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Loi de Finances 2024 : les impacts sur la location meublée, les donations en quasi-usufruit,  l’IFI et le pacte Dutreil

Loi de Finances 2024 : les impacts sur la location meublée, les donations en quasi-usufruit, l’IFI et le pacte Dutreil

Temps de lecture estimé : 8 min

Rédaction WEB : JUST DEEP CONTENT

La Loi de finances 2024 comporte des conséquences patrimoniales importantes : la modification du régime micro-BIC de la location meublée, les restrictions des effets fiscaux des donations de sommes d’argent démembrée, la déduction de certaines dettes à l’IFI, et des précisions sur les activités éligibles au dispositif Dutreil. Explications.

 

Parmi les mesures habituelles d’actualisation du barème de l’IR et de modifications de certains crédits d’impôt, plusieurs décisions de la Loi de finances 2024 ont des impacts nouveaux et conséquents sur les stratégies patrimoniales.

Elles concernent le régime fiscal de la location meublée et plus particulièrement du régime micro-BIC, le traitement fiscal de la créance de restitution suite à une donation de sommes d’argent avec réserve d’usufruit, la déduction de certaines dettes à l’IFI et des précisions attendues sur l’éligibilité de certaines activités au pacte Dutreil.

SOMMAIRE

  • Location meublée : un régime micro-Bic sérieusement écorné et par erreur
  • La donation démembrée de somme d’argent : fin de la déductibilité de la créance de restitution
  • IFI 2024 : certaines dettes ne sont plus déductibles en société
  • Loi de finances 2024 et Dutreil : des précisions sur les activités éligibles

Location meublée : un régime micro-Bic sérieusement écorné et par erreur

Fortement remis en cause, le régime fiscal de la location meublée est finalement revu sur son seul dispositif micro-BIC. Celui-ci est néanmoins fortement restreint et par erreur de rédaction de la loi.

 

 

Location meublée : un régime fiscal fortement discuté

Le régime fiscal de la location meublée a été largement discuté en préparation de la Loi de finances, l’attractivité fiscale de ce dispositif étant considéré comme favorisant les locations saisonnières de type « AirBnB » au détriment des locations d’habitation longue durée.

Les amendements proposés visaient à réduire les avantages du régime micro-BIC de la location meublée de courte durée et à l’aligner sur celui du régime micro-foncier de la location nue.

Certains amendements allaient plus loin et proposaient de réduire les avantages d’imposition de la plus-value de cession pour les loueurs en LMNP (Location Meublée Non Professionnelle). Sous ce statut en effet, la plus-value lors de la cession du bien relève du régime de la plus-value immobilière des particuliers (prix de revient majoré des frais d’acquisition et travaux non déduits (ou forfait sous conditions) et abattement pour durée de détention exonérant définitivement la plus-value au terme de 22 ans pour l’IR et 30 ans pour les prélèvements sociaux).

Un amendement proposait d’aligner le régime des plus-values de cession en LMNP avec celui de la LMP (Location Meublée Professionnelle), c’est-à-dire avec le régime des plus-values professionnelles. Dans ce régime, le prix de revient n’est pas majoré et est au contraire minoré des amortissements pratiqués, ce qui augmente la plus-value imposable dite à court terme.

Cette proposition de modification du calcul des plus-values de cession en LMNP n’a finalement pas été retenue et seules les modifications du régime micro-BIC ont été votées.

Ces modifications ont-elles-mêmes donné lieu à de nombreuses discussions sur le type de location meublée concernée, les plafonds et les taux d’abattement retenus.

Fin décembre, dans le cadre de la navette parlementaire, le Sénat a revu la proposition adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, en réduisant significativement les avantages du micro-BIC.

Bien que le gouvernement ne soutenait pas l’amendement du Sénat, cette proposition a néanmoins été incluse dans le projet définitif de Loi de Finances pour 2024. Il s’agit selon le gouvernement d’une « erreur » et des mesures devraient être prises d’ici la déclaration d’IR (Impôt sur le Revenu) 2024 pour rectifier ces règles.

