peut ponctuellement céder une partie de ses actifs mais n’a pas le statut juridique pour s’orienter vers une activité de marchands de bien et ne peut réaliser des opérations de promotion immobilière. En contrepartie de son investissement, les épargnants reçoivent des parts sociales.

Les typologies d’actifs gérés par les SCPI sont variées (bureaux, commerces, résidentiels) mais peuvent aussi concernés des secteurs plus spécifiques (santé, éducation, logistique ou encore hôtels, tourisme et loisirs). Les SCPI peuvent investir en France mais se sont de plus en plus ouvertes ces dernières années au marché européen et britannique.

Les SCPI de bureaux représentent 65% des SCPI hors résidentiel, tandis qu’à l’opposé les SCPI de logistique et locaux d’activité représentent environ 1% des SCPI.

Certaines SCPI sont diversifiées sur plusieurs thématiques (principalement bureaux et commerces), elles représentent 15,60% des SCPI. Élément clé pour les investisseurs, le TDVM (taux de distribution sur valeur de marché) en 2022 est de 4,53% pour la moyenne du marché.

Qu’est-ce que le TDVM ? Le TDVM (Taux de Distribution sur Valeur de Marché) correspond au montant des dividendes bruts avant fiscalité distribué par la SCPI l’année N rapporté à la valeur de marché de la part de SCPI pour cette même année.

Comment souscrire ou vendre des parts de SCPI ?

Les parts de SCPI sont le reflet du capital de la SCPI divisé en nombre de parts (montant minimal d’une part fixé à 150 € par la règlementation). La part de SCPI est un titre financier inscrit en nominatif (par opposition aux actions par exemple qui sont par défaut « au porteur » sauf exceptions). Ainsi la SCPI tient un registre et connait ses investisseurs. Il existe 2 catégories principales de SCPI :

  • celles à capital fixe (fermées à la commercialisation) pour lesquelles il est possible de souscrire sur le marché primaire (à l’émission ou lors d’une augmentation de capital) et sur le marché secondaire (prix de la part fonction du carnet d’ordre d’achat-vente).
  • celles à capital variable prévoyant pour le retrait d’un associé, un prix de part fixé par la société de gestion en fonction de la valeur réelle des actifs détenus (valeur de retrait).

Différentes valeurs interviennent donc :

  • La valeur de réalisation dépend de la valeur vénale du patrimoine immobilier détenu par la SCI et des autres actifs financiers.
  • La valeur de reconstitution correspond à la valeur de réalisation augmentée des frais d’acquisition s’il fallait reconstituer le patrimoine de la SCPI (droits de mutation …).
  • Le prix de souscription TTC composé de la valeur de souscription de la part, fixée par la société de gestion en fonction de l’offre et de la demande mais aussi de la valeur de réalisation. Cette valeur de souscription est augmentée des frais de souscription.

Par principe, la valeur de souscription est égale à la valeur de réalisation (somme des actifs) toutefois les SCPI ont une marge de valorisation de leur part de 10% à la hausse comme à la baisse.

  • Le prix de retrait d’une part correspond au prix de souscription de la part à la date du retrait diminué des frais de souscription.

La liquidité des parts de SCPI est donc fonction de la possibilité de la société de gestion de compenser les demandes de retrait par les nouvelles souscriptions (ou du carnet d’ordre pour les SCPI à capital fixe).  La liquidité des parts de SCPI dépend donc du marché de l’offre et de la demande de parts.

Qu’est-ce que les OPCI ?

Les OPCI ont été lancés en 2008 pour offrir aux épargnants une alternative aux SCPI :

Les OPCI (organisme de placement collectif en immobilier) sont donc une forme hybride de placement investi à la fois en actifs immobiliers mais aussi en actifs financiers. L’OPCI doit respecter deux bornes minimales sur chaque poche d’investissement à raison d’au moins 60% d’actifs immobiliers et 5% d’actifs liquides pour assurer les retraits. Le solde de 35% est librement investi par le gestionnaire de l’OPCI (actions, obligations ou autres instruments financiers).

 

Qu’est-ce que les SCI (société civile immobilière) ?

Classées également dans la catégorie des FIA, elles trouvent majoritairement leur place au sein des contrats d’assurance vie. Les SC ou plus précisément SCI (Sociétés Civiles Immobilières) fonctionnent sur le même modèle que les SCI familiales mais sont ici créées par des sociétés de gestion et les associés en sont les compagnies d’assurances pour le compte des souscripteurs.

Elles sont assimilables à des « fonds des fonds » et peuvent investir dans tout type d’actifs immobiliers y compris en parts de SCPI. Cette souplesse permet notamment des thématiques très précises comme l’investissement sur la thématique du viager par exemple.

Les SCI ont également pour avantage de ne pas avoir d’obligation de distribution de leurs revenus. Elles peuvent donc les capitaliser augmentant ainsi leur valeur.

Enfin, les parts des SCI sont la propriété de l’assureur. Selon les caractéristiques du contrat d’assurance, le client souscripteur peut plus facilement procéder à un désinvestissement, soit par arbitrage, soit par rachat partiel. Le client investisseur peut bénéficier ainsi d’une meilleure liquidité, sous réserve des conditions de fonctionnement du contrat concernant ce type d’unité de compte.

Quelques chiffres au 31/12/2022 :

Source : ASPIM

SCPI, OPCI, SCI : comparaison avec l’immobilier en direct

L’immobilier « papier » ou indirect est une alternative à un investissement immobilier en direct. Quels sont les points communs et les différences de ces deux types d’investissement ?

Comparaison en termes de gestion

Outre la possibilité d’investir sur de l’immobilier avec des montants plus faibles qu’un investissement en direct (il suffit en général de quelques milliers d’euros), les avantages principaux de la « pierre papier » se situent dans la diversification des investissements et la facilité de gestion. Les SCPI, OPCI, SCI permettent aux investisseurs d’accéder au marché immobilier avec :

  • une multiplication et mutualisation des investissements diluant le risque locatif sur un grand nombre d’actifs immobiliers.
  • une gestion totalement déléguée à la société de gestion ce qui permet d’éviter la lourdeur et le temps passé à la gestion de l’immobilier en direct.
  • des frais compris dans les frais de gestion de la société gérante alors que l’immobilier en direct demande à budgéter les charges annuelles (taxes foncières …) et les travaux à prévoir.

Chaque société de gestion est tenue de remettre un rapport annuel de gestion à ses associés. Ce rapport offre une transparence totale de l’information (biens détenus avec adresse, nombre d’associés et données comptables). Ce rapport permet également d’accéder à des indicateurs clés, indispensables à vérifier avant tout investissement :

  • Le taux d’occupation financière (loyers réellement encaissés / potentiel de location à 100% du patrimoine de la SCPI).
  • La durée des baux.
  • La capitalisation de la SCPI.
  • Le montant de report à nouveau.

Comparaison en termes de fiscalité

La fiscalité est différente selon le type de supports : SCPI, OPCI, SCI.

Une fiscalité des SCPI et des SCI comparable à la détention immobilière en direct

Par principe, les SCPI et SCI sont soumises au même régime d’imposition que l’immobilier détenu en direct. Elles sont ainsi imposables :

  • à l’IR dans la catégorie des revenus fonciers au réel (pas de possibilité d’application du régime micro foncier sauf si des revenus fonciers sont déjà perçus sur des actifs en direct et que le seuil global de 15.000 € est respecté). Le revenu foncier net distribué est soumis à :
    • la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu (tranche marginale d’imposition de 11 % à 45%). L’IR s’applique après déduction de la CSG déductible de l’année précédente (taux de 6,8 %).
    • la CEHR (contribution exceptionnelle aux hauts revenus).
  • aux prélèvements sociaux : Le revenu net foncier est soumis aux prélèvements sociaux de 17,20% (CSG, CRDS et Prélèvements sociaux).
  • au régime des plus-values immobilières des particuliers en cas de plus-value de cession (IR au taux de 19 % et prélèvements sociaux à 17,2 % sur la plus-value nette après abattements pour durée de détention ; taxe supplémentaire pour les plus-values excédant 50.000 €).
  • à l’IFI : La valeur des parts de SCPI est déclarée à l’actif de l’IFI et est soumise au calcul de l’IFI selon le barème en vigueur.

Certaines stratégies de détention des parts peuvent permettre de répondre aux contraintes fiscales des épargnants (financement à crédit, détention en assurance vie ou encore achat en nue-propriété). Chacune de ses formes d’acquisition comprend des avantages et des inconvénients qu’il convient d’expliquer à l’investisseur.

A noter : La SCPI dite « européenne » permet d’atténuer l’effet de la fiscalité de la SCPI détenue en direct notamment par l’application des conventions internationales.

Une fiscalité des OPCI comparable à celle des valeurs mobilières de placement

Par principe, les OPCI du type SPPICAV relèvent du régime des valeurs mobilières. Les revenus et plus-values sont imposables à la flat tax au taux de 30 % (12,8 % au titre de l’IR et 17,2 % de prélèvements sociaux) ou sur option du contribuable pour l’ensemble de ses revenus de capitaux mobiliers, revenus et plus-values peuvent être imposés au barème de l’IR (auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux à 17,2 %). La fiscalité dépend également du mode de détention, soit en assurance vie (fiscalité propre à l’assurance-vie), soit en compte-titres ordinaire (flat tax ou option pour le barème de l’IR). Les OPCI revêtant la forme de FPI sont imposables :

  • dans la catégorie des revenus fonciers pour la partie du revenu distribué correspondant aux loyers
  • au titre du revenus de capitaux mobiliers pour la partie de revenu distribué provenant de la gestion des actifs financiers.

