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COVID 19 : Quels impacts sur l’immobilier patrimonial ?

COVID 19 : Quels impacts sur l’immobilier patrimonial ?

Temps de lecture estimé : 15 min

Conséquences de la crise du Covid-19, la baisse prévisible du pouvoir d’achat des acquéreurs et des locataires tendent au fléchissement des prix de l’immobilier patrimonial. Mais les impacts sont différents selon le type de biens et leur emplacement. Quelles stratégies d’investissement immobilier adopter pour l’après-crise ?

Premier impact de la crise du coronavirus, les transactions immobilières sont à l’arrêt. Le déconfinement du 11 mai permet une reprise des opérations en cours mais celle-ci n’est pas suffisante pour maintenir la tendance haussière du marché immobilier.

L’immobilier est très présent dans le patrimoine des Français (61,6 % des ménages possèdent un bien immobilier en 2018, 57,7 % sont propriétaires de leur résidence principale et 17,7 % possèdent un autre bien tel qu’une résidence locative ou secondaire, selon les données Insee).

Malgré une fiscalité de plus en plus lourde, l’appétence des français pour l’immobilier ne se dément pas.

2019 fut une année de records. Ainsi le fameux cap du million de transactions de biens vendus dans le marché résidentiel a été atteint (1 059 000 transactions sur 12 mois à fin octobre, selon les actes de vente des notaires). Le marché immobilier a été fortement porté par des taux d’emprunt très bas ainsi que par une demande des investisseurs particuliers et institutionnels n’ayant que peu d’alternative quant à la recherche d’un rendement minimum.

Avec les mesures de confinement liées au COVID-19 et l’arrêt de l’activité économique mondiale, ces moteurs se grippent brutalement. Perçu traditionnellement comme un actif refuge, l’immobilier patrimonial est fortement impacté par la crise économique et sanitaire que nous traversons.

la crise actuelle et ses impacts sur l’immobilier patrimonial

En réponse au risque pandémique du Coronavirus, le confinement de la population française a été décidé le 17 mars dernier avec des conséquences économiques fortes, immédiates (arrêt total de l’activité économique non essentielle à la survie de la population) et futures dont nous ignorons encore la portée. Des mesures significatives de soutien économique sont également prises dans le même temps pour les particuliers et pour les entreprises.

Grâce à ces mesures, les ménages endettés pour leur résidence principale ne sont pas immédiatement impactés (chômage partiel, possibilité de négocier une modularité ou un report avec son banquier selon le contrat de crédit). Mais qu’en est-il de l’immobilier locatif notamment professionnel (bureaux, commerces) détenus parfois en direct par les particuliers ou via des SCPI ?

immobilier résidentiel : quels impacts sur le marché de l’ancien et le marché du neuf ?

Immobilier neuf ou ancien, la mise à l’arrêt brutal de l’activité économique a suspendu à court terme toute transaction.

Arrêt du marché immobilier dans son ensemble, quelle reprise à moyen et long terme ?

Le déconfinement et la reprise graduelle de l’activité vont permettre de finaliser les opérations en cours pour lesquels les financements sont accordés.

D’un point de vue conjoncturel, les notaires estiment que le marché immobilier subit des impacts immédiats (report des déménagements, des actes) puis mécaniquement un rebond « technique » au sortir du confinement par la réalisation des actes non enregistrés avant l’isolement de la population.

A moyen terme néanmoins, les délais des nouvelles transactions (recherche de bien, mise en vente) risquent de se rallonger. Un nouveau « trou d’air » devrait alors se faire ressentir.

La situation de long terme pose davantage d’incertitudes. Les notaires pensent que le marché pourrait redémarrer au 4ème trimestre 2020 voire au 1er trimestre 2021 mais il n’est pas attendu de niveaux de transactions records comme en 2019.

Selon les professionnels du secteur, l’immobilier devrait continuer à être résilient.
Du côté de la demande tout d’abord, qu’il s’agisse d’immobilier résidentiel ou d’immobilier locatif, la pierre inspire toujours confiance aux investisseurs. Certains peuvent être tentés de reporter leur décision, attendant plus d’informations sur la reprise d’après crise ou espérant une baisse des prix. Le marché resterait alors uniquement porté par les primo-accédants ne souhaitant pas différer leur décision.

Ce mouvement d’attente devrait néanmoins s’effacer à moyen terme à deux conditions :

  • Si le contexte de taux bas persiste. Des niveaux de taux d’intérêt faible soutiennent les acquisitions immobilières et les prix.

Il est à noter que certaines banques viennent de rehausser leur grille de taux. Le taux d’emprunt sur 20 ans proche de 1% fin 2019 passe en mai 2020 à environ 1,30%.

Cette augmentation n’est pas liée à l’évolution des taux de financement mais à une volonté des banques, face à la crise, de reconstituer leurs marges financières déjà fortement érodées.
Cet accroissement récent mais relatif des taux d’intérêt n’est pas à ce jour de nature à réduire les possibilités d’acquisition.

Les banques peuvent également resserrer les conditions d’octroi de prêt, excluant ainsi certains investisseurs. Les recommandations du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) émises en janvier avant la crise vont déjà dans ce sens. Ce mouvement est certainement nécessaire et sain face à l’afflux de prêts auquel les banques font face depuis plusieurs années. Il ne devrait pas se durcir à court terme si les aides de soutien économique aux ménages et leurs conditions de solvabilité se maintiennent et surtout si la reprise économique se fait sentir.

A moyen terme, tout dépend de la durée de la crise mais l’octroi de crédit des banques, y compris aux ménages, reste l’outil d’injection économique des politiques monétaires de soutien et ne peuvent pas, tant que ces politiques sont menées, se réduire drastiquement.

  • Si le niveau des loyers ne fléchit pas. Dans ce cas, le différentiel entre le rendement locatif et le taux d’intérêt offre un effet de levier financier intéressant pour les investisseurs. Le rendement net est alors plus élevé sur l’immobilier que sur l’épargne bancaire et financière à taux fixe.

Le maintien du niveau des loyers est directement lié au pouvoir d’achat des ménages. Comparativement à la crise financière de 2008-2009 provoquée par des dérèglements économiques (dettes dites « subprimes »), la crise actuelle et les mesures gouvernementales permettent à court terme de préserver les ménages grâce au mécanisme exceptionnel et massif de chômage partiel.

Si la crise sanitaire perdure et si l’activité économique reste atone, ces mesures de soutien risquent de ne pas être suffisantes pour maintenir le niveau de vie des particuliers engendrant alors une pression baissière sur les loyers.

En résumé, les professionnels ne s’attendent pas à court ou moyen terme à un cataclysme sur l’immobilier sauf crise persistante. Le moteur peut être lent à repartir mais compte tenu du contexte de taux bas et de la demande, il n’est pas à priori envisageable que les prix chutent fortement à moyen terme.

Des disparités régionales et locales peuvent néanmoins apparaître en fonction des tissus économiques et également, comme nous le verrons plus loin, si les habitudes de vie sont profondément modifiées par la crise.

En savoir plus : Notaires de France  Note de conjoncture immobilière

Les locations meublées saisonnières en première ligne

La location meublée saisonnière paie un lourd tribut immédiat à la crise. Conséquences de la crise sanitaire, les séjours prévus pendant la période de confinement sont annulés. Les récentes annonces gouvernementales informant les ménages de la possibilité de réserver en France pour leurs vacances d’été sont de nature à rassurer. Néanmoins, avec le développement des plateformes de location, beaucoup de clients sont internationaux et reportent ou annulent d’ores et déjà leurs séjours d’été, les frontières restant fermées et les vols annulés.

Ce phénomène nous rappelle que l’immobilier n’est pas sans risque comme on l’entend trop souvent. La contrepartie d’un rendement plus élevé tel que celui de l’investissement locatif meublé de tourisme est nécessairement un risque supérieur.

La reprise de ce marché dépend du comportement des ménages au sortir du confinement et également de la flexibilité du marché, celui-ci devenant dans un premier temps plus local.

Point sur le traitement fiscal d’un loyer impayé/reporté en location nue et meublée

Le traitement d’un loyer non perçu au plan fiscal diffère selon le régime d’exploitation de l’investissement locatif détenu par l’investisseur.

Les revenus générés par la location d’un bien nu (encadrée par la loi de Juillet 1989 et plus récemment la loi ALLUR) sont soumis fiscalement à la catégorie des revenus fonciers. Selon ce régime, les revenus sont imposés pour leur montant réellement perçus au cours de l’exercice fiscal.

Ainsi dans le cadre de la situation actuelle, un propriétaire bailleur se trouvant en situation d’impayés ou de report de la part de son locataire voit le loyer impayé fiscalisé uniquement lors de sa future perception en compte (comptabilité de trésorerie). Des effets de seuil liés à la tranche marginale d’imposition ou d’application de la CEHR (Contribution Exceptionnelle sur les Hauts Revenus) peuvent alors devenir pénalisants sur le plan fiscal alors qu’ils se sont avérés opportuns en année N de la non-perception de ce même revenu locatif.

Source BOFIP (BOI-RFPI-BASE-10-10-20140214) :  article 140 pour le traitement des loyers impayés et article 110 pour les reports et arriérés perçus.

Les revenus tirés par la location meublée d’un bien (location étudiante, meublé à l’année ou saisonnier par exemple) entrent dans une autre catégorie, celles des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Le principe de ce régime est différent et se rapproche du traitement d’une comptabilité commerciale.
Ainsi tout loyer facturé (par défaut un bail commercial engendre une facturation annuelle des loyers) est considéré comme un produit au plan fiscal quand bien même le locataire ou l’exploitant n’a pas versé ce dernier à son bailleur. On parle de comptabilité d’engagement.
Le loyer facturé et non encaissé est alors imposable. Pour tenir compte de l’impayé, il est nécessaire de constater une provision spécifique venant en diminution du résultat imposable dans le cas d’un régime réel d’imposition.

Lorsqu’il ne s’agit pas d’un impayé mais d’une suspension volontaire de loyer, ce qui est le cas dans les actions solidaires du propriétaire vis-à-vis du bailleur encouragées par le gouvernement, le loyer non perçu devient alors un abandon de loyer normalement imposable dans le régime BIC.

Pour ne pas pénaliser fiscalement les propriétaires bailleurs, le gouvernement permet d’assimiler la suspension de loyer à un abandon de créance déductible fiscalement. Cette mesure est prévue dans la dernière loi de finances rectificative pour 2020, compte tenu des circonstances et de manière provisoire (du 15 avril au 31 décembre 2020).

Spécificités du marché du neuf 

Sur le marché du neuf, la situation de l’offre foncière avant le Covid-19 était déjà tendue avec des permis de construire distribués au compte goute dans un contexte d’élections municipales prochaines et d’échéances à venir du régime Pinel (décembre 2021).

Suite au confinement, les promoteurs se sont vite retrouvés bloqués dans leur campagne de commercialisation avec l’obligation de fermer les espaces de vente. Plusieurs d’entre eux mettent en place des systèmes digitaux tels que la signature à distance, des campagnes publicitaires, des conférences Web pour continuer d’assurer la commercialisation de logements. Certains chantiers sont suspendus et reprendrons avec un trimestre minimum de retard.

Face à cette situation, les pouvoirs publics marquent leur soutien au secteur immobilier et plus particulièrement de la construction, compte tenu de leur poids économique. La Caisse des Dépôts et Consignation investit dans le secteur de l’immobilier neuf afin de soutenir les programmes en cours.