Il n’en demeure pas moins qu’en l’état, la loi étant promulguée, c’est ce nouveau régime micro-Bic particulièrement défavorable qui s’applique et ceci sur les revenus déjà réalisés en 2023 puisque la Loi de finances est rétroactive.

 

 

Un nouveau régime micro-BIC pour la location meublée applicable dès 2023

Quelle est la teneur de ce nouveau régime micro-BIC ?

Jusqu’en 2022, les revenus des activités de location meublée, qu’il s’agisse de LMP ou de LMNP, pouvaient relever du régime micro-BIC sous certaines conditions de seuil de chiffre d’affaires. Les locations meublées de courte durée classées bénéficiaient également d’un abattement majoré de 71 %. Les principes peuvent être résumés dans le tableau suivant :

Régime micro-BIC de la location meublée avant la Loi de finances pour 2024 :

  Conditions de Chiffre d’affaires HT Abattement sur le Chiffre d’affaires
Location meublée d’habitation ou de courte durée non classée CA < 77.700 € 50 %
Location meublée de tourisme classées* CA < 188.700 € 71 %

*ainsi que chambre d’hôtes et gîtes

Source : JUST DEEP CONTENT

La Loi de finances 2024, tel que le prévoit son texte à ce jour, réduit le seuil de chiffre d’affaires pour bénéficier du régime micro-BIC à 15.000 €, ceci pour les locations meublées de courte durée, c’est-à-dire les locations saisonnières à la journée, à la semaine ou au mois (avec un maximum de 6 mois), autrement nommée location de tourisme. Concernant ce seuil, le texte ne précise pas quel type de location meublée de courte durée est concernée, classée ou non classée.

Parallèlement, le taux d’abattement est réduit à 30 % s’alignant ainsi sur le régime micro-foncier de la location nue.

Les meublés de tourisme classés peuvent bénéficier d’un taux d’abattement de 51 %, au lieu de 71 % auparavant, sous deux conditions cumulatives :

  • Le bien n’est pas situé dans une zone de déséquilibre d’offres et de demandes de logements. Il doit donc se situer dans les zones non tendues.
  • Le chiffre d’affaires HT de l’année précédente doit être inférieur à 15.000 €

Dans tous les cas, les locations meublées d’habitation de longue durée (bail étudiant, bail mobilité, bail meublé d’habitation) ne sont pas concernées et continuent donc de bénéficier des règles du micro BIC telles que définies antérieurement.

Régime micro BIC de la location meublée de courte durée depuis la Loi de Finances 2024, rétroactive aux revenus de 2023 :

  Conditions de Chiffre d’affaires HT Abattement sur le Chiffre d’affaires
Location meublée de courte durée non classée CA < 15.000 € 30 %
Location meublée de tourisme classées* CA < 15.000 €

51 %

Sous condition de situation en zone non tendue.

*ainsi que chambre d’hôtes et gîtes

Source : JUST DEEP CONTENT

Pour préciser la formule définitive du régime micro-BIC des locations meublées saisonnières et procéder à la « correction » du texte de loi, une instruction fiscale devrait être publiée au BOFIP (Bulletin Officiel des Finances Publiques) avant avril-mai 2024 et le dépôt des déclarations sur les revenus 2023.

Dans l’état actuel du texte de la Loi de finances 2024,  applicable aux revenus perçus en 2023, un grand nombre de contribuables risquent d’avoir dépassé le seuil de CA de 15.000 € en 2023 et de basculer au régime réel.

Ce passage au régime réel est-il nécessairement un inconvénient ?

Le passage au régime réel suppose une comptabilité et des déclarations fiscales plus lourdes, et donc en général le recours à un expert-comptable. Ce régime permet néanmoins d’amortir le bien et les meubles, de déduire davantage de charges et de réduire significativement le bénéfice net imposable, voire de l’annuler ou créer un déficit (les charges d’amortissements ne peuvent pas cependant contribuer au déficit).

En cas de cession sous le statut LMP au régime réel, la plus-value relève du régime des plus-values professionnelles plus lourdes que celles des particuliers dont relève les LMNP à ce jour, mais pouvant bénéficier d’exonérations sous conditions au titre de l’IR (pas d’exonération néanmoins au titre des cotisations sociales).