En termes de plus-value, les OPCI sous forme de SPPICAV sont imposées à la flat tax au taux de 30 % (prélèvements sociaux inclus). Les OPCI sous forme de FPI relèvent du régime des plus-values immobilières des particuliers. Les OPCI sont de manière générale imposables à l’IFI.

Quels rendements et quels risques dans l’environnement actuel ?

Depuis le début de l’année, la conjoncture économique ouvre une nouvelle période pour l’investissement en « pierre papier » dans laquelle les rendements sont sous pression et les risques renforcés.

Rendements de la pierre papier : le passé ne préjuge pas de l’avenir

La « pierre papier » offrait ces dernières années des rendements annuels nets de frais de gestion de l’ordre de 4 à 6 % selon le type de biens détenus et le type de supports, les OPCI affichant un rendement inférieur aux SCPI compte tenu de leur contrainte d’investissement. Ces rendements sont néanmoins en baisse constante depuis une vingtaine d’année, passant de 8 % en 1999 à une moyenne de 4 % en 2020. En cause, la baisse de l’inflation et des taux d’intérêt. Un rendement de 4 % ces dernières années plaçait néanmoins ces supports nettement au-dessus des taux d’intérêt obligataires ou de ceux des livrets, du moins jusqu’en 2022.

Le retour de l’inflation en 2022, conjuguée à des politiques de fortes remontées des taux par les banquiers centraux, ont rebattu le paysage des placements. Dépôt à terme, sicav monétaire, obligations retrouvent des rémunérations perdues de vue depuis plusieurs années. L’OAT 10 ans rémunère ainsi au 6 octobre au taux de 3,49% quand il y a encore 18 mois son taux était négatif.

Les rendements de la « pierre papier » souffrent par ailleurs de la crise du secteur de l’immobilier de bureau et de la montée des coûts d’investissement liés à la hausse des taux d’intérêt et aux nouvelles normes environnementales. Les fonds immobiliers ont la possibilité de puiser dans leurs réserves (report à nouveau) pour accroître leurs revenus de distribution lorsque le rendement purement immobilier baisse mais cela n’a qu’un temps et impacte dans tous les cas la valeur de la part à terme.

 

SCPI, OPCI, SCI : des risques de valorisation et de liquidité plus prononcés

La pression sur les rendements engendre la montée de deux autres risques, souvent liés, et qui avait ces dernières années tendance à s’oublier : celui de la baisse de la valorisation et celui de la liquidité. La revente des parts de SCPI suppose :

  • la présence d’investisseur se positionnant à l’achat pour les SCPI à capital fixe. La revente pour ce type de SCPI ne s’effectue que via le marché secondaire et dépend donc de l’offre et de la demande. Si les acquéreurs étaient nombreux ces dernières années compte tenu de l’attrait de la « pierre papier », ils se font nettement plus rares depuis début 2023.
  • Le rachat des parts par la SCPI elle-même pour les SCPI à capital variable. Ceci suppose que la SCPI ait les liquidités nécessaires. Si les demandes de rachat deviennent particulièrement nombreuses, la SCPI crée un fonds de remboursement en vendant ces biens immobiliers les plus liquides. Les SCPI à capital variable peuvent également organiser un marché secondaire.

Dans les deux cas, l’arrivée importante de vendeurs a un fort impact sur la valeur des parts. Les SCI subissent le même phénomène en cas de mouvement vendeur et les OPCI n’en sont pas préservés non plus car leurs réserves obligatoires de liquidités restent limitées.

Parallèlement, les acquéreurs se font moins nombreux. Sur le premier semestre 2023, la collecte nette sur les SCPI a baissé de 23 % par rapport au premier trimestre 2022, selon les chiffres de l’ASPIM (Association française des sociétés de placement immobilier). Au deuxième trimestre 2023, la collecte est encore en repli de 28 % par rapport au premier trimestre de l’année. Si les demandes de retrait s’intensifient, le risque est une absence de liquidité et un délai de réalisation de la vente plus ou moins long.

Les fonds immobiliers commencent à ajuster la valeur de leur part à la baisse. Un grand nombre de SCPI commencent à diligenter des expertises de leur patrimoine immobilier en ce sens. Dans la conjoncture, l’AMF exige des sociétés de gestion immobilière une transparence sur la valeur de leur bilan.

Lors de la crise immobilière des années 1990, la valeur des parts de SCPI avaient baissé de plus de 40 %. Des données que les investisseurs ont souvent oublié ces dernières années. Espérons que les tensions actuelles du marché ne riment pas avec le retour de ces mauvais souvenirs.

Auteurs

Anne Brouard et Guillaume Thierry 

 Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisée en gestion de patrimoine

Guillaume Thierry est conseiller patrimonial, diplômé du CESB-CGP

Fiscalité successorale : dans l’attente d’une réforme annoncée, quelle optimisation ?

Fiscalité successorale : dans l’attente d’une réforme annoncée, quelle optimisation ?

Temps de lecture estimé : 13 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Dans l’attente d’une réforme des droits de succession, comment identifier les situations les plus imposées et quels outils d’optimisation utiliser ?

La France se classe 3e sur le podium des pays taxant le plus les successions et les donations au sein de l’OCDE. Il n’est donc pas étonnant que la réforme des droits de succession ait fait partie des thématiques de campagne des dernières présidentielles.

Si le président Emmanuel Macron a proposé dans son programme un accroissement des abattements successoraux en ligne directe à hauteur de 150.000 € par enfant et 100.000 € pour les autres héritiers (ligne indirecte : petit-enfant, frères et sœurs, neveux et nièces …), à ce jour, aucune disposition concrète ni calendrier ne sont annoncés.

La transmission successorale reste néanmoins un sujet patrimonial clé. Les actifs issus d’un héritage représentaient en moyenne 35 % du patrimoine individuel en 1970 mais 60 % aujourd’hui.

Les valeurs croissantes du patrimoine immobilier accroît celle des patrimoines taxables et rend également les jeunes générations plus demandeuses d’une transmission anticipée. Les situations personnelles et familiales sont moins linéaires, les familles recomposées sont nombreuses et les transmissions à d’autres héritiers que les enfants ne sont plus aussi rares.

Dans quel cas paie-t-on des droits de succession ? Dans quelles situations la fiscalité successorale devient particulièrement onéreuse ? Comment réduire la fiscalité successorale ? Quels outils patrimoniaux utiliser ?

Etat des lieux de la pression fiscale successorale actuelle et des moyens de l’optimiser.

succession sans optimisation : des situations exonérées de droits à celles les plus taxées

Avant de se précipiter dans la recherche de solutions d’optimisation successorale plus ou moins complexes, il est indispensable de bien identifier les situations patrimoniales et de distinguer celles qui vont subir une forte fiscalité successorale, de celles où l’imposition reste faible voire inexistante.

des droits à payer mais pas dans tous les cas

Quand bien même les abattements en ligne directe sont actuellement de 100.000 € par enfant, il serait faux de croire que tout patrimoine excédant ce montant est imposable aux droits de succession.

Les abattements et les barèmes successoraux ne sont pas les seuls facteurs impactant les droits de succession.

Le régime matrimonial est un élément déterminant dans le calcul des droits.

Les régimes de communauté ont tout particulièrement pour effet de réduire de moitié le patrimoine successoral imposable. Or le régime de communauté réduite aux acquêts étant le régime légal depuis 1966, il concerne une grande partie des Français.

Par ailleurs, l’exonération successorale du conjoint survivant et le fait qu’il exerce fréquemment ces droits en usufruit viennent également diminuer la base imposable au premier décès et encore plus significativement au deuxième décès.

Prenons l’exemple d’une situation assez courante :

Un couple marié sous le régime légal, ayant 2 enfants communs et n’ayant pas réalisé de donation au dernier vivant, ni de donation en faveur de leurs enfants.

Le patrimoine commun du couple est évalué à 400.000 €.

Au premier décès, le régime matrimonial est dissous. Le conjoint survivant conserve la moitié du patrimoine commun, l’autre moitié constitue la masse successorale.

Le patrimoine successoral sera donc de 200.000 € (moitié de la communauté) sur lequel le conjoint survivant pourra exercer ses droits : 100 % en usufruit ou ¼ en pleine propriété (article 757 du Code civil).

Dans les cas les plus fréquents, le conjoint survivant opte pour un héritage en usufruit, lui permettant de conserver l’usage et les revenus du patrimoine du défunt. La valeur fiscale de ses droits dépend alors de son âge au jour du décès du conjoint, selon le barème de l’article 669 du CGI.

Ainsi, si le conjoint survivant est âgé de 85 ans au jour du décès, la valeur de ses droits est de 20 % du patrimoine successoral.

Les deux enfants communs sont nus-propriétaires du patrimoine du défunt et la valeur fiscale de leurs droits est de 80 % de la masse successorale.

Fiscalement, la part successorale des enfants s’élève donc à 160.000 € (200.000 € x 80 %), soit 80.000 € par enfant.

Compte tenu des abattements en ligne directe de 100.000 € non utilisés jusqu’ici en l’absence de donation, les enfants ne sont pas imposables sur cette succession.