Suivant les mêmes fondements que le marché de l’ancien, l’évolution du neuf est également suspendue à la reprise économique, au niveau des loyers et à l’évolution des taux d’intérêt. Il est encore trop tôt pour faire des constats mais le million de transactions de 2019 risque de rester un record pour quelques temps.

scpi de rendement : que disent les gérants ?

En phase avec la crise, les SCPI (Société Civile de Placement collectif en Immobilier), véhicules de placement immobilier de plus en plus prisés ces dernières années par les investisseurs, souffrent aussi des impacts économiques.

En effet, ce support d’investissement intègre principalement des actifs immobiliers dit « d’entreprises » tels que bureaux, commerces ou autres actifs de diversification (maisons de retraite, cliniques, résidences de tourisme …).

Les SCPI sont donc essentiellement rémunérées par des baux commerciaux. Les mesures de suspension ou de report de loyers professionnels accordées par le gouvernement en soutien à la crise du Covid-19 impactent à court terme le rendement annuel des SCPI.

En savoir plus : Legifrance Ordonnance 2020-316 du 25 mars 2020

Selon certaines sociétés de gestion de SCPI, 30% de leurs locataires auraient fait une demande de suspension ou de report de loyers. L’impact à court terme serait de l’ordre de 1% du rendement annuel de la part selon certains gestionnaires.

Les conséquences ne sont pas les mêmes pour toutes les SCPI. La qualité de la gestion, de la diversification et la sélectivité des investissements et des locataires permettent de diluer le risque. Des indicateurs initiaux solides, tels qu’un niveau de TOF (Taux d’Occupation Financière) supérieur à 90%, tout comme la qualité des emplacements et des solvabilités des locataires permettent de se forger une idée sur la qualité de la SCPI détenue.

TOF (Taux d’Occupation Financière) 

Rapport entre les loyers réellement facturés et le montant des loyers qui seraient facturés si tout le patrimoine de la SCPI était loué.

L’immobilier professionnel reste néanmoins le premier secteur immobilier à souffrir de la crise économique. Les SCPI fortement investies dans ce secteur sont concernées en premier lieu.

Ces supports d’investissement étant largement utilisés depuis plusieurs années, le patrimoine des particuliers est nécessairement impacté :

  • En terme de rendement, compte tenu des reports et baisses prévisibles de loyers professionnels.
  • En terme de valeur à moyen et long terme si la crise économique perdure.
  • En terme de liquidité également, si la crise s’installant, il devient difficile de vendre les actifs.

Pour ces raisons de liquidité, les professionnels de la gestion de patrimoine conseillent de détenir une part limitée de son patrimoine en parts de SCPI.

Le soutien de l’immobilier professionnel passe par celui des entreprises locataires et l’ensemble des mesures en leur faveur : mise en place du prêt garanti par l’État (PGE), suspension d’impôts et de cotisations, soutien des acteurs économiques les plus exposés (Tourisme, Restauration…).

L’évolution de ce marché dépend également du comportement des acteurs économiques après crise et de l’évolution possible des lieux de travail.

les stratégies pour résister à la crise

Dans un tel bouleversement de marché, l’investisseur et le détenteur d’immobilier patrimonial doivent adapter leurs stratégies.

choix de l’emplacement et nécessaire diversification : deux règles d’or toujours d’actualité

Ces deux principes sont bien connus : « l’emplacement, l’emplacement et enfin l’emplacement » et « ne pas mettre ses œufs dans le même panier, diversifier ». Mais ils ne sont pas toujours appliqués.

Un emplacement de qualité attire des profils de locataires stables aux garanties solides. Une diversification dans des zones géographiques différentes permet également de limiter l’aléa. En contrepartie, le risque étant réduit, le rendement est plus faible que sur d’autres biens moins bien placés ou que sur une concentration sur un même immeuble.

En période de crise, cette différence de qualité se fait ressentir et les propriétaires ne subissent pas les mêmes risques selon leur type d’investissement.

Jusqu’à maintenant, l’immobilier qualitatif se trouve principalement dans les hyper-centres de métropole ou encore des villes en première ceinture de la capitale. Ces lieux bénéficient d’infrastructures fortes (écoles, transports, hôpitaux) mais aussi d’un bassin d’emploi riche et dynamique favorisant la continuité d’un flux migratoire important.

Souvent ces actifs sont occupés également à titre de résidence principale par leurs propriétaires. L’entretien des parties communes et privatives s’en ressent ainsi que la valeur du bâtiment à terme.

L’emplacement à la revente et la raréfaction des transactions attirent également un public plus résidentiel et familial. Ce qui limite l’impact de baisse des prix en période de crise.

Immobilier à fort rendement, une catégorie qui exige un fort degré de vigilance

Dans un marché immobilier en pleine expansion, les investisseurs oublient le risque et se tournent progressivement vers la recherche accrue de rendement. Certains biens offrent ainsi des rendements locatifs annuels proches de 7 à 10 % mais au prix d’une moindre qualité d’emplacement et de bâti.

Ce fort rendement séduisant de prime abord ne doit pas masquer certains risques :

  • La nécessaire prise en compte des travaux à venir sur les parties privatives mais également sur les parties communes. Ces charges futures sont rarement comptabilisées par l’investisseur. Le prix de cession future étant lié au marché, il n’est pas certain de récupérer la somme investie en travaux lors de la revente.

Le seul taux de rendement locatif brut n’est donc pas suffisant pour la décision d’investissement et la crise actuelle nous le rappelle. Il est nécessaire de prendre en compte l’ensemble des charges à venir et l’évolution du marché conditionnant le prix de revente. Seul le Taux de Rendement Interne (TRI) tient compte de l’ensemble de ces éléments.

Notion de TRI 

Le choix d’investissement dans un bien immobilier est souvent motivé par la seule notion du rendement locatif. Ce dernier rapporte le revenu locatif annuel brut à la valeur d’acquisition du bien avec ou sans frais.

Le taux de rendement locatif apparait souvent sur les annonces de vente afin de donner une idée plus concrète à l’investisseur de la rémunération qu’il tirera de son placement.

Une autre approche, beaucoup plus pertinente, est celle du taux de rendement interne ou TRI.

Cette méthode de calcul permet de tenir compte de l’ensemble des flux de recettes et de charges annuelles en incluant le prix d’acquisition et de cession. Le TRI se définit comme le taux d’actualisation de l’ensemble des flux positifs et négatifs de l’investissement sur la durée.

Il permet une approche plus fine de la rentabilité de l’investissement. On peut ainsi inclure dans le calcul du TRI différents paramètres tel que les impacts des charges courantes, de la fiscalité liée au revenu perçu, de l’éventuelle réduction d’impôt associé au dispositif choisi mais aussi du mode de financement (quotité financée, taux, durée, type de prêt), de l’IFI ou encore des revalorisations de charges et de revenus (hausse du loyer mais aussi diminution).

L’investisseur mesure alors que la seule perception faciale d’un loyer n’est pas la finalité de l’investissement.

  • La dégradation ou l’absence d’activité économique dans ces zones à fort rendement augmentent également le risque locatif associé et obèrent souvent l’espoir de maintien du prix ou de plus-value à long terme.
  • Ces lieux concentrent une forte typologie de logement identiques (souvent de petites surfaces), ce qui augmente mécaniquement l’offre de revente face à une demande faible ou atone en période de crise, accentuant la tendance à la baisse des prix.

Après la précédente crise de 2008, les écarts de prix immobilier selon les zones géographiques se sont fortement creusés en faveur des grandes métropoles et au détriment de certaines villes régionales.

Dans un contexte de crise et par tout temps, s’intéresser à la valeur intrinsèque de son investissement peut s’avérer plus judicieux que de courir les « bonnes affaires » qui n’en sont pas toujours à long terme.

Mais si l’emplacement et la diversification restent les principes de base d’un bon investissement, les critères de qualité de l’emplacement sont susceptibles d’évoluer avec la crise que nous traversons. Les bons emplacements d’avant la crise sont-ils ceux de demain ?

s’adapter à l’émergence de nouveaux besoins

L’émergence du télétravail : de nouveaux critères immobiliers

L’émergence de la crise sanitaire et l’obligation de confinement accélèrent le développement du télétravail et de la digitalisation. La nécessité de se rendre quotidiennement à son bureau est de moins en moins nécessaire. Des villes se situant à 1 heure en LGV ou TER de Paris retrouvent de l’attrait avec une possibilité, pour certains salariés, de ne se rendre à l’entreprise que 1 à 2 journées par semaine ou encore moins souvent.

Déjà en progression, le télétravail expérimenté pendant la crise peut s’installer plus fortement.

Effets sur l’immobilier résidentiel

Ce nouvel état de fait pourrait relancer certains marchés moins urbains.  La demande en maison individuelle avec espace de bureau et jardin peut ainsi s’accroître.

Dans le même élan, le développement numérique de certaines régions (internet haut débit) devrait suivre avec les investissements réalisés par les pouvoirs publics en ce sens.

Mais le bureau reste malgré tout un lieu de vie commun, de socialisation et de création collective.

Les nouveaux investissements immobiliers peuvent donc s’éloigner des hyper-centres mais ils devraient rester proches des grandes métropoles et bassins d’emplois. Avec les moyens rapides de transport, cette proximité ne se mesure plus en distance mais en temps. Certaines villes régionales proches en durée de transport de grandes métropoles peuvent retrouver un certain attrait.

Effets sur l’immobilier professionnel

Cette modification des habitudes et lieux de travail a des répercussions également sur le marché immobilier de bureaux et de sociétés.

Les besoins en surface des entreprises peuvent avoir tendance à diminuer, entraînant des changements en termes de siège social ou d’établissements. Pour certaines activités, le choix de bureaux modulaires, type centre d’affaires, peut être privilégié.

Ces transformations de comportements de travail, si elles deviennent durables, modifient considérablement le marché de l’immobilier professionnel. Les SCPI fortement investies dans ce secteur doivent alors adapter leurs stratégies.

Location meublée : une remise en cause des locations saisonnières ?

Autre conséquence de la crise du Covid-19, une baisse attendue de la demande de location meublée saisonnière et des impacts financiers auprès des particuliers investisseurs qui se sont parfois endettés fortement sur ce type de logement.

La location saisonnière de plus en plus internationale, tant sur le tourisme que sur le voyage d’affaires, souffre à court terme de la limitation des déplacements et de la fermeture des frontières. A moyen terme, la reprise dépend de l’amélioration de la situation sanitaire, les risques dissuadant les souhaits de vacances à l’étranger.

Les statuts de loueur en meublé non professionnel, ou professionnel, associé à ce type d’activité offrent un cadre fiscal toujours pertinent à condition que l’activité se reprenne.

Une stratégie de recherche de locataires en provenance de zones géographiques plus proches est une première solution à l’impact de la crise.

Le report du caractère saisonnier des locations vers des locations meublées plus longue en durée est également motivé par les différentes plateformes de locations qui craignent pour leur modèle économique.

L’offre importante depuis ces dernières années de location meublée saisonnière risque dans tous les cas de souffrir. En cas de forte réduction de la demande, la transformation en location nue est alors l’ultime solution, remettant en cause les rendements et les choix fiscaux.

Cette situation nous rappelle que la diversification patrimoniale reste cruciale. Souvent motivé par des raisons fiscales et la recherche de rendement, le meublé saisonnier doit rester une diversification de l’immobilier patrimonial et venir en complément d’investissements en location nue moins risqués.

L’importance des critères environnementaux

En progression depuis plusieurs années, les critères environnementaux sont accentués par la crise que nous traversons.
Recherche d’économies d’énergie, participation à la protection environnementale par le choix de bâtiment optimisé, ces éléments pèsent de plus en plus dans les choix d’investissement.