 

La donation démembrée de somme d’argent : fin de la déductibilité de la créance de restitution

Il est possible de donner une somme d’argent, non pas en pleine propriété mais en nue-propriété. Le donateur conserve alors l’usufruit. S’agissant d’une somme d’argent, cet usufruit est en fait un quasi-usufruit.

Le donateur quasi-usufruitier garde la libre disposition de ces fonds et doit en restituer l’équivalent au terme de l’usufruit, c’est-à-dire à son décès.

Au décès de l’usufruitier, son patrimoine successoral comprend alors une dette dite de restitution correspondant à la valeur en pleine propriété de la somme d’argent initialement donnée en faveur du ou des nus-propriétaires. Ce ou ces derniers détiennent une créance sur la succession de l’usufruitier défunt, dite créance de restitution.

Jusqu’à la Loi de finances pour 2024, la dette de restitution était fiscalement déductible du patrimoine successoral de l’usufruitier décédé.

La Loi de finances met fin à cette déductibilité fiscale par un nouvel article 774 bis du CGI.

L’objet de cet article est de mettre fin à une pratique qui serait principalement menée dans un objectif d’optimisation fiscale :

  • Lors de la donation de la somme d’argent avec réserve d’usufruit, les droits de donation ne portent que sur la valeur en nue-propriété.
  • Au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient plein propriétaire de la somme d’argent sans payer de droits de succession (article 1133 du CGI) et la valeur en pleine propriété de cette somme d’argent est également déduite du patrimoine successoral imposable.

Pour les successions ouvertes à partir du 01/01/2024, la dette de restitution n’est donc plus déductible dans le cas d’une donation en nue-propriété d’une somme d’argent.

Ceci suppose que le nu-propriétaire héritier paie des droits de succession sur la valeur de la créance de restitution. Il lui est néanmoins possible de déduire de ces droits de succession les droits payés sur la nue-propriété lors de la donation initiale, sans que cela puisse donner lieu à restitution.

Il est à noter que :

  • Le quasi-usufruit légal, notamment celui du conjoint survivant usufruitier légal de la succession (article 757 du Code civil), n’est pas concerné par cette non-déductibilité fiscale de la dette de restitution en faveur des nus-propriétaires
  • De même, le quasi-usufruit provenant d’une donation au dernier vivant (article 1094-1 du Code civil).
  • Les quasi-usufruits provenant de la cession d’un bien préalablement démembré entre usufruitier et nu-propriétaire n’entre pas dans ces nouvelles dispositions, à condition que la dette de restitution ne participe pas à la poursuite d’un objectif principalement fiscal.
  • Concernant le quasi-usufruit né d’une clause bénéficiaire démembrée, le principe de l’assurance-vie étant distinct de celui de la donation, cette situation ne devrait pas être concernée. Mais la loi ne précise rien sur ce point et il convient donc de rester prudent sur ce point.

 

 

IFI 2024 : certaines dettes ne sont plus déductibles en société

Les biens immobiliers détenus en société sont imposables à l’IFI (sauf situations spécifiques comme les biens affectés à l’activité professionnelle).

Dans le cas d’une détention en société, ce sont les parts sociales qui sont imposables pour leur valeur représentative des actifs immobiliers en déduisant le passif de la société.

Pour éviter les situations d’abus consistant à loger les biens immobiliers dans des sociétés fortement endettées, la Loi de finances 2024 instaure une nouvelle règle de déductibilité du passif social de la valeur imposable des parts à l’IFI.

Seules les dettes afférentes à l’actif imposable, c’est-à-dire aux biens immobiliers, sont déductibles.

Pour éviter que la valeur imposable ainsi calculée devienne supérieure à la valeur réelle des parts, le texte de loi instaure un dispositif de plafonnement de la valeur imposable à la valeur vénale des parts.

 

Loi de finances 2024 et Dutreil : des précisions sur les activités éligibles

La Loi de finances 2024 vient préciser l’éligibilité du pacte Dutreil à certaines activités, confortant la position de la doctrine administrative et contredisant les récents arrêts de jurisprudence sur ce sujet.