Au décès du conjoint survivant, les enfants nus-propriétaires de la moitié du patrimoine commun de leurs parents en deviennent pleins propriétaires sans droits de succession supplémentaires à payer (article 1133 du CGI).

Ils héritent par ailleurs de la moitié du patrimoine commun qui revenait à leur parent survivant du fait de la dissolution du régime matrimonial.

Si nous ne tenons pas compte de la revalorisation de ce patrimoine, ils héritent donc de 200.000 € en pleine propriété du parent survivant, soit 100.000 € chacun.

Les abattement s‘appliquant par parent et par enfant, ils bénéficient de l’abattement de 100.000 € chacun et ne sont donc pas imposables non plus sur cette succession.

Dans cette situation, un patrimoine de 400.000 € a été transmis aux deux enfants sans aucun droits de succession.

Il en est différemment d’une personne mariée en séparation de biens qui détient la plus grande partie ou la quasi-totalité du patrimoine. Dans ce cas, seul l’usufruit du conjoint survivant réduit la base imposable.

Si nous reprenons notre exemple précédent, si les conjoints sont mariés en séparation de bien et que seul l’un d’entre eux détient le patrimoine de 400.000 € en biens propres, la valeur fiscale de la part d’héritage en nue-propriété des enfants est de 320.000 € (400.000 € x 80 % si le conjoint survivant a plus de 81 ans), soit 160.000 € par enfant.

Après abattement en ligne directe de 100.000 €, chacun d’eux a alors à payer 10.194 € ((160.000 € – 100.000 €) x 20 % – 1806 € ; barème des droits de mutation à titre gratuit en ligne directe).

Le conjoint survivant n’ayant pas de patrimoine personnel et ayant exercé ses droits en usufruit sur la masse successorale, les enfants deviennent, à son décès, pleins propriétaires du patrimoine de 400.000 € (en l’absence de revalorisation), sans payer de droits de succession complémentaires (article 1133 du CGI).

Au total, pour ce patrimoine de 400.000 € transmis in fine aux enfants, les droits de succession auront été de 20.388 € (10.194 € x 2) alors que dans la même situation, mais en régime de communauté légale, aucun droit n’est dû.

les situations patrimoniales les plus imposées aux droits de succession

En ligne directe, les situations les plus fortement imposées sont bien évidemment celles où les valeurs patrimoniales sont élevées : le barème en ligne directe atteint ainsi 30 % au-delà de 552.324 € transmis par enfant après abattement. Ce taux passe à 40 % au-delà de 902.838 € et 45 % au-delà de 1.805.677 €.

Bien que la succession ne soit pas imposée totalement à ces taux marginaux compte tenu de la progressivité du barème, les montants à payer peuvent devenir rapidement significatifs et nécessiter de prévoir spécifiquement leur financement.

Ainsi, un enfant qui reçoit de son parent une part d’héritage valorisée fiscalement à 500.000 € paie 78.194 € de droits ((500.000 – 100.000) x 20 % – 1806).

Un enfant qui reçoit un héritage valorisé à 1.000.000 € paie 212.962 € de droits ((1.000.000 – 100.000) x 30 % – 57.038 €).

A l’importance du patrimoine vient aussi se conjuguer le régime matrimonial. Comme nous l’avons vu, le régime de séparation de biens dans lequel l’un des époux détient l’essentiel du patrimoine accroît fortement la fiscalité successorale.

Le régime de la séparation de biens est souvent adopté lorsque l’un des époux est entrepreneur ou indépendant, dans un souci de protection patrimoniale vis-à-vis des créanciers, mais aussi dans les situations fréquentes de remariage.

Bien souvent et de plus en plus avec l’évolution de notre société, de nombreuses transmissions se font hors ligne directe (entre frères et sœurs, vers des neveux et nièces, entre parents jusqu’au 4e degré), ou encore entre concubins non pacsés.

La taxation est alors bien plus élevé et avec peu de progressivité. Vers un neveu ou une nièce, l’abattement est de 7.967€ puis l’imposition passe directement à 55% sans aucune progressivité du barème. Entre concubins non pacsés, la fiscalité est de 60 % après un abattement de 1.594 €.

Ces situations patrimoniales doivent nécessairement être aménagées afin d’optimiser l’imposition successorale.

Source : Capital « Droits de succession : calcul, barème, abattements … »

des outils d’optimisation adaptés à chaque situation et chaque type de biens

Assurance-vie bien sûr, donations mais aussi vente avec réserve d’usufruit ou en viager et aménagement du régime matrimonial, les outils d’optimisation sont propres à chaque situation patrimoniale.

l’assurance-vie : le « couteau suisse » de la transmission successorale

Bien connue des Français, l’assurance-vie présente à ce jour des atouts indéniables pour la transmission du patrimoine.
Elle a pour principal avantage de réduire l’imposition successorale, tout en permettant au souscripteur, contrairement aux donations, de garder la maîtrise de son patrimoine.

On pourra ainsi optimiser la fiscalité successorale en privilégiant l’assurance-vie pour la transmission du patrimoine financier. Cette partie du patrimoine n’entrera pas dans le calcul des droits de succession. Les abattements et barème ne resteront alors applicables que pour le patrimoine immobilier.

La fiscalité successorale de l’assurance-vie est loin d’être uniforme.

Source : Anne Brouard pour l’ESBanque

N.B : dans tous les cas, le conjoint, le partenaire de PACS et les frères et sœurs sous conditions, restent exonérés d’imposition successorale pour les capitaux reçus via l’assurance-vie.

Les plus-values et intérêts des contrats d’assurance-vie sont soumis aux prélèvements sociaux : au taux de l’année de dénouement du contrat (taux de 17,2 % en 2022) pour les plus-values issues des unités de compte du contrat ; prélevés annuellement pour les intérêts du support fonds en euros.

L’optimisation de la fiscalité successorale consiste alors :

  • à dédier le bénéfice des contrats exonérés de fiscalité successorale dont peut disposer le souscripteur aux héritiers qui seraient fortement taxés en cas de succession, tels les membres de la famille hors ligne directe (neveux, nièces / frères et sœurs …) et à ne pas réaliser de retraits sur ces contrats.
  • Depuis le 13/10/1998, à ne pas nécessairement limiter les versements en assurance-vie à l’abattement de 152.500 €. Cette limite peut en effet être optimisée en :
    • augmentant le nombre de bénéficiaires (ex : ajouter des petits enfants sur la clause)
    • ou en optimisant la clause bénéficiaire par un démembrement par exemple ou une clause à option.
    • versant au-delà de l’abattement car le taux de taxation de 20% sur les 700.000 € suivant peut s’avérer plus favorable que les taxations maximales du barème en ligne directe (45%).
  • à ne pas systématiquement éviter les versements après l’âge de 70 ans, pour les contrats souscrits depuis le 20/11/1991. Il faut en effet tenir compte de l’espérance de vie, du rendement potentiel et du fait que les intérêts et plus-values sont exonérés.

Prenons, l’exemple, d’un assuré disposant de 500.000€, célibataire avec un enfant qui a 69 ans et s’interroge sur l’opportunité de verser avant ou après 70 ans :

Hypothèse de survie : 15 ans.
Hypothèse de rendement : 4% l’an.
Droits de succession : atteinte du taux marginal de 20 % du barème

Source : Guillaume Thierry pour l’ESBanque
Bien entendu, il reste financièrement opportun de capitaliser dans l’assurance-vie avant 70 ans. Cet exemple est ici mentionné pour illustrer certains raccourcis rapides concernant les versements après 70 ans. Les souscripteurs ayant dépassé l’âge clé de 70 ans ne doivent pas nécessairement se détourner de l’assurance vie.
Prélèvements sociaux :

Les plus-values et intérêts des contrats d’assurance-vie sont dans tous les cas soumis aux prélèvements sociaux : au taux de l’année de dénouement du contrat (taux de 17,2 % en 2022) pour les plus-values issues des unités de compte du contrat ; prélevés annuellement pour les intérêts du support fonds en euros.

L’assurance-vie offrant un cadre fiscal avantageux pour la transmission de patrimoine, il serait tentant d’y loger la plus grande partie, voire la totalité de son patrimoine.

Et ceci d’autant plus que la clause bénéficiaire de l’assurance-vie n’est pas soumise aux mêmes contraintes que la dévolution successorale civile. Contrairement au Code civil qui impose de respecter une dévolution légale organisée et avec certaines limites (réserve héréditaire), le souscripteur d’assurance vie peut en effet choisir le bénéficiaire de son choix beaucoup plus librement.

Le capital transmis n’est pas soumis aux règles civiles du rapport successoral ou de la réduction (articles L132-12 et L132-13 du Code des assurances).