Après le marché du neuf, la règlementation énergétique s’impose progressivement sur l’immobilier ancien.

On peut parler d’une véritable « valeur verte » qui compte maintenant dans le prix de revente.

conclusion

La crise du Covid-19 modifie brutalement la donne du marché immobilier. Certains types de biens sont impactés plus que d’autres, tels que les biens professionnels et les locations meublées saisonnières. A moyen terme, les biens situés en hyper-centres et relativement chers peuvent subir une baisse de prix, les grandes surfaces de bureaux également. Les biens situés dans des villes régionales jusqu’ici moins recherchées et proches de grands centres urbains peuvent mieux s’en sortir. La crise rebat donc les cartes de l’immobilier patrimonial et peut corriger certains excès. Elle accentue également des tendances qui étaient déjà à l’œuvre, tel que l’accroissement des mesures environnementales.

Dans un tel bouleversement des marchés, les règles de l’emplacement et de la diversification restent d’or même si ses critères doivent être revus si les habitudes de vie post-covid changent profondément.

La crise nous rappelle également que même en immobilier, comme pour tout marché, plus le rendement est élevé plus le risque l’est aussi. Dans les mois et années à venir, l’investisseur en immobilier patrimonial doit, encore plus qu’auparavant, s’entourer des études et avis des conseils en gestion de patrimoine.

Auteurs
Anne Brouard et Guillaume Thierry

Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine
Guillaume Thierry est diplômé du CESB-CGP 

Gestion des valeurs mobilières de placement (VMP) : détention directe ou choix d’une structure impôt sur les sociétés (IS)

Gestion des valeurs mobilières de placement (VMP) : détention directe ou choix d’une structure impôt sur les sociétés (IS)

Temps de lecture estimé : 9 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Vaut-il mieux gérer un portefeuille de valeurs mobilières à  l’IR (Impôt sur le Revenu) ou dans une structure à l’IS (Impôt sur les Sociétés) ? Le point sur les solutions les plus appropriées suivant les objectifs patrimoniaux recherchés.

Optimiser fiscalement le patrimoine financier consiste à réaliser les arbitrages de gestion, le financement du train de vie ainsi que la transmission in fine du patrimoine dans le cadre fiscal le moins onéreux, tout en respectant les objectifs patrimoniaux et familiaux.

S’agissant d’un portefeuille de valeurs mobilières, la fiscalité se trouve le plus souvent être celle de l’impôt sur le revenu (IR) dans la rubrique des plus-values mobilières et/ou des revenus de capitaux mobiliers, ainsi que celle de l’impôt sur la fortune (IFI) du point de vue du plafonnement de cet impôt.

Néanmoins, un autre cadre fiscal peut également être envisagé : celui de l’IS (Impôt sur les Sociétés). Quelle solution est-alors la plus opportune ? Explications.

 

SOMMAIRE

  • Les hypothèses à considérer
  • In or out : quelles opportunités pour les liquidités surabondantes détenues par une structure holding ?
  • Les différentes observations
  • Conclusion

 

Les hypothèses à considérer

On retiendra, à titre de postulat général, que si l’option à retenir se définit a priori très simplement pour des capitaux liquides détenus en direct, il n’en est pas de même si la trésorerie à investir se trouve d’ores et déjà à l’actif du bilan d’une structure soumise à l’IS.

 

Hypothèse 1 : investissement de liquidités détenues directement par un particulier.

Cette configuration amène le plus souvent à exclure le recours à une structure IS.

En effet, la gestion des actifs financiers subit annuellement l’IS au taux normal soit 25 % à ce jour (15 % sur la fraction du bénéfice inférieure à 38 120 € pour les PME dont le chiffres d’affaires est inférieur à 7,63 M €).

Le financement du train de vie par distribution de dividendes suppose, par ailleurs, une taxation de l’intégralité des flux perçus, à l’impôt sur le revenu soit au prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 12,8% soit, sur option (annuelle et globale), au barème progressif de l’IR sur une assiette réduite de 40%. L’assujettissement aux PS (17,2 %) est à prévoir dans l’une et l’autre des deux situations. La CEHR (3 ou 4 %) peut aussi trouver à s’appliquer.

Sur un autre registre, il peut enfin entraîner, dans certains cas, le « déplafonnement » de l’IFI. Cette situation serait synonyme d’une fiscalité globale pouvant atteindre 75 % des revenus perçus.

Ces contraintes militent pour que soient retenues, dans cette configuration, l’acquisition et la gestion des valeurs mobilières de placement au sein d’enveloppes juridiques spécifiques tels ceux du PEA et/ou des contrats d’assurance-vie ou de capitalisation.

La tendance sera donc de délaisser le compte titres dit « ordinaire » victime de son incapacité à véritablement capitaliser ses revenus et ses produits constatés lors des arbitrages dans le cadre de la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières de placement.

 

Hypothèse 2 : investissement des liquidités figurant à l’actif du bilan d’une société soumise à l’IS

Cette configuration est notamment rencontrée lorsqu’une holding cède une ou plusieurs de ses filiales. On parle alors d’une cession « par le bas ».

Le traitement fiscal propre à une telle opération dépend du fait de savoir si les droits sociaux représentatifs du capital de la filiale répondent ou non à la qualification comptable et fiscale de titres de participation et s’ils sont détenus depuis au moins deux ans.

 

Les titres de participation sont, au sein du bilan d’une structure, des immobilisations financières. Elles représentent des actifs à vocation de détention durable par opposition aux valeurs mobilières de placement acquises dans la perspective d’une conservation plutôt courte. Cette qualification suppose par ailleurs une comptabilisation au sein d’un compte spécifique.

 

Si ces deux conditions sont réunies, les gains générés sont en principe en majeure partie exonérés d’IS.

En effet, en situation de cession de titres de participation, seule une quote-part de frais et charges doit être réintégrée dans le résultat imposable du holding cédant.

Elle est fixée à 12 % du montant brut de la plus-value réalisée, ce qui limite à 3,72% maximum le frottement fiscal pour une cession opérée en 2019.

C’est donc d’un capital in fine peu impacté par la fiscalité dont il va falloir flécher la destination. A cet égard, deux options existent :

  • maintenir les liquidités au sein de la structure ou inversement
  • externaliser les capitaux

 

In or out : quelles opportunités pour les liquidités surabondantes détenues par une structure holding ?

L’exercice à mener sur cette base s’avère ambitieux et en réalité des plus complexe. Il suppose, en effet, de trancher entre les deux options suivantes :

  • conservation des liquidités au sein de la holding laquelle devient purement patrimoniale et gère ses actifs sous IS.
  • externalisation de tout ou partie de sa trésorerie au profit de ses actionnaires afin qu’ils l’investissent à titre direct et personnel.

Répondre à cette interrogation stratégique « in or out » n’est pas simple et trois critères principaux sont à prendre en considération :

  • La taxation cumulée à prendre en compte : de la perception du prix de cession, en passant par son éventuelle extériorisation au bénéfice du détenteur du capital, à la transmission par décès [IS + DMTG (Droits de mutation à titre gratuit ou droits de succession) versus IR, PS, CEHR + 990 I du CGI (fiscalité spécifique du dénouement par décès de l’assurance-vie)].
  • L’espérance de vie de l’associé.
  • La rentabilité espérée des supports retenus pour l’investissement des liquidités en dedans et en dehors de la holding.

Replaçons successivement ces critères dans chacune des situations. Arrêtons-nous tout d’abord sur l’option suivante : conservation du prix de cession net de fiscalité au sein de la holding.

Si l’on retient l’hypothèse de l’investissement des liquidités en VMP, la performance de celles-ci, si elle est positive, sera au titre de chaque exercice, amputée du taux normal de l’IS, pénalisant de fait significativement l’effet de capitalisation.

Ce frottement fiscal n’est malheureusement pas le seul à prendre en compte dans le scénario envisagé. En effet, en cas de décès de l’actionnaire du holding, la valeur de cette dernière sera comprise dans l’actif successoral et donc soumise aux droits de succession à un taux pouvant marginalement atteindre 45%.

Le cumul de ces deux fiscalités acquittées, l’une au fil du temps (IS) et l’autre à terme (droits de succession), représente une imposition globale des plus significatives mais permet aux héritiers ou légataires, s’ils devaient décider la dissolution de la holding immédiatement après la cession, de percevoir un boni de liquidation ne supposant aucun frottement supplémentaire en termes d’IR, de PS, ou de CEHR.

La seconde approche possible consiste à organiser la récupération du prix de cession net d’IS capté par le holding entre les mains du détenteur du capital de la structure.

Cette modalité pourra emprunter différentes formes : une distribution de dividendes, une réduction de capital ou encore une dissolution pure et simple.

La fiscalité propre à ces différents modes opératoires consistera dans de nombreux cas en un frottement global de 30 % (celui du PFU majoré des PS), éventuellement complété de 3 ou 4 % de CEHR. Il pourrait porter, pour peu que les capitaux propres investis initialement aient été modestes, sur des montants semblables dans les trois hypothèses visées.

Dans le cas d’un placement en VMP opéré par l’investisseur via la souscription d’un contrat d’assurance-vie, la performance de celles-ci sera, dans l’hypothèse d’un dénouement du contrat par décès, fiscalisée au taux de 17,2% au seul titre des PS (à l’exception de ceux prélevés au fil de l’eau sur la partie placée en fonds en euros).

Le capital net transmis au(x) bénéficiaire(s) désigné(s) par le souscripteur s’effectuera moyennant une imposition maximum de 31,25% s’agissant des capitaux versés avant les 70 ans du souscripteur.

Le choix de la pondération à retenir entre ces deux schémas d’investissement relève de paramètres multiples et nécessairement variables d’une situation à une autre. Il peut être facilité par le recours à des modélisations. Ces dernières reposent sur différents postulats lesquels devront parfois être simplifiés.

On se limitera ainsi, dans une première approche, à l’idée d’un investisseur unique transmettant son patrimoine, quelle que soit la forme empruntée par la transmission (succession ou bénéfice d’un contrat d’assurance-vie) à destinataire unique.

Ci-après figure un exemple d’une telle simulation reposant sur les scenarii suivants :

  • Trésorerie disponible dans la société IS : 1 000 000€.
  • Trésorerie externalisée (via une distribution ou une réduction de capital) : 660 000€ (PFU de 12,8% + PS de 17,2% + CEHR au taux de 4 %).
  • Hypothèses de rendement des supports d’investissement :
    • H1 : 3 %,
    • H2 : 6 %,
    • H3 : 9 %.
  • Fiscalité durant la détention :
    • Taux de l’IS : 25%,
    • PS prélevés lors du dénouement du contrat au taux global de 17,2%.
  • Fiscalité de la transmission :
    • Droits de succession : TMI de 45 %,
    • Fiscalité de l’assurance-vie (CGI, art. 990 I) : TMI de 31,25 %.

Remarque :

  • Les taux d’imposition sont retenus pour leur valeur marginale et constante dans le temps

Les graphiques ci-après permettent de visualiser l’impact des données retenues ci-dessus sur l’évolution comparée des deux hypothèses de travail. En abscisse figure le temps qui passe et en ordonnée la valeur des capitaux nets transmis.

 

Hypothèses de rendement :

 

Comme nous pouvons le constater, l’option d’externaliser les fonds de la structure IS pour les investir en assurance-vie s’avère plus pertinente au-delà d’une durée d’investissement de :

  • 45 ans dans l’hypothèse d’un taux de rendement annuel moyen de 3%,
  • 24 ans si ce même taux est de 6%,
  • 16 ans s’il est de 9%.