La loi prévoit ainsi que :

  • Les activités de gestion de son propre patrimoine immobilier ou mobilier ne sont pas considérées comme des activités commerciales au regard du pacte Dutreil et ne sont donc pas éligibles. La location meublée ou les locations de biens commerciaux ou industriels équipés ne peuvent donc pas bénéficier du régime Dutreil.
  • En cas d’activité mixte, le pacte Dutreil n’est applicable que si l’activité opérationnelle est prépondérante.
  • Les sociétés Holding animatrices de groupe exercent bien une activité opérationnelle et sont donc clairement éligible au pacte Dutreil.

Ces nouvelles dispositions Dutreil sont applicables aux transmissions intervenues à partir du 17/10/2023.

Auteur 

Anne Brouard

Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisé en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7

IFI : le point sur l’immobilier professionnel

IFI : le point sur l’immobilier professionnel

Temps de lecture estimé : 8 min

Depuis l’instauration de l’IFI, Impôt sur la Fortune Immobilière, succédant à l’ISF au 1er janvier 2018, le champ de l’imposition sur la fortune est réduit aux biens immobiliers détenus directement ou par l’intermédiaire de société.

Qu’en est-il de l’immobilier d’entreprise ? Les règles d’imposition de ces biens immobiliers professionnels diffèrent-elles de celles de l’ISF ? Sont-ils imposables ou s’agit-il d’actif professionnel exonéré et dans quels cas ?

Au 1er janvier 2018, l’ISF a été remplacé par l’IFI, Impôt sur la Fortune Immobilière. Comme son nom l’indique, le champ d’application de cette nouvelle imposition est limité aux biens et titres immobiliers.

Est ainsi imposable, tout contribuable, résidant fiscal en France (à raison de ses biens immobiliers situés en France et hors de France), ou non résident (à raison de la valeur de ses biens et droits immobiliers situés en France), qui seul ou avec son foyer fiscal (conjoint, partenaire de Pacs, concubin notoire, enfants mineurs) détient un patrimoine immobilier net supérieur à 1 300 000 €.

Les actifs immobiliers pris en compte sont ceux détenus directement par les membres du foyer fiscal mais également ceux détenus indirectement au sein de sociétés dont le contribuable ou un membre de son foyer fiscal est associé ou par l’intermédiaire de fonds de placement (SCPI, OPCI).

Les biens immobiliers de jouissance (résidence principale – celle-ci bénéficiant d’un abattement – résidence secondaire) sont imposables mais aussi les biens immobiliers de rapport (immeubles locatifs) détenus directement ou indirectement, leur gestion relevant d’une activité civile.

Qu’en est-il des biens immobiliers professionnels ?

Avant 2018, l’ISF prévoyait un régime spécifique pour l’exonération des actifs professionnels. L’IFI a repris ce principe mais de manière différente.

Dans le cadre de l’ISF, les critères d’exonération concernaient principalement la situation professionnelle du contribuable (entrepreneur individuel, conditions spécifiques pour les actionnaires de sociétés à l’IR et de sociétés à l’IS).

L’IFI prévoit deux régimes distincts concernant les biens immobiliers professionnels :

  • le premier concerne le bien lui-même et ses conditions pour être hors champ de l’IFI et donc non imposable (article 965 du CGI).
  • le deuxième concerne le contribuable au regard de l’exercice de son activité professionnelle (entrepreneur individuel, société à l’IR ou à l’IS) et prévoit la situation où le bien immobilier est détenu hors société (article 975 du CGI).

Ces deux régimes s’appliquent indépendamment.

La non-imposition des biens immobiliers professionnels détenus en sociétés et hors champ de l’ifi : article 965 du cgi

Le nouvel article 965 du CGI (créé par la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017) définit l’assiette imposable de l’IFI.

Dans le cas où les biens immobiliers sont détenus en société dont le redevable est associé, la valeur imposable à l’IFI est celle des parts de la société pour leur fraction représentative des biens immobiliers détenus directement ou indirectement.