Il convient néanmoins d’être prudent. L’avantage civil et fiscal de l’assurance-vie peut être remis en cause dans certaines situations :

  • primes manifestement exagérées : l’article L132-13 du Code des assurances dispensant l’assurance-vie des règles du rapport et de la réduction prévoit néanmoins une exception, lorsque les primes ont été « manifestement exagérées eu égard aux facultés du souscripteur ». Un ou des enfants qui s’estimeraient léser par le bénéfice d’un important contrat d’assurance-vie de leur parent qui ne leur reviendrait pas pourraient acter en justice sur ce fondement. La notion de primes manifestement exagérées reste néanmoins à l’appréciation des juges du fond sur la base d’éléments de fait (âge du souscripteur, revenus, patrimoine, montant versé mais aussi retraits réalisés …). Si le caractère manifestement exagéré des primes est reconnu, le montant de ses primes excédentaire est ramené à la succession afin de rétablir les droits des héritiers réservataires. De facto, ces primes sont alors imposées aux droits de succession.
  • requalification du contrat d’assurance-vie en donation indirecte : ce moyen peut être utilisé par l’administration fiscale si elle estime que la souscription du contrat n’avait pas d’autre utilité pour l’assuré que d’avantager le bénéficiaire et que ce contrat équivaut à une donation.
  • abus de droit : l’administration fiscale pourrait également invoquer l’abus de droit en démontrant que la souscription du contrat a pour objectif exclusif, ou depuis 2020 principal, d’éluder l’impôt.

les donations, outil d’optimisation successorale à privilégier pour le patrimoine immobilier ou professionnel

Les donations permettent de transmettre de son vivant des biens et sont comme les successions assujetties aux droits de mutation à titre gratuit.

Les droits de mutation à titre gratuit (abattement et barème selon le lien de parenté) concernent aussi bien les successions que les donations.

Dès lors, quels sont les avantages de la donation ?

  • faire courir le délai de rappel fiscal des donations et pouvoir le renouveler : la donation en pleine propriété permet de transmettre un bien dès maintenant ce qui permet de faire courir le délai de 15 ans, dit de rappel fiscal, nécessaire à la reconstitution des abattements et des tranches utilisées du barème. Les patrimoines importants ont pour cette raison intérêt à renouveler des opérations de donation tous les 15 ans afin de bénéficier des premières tranches du barème alors que leur patrimoine global atteindrait rapidement les tranches maximales (de 40 % ou 45 %).Le donateur peut par ailleurs disposer du bien immédiatement.

    Attention néanmoins, une fois les donations réalisées, elles ne sont pas oubliées : les donations simples seront en effet revalorisées au jour du décès et ramenées à la masse successorale pour les calculs du rapport et de la réduction. La donation-partage permet de geler les valeurs afin d’éviter cette revalorisation au jour du décès.

  • bénéficier d’une base d’imposition réduite :
    • par la donation en nue-propriété ou avec réserve d’usufruit. Ce type de donation permet au donateur usufruitier de percevoir les revenus du bien ou de l’utiliser, mais réduit également significativement le coût fiscal de la transmission : seule la valeur en nue-propriété est imposable et cette valeur est d’autant plus faible que l’usufruitier est jeune (barème de l’article 669 du CGI). Au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient plein propriétaire sans droits de mutation supplémentaire (article 1133 du CGI). Seule la valeur de la nue-propriété au jour de la donation aura donc été imposée.
Attention à la présomption de l’article 751 du CGI :

Cette donation en nue-propriété à un héritier présomptif n’aura d’effet fiscal que si elle est régulière et réalisée plus de 3 mois avant le décès.

  • pour les biens professionnels (sociétés et entreprises individuelles), la base imposable peut être réduite de 75 % si les conditions du pacte Dutreil sont réunis.
  • prise en charge des droits à payer par le donateur sans coût fiscal supplémentaire : le paiement des droits pourra être pris en charge par le donateur sans que cela ne soit considéré par l’administration fiscale comme une nouvelle donation.

Si les donations permettent de réduire l’imposition successorale, elles présentent néanmoins deux inconvénients principaux :

  • l’acte de donation est irrévocable et le donateur se dépossède donc du bien transmis. La donation avec réserve d’usufruit tempère néanmoins cette contrainte puisqu’elle permet de conserver les revenus ou l’usage du bien.
  • Les donations ont un coût fiscal immédiat (droit de mutation à titre gratuit), à la différence de la souscription d’un contrat d’assurance-vie.

Pour ces raisons, les donations sont à privilégier pour :

  • la transmission du patrimoine immobilier détenu en direct ou via une SCI familiale (Société Civile Immobilière), en particulier lorsque la SCI recourt à l’emprunt
  • la transmission du patrimoine professionnel qu’il n’est pas possible de loger dans l’assurance-vie.
  • Lorsque les investissements en assurance-vie son déjà significatifs et que les capitaux décès atteignent déjà les taux maximums de la fiscalité successorale de l’assurance-vie (31,25 %).

Dans tous les cas, pour éviter toute remise en cause de la donation, l’intention libérale du donateur doit être réelle et il ne doit pas conserver la pleine disposition du bien. Ces risques peuvent par exemple apparaître dans le cas de SCI dont les parts sont détenues en usufruit après une donation en nue-propriété, et lorsque l’usufruitier conserve des pouvoirs étendus dans la société en tant que gérant.

les ventes avec réserve d’usufruit ou en viager à un héritier

Il est possible de transmettre un bien, notamment immobilier, sans passer par une mutation dite à titre gratuit (donation ou succession) mais via une vente à un enfant ou un héritier.

L’opération est alors imposable aux droits de mutation à titre onéreux dont la fiscalité est beaucoup moins lourde (taux de l’ordre de 8 %).

Attention néanmoins, la vente suppose le paiement du prix par l’acquéreur qui est ici un héritier. Il convient d’être particulièrement prudent sur la valeur du bien qui doit être celle du marché et sur le paiement réel du prix, afin d’éviter toute faveur requalifiable en donation.

Lorsque l’héritier n’a pas les fonds disponibles pour cette acquisition, il est possible d’envisager :

  • une vente en viager : comme toute vente en viager, l’acquisition aura été plus ou moins coûteuse pour l’héritier selon l’espérance de vie du vendeur. La vente en viager occupée permet par ailleurs au vendeur de conserver l’usage du bien tout en percevant une rente viagère.
  • une vente en nue-propriété : l’acquéreur deviendra plein propriétaire au décès de l’usufruitier. L’héritier acquéreur devra bien sûr disposer du financement de la valeur de la nue-propriété.

Dans les deux cas, ces opérations relèvent des droits de mutation à titre onéreux et non des droits de mutation à titre gratuit.

S’agissant d’un héritier, ces ventes devront néanmoins être pratiquées avec précaution afin d’éviter la présomption de l’article 918 du Code civil et celle de l’article 751 du CGI, qui annihileraient le caractère onéreux de l’opération.

Nous vous renvoyons pour cela à notre précédent article :

aménagement du régime matrimonial : un outil d’optimisation successorale

Comme nous l’avons vu, les droits de succession sont moins élevés voire nuls en régime de communauté, par l’effet de ce régime, couplé à l’exonération de droit du conjoint.

Pour optimiser les droits de succession, il peut être intéressant de modifier le régime matrimonial soit pour adopter un régime communautaire, soit pour créer une masse de biens communs, par l’ajout d’une société d’acquêt par exemple dans un régime de séparation de biens.

Attention néanmoins :

L’adoption d’un régime de communauté universelle assorti d’une clause d’attribution intégrale n’aurait pas les effets escomptés et au contraire les annihilerait. La totalité du patrimoine sera en effet transmis aux enfants au second décès avec une fiscalité alourdie puisque l’héritage ne leur proviendra que d’un seul parent. Les abattements et l’utilisation du barème ne seront utilisables qu’auprès d’un seul des parents.

Ces changements de régime ont néanmoins des effets civils et peuvent créer des situations ne convenant pas aux époux, notamment en cas de divorce. Un changement de régime matrimonial ne doit pas être réalisé uniquement pour des raisons fiscales.

Quel que soit l’outil patrimonial utilisé dans l’objectif d’optimiser la fiscalité successorale, assurance-vie, donation, vente, changement de régime matrimonial, il est indispensable de mesurer en amont les effets civils de telles décisions et de vérifier qu’ils sont conformes aux objectifs patrimoniaux.

Auteurs

Anne Brouard   et Guillaume Thierry    

 Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisée en gestion de patrimoine

Guillaume Thierry est est conseiller patrimonial, diplômé du CESB-CGP

Assurance-Vie : décollecte, rendement, solvabilité des compagnies, où en sommes-nous ?

Assurance-Vie : décollecte, rendement, solvabilité des compagnies, où en sommes-nous ?

Temps de lecture estimé : 10 min

Quel état de santé de l’assurance-vie en 2021 ? Malgré une forte décollecte, les ratios de solvabilité sont stables mais les contraintes demeurent sur les fonds en euros.

 

La crise sanitaire a eu un impact significatif sur l’assurance-vie en 2020 suscitant une très forte décollecte. De là à dire que l’assurance-vie va mal, l’analyse n’est pas si simple.

Si les fonds en euros sont particulièrement touchés par les retraits, la collecte sur les unités de compte est en croissance significative. Par ailleurs, la solvabilité des compagnies résiste bien.

Reste un défi majeur : la gestion du fonds en euros, encours significatif au bilan des compagnies, alors que l’univers de taux est soumis à de nouvelles contraintes.

une décollecte historique sur l’assurance-vie en 2020 : attention aux conclusions hâtives

L’assurance-vie est-elle toujours le placement favori des épargnants français ?

Face à la décollecte historique de 6,5 milliards d’euros qu’ont subi les compagnies françaises en 2020, comparativement à une collecte nette de près de 22 milliards en 2019, il est permis d’en douter.

Mais méfions-nous des conclusions trop rapides et recherchons les raisons.

une nette baisse des versements en assurance-vie dans une année de crise

Le montant total des versements en assurance-vie en 2020 est de l’ordre de 116 milliards d’euros contre 144 milliards en 2019.

Ce recul significatif tient bien sûr à la crise sanitaire et son impact sur les comportements d’épargne des français.