 

Les différentes observations

  • La solution d’externaliser les capitaux de la holding accuse dans un premier temps un retard significatif par rapport à celle du maintien de cette trésorerie à l’actif de la société.
  • La mise à disposition de revenus complémentaires (via des rachats opérés sur des contrats d’assurance-vie ou via une distribution de dividende initiée à partir d’une structure soumise à l’IS) est un facteur pouvant influer sur le résultat de l’approche modélisée.
  • Les caractéristiques propres à la fiscalité de l’assurance-vie permettent de réduire progressivement le retard lié à la sortir précoce de la trésorerie de la structure holding.
  • L’importance du rendement net de fiscalité avant transmission du placement renforce cette analyse : plus la rentabilité nette est forte, plus le point de convergence des courbes interviendra tôt.
  • La fiscalité relative à la transmission par décès des capitaux placés en assurance-vie joue aussi un rôle. Sous réserve d’avoir investi son épargne avant l’âge de 70 ans, le taux marginal de fiscalité prévu par l’article 990 I du CGI (soit 31,25 %) sera moins élevé dans le contexte de l’assurance-vie que dans le cadre des droits de succession (DMTG au taux marginal de (45 %).
  • L’investissement financier réalisé dans chacun des scénarios étudiés prenant fin, dans notre hypothèse de travail, au décès de l’investisseur, l’espérance de vie de ce dernier est, de fait, un paramètre important de la modélisation.
  • En fonction de la durée de vie moyenne indiquée par les tables de mortalité, le croisement des deux courbes peut donc, en toute probabilité, ne pas avoir lieu du vivant de l’investisseur. Ces dernières sont, par exemple, sensées se rejoindre en N + 45 pour une rentabilité moyenne de 3%, alors que l’espérance de vie, selon l’INSEE d’une personne de 69 ans se limite à 19 ans et 8 mois pour une femme et 16 ans et 2 mois pour un homme.

 

Conclusion

Ces constats nous orientent vers les éléments de conclusion suivants :

  • Eu égard à la volatilité des marchés financiers, il peut parfois s’avérer déraisonnable d’escompter un taux de rendement moyen conséquent sur le long terme.
  • S’agissant d’une personne âgée de moins de 70 ans, l’opportunité d’une sortie des capitaux et un investissement en assurance-vie sera d’autant plus à privilégier que son espérance de vie statistique est longue.

Toutefois, compte tenu de l’instabilité de notre droit fiscal, cette appréciation doit être tempérée.

Il semble en effet clair que la possibilité d’aménagements et autres changements de cap pouvant intervenir sur la période considérée doivent nous inciter à pondérer les conclusions mathématiques obtenues par les simulations.

Ainsi l’idée est ainsi de suivre pour l’essentiel la conclusion démontrée par le calcul. La solution globale devra sans doute, à titre de diversification, laisser une place à la piste alternative étudiée.

 

Auteur

Pascal PREVOT

Directeur de l’Ingénierie Patrimoniale de Natixis Wealth Management – Intervenant à l’ESBanque lors des sessions de Travaux collaboratifs et Président de jury du Grand Oral

Vente d’un bien immobilier en SCI : comment procéder ? Quelle fiscalité ?

Vente d’un bien immobilier en SCI : comment procéder ? Quelle fiscalité ?

Temps de lecture estimé : 8 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Avant de vendre un bien en SCI, il est indispensable de connaître les règles civiles (la SCI peut-elle vendre ? Qui prend la décision ?) et l’imposition selon le régime IR ou IS.

Lorsqu’un bien immobilier est détenu par une SCI (Société Civile Immobilière), il est possible de le vendre de deux manières :

  • Vente du bien lui-même par la SCI. C’est alors la SCI personne morale qui procède à la cession. L’acquéreur devient propriétaire du bien mais ne sera pas associé de la SCI.
  • Vente des parts de la SCI par les associés. Cette méthode est en pratique moins utilisée car elle contraint les possibilités de cession. En général, les acquéreurs sont intéressés par le bien lui-même mais ne souhaitent pas devenir associés de la SCI. Cette modalité de cession peut néanmoins avoir son intérêt.

Par ailleurs, ces modes de cession n’ont pas le même impact selon le statut de la SCI : IR (Impôt sur le Revenu) ou IS (Impôt sur les Sociétés).

Il est indispensable de connaître ces deux situations et leurs conséquences civiles et fiscales.

Nous nous attacherons dans ce premier article au cas de la vente du bien immobilier par la SCI. Nous aborderons dans un article suivant la cession par vente des parts de la SCI.

Lorsque la SCI, personne morale vend le bien immobilier, plusieurs questions se posent : la SCI a-t-elle le droit de vendre le bien immobilier ? Qui prend la décision et peut engager la SCI dans la vente, les associés, le gérant ? Quelles sont les conséquences fiscales en matière de plus-value ?

 

SOMMAIRE

  • SCI et vente du bien immobilier : qui décide ?
  • Vente du bien immobilier par la SCI : quelle fiscalité ?

SCI et vente du bien immobilier : qui décide ?

 

Pour vendre le bien immobilier, la SCI doit tout d’abord en avoir la possibilité. Celle-ci dépend de la définition de son objet social.

Si l’objet social se limite à la gestion des biens immobiliers mais ne prévoient pas explicitement la vente, sauf à modifier les statuts, il est impossible de vendre le bien et l’acte de cession pourrait être annulé. La Cour de cassation en a décidé ainsi dans un arrêt de 2010 (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 20 mais 2010, 09-12.778).

Si l’objet dans les statuts permet la vente, la SCI doit par ailleurs être investie du pouvoir de cession soit par les associés, soit par le gérant, selon ce qui est défini dans les statuts :

  • En règle générale, les statuts prévoient que la vente d’un bien par la SCI doit être décidée par l’assemblée générale des associés. Le gérant va alors soumettre cette décision à l’AGO (Assemblée Générale Ordinaire) annuelle ou convoquer une AGE (Assemblée Générale Extraordinaire) si cela ne peut attendre. Les modalités du vote (quorum et majorité nécessaire pour l’approbation) sont également définis par les statuts. En général, compte tenu de l’importance de la décision, les statuts requièrent l’unanimité des voix.
  • Les statuts peuvent prévoir que la décision de vente revienne au gérant, sans décision des associés en assemblée générale. Cette situation est plus rare mais peut avoir été mise en place dans une SCI familiale par exemple, afin qu’un parent gérant puisse décider de la cession librement sans avoir à requérir l’approbation des enfants associés.

 

Attention :

Si le gérant prend seul la décision de vente d’un bien immobilier détenu par la SCI alors que les statuts ne lui confèrent pas ce pouvoir, la vente n’est pas annulée et reste opposable aux tiers. Le gérant engage néanmoins sa responsabilité à l’égard des associés et peut être poursuivi pour faute de gestion.

 

Vente du bien immobilier par la SCI : quelle fiscalité ?

 

La fiscalité sur la plus-value de cession du bien immobilier diffère selon le régime fiscal de la SCI : IR ou IS.

 

SCI à l’IR et vente du bien immobilier

Lorsque la SCI relève de l’IR, la SCI est dite transparente fiscalement et la plus-value est imposable selon le régime dit de la plus-value immobilière des particuliers (article 150 U du CGI et articles 150 V à 150 VH du CGI).

La vente du bien détenu par la SCI est imposée dans ce cas comme une vente du bien détenu en direct.

La plus-value correspond à la différence entre :

  • le prix de cession (après déduction des frais de cession, commission de vente, diagnostics, TVA si la SCI est assujettie)
  • et le prix d’acquisition du bien, celui s’entendant du prix figurant dans l’acte authentique en cas d’acquisition à titre onéreux ou de la valeur ayant servi de base au calcul des droits d’enregistrement en cas de mutation à titre gratuit. Si le bien a été apporté à la SCI, le prix d’acquisition correspondra à la valeur d’apport.

Le prix d’acquisition est revalorisé des frais d’acquisition (frais réels ou forfait de 7,5 % du prix du bien) et des frais de travaux (réels ou forfait de 15 % du prix d’acquisition) à condition que le bien soit détenu depuis au moins 5 ans et que les travaux n’aient pas donné lieu à une déduction sur les revenus fonciers.

La plus-value bénéficie d’abattement au-delà de la 5ème année de détention, au titre de l’IR et des prélèvements sociaux, permettant une exonération totale à l’IR au terme de 22 ans de détention et aux prélèvements sociaux après 30 ans.

La durée de détention débute à la date d’acquisition du bien par la SCI.

La plus-value nette d’abattement est imposée :

  • au taux de 19 % au titre de l’IR
  • au taux de 17,2 % au titre des prélèvements sociaux

Une « surtaxe » de 2 % à 6 % est également applicable si le montant de la plus-value nette excède 50.000 €.

Chaque associé est redevable de l’impôt sur plus-value ainsi calculé selon sa quote-part dans le capital.

La plus-value relevant du régime des particuliers, il est également possible de bénéficier des cas d’exonération, notamment :

  • Exonération en cas de cession de la résidence principale d’un des associés au jour de la cession.
  • Exonération si le prix de cession du bien est inférieur ou égal à 15.000 €.
  • Exonération de la première cession d’un bien autre que la résidence principale des associés et à condition que ces derniers n’aient pas été propriétaire de leur résidence principale dans les 4 dernières années et qu’ils réemploient le prix de cession à l’acquisition de leur résidence principale dans les 24 mois suivant la cession.
  • Exonération en cas de départ en maison de retraite à condition que le bien ayant constitué la résidence principale soit resté inoccupé, de non-imposition à l’IFI et d’un revenu fiscal de référence inférieur à une certaine limite, au titre de l’avant dernière année précédant la cession.
  • Exonération en cas d’expropriation sous condition de réemploi de l’indemnité d’expropriation dans l’acquisition ou la construction d’un bien dans un délai de 12 mois.

 

SCI à l’IS et vente du bien immobilier

Lorsque la SCI est imposée à l’IS, la plus-value de cession du bien relève du régime des plus-values professionnelles.

La plus-value est alors la différence entre :

  • le prix de cession
  • et la VNC ou Valeur Nette Comptable du bien : c’est-à-dire le prix d’acquisition du bien par la SCI diminué des amortissements pratiqués depuis l’inscription au bilan.

La plus-value ainsi calculée est imposée au taux de l’IS (taux normal de 25 % ou taux réduit de 15 % sous conditions et si le bénéfice est inférieur à 42.500 €).

Lorsque la SCI est à l’IS, la plus-value ne peut donc pas bénéficier des régimes d’exonération des particuliers (résidence principale, abattement pour durée de détention …).

De manière générale, le régime des plus-professionnelles est plus défavorable que celui des plus-values immobilières des particuliers.

On retrouve ici l’une des limites de l’intérêt de l’IS pour les SCI. La SCI à l’IS a l’avantage de permettre des déductions plus importantes pendant l’exploitation du bien (par les amortissements notamment) et donc une imposition moins lourde pendant la détention immobilière. Par contre, lors de la vente du bien, l’imposition sur plus-value est nettement plus lourde que dans le cadre de l’IR.

Il est à noter que dans le cadre de la location meublée, la SCI relève nécessairement de l’IS et ne peut opter pour l’IR. La vente d’un bien loué en meublé au sein d’une SCI sera donc nécessairement imposée selon le régime des plus-values professionnelles.

 

Exemple :

La SCI Immo relève de l’IS. Elle a acheté un bien en janvier 2010 pour 800.000 € et l’amortit à hauteur de 40.000 € par an.