Pour calculer cette fraction, on applique à la valeur des parts un coefficient correspondant au rapport entre la valeur vénale des biens immobiliers imposables détenus directement ou indirectement  par la société et la valeur vénale de l’actif total de la société.

Ce même article prévoit néanmoins deux situations dans lesquelles les biens immobiliers n’entrent pas dans le calcul de ce coefficient et donc de la fraction des parts sociales imposables à l’IFI.

Ces cas de non-imposition concernent donc uniquement des biens immobiliers détenus en société.

Biens immobiliers détenus dans une société ayant une activité économique et dont le redevable détient moins de 10 % du capital

Lorsque le bien immobilier est détenu dans une société ayant une activité économique (industrielle, commerciale, artisanale, agricole, libérale) dont le redevable détient directement ou indirectement, seul ou avec son foyer fiscal, moins de 10 % du capital et des droits de vote, sa valeur est exclue du champ imposable de l’IFI pour ce redevable.

Si la société n’a pas d’activité économique opérationnelle, le contribuable est alors imposable sur la valeur immobilière des parts sociales sauf s’il peut démontrer qu’il ne dispose pas des informations nécessaires à l’estimation de la fraction imposable de ses parts et à condition qu’il ne contrôle pas la société et qu’il détienne directement ou indirectement, seul ou avec son foyer fiscal, moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société détenant les biens immobiliers concernés.

Biens immobiliers détenus dans une société et affectés à l’activité économique de cette société ou d’une société du groupe

Cas d’une seule société :

Les biens immobiliers détenus directement par une société dont le redevable est associé ou actionnaire n’entrent pas dans le calcul de la fraction imposable des parts de cette société à l’IFI si ces biens sont affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de cette même société.

Le contribuable doit simplement être associé de la société mais aucune condition de détention minimale de capital n’est exigée. Cette « non-imposition » à l’IFI tient donc principalement à la détention du bien en société et à l’affectation du bien à l’activité économique de cette même société.

Cas des groupes de sociétés :

Dans les groupes de sociétés, les biens immobiliers peuvent être détenus à plusieurs niveaux (holding, filiales). Les biens immobiliers ne sont alors hors champ de l’IFI que dans les situations suivantes :

  • lorsque le bien immobilier est détenu par une filiale détenue directement ou indirectement par la société dans laquelle le redevable détient ses parts et que ce bien est affecté à l’activité économique de cette filiale (CGI art. 965, 2°-a) ;
  • lorsque le bien immobilier est détenu par une société du groupe mais affecté à l’activité économique d’une autre société du même groupe (CGI art. 965,2°-b), les possibilités de non-imposition sont alors limitées aux seuls cas où le bien immobilier est affecté :
    • à l’exploitation de la société du groupe qui exerce l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et dans laquelle le redevable détient sa participation directement ou indirectement ;
    • à l’activité économique de la société même qui détient le bien ;
    • à l’activité économique d’une société du groupe contrôlée par la société qui exerce l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale dont le redevable est directement ou indirectement associé. Ce contrôle se caractérise par la détention, directement ou par personne interposée, de la majorité des droits de vote ou du pouvoir de décision.

Dans l’organigramme ci-dessus, si le bien professionnel détenu par la société B est affecté à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société C, il est exclu du champ de l’IFI pour le calcul de la valeur imposable des parts sociales de A à l’IFI car la société C est contrôlée par la société A.

Si le bien professionnel détenu par la société B est affecté à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société D, il reste imposable car la société D n’est pas contrôlée par la société A.

En savoir plus
Legifrance.gouv.fr – Article 965 du CGI

L’exonération des biens immobiliers pour caractère professionnel : article 975 du cgi

Un autre régime d’exonération des biens à caractère professionnel existant du temps de l’ISF et codifié à l’article 975 du CGI a également été maintenu dans le cadre de l’IFI et actualisé en conséquence. Il concerne :

  • les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI, lorsque ces biens sont affectés à l’activité principale industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale du redevable.