Dans un environnement incertain, le réflexe est de privilégier des placements d’épargne liquides tels le Livret A et le LDDS qui ont connu une collecte record l’année dernière de plus de 35 milliards d’euros.

L’autre raison de cette chute des versements est le manque d’attrait des rendements des fonds en euros.

La rentabilité des fonds en euros s’érode un peu plus tous les ans. Le mois de février est traditionnellement le mois de publication des rendements de l’année précédente : ceux-ci poursuivent leur baisse dans un contexte de taux bas persistants.

Ainsi le rendement net des fonds en euros en 2020 oscille entre 1% et 2 %, certaines compagnies pouvant reverser un complément de bonus de 0,1 à  0,5%  en fonction de la part investie en unité de compte.

Les fonds en euros à dominante immobilière présentent des rendements légèrement supérieurs à 2% en moyenne. Compte tenu de leur fort succès, les compagnies en ont tout d’abord conditionné l’accès à une part d’investissement à 40% en unité de compte. Les contraintes de gestion devenant plus importantes, certaines compagnies viennent de fermer ces fonds à la commercialisation.

La baisse générale de rendement est directement liée à la composition du fond en euros :

 

Source : ACPR Analyses et synthèses n° 118-2020 La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France au premier semestre 2020

 

 

Les fonds en euros sont en effet fortement investis sur le marché obligataire en obligations d’État (notation Standard & Poor’s AAA à AA).  Or, les taux souverains, tel celui de l’OAT 10 ans, sont en territoire négatif depuis plusieurs mois. Les maturités très longues peinent à offrir un rendement positif.

 

Source : Banque de France

 

Du côté des obligations du secteur financier représentant une part non négligeable de 22 % des fonds en euros au 30 juin 2020, les rendements sont à peine plus importants (moins de 1 % pour la dette bancaire senior 3-5 ans notée A fin 2020).

Conséquence de la recherche de liquidité et de ces taux bas, une forte décollecte sur le support fonds en euros de près de 20 milliards d’euros sur les six premiers mois de 2020 :

 

Source : ACPR Analyses et synthèses n° 118-2020 La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France au premier semestre 2020

 

mais des retraits des contrats d’assurance-vie et des sinistres stables en moyenne sur l’année

Cette forte décollecte sur le fonds en euros ne s’est pas traduite pour autant par des retraits massifs de l’assurance-vie ou augmentation des sinistres (dénouement des contrats par décès).

Les rachats et sinistres se sont ainsi élevés à 123 milliards d’euros, relativement stables par rapport à 2019 (119 milliards).

Les retraits ont été plus marqués au premier semestre en pleine crise du coronavirus mais se sont nettement réduits sur le reste de l’année pour revenir sous leur valeur moyenne calculée de 2011 à 2020. Ils restent nettement plus faibles qu’au premier semestre 2017 (vote de la Loi Sapin 2 et élection présidentielle).

 

Source : ACPR Analyses et synthèses n° 118-2020 La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France au premier semestre 2020

 

La forte décollecte sur le fonds en euros s’explique en fait par un très fort mouvement d’arbitrage vers les unités de compte. Ce mouvement confirme la tendance depuis longtemps annoncée de fin du fonds en euros comme support privilégié des épargnants en assurance-vie.

une collecte nettement positive sur les unités de compte des contrats d’assurance-vie

Les unités de compte (UC) ont connu une forte progression avec une collecte de plus de 13 milliards au 30 juin 2020.

La part des UC est ainsi passée de 28 % des encours en 2019 à 34 % en 2020.

La raison principale est le fort arbitrage des épargnants en 2020 du fonds en euros vers les UC :

 

Source : ACPR Analyses et synthèses n° 118-2020 La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France au premier semestre 2020

 

Ces arbitrages significatifs s’expliquent par :

  • l’engouement des épargnants pour la bourse en 2020 : cet attrait vers les actions et autres supports boursiers n’a pas concerné que les PEA et les comptes-titres.
    Constatant que l’univers de taux bas est persistant et que le rendement du fonds en euros est insuffisant pour compenser la simple érosion de l’épargne par l’inflation, de plus en plus d’épargnants ont pris conscience de la nécessaire diversification de leur contrat vers les UC. A ce mouvement s’ajoutent des opportunités d’investissement en actions liées à la crise de la Covid-19.
  • L’action des assureurs eux-mêmes : ce changement dans les mœurs de l’épargnant français s’accompagne également de l’action de promotion des UC par les intermédiaires mais aussi de leur rôle pédagogique, visant au respect de la réglementation et de la bonne compréhension des offres.

L’univers d’investissement en UC est en effet devenu au fil des années très large, balayant des univers d’investissement variés (actions, obligations, immobilier, private equity, ISR …) et des horizons géographiques et sectorielles diversifiés.

En parallèle de la gestion libre, les assureurs développent de plus en plus de services de gestion déléguée (mandat d’arbitrage, gestion pilotée, gestion profilée). Ces offres commerciales permettent à l’assuré de s’en remettre à un professionnel des marchés pour la gestion de la partie en UC de son contrat d’assurance vie (sélection des UC, arbitrage).

Les styles de gestion des OPC (Organisme de Placement Collectif) sur lesquels sont basés les UC se sont affinés ces dernières années pour se détacher des gestions purement indicielles. Il est ainsi possible d’investir sur des OPC de style dit Value (valeurs décotées) ou Growth (valeurs de croissance) ou encore de Stock-picking (privilégiant la sélection de titres aux choix sectoriels et géographiques).

En parallèle d’une gestion pure actions, les assureurs intègrent également de plus en plus dans leur univers de placement des fonds dits structurés. Ces produits sont émis par des établissements financiers et offrent un rendement et une protection totale ou partielle du capital à l’échéance, variable selon l’évolution d’un indice. Ces produits connaissent un certain succès depuis la baisse de rendement des fonds en euros.

Compte tenu du risque associé, de la durée de placement longue et de leur manque de liquidité, il est recommandé de limiter l’exposition de l’allocation à ce type de support à 10 % de l’encours placé.

L’intérêt des investisseurs pour l’immobilier patrimonial peut également être satisfait par des unités de compte de type immobilières tels que les SCPI ou les OPCI.

Enfin, pour certains contrats, il sera également possible de loger des titres vifs (titres en direct). Cette faculté peut s’avérer intéressante pour un assuré souhaitant investir à long terme sans recourir à des OPC mais ne convient pas à un épargnant souhaitant s’adonner à une activité de trading. L’enveloppe assurance-vie ne permet pas au souscripteur de passer des ordres instantanés sur les marchés et ne convient donc pas à l’investisseur intraday.

Cette évolution de l’offre financière en assurance vie s’est accompagnée du développement de la gestion digitale des contrats, les compagnies permettant désormais de réaliser de nombreux actes de gestion en ligne.

une reprise de la collecte globale en assurance-vie en fin d’année

Le dernier mois de l’année 2020 marque une reprise de la collecte nette en assurance vie liée à un retour des perspectives positives (vaccinations, reprise économique).

 

Source : Fédération Française de l’Assurance « L’assurance-vie à fin décembre 2020 »

 

L’assurance-vie n’est donc pas délaissée par l’épargnant mais utilisée et investie différemment.

quel impact de la crise sur la solvabilité et la gestion des assureurs ?

S’il ne s’agit pas d’une défiance majeure vis-à-vis de l’assurance-vie, l’année 2020 a néanmoins suscité des mouvements forts sur les contrats et une forte volatilité sur les marchés financiers.

Quel en a été l’impact sur le bilan des compagnies d’assurance et leur solvabilité et quels risques demeurent ?

solvabilité des compagnies d’assurance-vie françaises en 2020

Les ratios de solvabilité et de liquidité, le niveau de valorisation des encours écartent les risques de bilan des compagnies en 2020.

CSR (Capital de Solvabilité Requis) et MCR (Minimum de Capital Requis) : une solvabilité forte

La solidité bilancielle des compagnies françaises est mesurée par deux ratios :

  • Le CSR (Capital de Solvabilité Requis) est un indicateur du montant de fonds propres (évalués selon les modalités spécifiques de Solvabilité 2) dont les assureurs doivent disposer pour couvrir un risque de sinistre exceptionnel.
    Le niveau de risque requis pour ce calcul est celui d’une probabilité de faillite à un an de 0,5 % ou inversement le niveau de risque pour lequel la probabilité de pouvoir faire face aux engagements des clients à un an est de 99,5 %. 

    Le taux de couverture du CSR est le rapport entre les fonds propres éligibles et le niveau de CSR requis. Il doit être supérieur à 100 %.Même si la baisse des taux d’intérêt au premier semestre 2020 a dégradé le taux de couverture du CSR des compagnies d’assurance-vie françaises, celui-ci s’élevant à 225 % au 30 juin contre 256 % en décembre 2019, son niveau reste supérieur au plus bas de septembre 2019 de l’ordre de 220 %. 

    Les bilans des compagnies affichent ainsi une résilience à la crise économique et financière provoquée par la Covid-19.

Taux de couverture moyen des branches vies, mixtes et non vies.
Source : ACPR Analyses et synthèses n° 118-2020 La situation des assureurs soumis à Solvabilité II en France au premier semestre 2020

 

  • Le MCR (Minimum de Capital Requis) est le montant minimum de fonds propres (évalués conformément aux règles de Solvabilité 2) en deçà duquel la compagnie présente un risque de poursuite de son activité. Il est calculé un MCR dit « combiné » devant se situer entre 25 % et 45 % du CSR.Le taux moyen de couverture du MCR subit une dégradation plus importante, passant de 638 % au dernier trimestre 2019 à 559 % au 30 juin 2020. Il reste néanmoins supérieur à son niveau du troisième trimestre 2019 où il avait atteint 500 % avant la crise du coronavirus.