Elle vend ce bien début 2023 pour une valeur de 1.200.000 €.

La plus-value est une plus-value professionnelle et se calcule de la manière suivante :

Prix de cession : 1.200.000 €

Prix d’acquisition : VNC soit prix d’achat moins les amortissements pratiqués = 800.000 € – (40.000 € x 13 ans) = 280.000 €

Plus-value imposable à l’IS : 1.200.000 € – 280.000 € = 920.000 €

Imposition à l’IS : 920.000 € x 25 % = 230.000 €

La déduction des amortissements a donc un impact important sur la plus-value et l’absence d’abattement pour durée de détention également.

A titre de comparaison, si la SCI relève de l’IR, l’imposition serait la suivante :

Prix de cession : 1.200.000 €

Prix d’acquisition revalorisé des frais et travaux : 800.000 € + (800.000 € x 7,5 %) + (800.000 € x 15 %) = 980.000 €

Plus-value avant abattement : 220.000 €

Plus-value imposable à l’IR après abattement pour durée de détention (13 ans soit 48 %) : 220.000 € – (220.000 € x 48 %) = 114.400 €

IR = 114.400 € x 19 % = 21.736 €

Plus-value imposable aux prélèvements sociaux après abattement pour durée de détention (13 ans, soit 13,2 %) : 220.000 € – (220.000 € x 13,2 %) = 190.960 €

Prélèvements sociaux : 190.960 € x 17,2 % = 32.845 €

Imposition totale sur la plus-value : 54.581 €, à comparer à une imposition de 230.000 € si la SCI est à l’IS.

 

Vendre un bien en SCI nécessite donc de bien respecter les règles civiles (vérification de la possibilité de cession dans l’objet social, des modalités de prises de décision, gérant ou associés) et au besoin d’adapter les statuts au préalable.

Fiscalement, l’imposition de la plus-value de cession dans le cadre du régime de l’IS est significativement plus lourde. Le choix du régime fiscal est donc déterminant et il est certain qu’il vaut mieux vendre sous le régime de l’IR dans l’état actuel de la législation.

Même s’il est possible de changer de régime fiscal en cours de vie de la société (hors cas de location meublée en SCI), il existe des conditions spécifiques au passage à l’IR, notamment de délais. Depuis la Loi de Finances pour 2019, une SCI à l’IS peut faire le choix de l’IR dans les 5 ans suivant son option pour l’IS. Au-delà le choix de l’IS devient définitif.

Par ailleurs, le changement de régime fiscal pour l’IR a des conséquences fiscales importantes, notamment l’imposition des plus-values latentes, sans possibilité de bénéficier de régime d’atténuation (les conditions de ce régime ne pouvant être satisfaites dans le cas du passage à l’IR de la SCI immobilière). Si ce choix est opéré peu de temps après l’acquisition du bien, la plus-value latente peut être faible mais si le bien est détenu depuis longtemps, cette plus-value peut être conséquente. Les perspectives de cession et les modalités fiscales devront donc être envisagées le plus en amont possible. 

 

Auteur

Anne Brouard

Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisé en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7

Travaux, déficit : quelles déductions en location meublée et location nue ?

Travaux, déficit : quelles déductions en location meublée et location nue ?

Temps de lecture estimé : 12 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Travaux et déficits se déduisent différemment en location meublée et en location nue. Explications !

 

Le projet de Loi de Finances rectificative pour 2022 double le montant maximal de report des déficits sur le revenu global, lorsque ce déficit est issu de travaux énergétiques, le portant à 21.400 €, alors qu’il est d’ordinaire de 10.700 €.

L’objectif du législateur est d’encourager et d’aider à la rénovation énergétique des biens à usage d’habitation et loués nus. Ce plafond de déficit reportable sur le revenu global, pouvant être doublé lorsqu’il provient de travaux énergétiques, ne relève en effet que de la location nue.

Les biens en location meublée ne peuvent bénéficier de ce plafond doublé, y compris lorsqu’ils sont loués à usage d’habitation sur une longue durée.

Or, depuis la Loi Climat de 2019 et la Loi dite « Climat et résilience » de 2021, les biens meublés à usage d’habitation, c’est-à-dire loués en bail étudiant, bail mobilité ou bail meublé classique d’habitation, sont soumis comme les biens en location nue aux exigences des étiquettes dites DPE (Diagnostic de Performance Énergétique).

Les biens classés G ne pourront plus être loués en 2025 et en 2028 pour les biens classés F.  Suivant leur classement, ces biens vont donc nécessiter des travaux de rénovation énergétique pour pouvoir continuer à être loués. Ces travaux seront aussi nécessaires pour pouvoir augmenter ou indexer le loyer des biens classés F ou G lorsque les baux sont conclus ou reconduits depuis le 24/08/2022.

Au-delà de ce plafond de déficit reportable propre aux locations nues, l’ensemble des règles de déduction des travaux et d’imputation des déficits sont totalement différentes en location meublée et en location nue.

Alors que de nombreux propriétaires locatifs vont certainement entamer d’importants travaux sur leurs biens dans les années à venir, il est important de connaître ces différences de traitement fiscal.

 

SOMMAIRE

  • Location nue : une déduction de certains travaux et un déficit fiscal reportable
  • Location meublée : un amortissement des travaux et un déficit fiscal limité

 

Location nue : une déduction de certains travaux et un déficit fiscal reportable

 

En location nue, seuls certains types de travaux sont retenus fiscalement et sont alors déductibles directement des loyers perçus.  Ces travaux peuvent créer un déficit dont une partie seulement s’impute sur le revenu global, c’est-à-dire sur le total des autres catégories de revenus nets de l’année.

 

Quels sont les travaux déductibles en location nue

En location nue, pour pouvoir déduire des loyers perçus les charges et les travaux sur le bien locatif, il est tout d’abord nécessaire de relever du régime réel des revenus fonciers ou d’opter pour ce régime si les loyers annuels perçus sont inférieurs à 15.000 €.

En deçà de ce montant, le micro-foncier est applicable d’office. Dans ce régime, le revenu foncier net imposable est déterminé après application d’un abattement de 30 % sur les loyers perçus, ce qui ne permet donc pas de déduire les frais réels.

L’option pour le régime réel est irrévocable pendant 3 ans.

Ces travaux doivent :

  • permettre l’acquisition ou la conservation des revenus fonciers
  • et être effectivement payés l’année de leur déduction (même si les travaux sont effectués avant ou après l’année en question).

Cela étant, seuls certains types de travaux peuvent faire l’objet d’une déduction. Il s’agit :

  • des travaux d’amélioration: ils doivent avoir pour objet d’apporter au bien un élément ou un équipement de confort nouveau ou moderniser le bien pour offrir une meilleure conditions d’utilisation et de vie. Ils ne doivent pas modifier la structure de l’immeuble. Une nouvelle installation de chauffage plus efficace et moins énergivore, ou la réfection d’une salle d’eau ou d’une cuisine entrent ainsi dans ce type de travaux.

A noter :

Dans le cas de location de bien à usage professionnel ou commercial, les dépenses d’amélioration ne sont pas déductibles, sauf celles permettant l’accueil des personnes handicapées, ou la protection des locaux contre l’amiante.

  • des travaux de réparation et d’entretien: ces dépenses permettent de maintenir ou de remettre le bien en état afin que l’on puisse en conserver un usage normal. Entrent dans cette catégorie par exemple le remplacement d’un chauffe-eau défectueux ou la rénovation de l’installation électrique. Ces travaux ne doivent pas modifier la consistance du bien, son agencement ou son équipement.

Attention :

Les dépenses de réparations et d’entretien normalement mises à la charge du locataire ne sont pas déductibles des revenus fonciers.

Ces dépenses de réparation et d’entretien sont dites locatives car incombant au locataire, tel que défini par le décret du 26/08/1987. Si elles sont prises en charge par le propriétaire, le locataire doit les lui rembourser.

Qu’elles soient remboursées ou non, ces dépenses locatives ne peuvent pas donner lieu à une déduction des revenus fonciers, sauf dans deux cas :

  • dépenses rendues nécessaires par la vétusté ou la force majeure
  • dépenses engagées avant l’installation d’un locataire afin de faciliter la location du bien.
  • Les autres types de travaux ne sont jamais déductibles des revenus fonciers. Il s’agit notamment :

    • des travaux de construction ou de reconstruction modifiant de manière importante le gros œuvre ou équivalent par leur importance à une reconstruction
    • les travaux d’agrandissement augmentant le volume ou la surface habitable
    • les travaux de démolition

 

Comment le déficit foncier se calcule et s’impute en location nue ?

Les travaux déductibles peuvent créer un déficit foncier. L’imputation de ce dernier suit des règles spécifiques.

Règles de calcul du déficit foncier

Les dépenses et les travaux déductibles peuvent aboutir à un déficit foncier lorsque leur montant excède le total des loyers perçus sur le bien hors charges locatives.

Mais la règle fiscale n’est pas si simple :

  • Une part du déficit est déductible du revenu global, c’est-à-dire de la somme des autres revenus nets annuels du contribuable (traitements et salaires, pensions de retraite et rentes viagères, BIC (Bénéfices Industrielles et Commerciaux), BNC (Bénéfices Non Commerciaux), BA (Bénéfices Agricoles), Revenus et plus-values mobiliers …).
  • L’autre part est déductible des revenus fonciers des années suivantes.

Pour que ces déficits ne soient pas remis en cause, le bien doit rester loué jusqu’au 31 décembre de la 3ème année suivant leur imputation. 

Un autre principe est que les charges d’intérêt d’emprunt ne peuvent pas créer un déficit imputable sur le revenu global.

Concrètement, le calcul doit d’abord consister à déduire les intérêts d’emprunt des loyers perçus :

  • Si le résultat est positif: les charges d’intérêt ne créent pas de déficit. Le déficit qui serait créé par les autres charges et travaux déductibles est alors fiscalement imputable sur le revenu global dans la limite d’un plafond de 10.700 € (doublé à 20.400 € pour les déficits issus de travaux énergétiques à partir de 2023), comme nous allons le voir ensuite.
  • Si le résultat est négatif: les intérêts créent un déficit. Cette part de déficit n’est pas imputable sur le revenu global mais uniquement sur les revenus fonciers des années suivantes. Seules les autres charges et travaux déductibles sont à prendre en compte pour déterminer le déficit imputable sur le revenu global de l’année.

Schéma d’imputation du déficit : 

Revenus bruts : + 15.000 €

Intérêts d’emprunt : – 18.000 €

Autres charges déductibles : – 20.000 €

Source : Commission des Finances, Sénat

Exemples :

Cas 1 :

Loyers perçus : 4.000 €

Intérêts d’emprunt : – 3.000 €

Solde : 1.000 €

Travaux déductibles : – 8.000 €

Déficit : – 7.000 €

L’intégralité de ce déficit est imputable sur le revenu global.

Cas 2 :

Loyers : 2.000 €

Intérêts d’emprunt : – 3.000 €

Solde : – 1.000 €

Travaux déductibles : – 8.000 €

Déficit : – 9.000 €

La part de déficit généré par les intérêts d’emprunt, soit – 1.000 €, n’est pas imputable sur le revenu global mais sur les revenus fonciers des 10 prochaines années. Le solde du déficit, soit – 8.000 €, est imputable sur le revenu global.

 

Règles d’imputation du déficit foncier

Le projet de Loi de Finances rectificative modifie les plafonds d’imputation des déficits fonciers sur le revenu global.