Cette situation concerne principalement l’entrepreneur individuel détenant en direct un bien immobilier et affectant exclusivement ce bien à son activité professionnelle principale. Ce bien est alors exonéré au titre des biens professionnels. Le régime de l’article 965 du CGI n’aurait pas permis d’exclure ce bien de l’IFI puisque les cas de non-imposition qu’il prévoit ne visent que les biens détenus en société.

  • les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI et affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale d’une société de personnes soumise à l’IR (sociétés de l’article 8 et 8 ter du CGI) et dans laquelle le redevable exerce son activité professionnelle principale.

Un bien immobilier affecté exclusivement à l’activité économique d’une SNC dans laquelle le contribuable exerce son activité principale est donc exonéré d’IFI.

  • Les biens immobiliers ou les parts de société telles que définies dans l’article 965 du CGI et affectés à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale d’une société de personnes soumise à l’IS à condition que :
    • le redevable exerce dans cette société une fonction de direction (gérant nommé dans les statuts pour une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions ou associé en nom d’une société de personnes ou président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions) ;
    • cette fonction de direction doit être effectivement exercée et donner lieu à une rémunération dite normale au regard des rémunérations de même type. Cette rémunération doit également représenter plus de la moitié des revenus professionnels du contribuable ;
    • le redevable doit détenir plus de 25 % des droits de vote au capital de la société, seul ou par l’intermédiaire de son conjoint, de leurs ascendants, descendants ou de leurs frères et sœurs, directement ou indirectement dans la limite d’un seul niveau d’interposition. Cette condition de détention de 25 % du capital n’est pas exigée pour les gérants majoritaires de SARL, pour les associés de sociétés de personne ou sociétés civiles soumises à l’IS, pour les gérants de société en commandite par actions ;
    • si la détention de 25 % du capital n’est pas réalisée, l’exonération est également accordée si le redevable exerce bien une fonction de direction et lorsque la valeur des titres de la société qu’il détient représente plus de 50 % de la valeur brute de son patrimoine total.

Enfin, l’article 975 du CGI prévoit le cas important, car fréquent, où le bien immobilier n’est pas détenu par la société professionnelle du contribuable mais affecté à l’activité économique de cette société.

Dans la situation ci-dessus, le bien immobilier est détenu directement par le redevable qui satisfait aux conditions précédentes de l’article 975 du CGI. Ce bien est affecté à l’activité économique de la société. Il bénéficie de l’exonération au titre des biens professionnels à hauteur de la participation du redevable au capital de la société A.

Ce dernier point prévu par l’article 975 du CGI est d’application importante puisqu’il concerne les cas fréquents de détention de l’immobilier professionnel hors société. Son usage est d’autant plus important que l’article 965 du CGI ne prévoit pas cette situation et ne vise, pour les cas de non-imposition, que les biens immobiliers détenus en société.

En savoir plus
Legifrance.gouv.fr – Article 975 du CGI

En conclusion, il existe deux régimes distincts (article 965 du CGI et article 975 du CGI) permettant d’exclure du champ imposable de l’IFI les biens immobiliers à usage professionnel.

Certains contribuables peuvent être non imposables sur leur bien immobilier professionnel au titre des deux régimes.

D’autres contribuables qui n’étaient pas exonérés dans le cadre de l’ISF peuvent le devenir dans celui de l’IFI, principalement par l’application de l’article 965 du CGI.

Ceci peut être le cas d’une société à l’IS ayant une activité économique et détenant un bien immobilier affecté à cette activité. Si l’associé ne détient pas 25 % du capital et n’exerce pas de fonction de direction dans cette société, il ne peut être exonéré d’IFI au titre de l’article 975 du CGI mais, par application de l’article 965 du CGI, ce bien n’entrera pas dans le calcul de la fraction imposable à l’IFI de ses parts de société.

Sources

  • Code Général des Impôts
    • Article 964
    • Article 965
    • Article 975
  • Loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, art. 31
  • BOI-PAT-IFI
    • BOI-PAT-IFI-10
    • BOI-PAT-IFI-20-20 et sous-chapitres
    • BOI-PAT-IFI-30 et sous-chapitres

Auteur
Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.