Un ratio de liquidité à court terme (LCR Liquidity Coverage Ratio) stable en 2020 pour les compagnies d’assurance-vie

Il est également important d’apprécier la qualité des actifs des compagnies d’assurance en termes de liquidité.

Les ratios de liquidité à court terme (LCR Liquidity Coverage Ratio) ne reculent pas sur le premier semestre 2020.

La part des actifs liquides reste stable à une moyenne de 50 % du bilan des compagnies.

Les actifs liquides de haute qualité couvrent en moyenne 30 mois de sinistres au 30 juin 2020 contre 28 mois fin 2019.

Un encours peu impacté par la crise en 2020

Malgré la crise, la valeur des encours de placement des assureurs est en légère augmentation de 0,8 % sur un an, s’élevant à 2 666 milliards d’euros au 30 juin 2020.

Les compagnies d’assurance n’ont pas modifié leur allocation d’actifs en 2020 et la part des supports obligataires est toujours de l’ordre de 60 % des encours (avant mise en transparence de la partie OPC représentant 27 % des actifs).

Les investissements se répartissent à 63 % sur la France et 23 % sur la zone euro, les actifs hors union européenne ne représentant que 8 % du total.

Après une nette augmentation des taux au premier semestre en raison de la crise, les niveaux sont revenus à ceux de début d’année. Le marché obligataire n’a pas fortement pâti de la crise sanitaire.

Les encours des assureurs en actions cotées sont moins importants, de l’ordre de 4 % des encours, et n’ont pas significativement soufferts en 2020. La forte baisse des marchés actions au premier trimestre a été compensée par une reprise significative sur le reste de l’année.

les risques qui demeurent pour l’assurance-vie et les fonds en euros : dégradation des signatures obligataires et remontée des taux

La crise économique, induite par le coronavirus, comporte de nouveaux risques pour les assureurs et les épargnants :

  • la dégradation de la note des entreprises (non financières et financières) s’est accélérée. Au niveau des encours des compagnies d’assurance, la part des obligations inférieures à BBB- sont ainsi passées de 0,6 % à 0,9 % au premier semestre 2020.
    Si la santé financière des sociétés continuait à s’affaiblir, la qualité du portefeuille obligataire des assureurs pourrait se détériorer et les risques en capital augmenter.
  • Le risque de remontée des taux en cas de résurgence de l’inflation est également un facteur à prendre en compte. L’augmentation des taux entraîne mécaniquement une baisse de la valeur des obligations déjà émises sur le marché, donc du stock de supports obligataires détenu par les compagnies.

Ces nouveaux risques viennent s’ajouter aux contraintes de gestion que connaissent les assureurs depuis plusieurs années sur le fonds en euros, dans un univers de taux bas.

 

 

Une orientation et une diversification plus significatives des encours des contrats vers les unités de compte restent donc primordiales, afin que les risques sur l’assurance-vie restent maitrisés et que ce placement garde toute sa place dans le patrimoine des épargnants : un outil pertinent d’un point de vue fiscal, mais aussi financier.

 

Auteurs
Anne Brouard et Guillaume Thierry

Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisée en gestion de patrimoine

Guillaume Thierry est est conseiller patrimonial, diplômé du CESB-CGP 

COVID 19 : Quels impacts sur l’immobilier patrimonial ?

COVID 19 : Quels impacts sur l’immobilier patrimonial ?

Temps de lecture estimé : 15 min

Conséquences de la crise du Covid-19, la baisse prévisible du pouvoir d’achat des acquéreurs et des locataires tendent au fléchissement des prix de l’immobilier patrimonial. Mais les impacts sont différents selon le type de biens et leur emplacement. Quelles stratégies d’investissement immobilier adopter pour l’après-crise ?

Premier impact de la crise du coronavirus, les transactions immobilières sont à l’arrêt. Le déconfinement du 11 mai permet une reprise des opérations en cours mais celle-ci n’est pas suffisante pour maintenir la tendance haussière du marché immobilier.

L’immobilier est très présent dans le patrimoine des Français (61,6 % des ménages possèdent un bien immobilier en 2018, 57,7 % sont propriétaires de leur résidence principale et 17,7 % possèdent un autre bien tel qu’une résidence locative ou secondaire, selon les données Insee).

Malgré une fiscalité de plus en plus lourde, l’appétence des français pour l’immobilier ne se dément pas.

2019 fut une année de records. Ainsi le fameux cap du million de transactions de biens vendus dans le marché résidentiel a été atteint (1 059 000 transactions sur 12 mois à fin octobre, selon les actes de vente des notaires). Le marché immobilier a été fortement porté par des taux d’emprunt très bas ainsi que par une demande des investisseurs particuliers et institutionnels n’ayant que peu d’alternative quant à la recherche d’un rendement minimum.

Avec les mesures de confinement liées au COVID-19 et l’arrêt de l’activité économique mondiale, ces moteurs se grippent brutalement. Perçu traditionnellement comme un actif refuge, l’immobilier patrimonial est fortement impacté par la crise économique et sanitaire que nous traversons.

la crise actuelle et ses impacts sur l’immobilier patrimonial

En réponse au risque pandémique du Coronavirus, le confinement de la population française a été décidé le 17 mars dernier avec des conséquences économiques fortes, immédiates (arrêt total de l’activité économique non essentielle à la survie de la population) et futures dont nous ignorons encore la portée. Des mesures significatives de soutien économique sont également prises dans le même temps pour les particuliers et pour les entreprises.

Grâce à ces mesures, les ménages endettés pour leur résidence principale ne sont pas immédiatement impactés (chômage partiel, possibilité de négocier une modularité ou un report avec son banquier selon le contrat de crédit). Mais qu’en est-il de l’immobilier locatif notamment professionnel (bureaux, commerces) détenus parfois en direct par les particuliers ou via des SCPI ?

immobilier résidentiel : quels impacts sur le marché de l’ancien et le marché du neuf ?

Immobilier neuf ou ancien, la mise à l’arrêt brutal de l’activité économique a suspendu à court terme toute transaction.

Arrêt du marché immobilier dans son ensemble, quelle reprise à moyen et long terme ?

Le déconfinement et la reprise graduelle de l’activité vont permettre de finaliser les opérations en cours pour lesquels les financements sont accordés.

D’un point de vue conjoncturel, les notaires estiment que le marché immobilier subit des impacts immédiats (report des déménagements, des actes) puis mécaniquement un rebond « technique » au sortir du confinement par la réalisation des actes non enregistrés avant l’isolement de la population.

A moyen terme néanmoins, les délais des nouvelles transactions (recherche de bien, mise en vente) risquent de se rallonger. Un nouveau « trou d’air » devrait alors se faire ressentir.

La situation de long terme pose davantage d’incertitudes. Les notaires pensent que le marché pourrait redémarrer au 4ème trimestre 2020 voire au 1er trimestre 2021 mais il n’est pas attendu de niveaux de transactions records comme en 2019.

Selon les professionnels du secteur, l’immobilier devrait continuer à être résilient.
Du côté de la demande tout d’abord, qu’il s’agisse d’immobilier résidentiel ou d’immobilier locatif, la pierre inspire toujours confiance aux investisseurs. Certains peuvent être tentés de reporter leur décision, attendant plus d’informations sur la reprise d’après crise ou espérant une baisse des prix. Le marché resterait alors uniquement porté par les primo-accédants ne souhaitant pas différer leur décision.

Ce mouvement d’attente devrait néanmoins s’effacer à moyen terme à deux conditions :

  • Si le contexte de taux bas persiste. Des niveaux de taux d’intérêt faible soutiennent les acquisitions immobilières et les prix.

Il est à noter que certaines banques viennent de rehausser leur grille de taux. Le taux d’emprunt sur 20 ans proche de 1% fin 2019 passe en mai 2020 à environ 1,30%.

Cette augmentation n’est pas liée à l’évolution des taux de financement mais à une volonté des banques, face à la crise, de reconstituer leurs marges financières déjà fortement érodées.
Cet accroissement récent mais relatif des taux d’intérêt n’est pas à ce jour de nature à réduire les possibilités d’acquisition.

Les banques peuvent également resserrer les conditions d’octroi de prêt, excluant ainsi certains investisseurs. Les recommandations du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) émises en janvier avant la crise vont déjà dans ce sens. Ce mouvement est certainement nécessaire et sain face à l’afflux de prêts auquel les banques font face depuis plusieurs années. Il ne devrait pas se durcir à court terme si les aides de soutien économique aux ménages et leurs conditions de solvabilité se maintiennent et surtout si la reprise économique se fait sentir.

A moyen terme, tout dépend de la durée de la crise mais l’octroi de crédit des banques, y compris aux ménages, reste l’outil d’injection économique des politiques monétaires de soutien et ne peuvent pas, tant que ces politiques sont menées, se réduire drastiquement.

  • Si le niveau des loyers ne fléchit pas. Dans ce cas, le différentiel entre le rendement locatif et le taux d’intérêt offre un effet de levier financier intéressant pour les investisseurs. Le rendement net est alors plus élevé sur l’immobilier que sur l’épargne bancaire et financière à taux fixe.