Déficit imputable sur le revenu global : un nouveau plafond en 2023 pour certains travaux

Le déficit foncier calculé selon les principes précédents est imputable pour partie :

  • sur le revenu global de l’année, c’est-à-dire sur la somme des autres revenus catégoriels nets du contribuable, à hauteur d’un certain plafond, jusqu’ici fixé à 10.700 €. La part du déficit créé par les intérêts d’emprunt n’entre pas dans ce déficit imputable sur le revenu global.

Si le revenu global est insuffisant pour absorber le déficit, le solde est imputable sur le revenu global des 6 années suivantes.

  • sur les revenus fonciers des 10 années suivantes pour la part du déficit excédant le plafond de 10.700 € et pour le déficit généré par les intérêts d’emprunt

Important :

L’imputation du déficit foncier sur le revenu global, ou sur les revenus fonciers, engage le propriétaire à louer le bien en location nue jusqu’au 31 décembre de la 3ème année suivant celle de l’imputation. En cas de non-respect de cette durée de location, la déduction du déficit est remise en cause.

Le projet de loi de Finances rectificative pour 2022 double le plafond de 10.700 € à 21.400 € lorsque le déficit est généré par des travaux de rénovation énergétique.

Certaines conditions sont néanmoins à respecter :

  • Les travaux de rénovation énergétique doivent permettre de sortir le bien des classes énergétiques E, F ou G (passoires thermiques) et de le faire passer en classe minimum A, B, C ou D au plus tard le 31 décembre 2025, sur justificatif de nouveau diagnostic après travaux.
  • Les dépenses de rénovation énergétique doivent être réalisées entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025. Les devis doivent avoir été acceptés à partir du 5 novembre 2022.

Un grand nombre de précisions et détails sur l’application de cette mesure reste à définir par décret, notamment la liste précise des travaux éligibles.

Déficit imputable sur les revenus fonciers : une économie d’impôt particulièrement efficace

Les contribuables fortement imposés compte tenu d’un revenu global significatif peuvent être naturellement intéressés par imputer sur ce revenu un déficit foncier à hauteur de 10.700 € ou 21.400 € pour travaux énergiques. L’économie d’impôt sera proportionnelle à la tranche marginale d’imposition (TMI).

Une personne imposée à la tranche marginale de 45 % par exemple fera une économie d’impôt de 4.815 € pour une imputation de déficit de 10.700 € (10.700 x 45 %) ou de 9.630 € pour 21.400 € de déficit imputé.

Cependant, l’imputation du déficit, non pas sur le revenu global mais sur les revenus fonciers des années suivantes, peut être beaucoup plus efficace.

L’économie d’impôt est alors proportionnelle à la TMI mais également aux prélèvements sociaux de 17,2 % applicables aux revenus fonciers nets et qui seront également économisés.

L’économie fiscale pour une personne imposée à la TMI maximale sera ainsi de 62,2 % (45 % + 17,2 %) du déficit imputé sur les revenus fonciers (sans tenir compte de la CSG déductible de 6,8 % l’année suivante).

Mieux vaut donc imputer le déficit sur les revenus fonciers si ceux-ci restent constants dans les années suivantes, et ceci d’autant plus si le déficit peut s’imputer rapidement en un ou deux ans.

Il n’est pas possible néanmoins de choisir le mode d’imputation de déficit sur le revenu global ou sur les revenus fonciers. Le déficit, hors celui généré par les intérêts d’emprunt, est nécessairement imputable sur le revenu global jusqu’à 10.700 € et il n’est pas possible dans l’état actuel de la loi d’y déroger.

Qu’en est-il pour le déficit doublé à 21.400 € ?

Dans l’attente du décret d’application, il est difficile d’y répondre. Le dispositif est présenté pour s’appliquer systématiquement sur les travaux de rénovation énergétique par une imputation sur le revenu global jusqu’à 21.400 €.

Pour les contribuables préférant imputer leur déficit davantage sur les revenus fonciers que sur le revenu global pour les raisons que nous avons présentées, sera-t-il possible de ne pas relever de ce doublement de plafond ?

Dans le texte actuel de la loi, il faudrait pour cela que les travaux n’entrent pas dans la liste éligible (attendue par décret), cette condition étant peu applicable en pratique, ou de ne pas présenter de diagnostic d’amélioration énergétique avant la fin du dispositif, le 31 décembre 2025.

Ces questions concernant l’application, ou non, de ce dispositif de doublement de plafond seront, nous l’espérons, précisées par le décret à venir.

 

Location meublée : un amortissement des travaux et un déficit fiscal limité

 

En location meublée, les travaux ne sont pas déductibles du chiffre d’affaires de l’année de leur réalisation mais sont amortissables sur une certaine durée. S’agissant d’une déduction par amortissement, ils ne peuvent pas participer à la création d’un déficit fiscal.

Mais cette règle n’est pas nécessairement un inconvénient.

 

Location meublée : des travaux amortissables et non pas déductibles

Dans le régime fiscal de la location meublée, qu’elle soit pratiquée en statut LMP (Location Meublée Professionnelle) ou LMNP (Location Meublée Non Professionnelle), les travaux ne sont pas déductibles directement des loyers perçus mais amortissables sur une certaine durée et selon leur nature.

Seules certaines dépenses d’entretien ou de remplacement peuvent être déductibles sous conditions.

Règles d’amortissement des travaux en location meublée

En location meublée, les travaux qui viennent augmenter la valeur du bien ne peuvent constituer des charges déductibles du chiffre d’affaires annuel.

Ces dépenses de travaux sont nécessairement amorties sur des durées différentes selon la nature de travaux et leur durée d’usage.

Concernant les travaux d’amélioration et d’équipement, aucune durée spécifique d’amortissement n’est définie par l’administration fiscale qui mentionne simplement que les dépenses d’amélioration sont amorties sur des durées de 5 à 12 ans.

A titre d’exemple, les travaux d’agencement intérieur sont amortis en moyenne sur 12 ans, une cuisine équipée sur 10 ans, l’électroménager sur 5 ans.

Les meubles acquis ou installés pour débuter la location meublée sont inscrits au bilan et font l’objet d’un amortissement en général sur une durée de 5 ans.

S’il s’agit de travaux de construction ou d’agrandissement, leur valeur est décomposée en différents types d’éléments (gros œuvres, menuiserie, électricité, plomberie …) dont chacun est amorti selon une durée spécifique, en général plus longue que les travaux d’amélioration et d’équipement, ces durées pouvant aller de 25 à 40 ans ou plus. La plomberie peut par exemple s’amortir sur une durée moyenne de 20 ans, la toiture sur 25 ans.

Les travaux de rénovation énergétique sont donc des dépenses amortissables dont la durée dépend de chaque élément composant ces travaux (isolation des murs, étanchéité des fenêtres …).

 Dépenses d’entretien et de remplacement déductibles : attention au seuil des 500 € HT.

Les dépenses d’entretien et de réparation sont considérées comme des charges déductibles du chiffre d’affaires annuelle l’année de leur paiement.

L’administration fiscale a émis une règle concernant les dépenses de petit équipement (matériel et outillage, mobilier …). Ces dépenses, si elles sont inférieures à 500 € HT (ou 600 € TTC), peuvent être déduites immédiatement et entrent dans les charges annuelles.

Mais ce seuil de 500 € HT n’est pas le seul critère à considérer pour catégoriser la dépense en amortissement ou en charge déductible. Certaines pratiques consistant à diviser les travaux en plusieurs factures inférieures à 500 € HT pour les déduire en charges sont bien sûr requalifiables.

Le critère principal pour distinguer si travaux sont amortissables ou s’ils passent en charges déductibles réside dans la nature de la dépense.

Si cette dépense a une durée de vie supérieure à un an, il s’agit alors de travaux amortissables. Si ces frais devront être renouvelés avant un an du fait de l’usure et de la nécessité de remplacement et d’entretien, ils correspondent à des charges déductibles.

En général, les travaux sont réalisés pour une période supérieure à l’année et sont donc des dépenses amortissables.

 

Travaux immobiliers et déficit en location meublée : quel effet fiscal ?

A la différence de la location nue, la déduction des travaux en location meublée est donc répartie sur plusieurs années sous forme d’amortissement annuel.

Pour autant, comment ces dépenses de travaux amortissables s’imputent-elles en cas de déficit ?

Le plafond de déduction du déficit sur le revenu global (à 10.700 € ou 21.400 € pour des travaux de rénovation énergétique) n’existe pas en location meublée.

Un autre principe s’applique : les amortissements ne peuvent pas créer de déficit fiscal.

Cette règle, codifiée à l’article 39 C du CGI, est propre à l’activité de location meublée, qu’elle soit exercée en LMP ou LMNP (BOI-BIC-CHAMP-40-20 n° 57)

Si le déficit comptable annuel est dû aux amortissements, il ne peut être tenu compte de ce déficit fiscalement. Le résultat imposable est alors nul mais il ne peut pas être déficitaire.

Ce déficit comptable dû aux amortissements ne peut donc pas être imputé sur le revenu global dans le cas de la LMP ou sur les BIC non professionnels, c’est-à-dire les revenus de location meublée non professionnelle des 10 années suivantes sous le statut de LMNP.

Néanmoins, la part d’amortissement ayant créé ce déficit comptable n’est pas perdue. Ces amortissements sont réputés différés et peuvent s’imputer sur les revenus de location meublée des années à venir sans limitation de durée.

L’amortissement des dépenses de travaux amortissables n’est donc jamais perdu tant que l’activité de location meublée se poursuit.

Cet amortissement, même s’il ne crée pas de déficit, permet d’effacer les revenus imposables, ce qui peut offrir une plus grande efficacité fiscale que l’imputation de déficit sur le revenu global.

L’économie d’imposition induite est en effet proportionnelle à la TMI du contribuable concerné mais également aux prélèvements sociaux de 17,2 % ou au taux de cotisations sociales (de l’ordre de 40 % au régime social réel, hors forfait minimum) si l’activité y est soumise.

On retrouve ici une efficacité fiscale proche de l’imputation des déficits sur les seuls revenus fonciers en location nue, à la différence que la totalité des amortissements de travaux est nécessairement concernée, sans qu’il soit nécessaire de consacrer 10.700 € (ou 21.400 €) à une imputation sur le revenu global moins efficiente.

Cette « performance » fiscale est néanmoins à pondérer par le temps. Vaut-il mieux réaliser une économie d’impôt immédiate, proportionnelle à la TMI, ou bénéficier d’une économie plus importante incluant les prélèvements sociaux (17,2 %) ou les cotisations sociales mais à une date ultérieure ? Plus cette imputation sur les revenus fonciers ou les revenus de location meublée des années à venir pourra se faire rapidement, plus l’économie d’impôt sera efficiente.

Les amortissements annuels ont par ailleurs une conséquence fiscale et surtout sociale en termes de plus-values de cession en statut de location professionnelle (LMP). Le cumul des amortissements pratiqués sur le bien, y compris les amortissements des dépenses de travaux, entrent dans le calcul de la plus-value professionnelle dite à court terme, imposable au barème de l’IR en cas de cession ou de mutation à titre gratuit (donation, cession) et également aux cotisations sociales.

Il est possible de bénéficier, sous conditions, de régimes d’exonération mais uniquement au titre de l’IR et des prélèvements sociaux, mais pas des cotisations sociales. Dans le statut LMP, l’économie fiscale de l’amortissement des travaux peut donc se perdre au moment de la cession ou de la transmission du bien. Il peut être alors préférable avant toute mutation de passer en régime de LMNP, comme nous l’avons vu dans un précédent article.