Le maintien du niveau des loyers est directement lié au pouvoir d’achat des ménages. Comparativement à la crise financière de 2008-2009 provoquée par des dérèglements économiques (dettes dites « subprimes »), la crise actuelle et les mesures gouvernementales permettent à court terme de préserver les ménages grâce au mécanisme exceptionnel et massif de chômage partiel.

Si la crise sanitaire perdure et si l’activité économique reste atone, ces mesures de soutien risquent de ne pas être suffisantes pour maintenir le niveau de vie des particuliers engendrant alors une pression baissière sur les loyers.

En résumé, les professionnels ne s’attendent pas à court ou moyen terme à un cataclysme sur l’immobilier sauf crise persistante. Le moteur peut être lent à repartir mais compte tenu du contexte de taux bas et de la demande, il n’est pas à priori envisageable que les prix chutent fortement à moyen terme.

Des disparités régionales et locales peuvent néanmoins apparaître en fonction des tissus économiques et également, comme nous le verrons plus loin, si les habitudes de vie sont profondément modifiées par la crise.

En savoir plus : Notaires de France  Note de conjoncture immobilière

Les locations meublées saisonnières en première ligne

La location meublée saisonnière paie un lourd tribut immédiat à la crise. Conséquences de la crise sanitaire, les séjours prévus pendant la période de confinement sont annulés. Les récentes annonces gouvernementales informant les ménages de la possibilité de réserver en France pour leurs vacances d’été sont de nature à rassurer. Néanmoins, avec le développement des plateformes de location, beaucoup de clients sont internationaux et reportent ou annulent d’ores et déjà leurs séjours d’été, les frontières restant fermées et les vols annulés.

Ce phénomène nous rappelle que l’immobilier n’est pas sans risque comme on l’entend trop souvent. La contrepartie d’un rendement plus élevé tel que celui de l’investissement locatif meublé de tourisme est nécessairement un risque supérieur.

La reprise de ce marché dépend du comportement des ménages au sortir du confinement et également de la flexibilité du marché, celui-ci devenant dans un premier temps plus local.

Point sur le traitement fiscal d’un loyer impayé/reporté en location nue et meublée

Le traitement d’un loyer non perçu au plan fiscal diffère selon le régime d’exploitation de l’investissement locatif détenu par l’investisseur.

Les revenus générés par la location d’un bien nu (encadrée par la loi de Juillet 1989 et plus récemment la loi ALLUR) sont soumis fiscalement à la catégorie des revenus fonciers. Selon ce régime, les revenus sont imposés pour leur montant réellement perçus au cours de l’exercice fiscal.

Ainsi dans le cadre de la situation actuelle, un propriétaire bailleur se trouvant en situation d’impayés ou de report de la part de son locataire voit le loyer impayé fiscalisé uniquement lors de sa future perception en compte (comptabilité de trésorerie). Des effets de seuil liés à la tranche marginale d’imposition ou d’application de la CEHR (Contribution Exceptionnelle sur les Hauts Revenus) peuvent alors devenir pénalisants sur le plan fiscal alors qu’ils se sont avérés opportuns en année N de la non-perception de ce même revenu locatif.

Source BOFIP (BOI-RFPI-BASE-10-10-20140214) :  article 140 pour le traitement des loyers impayés et article 110 pour les reports et arriérés perçus.

Les revenus tirés par la location meublée d’un bien (location étudiante, meublé à l’année ou saisonnier par exemple) entrent dans une autre catégorie, celles des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Le principe de ce régime est différent et se rapproche du traitement d’une comptabilité commerciale.
Ainsi tout loyer facturé (par défaut un bail commercial engendre une facturation annuelle des loyers) est considéré comme un produit au plan fiscal quand bien même le locataire ou l’exploitant n’a pas versé ce dernier à son bailleur. On parle de comptabilité d’engagement.
Le loyer facturé et non encaissé est alors imposable. Pour tenir compte de l’impayé, il est nécessaire de constater une provision spécifique venant en diminution du résultat imposable dans le cas d’un régime réel d’imposition.

Lorsqu’il ne s’agit pas d’un impayé mais d’une suspension volontaire de loyer, ce qui est le cas dans les actions solidaires du propriétaire vis-à-vis du bailleur encouragées par le gouvernement, le loyer non perçu devient alors un abandon de loyer normalement imposable dans le régime BIC.

Pour ne pas pénaliser fiscalement les propriétaires bailleurs, le gouvernement permet d’assimiler la suspension de loyer à un abandon de créance déductible fiscalement. Cette mesure est prévue dans la dernière loi de finances rectificative pour 2020, compte tenu des circonstances et de manière provisoire (du 15 avril au 31 décembre 2020).

Spécificités du marché du neuf 

Sur le marché du neuf, la situation de l’offre foncière avant le Covid-19 était déjà tendue avec des permis de construire distribués au compte goute dans un contexte d’élections municipales prochaines et d’échéances à venir du régime Pinel (décembre 2021).

Suite au confinement, les promoteurs se sont vite retrouvés bloqués dans leur campagne de commercialisation avec l’obligation de fermer les espaces de vente. Plusieurs d’entre eux mettent en place des systèmes digitaux tels que la signature à distance, des campagnes publicitaires, des conférences Web pour continuer d’assurer la commercialisation de logements. Certains chantiers sont suspendus et reprendrons avec un trimestre minimum de retard.

Face à cette situation, les pouvoirs publics marquent leur soutien au secteur immobilier et plus particulièrement de la construction, compte tenu de leur poids économique. La Caisse des Dépôts et Consignation investit dans le secteur de l’immobilier neuf afin de soutenir les programmes en cours.

Suivant les mêmes fondements que le marché de l’ancien, l’évolution du neuf est également suspendue à la reprise économique, au niveau des loyers et à l’évolution des taux d’intérêt. Il est encore trop tôt pour faire des constats mais le million de transactions de 2019 risque de rester un record pour quelques temps.

scpi de rendement : que disent les gérants ?

En phase avec la crise, les SCPI (Société Civile de Placement collectif en Immobilier), véhicules de placement immobilier de plus en plus prisés ces dernières années par les investisseurs, souffrent aussi des impacts économiques.

En effet, ce support d’investissement intègre principalement des actifs immobiliers dit « d’entreprises » tels que bureaux, commerces ou autres actifs de diversification (maisons de retraite, cliniques, résidences de tourisme …).

Les SCPI sont donc essentiellement rémunérées par des baux commerciaux. Les mesures de suspension ou de report de loyers professionnels accordées par le gouvernement en soutien à la crise du Covid-19 impactent à court terme le rendement annuel des SCPI.

En savoir plus : Legifrance Ordonnance 2020-316 du 25 mars 2020

Selon certaines sociétés de gestion de SCPI, 30% de leurs locataires auraient fait une demande de suspension ou de report de loyers. L’impact à court terme serait de l’ordre de 1% du rendement annuel de la part selon certains gestionnaires.

Les conséquences ne sont pas les mêmes pour toutes les SCPI. La qualité de la gestion, de la diversification et la sélectivité des investissements et des locataires permettent de diluer le risque. Des indicateurs initiaux solides, tels qu’un niveau de TOF (Taux d’Occupation Financière) supérieur à 90%, tout comme la qualité des emplacements et des solvabilités des locataires permettent de se forger une idée sur la qualité de la SCPI détenue.

TOF (Taux d’Occupation Financière) 

Rapport entre les loyers réellement facturés et le montant des loyers qui seraient facturés si tout le patrimoine de la SCPI était loué.

L’immobilier professionnel reste néanmoins le premier secteur immobilier à souffrir de la crise économique. Les SCPI fortement investies dans ce secteur sont concernées en premier lieu.

Ces supports d’investissement étant largement utilisés depuis plusieurs années, le patrimoine des particuliers est nécessairement impacté :

  • En terme de rendement, compte tenu des reports et baisses prévisibles de loyers professionnels.
  • En terme de valeur à moyen et long terme si la crise économique perdure.
  • En terme de liquidité également, si la crise s’installant, il devient difficile de vendre les actifs.

Pour ces raisons de liquidité, les professionnels de la gestion de patrimoine conseillent de détenir une part limitée de son patrimoine en parts de SCPI.

Le soutien de l’immobilier professionnel passe par celui des entreprises locataires et l’ensemble des mesures en leur faveur : mise en place du prêt garanti par l’État (PGE), suspension d’impôts et de cotisations, soutien des acteurs économiques les plus exposés (Tourisme, Restauration…).

L’évolution de ce marché dépend également du comportement des acteurs économiques après crise et de l’évolution possible des lieux de travail.

les stratégies pour résister à la crise

Dans un tel bouleversement de marché, l’investisseur et le détenteur d’immobilier patrimonial doivent adapter leurs stratégies.

choix de l’emplacement et nécessaire diversification : deux règles d’or toujours d’actualité

Ces deux principes sont bien connus : « l’emplacement, l’emplacement et enfin l’emplacement » et « ne pas mettre ses œufs dans le même panier, diversifier ». Mais ils ne sont pas toujours appliqués.

Un emplacement de qualité attire des profils de locataires stables aux garanties solides. Une diversification dans des zones géographiques différentes permet également de limiter l’aléa. En contrepartie, le risque étant réduit, le rendement est plus faible que sur d’autres biens moins bien placés ou que sur une concentration sur un même immeuble.