 

Auteur

Anne Brouard   

Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisé en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7

Immobilier : ce qu’il faut savoir dès 2020

Immobilier : ce qu’il faut savoir dès 2020

Temps de lecture estimé : 8 min

Inutile de chercher dans la Loi de Finances 2020 de grandes nouveautés concernant l’immobilier. La loi apporte peu de modifications sur le sujet. Pour l’essentiel, les régimes de défiscalisation existants (Denormandie, Malraux, Cosse, Pinel…) sont prorogés et élargis.

Pour mesurer les changements majeurs qui pourraient impacter l’immobilier dans les années à venir, il faut plutôt s’intéresser à la Loi relative à l’Energie et au Climat du 08/11/2019. Explications.

des dispositifs fiscaux prorogés et élargis

Les principaux régimes de défiscalisation immobilière en vigueur en 2019 sont prolongés et pour la plupart assouplis quant à leur application.

denormandie

Mis en place au 01/01/2019, le régime Denormandie est prorogé jusqu’au 31/12/2022.

Ce dispositif concerne la réhabilitation de biens anciens ne satisfaisant pas aux critères de logements dits décents et situés au cœur de certains centres-villes le nécessitant (liste établie par décret de 245 communes dits « Action cœur de ville » ou ayant signé avec l’Etat une convention d’opération de revitalisation du territoire (ORT)).

Sous conditions de réaliser des travaux représentant au moins 25 % du montant total de l’opération (investissement + travaux) et dans la limite d’un plafond global de 300.000 € et de 5.500 €/m2, l’investisseur bénéficie d’une réduction d’impôt de 12 %, 18 % ou 21 %, selon la durée d’engagement de location du bien à titre de résidence principale sur 6, 9 ou 12 ans et dans le respect de ressources et de loyers.

Il est possible de louer à des ascendants ou descendants ne faisant pas partie du foyer fiscal.

Les travaux pris en compte dans le calcul de la réduction d’impôt ne peuvent pas être déduits des revenus fonciers pour créer un déficit.

En 2019, seuls les travaux améliorant la performance énergétique d’au moins 30 % (20 % pour les logements collectifs) pouvaient être pris en compte.

Depuis le 01/01/2020, les travaux d’amélioration (modernisation, assainissement, aménagement de surface habitable, création de surfaces habitables supplémentaires) entrent également dans le calcul.

Par ailleurs, la zone d’investissement est élargie à l’ensemble du territoire des villes concernées.

malraux

Offrant une réduction d’impôt de  22% à 30 % du montant des travaux, le dispositif Malraux est prorogé jusqu’au 31/12/2022.

Rappel régime Malraux :

  • Investissement dans un logement ancien situé dans un Site Patrimonial Remarquable avec Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV) ou dans des Quartiers Anciens Dégradés (QAD) et les anciens secteurs sauvegardés : réduction d’impôt de 30 %
  • Investissement dans un Site Patrimonial Remarquable avec Plan de Valorisation de l’Architecture et du Patrimoine (PVAP) ou anciennes Zone de Protection Architectural Urbain ou Paysager (ZPPAUP) : réduction de 22 %
  • Réduction d’impôt calculée sur le montant des travaux dans la limite de 400.000 € sur 4 ans
  • Conditions de location nue à titre de résidence principale sur une durée de 9 ans dans les 12 mois suivant l’achèvement des travaux

 

cosse

Remplaçant les régimes Besson ancien et Borloo ancien et visant à inciter à la pratique de loyers dits « abordables », le dispositif Cosse permet de bénéficier d’un abattement spécifique sur les revenus fonciers de 15 % et jusqu’à 85 % selon la zone géographique, le niveau de loyer, les ressources des locataires et le recours ou non à un organisme public ou privé de location.

Parallèlement, le plafond de déficit foncier reportable sur le revenu global est porté à 15.300 € dans le cadre du régime Cosse, contre 10.700 € normalement.

Les conditions

  • location nue à titre de résidence principale pendant 6 ans (9 ans si travaux subventionnés par l’Anah (Agence Nationale de l’Habitat)).
  • logement situé dans les zones A, Abis, B1 et B2 et C sous condition de convention avec l’Anah et de travaux
  • respect des plafonds de loyers et ressources des locataires
  • possibilité de subvention pour travaux si conclusion d’une convention avec l’Anah avec obligation de location pendant 9 ans

Ce régime est prorogé jusqu’au 31/12/2022. Attention néanmoins, les logements devront respecter un seuil de performance énergétique à partir du 1er juillet 2020.

censi-bouvard

Le dispositif Censi-Bouvard concerne les locations meublées en résidences services et offre une réduction de 11 % de l’investissement plafonné à 300.000 € HT.
Ce régime est prorogé jusqu’au 31/12/2021.

Le bien doit faire l’objet d’un contrat de location meublé en faveur d’un exploitant pour une durée minimale de 9 ans. Pour bénéficier de la réduction, l’investisseur doit relever du statut de loueur en meublé non professionnel (LMNP).

La location à un exploitant professionnel proposant au moins trois services associés à la location permet de récupérer la TVA de 20 % sur le prix d’acquisition, sous condition d’engagement de location pendant 20 ans.

pinel

En contrepartie d’un engagement de location de 6, 9 ou 12 ans et dans le respect des niveaux de loyers, des ressources des locataires et des zones géographiques (zones A, A bis et B1 dites « tendues »), l’investissement Pinel offre une réduction d’impôt de respectivement 12 %,  18 % et 21 % calculée sur le prix du bien plafonné à 300.000 € par an (maximum deux logements par an) et à 5.500 €/m2.

Le dispositif Pinel est reconduit jusqu’au 31/12/2021 mais il ne pourra plus porter sur une maison individuelle à partir du 01/01/2021. Seuls les logements situés dans des immeubles collectifs pourront bénéficier de ce régime à partir de cette date.

certaines aides préservées, d’autres revues

 le ptz maintenu

Le prêt à taux zéro (PTZ), ou sans intérêt, est une aide de l’Etat dont il est possible de bénéficier pour la première acquisition de la résidence principale sous conditions de revenus.

Le PTZ devait prendre fin le 31/12/2019 pour les zones dites « détendues » B2 et C. Il est maintenu jusqu’au 31/12/2021.

le cite transformé en prime forfaitaire

Au 01/01/2020, une prime forfaitaire, versée par l’Anah et plafonnée à 20.000 € sur 5 ans, a remplacé le Crédit d’Impôt pour la Transition Energétique.

Cette prime a pour particularité d’être fonction des revenus du contribuable, ce qui n’était pas le cas du CITE.

Le CITE existe néanmoins encore cette année pour certains contribuables dont le revenu fiscal de référence est supérieur aux conditions de ressources de la prime forfaitaire et inférieur à un certain plafond.

Exceptions : 2 types de dépenses ouvrent droit à la prime sans condition de ressources :

  • les équipements de charge pour véhicule électrique
  • les matériaux d’isolation thermique des parois opaques

vers la suppression de la taxe d’habitation mais une révision des valeurs locatives

suppression progressive de la taxe d’habitation 

Cette année sera celle de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables. Les personnes ayant déjà bénéficié d’un dégrèvement en 2018 et 2019 ne seront plus imposables en 2020.

Les autres contribuables bénéficieront d’un dégrèvement de 30% en 2021, 65 % en 2022 et seront définitivement exonérés en 2023.

revalorisation des valeurs locatives

La loi de Finances 2020 a lancé un programme de révision des valeurs locatives servant de base de calcul à la taxe foncière. Ces valeurs cadastrales n’avaient pas été revues depuis 1970.

Le calendrier prévoit la refonte des valeurs locatives pour le 01/01/2026.

Pour déterminer les nouvelles valeurs, les propriétaires bailleurs devront transmettre début 2023 à l’administration fiscale le montant des loyers pratiqués. Ces éléments serviront de base au rapport qui sera présenté avant le 01/09/2024.

Augmentation ou diminution des valeurs locatives, il est dans tous les cas certain que les variations risquent d’être significatives depuis les derniers calculs de 1970.

une réforme d’ampleur, les seuils de consommation énergétique

Si la loi de finances 2020 ne modifie donc pas profondément le paysage de l’immobilier français, une nouvelle réglementation annonce des bouleversements beaucoup plus significatifs.

La Loi relative à l’Energie et au Climat du 08/11/2019, passée relativement inaperçue des annonces de fin d’année, instaure pour les logements anciens, c’est à dire l’essentiel du marché, des conditions de seuil de consommation énergétique pour :

la revalorisation des loyers et ce dès 2021

Actuellement, la revalorisation des loyers à l’occasion de la signature d’un nouveau bail est encadrée uniquement pour 28 agglomérations situées en zone tendue. Afin d’augmenter le loyer pratiqué, il est nécessaire dans ces villes de procéder à des travaux d’amélioration du logement parmi lesquels des travaux de performance énergétique mais pas seulement.

A partir du 01/01/2021, l’augmentation du loyer ne sera possible qu’à condition de respecter un seuil de consommation énergétique du logement inférieur à 331 kilowattheures par m2 et par an.

Les biens classés F et G dans les fameux DPE (Diagnostic de Performance Energétique) ne satisfont pas ce seuil minimal et les loyers afférents ne pourront donc pas être revalorisés.

Et dès 2020, les travaux d’amélioration qui entraient en compte pour pouvoir revaloriser le loyer ne seront plus retenus si après travaux, la consommation énergétique reste supérieure à 330 KWh/m2/an.

les annonces de location et les baux

Actuellement, les annonces de location doivent faire apparaître le « score » du DPE du bien mais aucune sanction n’est prévue en cas de non respect.

A partir du 01/01/2022, l’annonce devra également faire figurer le montant des charges de chauffage du bien et de l’eau. Faute d’information à ce sujet, le professionnel immobilier encourra une amende de 15.000 €. Ce montant devra aussi figurer sur le bail.

Si le DPE fait apparaître un seuil de consommation énergétique supérieur à 330 kWh/m2/an, il sera nécessaire de s’engager dans l’annonce, et dans le bail, à respecter ce seuil d’ici le 01/01/2028.

Si le seuil n’est pas respecté à cette date, aucune sanction n’est pour l’instant prévue mais l’annonce et le bail devant faire figurer cette information, il est prévisible que les locataires seront moins nombreux ou que le loyer devra être revu à la baisse.

Au 01/01/2023, les conditions deviendront plus strictes : un bien dont la consommation d’énergie dépasse un certain seuil (non encore défini) ne pourra pas faire l’objet d’une location.

Des assouplissements seront prévus si le bien est situé dans une copropriété et que les demandes de travaux n’ont pu aboutir à réduire le seuil.

les ventes immobilières

Tout comme les annonces de location, à partir du 01/01/2022, les annonces de vente devront indiquer le coût des charges de chauffage. Le cas échéant, les professionnels s’exposent à une amende de 15.000 €.

Si le seuil de consommation énergétique dépasse 330 kWh/m2/an, l’annonce et l’acte de vente devront le faire figurer et indiquer que ce seuil sera à respecter avant le 01/01/2028.

Au 01/01/2028, le respect de ce seuil deviendra obligatoire. Si le bien ne le respecte pas, aucune sanction n’est prévue à ce jour mais les actes devront indiquer que le bien n’est pas conforme au seuil énergétique.

Afin d’aider à la mise en conformité des biens, les DPE (Diagnostics de Performance Energétique) vont être amenés à évoluer et devront, lorsque le seuil de consommation est dépassé, comporter un audit listant les préconisations de travaux à réaliser et les chiffrer.

Là encore, ce type d’information sera de nature à dissuader des acquéreurs ou à dévaloriser le bien.