En période de crise, cette différence de qualité se fait ressentir et les propriétaires ne subissent pas les mêmes risques selon leur type d’investissement.

Jusqu’à maintenant, l’immobilier qualitatif se trouve principalement dans les hyper-centres de métropole ou encore des villes en première ceinture de la capitale. Ces lieux bénéficient d’infrastructures fortes (écoles, transports, hôpitaux) mais aussi d’un bassin d’emploi riche et dynamique favorisant la continuité d’un flux migratoire important.

Souvent ces actifs sont occupés également à titre de résidence principale par leurs propriétaires. L’entretien des parties communes et privatives s’en ressent ainsi que la valeur du bâtiment à terme.

L’emplacement à la revente et la raréfaction des transactions attirent également un public plus résidentiel et familial. Ce qui limite l’impact de baisse des prix en période de crise.

Immobilier à fort rendement, une catégorie qui exige un fort degré de vigilance

Dans un marché immobilier en pleine expansion, les investisseurs oublient le risque et se tournent progressivement vers la recherche accrue de rendement. Certains biens offrent ainsi des rendements locatifs annuels proches de 7 à 10 % mais au prix d’une moindre qualité d’emplacement et de bâti.

Ce fort rendement séduisant de prime abord ne doit pas masquer certains risques :

  • La nécessaire prise en compte des travaux à venir sur les parties privatives mais également sur les parties communes. Ces charges futures sont rarement comptabilisées par l’investisseur. Le prix de cession future étant lié au marché, il n’est pas certain de récupérer la somme investie en travaux lors de la revente.

Le seul taux de rendement locatif brut n’est donc pas suffisant pour la décision d’investissement et la crise actuelle nous le rappelle. Il est nécessaire de prendre en compte l’ensemble des charges à venir et l’évolution du marché conditionnant le prix de revente. Seul le Taux de Rendement Interne (TRI) tient compte de l’ensemble de ces éléments.

Notion de TRI 

Le choix d’investissement dans un bien immobilier est souvent motivé par la seule notion du rendement locatif. Ce dernier rapporte le revenu locatif annuel brut à la valeur d’acquisition du bien avec ou sans frais.

Le taux de rendement locatif apparait souvent sur les annonces de vente afin de donner une idée plus concrète à l’investisseur de la rémunération qu’il tirera de son placement.

Une autre approche, beaucoup plus pertinente, est celle du taux de rendement interne ou TRI.

Cette méthode de calcul permet de tenir compte de l’ensemble des flux de recettes et de charges annuelles en incluant le prix d’acquisition et de cession. Le TRI se définit comme le taux d’actualisation de l’ensemble des flux positifs et négatifs de l’investissement sur la durée.

Il permet une approche plus fine de la rentabilité de l’investissement. On peut ainsi inclure dans le calcul du TRI différents paramètres tel que les impacts des charges courantes, de la fiscalité liée au revenu perçu, de l’éventuelle réduction d’impôt associé au dispositif choisi mais aussi du mode de financement (quotité financée, taux, durée, type de prêt), de l’IFI ou encore des revalorisations de charges et de revenus (hausse du loyer mais aussi diminution).

L’investisseur mesure alors que la seule perception faciale d’un loyer n’est pas la finalité de l’investissement.

  • La dégradation ou l’absence d’activité économique dans ces zones à fort rendement augmentent également le risque locatif associé et obèrent souvent l’espoir de maintien du prix ou de plus-value à long terme.
  • Ces lieux concentrent une forte typologie de logement identiques (souvent de petites surfaces), ce qui augmente mécaniquement l’offre de revente face à une demande faible ou atone en période de crise, accentuant la tendance à la baisse des prix.

Après la précédente crise de 2008, les écarts de prix immobilier selon les zones géographiques se sont fortement creusés en faveur des grandes métropoles et au détriment de certaines villes régionales.

Dans un contexte de crise et par tout temps, s’intéresser à la valeur intrinsèque de son investissement peut s’avérer plus judicieux que de courir les « bonnes affaires » qui n’en sont pas toujours à long terme.

Mais si l’emplacement et la diversification restent les principes de base d’un bon investissement, les critères de qualité de l’emplacement sont susceptibles d’évoluer avec la crise que nous traversons. Les bons emplacements d’avant la crise sont-ils ceux de demain ?

s’adapter à l’émergence de nouveaux besoins

L’émergence du télétravail : de nouveaux critères immobiliers

L’émergence de la crise sanitaire et l’obligation de confinement accélèrent le développement du télétravail et de la digitalisation. La nécessité de se rendre quotidiennement à son bureau est de moins en moins nécessaire. Des villes se situant à 1 heure en LGV ou TER de Paris retrouvent de l’attrait avec une possibilité, pour certains salariés, de ne se rendre à l’entreprise que 1 à 2 journées par semaine ou encore moins souvent.

Déjà en progression, le télétravail expérimenté pendant la crise peut s’installer plus fortement.

Effets sur l’immobilier résidentiel

Ce nouvel état de fait pourrait relancer certains marchés moins urbains.  La demande en maison individuelle avec espace de bureau et jardin peut ainsi s’accroître.

Dans le même élan, le développement numérique de certaines régions (internet haut débit) devrait suivre avec les investissements réalisés par les pouvoirs publics en ce sens.

Mais le bureau reste malgré tout un lieu de vie commun, de socialisation et de création collective.

Les nouveaux investissements immobiliers peuvent donc s’éloigner des hyper-centres mais ils devraient rester proches des grandes métropoles et bassins d’emplois. Avec les moyens rapides de transport, cette proximité ne se mesure plus en distance mais en temps. Certaines villes régionales proches en durée de transport de grandes métropoles peuvent retrouver un certain attrait.

Effets sur l’immobilier professionnel

Cette modification des habitudes et lieux de travail a des répercussions également sur le marché immobilier de bureaux et de sociétés.

Les besoins en surface des entreprises peuvent avoir tendance à diminuer, entraînant des changements en termes de siège social ou d’établissements. Pour certaines activités, le choix de bureaux modulaires, type centre d’affaires, peut être privilégié.

Ces transformations de comportements de travail, si elles deviennent durables, modifient considérablement le marché de l’immobilier professionnel. Les SCPI fortement investies dans ce secteur doivent alors adapter leurs stratégies.

Location meublée : une remise en cause des locations saisonnières ?

Autre conséquence de la crise du Covid-19, une baisse attendue de la demande de location meublée saisonnière et des impacts financiers auprès des particuliers investisseurs qui se sont parfois endettés fortement sur ce type de logement.

La location saisonnière de plus en plus internationale, tant sur le tourisme que sur le voyage d’affaires, souffre à court terme de la limitation des déplacements et de la fermeture des frontières. A moyen terme, la reprise dépend de l’amélioration de la situation sanitaire, les risques dissuadant les souhaits de vacances à l’étranger.

Les statuts de loueur en meublé non professionnel, ou professionnel, associé à ce type d’activité offrent un cadre fiscal toujours pertinent à condition que l’activité se reprenne.

Une stratégie de recherche de locataires en provenance de zones géographiques plus proches est une première solution à l’impact de la crise.

Le report du caractère saisonnier des locations vers des locations meublées plus longue en durée est également motivé par les différentes plateformes de locations qui craignent pour leur modèle économique.

L’offre importante depuis ces dernières années de location meublée saisonnière risque dans tous les cas de souffrir. En cas de forte réduction de la demande, la transformation en location nue est alors l’ultime solution, remettant en cause les rendements et les choix fiscaux.

Cette situation nous rappelle que la diversification patrimoniale reste cruciale. Souvent motivé par des raisons fiscales et la recherche de rendement, le meublé saisonnier doit rester une diversification de l’immobilier patrimonial et venir en complément d’investissements en location nue moins risqués.

L’importance des critères environnementaux

En progression depuis plusieurs années, les critères environnementaux sont accentués par la crise que nous traversons.
Recherche d’économies d’énergie, participation à la protection environnementale par le choix de bâtiment optimisé, ces éléments pèsent de plus en plus dans les choix d’investissement.

Après le marché du neuf, la règlementation énergétique s’impose progressivement sur l’immobilier ancien.

On peut parler d’une véritable « valeur verte » qui compte maintenant dans le prix de revente.

conclusion

La crise du Covid-19 modifie brutalement la donne du marché immobilier. Certains types de biens sont impactés plus que d’autres, tels que les biens professionnels et les locations meublées saisonnières. A moyen terme, les biens situés en hyper-centres et relativement chers peuvent subir une baisse de prix, les grandes surfaces de bureaux également. Les biens situés dans des villes régionales jusqu’ici moins recherchées et proches de grands centres urbains peuvent mieux s’en sortir. La crise rebat donc les cartes de l’immobilier patrimonial et peut corriger certains excès. Elle accentue également des tendances qui étaient déjà à l’œuvre, tel que l’accroissement des mesures environnementales.

Dans un tel bouleversement des marchés, les règles de l’emplacement et de la diversification restent d’or même si ses critères doivent être revus si les habitudes de vie post-covid changent profondément.

La crise nous rappelle également que même en immobilier, comme pour tout marché, plus le rendement est élevé plus le risque l’est aussi. Dans les mois et années à venir, l’investisseur en immobilier patrimonial doit, encore plus qu’auparavant, s’entourer des études et avis des conseils en gestion de patrimoine.

Auteurs
Anne Brouard et Guillaume Thierry

Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine
Guillaume Thierry est diplômé du CESB-CGP