La Loi relative à l’énergie et au climat a donc un impact significatif sur l’évolution du marché immobilier.
Les logements susceptibles de ne plus satisfaire les nouvelles conditions énergétiques (ceux classés F et G) représentent environ 20 % du marché immobilier français.
Cette nouvelle réglementation va donc peser sur le marché de la location et de la transaction et les conseillers ne peuvent qu’encourager leurs clients à anticiper la mise aux normes énergétiques de leurs biens dans un objectif, si ce n’est écologique, de conservation de la valeur de leur patrimoine.

Auteur

Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.

Résidence fiscale des personnes physiques en France : quels critères dans un monde international ?

Résidence fiscale des personnes physiques en France : quels critères dans un monde international ?

Temps de lecture estimé : 8 min

Dans une économie globalisée, où l’on peut vivre dans plusieurs pays, comment s’apprécient les critères de résidence fiscale en France ? Quelles conséquences patrimoniales ?

Avec la mondialisation de l’économie, le développement du transport aérien ou encore la révolution digitale, il n’est pas rare de partager son activité professionnelle et sa vie personnelle entre plusieurs Etats. Cette tendance est d’autant plus marquée auprès de la clientèle fortunée qui dispose souvent de plusieurs lieux de villégiature à travers le globe.

La détermination de la résidence d’une personne physique est la condition préalable pour déterminer sa situation fiscale et ainsi définir les obligations qui lui incombent. Quelle que soit sa nationalité et ses liens avec un autre pays, si une personne physique est fiscalement domiciliée en France, elle relève du droit fiscal français pour son impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux mais également les droits de donation ou de succession.

quels sont les critères pour être résident fiscal en france ?

Il convient d’avoir à l’esprit que le domicile fiscal est décorrélé de la nationalité : un étranger peut être domicilié en France et un ressortissant français n’est pas nécessairement établi fiscalement en France.

L’article 4 B du CGI définit les critères permettant la détermination du domicile fiscal du contribuable.

Ces critères sont alternatifs et non pas cumulatifs, il convient qu’un seul soit rempli pour que la personne physique soit résidente fiscale française.

critères personnels : le foyer et le lieu de séjour principal

Le droit français retient deux critères personnels pour déterminer la résidence fiscale sur son sol : le foyer familial en première référence, à défaut le lieu de séjour principale.

Est ainsi résident(e) fiscal(e) en France :

  • toute personne qui a son foyer en France.Le foyer est caractérisé par le centre des intérêts familiaux du contribuable (pour le célibataire il s’agit du centre de vie personnelle) et le lieu où il habite normalement.La famille reste un marqueur relevant de la qualification du foyer.

    A ainsi été considéré comme ayant son foyer en France un contribuable dont l’épouse et les enfants vivent en Gironde, même s’il détient un appartement à l’étranger dans lequel il exerce son activité professionnelle et ce, durant de longs séjours (Conseil d’Etat 17/12/2010).

    A l’inverse, n’a pas de foyer en France une personne propriétaire d’un bien en France mais dont les factures d’électricité et de téléphone font apparaître des montants modestes montrant que l’intéressé n’a pas de vie de famille en France (Cour d’Appel Administrative Lyon 30/03/2017).

  • l’individu qui a en France son lieu de séjour principal, peu importe qu’il demeure dans une habitation lui appartenant, louée, mise à sa disposition ou à l’hôtel.

    Le caractère principal du séjour est établi pour un séjour en France de plus de 6 mois au cours d’une année ou si la durée en France est nettement supérieure à celle des séjours effectués à l’étranger.

En priorité, l’administration fiscale détermine s’il existe un foyer en France. Si c’est le cas, le lieu de séjour est sans effet. Ce n’est que s’il est impossible de qualifier un foyer que le lieu de séjour principal est examiné.

critère professionnel : le lieu d’exercice de son activité professionnelle à titre non accessoire

Est fiscalement domicilié en France, le salarié qui y exerce effectivement et régulièrement son activité professionnelle.

Pour les non-salariés, il convient de rechercher le point d’attache fixe en France.

A été qualifié comme ayant son activité professionnelle en France, un ressortissant autrichien qui disposait en France des moyens matériels nécessaires à son activité, comme un appartement où il avait installé son bureau (Cour d’Appel Administrative Paris 11/04/2018 : N°17PA01706 2 Chambre).

Dans l’hypothèse où la personne exerce dans plusieurs pays, l’individu sera sujet fiscal en France s’il y exerce son activité principale.

L’activité principale se définit comme celle à laquelle il consacre le plus de temps effectif, même si cette activité ne dégage pas l’essentiel de ses revenus et même si le contribuable n’en perçoit aucune rémunération.

Par une volonté accrue des autorités de renforcer le contrôle de la résidence fiscale des dirigeants d’entreprise, la Loi de Finances 2020 a étendu la domiciliation fiscale aux dirigeants dont l’entreprise a son siège social en France et réalise plus de 250 M€ de chiffre d’affaires (CA).

Au-delà de l’impact en matière d’imposition sur le revenu, cet élargissement de l’article 4 du CGI peut avoir de lourdes conséquences patrimoniales pour le dirigeant domicilié en France.

Ainsi, un ressortissant belge, habitant en Belgique en famille mais assurant la direction d’une entreprise en France à plus de 250 M€ de CA, est considéré sur la base de ce nouveau critère comme résident fiscal en France. S’il procède à une donation à ses enfants, il est alors imposable aux droits de donation selon le barème français (tranche marginale d’imposition à 45% pour la part taxable transmise supérieure à 1 805 677 €), quand bien même en Belgique les droits de donation peuvent, sous conditions, être réduits à zéro.

De même, un ressortissant portugais habitant au Portugal, mais domicilié en France sur ce nouveau marqueur, relève des droits de succession en France alors qu’ils n’existent pas au Portugal.

troisième critère : le centre des intérêts économiques

Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France, les personnes qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques et ce, même si elles n’y séjournent pas ou n’y ont pas d’activité professionnelle.

Critère très large, le centre des intérêts économiques du contribuable vise le lieu où il a effectué ses principaux investissements, possède le siège de ses affaires, administre ses biens ou en tire la majeure partie de ses revenus.

La détermination du centre des intérêts économiques peut être délicate car elle nécessite une comparaison entre la situation du contribuable en France et dans d’autres pays.

Ainsi, un retraité au Cambodge a son centre des intérêts économiques en France, car il perçoit une retraite de source française qui constitue sa seule source de revenus (Conseil d’Etat 17/06/2015).

De même, un ressortissant français résidant à Monaco a été considéré comme ayant le centre de ses intérêts économiques en France l’année où il a réalisé une importante plus-value de cessions de titres d’une société française, sans commune mesure avec ses revenus de source monégasque (Cour d’Appel Administrative Marseille 25/03/2016).

Avec les nombreux confinements et restrictions de circulation liés à la Crise du Covid 19, la question s’est posée si un contribuable, « bloqué » en France pendant de long mois du fait de ces circonstances exceptionnelles, pouvait y être considéré comme domicilié fiscalement.

Un communiqué de la Direction des Impôts des non-résidents (DINR) a précisé qu’un séjour temporaire en France au titre du confinement ou de restrictions de circulation (travel ban) décidées par la France ou d’autres Etats n’est pas de nature à qualifier une résidence fiscale en France, sous réserves que les autres critères de l’article 4 du CGI ne soient pas remplis.

Ainsi, une personne vivant aux Etats-Unis avec sa famille mais étant confinée en France pour une période indéterminée ne devient pas fiscalement français.

peut-on être résident dans deux pays ? articulation entre le droit interne et le droit conventionnel

Lorsqu’une personne physique remplit les conditions de résidence de deux Etats, il convient de se référer à la Convention fiscale signée entre les Etats contractants, afin de déterminer la juridiction dans laquelle le contribuable doit être considéré comme domicilié.

Il est alors nécessaire de se référer à la convention fiscale concernée sachant qu’il existe plus de 3000 conventions fiscales bilatérales dans le monde. En 2019, la France compte ainsi 121 conventions fiscales avec des pays tiers, ce qui en fait l’un des réseaux le plus large au monde.

Dans un souci d’harmonisation, l’ONU mais aussi l’OCDE ont établi des modèles dont les conventions bilatérales s’inspirent.

La convention de l’ONU concerne principalement les situations de double imposition entre pays développés et pays dits en développement.

La Convention modèle OCDE traite de l’imposition sur le revenu et la fortune. Elle établit des critères qui doivent être examinés de manière successive.

Une personne physique est réputée résidente de l’Etat contractant :

  • où elle dispose d’un foyer permanent d’habitation (toute forme d’habitation aménagée et réservée à l’usage de l’intéressé d’une manière durable)
  • où elle a le centre de ses intérêts vitaux (relations familiales et sociales, le siège des affaires de l’intéressé, la répartition de son patrimoine mobilier ou immobilier, activités culturelles ou politiques…)
  • où elle séjourne de façon habituelle
  • dont elle possède la nationalité

transfert de domicile fiscal : les précautions à prendre

Afin de se prémunir contre une éventuelle tentative de requalification de son domicile fiscal, la personne physique quittant la France se doit de respecter un minimum de recommandations.

Compte tenu du premier critère du foyer familial, il semble impératif que l’ensemble des membres du foyer fiscal se délocalisent, ce qui implique le départ du conjoint et des enfants.

Concernant l’immobilier, les critères du lieu de séjour principal mais aussi de centre des intérêts économiques supposent :

  • de ne pas conserver la résidence principale en libre disposition
  • de céder la majeure partie de l’immobilier locatif avant le départ ou de les donner en pleine propriété aux enfants non attachés au foyer fiscal.

Idéalement, il faut rompre tout lien professionnel avec la France. Il est conseillé au chef d’entreprise qui conserve une société en France, d’en déléguer la gestion ou d’être nommé Président du Conseil de Surveillance, activité non salariée rémunérée par des jetons de présence et qui ne nécessite pas une présence quotidienne.

Les actifs financiers peuvent être également considérés comme une source de revenus et un centre d’intérêt économique. La majorité de ces placements doit être transférée hors de France (Luxembourg, Suisse).

En matière de vie sociale, il convient également de résilier tous les abonnements qui soulignent une activité en France (opéras, clubs de sport…) et les prévoir dans le nouvel Etat de résidence.

Depuis 2020, les autorités fiscales disposent d’un nouvel arsenal pour contrôler la résidence fiscale du contribuable (et les fausses domiciliations à l’étranger) en ayant la possibilité de collecter et d’exploiter les contenus accessibles sur les plateformes d’échanges ou les réseaux sociaux. Certains contribuables devront être prudents avant de publier sur Internet les clichés de « vacances prolongées » à Paris ou sur la Côte d’Azur.

Déterminer la résidence fiscale en France est une opération complexe. Les principes directeurs restent très larges et l’apport de la jurisprudence est omniprésent. Il est également nécessaire de recourir aux conventions fiscales internationales, d’application délicate.

Les modes de vie, de plus en plus internationalisés, soulèvent aussi de nouvelles interrogations quant à la détermination de la résidence fiscale.

Quant aux souhaits de transfert de résidence à l’étranger, ils doivent être étudiés avec précision car des indices de domiciliation fiscale en France peuvent demeurer.

Dans tous les cas, il est indispensable de consulter un conseil spécialisé en gestion de patrimoine internationale dont le rôle est ici essentiel.

Auteur
Julien Milinkiewicz  

Formateur intervenant à L’École supérieure de la banque – Ingénieur patrimonial Luxembourg