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Gestion des valeurs mobilières de placement (VMP) : détention directe ou choix d’une structure impôt sur les sociétés (IS)

Gestion des valeurs mobilières de placement (VMP) : détention directe ou choix d’une structure impôt sur les sociétés (IS)

Temps de lecture estimé : 9 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Vaut-il mieux gérer un portefeuille de valeurs mobilières à  l’IR (Impôt sur le Revenu) ou dans une structure à l’IS (Impôt sur les Sociétés) ? Le point sur les solutions les plus appropriées suivant les objectifs patrimoniaux recherchés.

Optimiser fiscalement le patrimoine financier consiste à réaliser les arbitrages de gestion, le financement du train de vie ainsi que la transmission in fine du patrimoine dans le cadre fiscal le moins onéreux, tout en respectant les objectifs patrimoniaux et familiaux.

S’agissant d’un portefeuille de valeurs mobilières, la fiscalité se trouve le plus souvent être celle de l’impôt sur le revenu (IR) dans la rubrique des plus-values mobilières et/ou des revenus de capitaux mobiliers, ainsi que celle de l’impôt sur la fortune (IFI) du point de vue du plafonnement de cet impôt.

Néanmoins, un autre cadre fiscal peut également être envisagé : celui de l’IS (Impôt sur les Sociétés). Quelle solution est-alors la plus opportune ? Explications.

 

SOMMAIRE

  • Les hypothèses à considérer
  • In or out : quelles opportunités pour les liquidités surabondantes détenues par une structure holding ?
  • Les différentes observations
  • Conclusion

 

Les hypothèses à considérer

On retiendra, à titre de postulat général, que si l’option à retenir se définit a priori très simplement pour des capitaux liquides détenus en direct, il n’en est pas de même si la trésorerie à investir se trouve d’ores et déjà à l’actif du bilan d’une structure soumise à l’IS.

 

Hypothèse 1 : investissement de liquidités détenues directement par un particulier.

Cette configuration amène le plus souvent à exclure le recours à une structure IS.

En effet, la gestion des actifs financiers subit annuellement l’IS au taux normal soit 25 % à ce jour (15 % sur la fraction du bénéfice inférieure à 38 120 € pour les PME dont le chiffres d’affaires est inférieur à 7,63 M €).

Le financement du train de vie par distribution de dividendes suppose, par ailleurs, une taxation de l’intégralité des flux perçus, à l’impôt sur le revenu soit au prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 12,8% soit, sur option (annuelle et globale), au barème progressif de l’IR sur une assiette réduite de 40%. L’assujettissement aux PS (17,2 %) est à prévoir dans l’une et l’autre des deux situations. La CEHR (3 ou 4 %) peut aussi trouver à s’appliquer.

Sur un autre registre, il peut enfin entraîner, dans certains cas, le « déplafonnement » de l’IFI. Cette situation serait synonyme d’une fiscalité globale pouvant atteindre 75 % des revenus perçus.

Ces contraintes militent pour que soient retenues, dans cette configuration, l’acquisition et la gestion des valeurs mobilières de placement au sein d’enveloppes juridiques spécifiques tels ceux du PEA et/ou des contrats d’assurance-vie ou de capitalisation.

La tendance sera donc de délaisser le compte titres dit « ordinaire » victime de son incapacité à véritablement capitaliser ses revenus et ses produits constatés lors des arbitrages dans le cadre de la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières de placement.

 

Hypothèse 2 : investissement des liquidités figurant à l’actif du bilan d’une société soumise à l’IS

Cette configuration est notamment rencontrée lorsqu’une holding cède une ou plusieurs de ses filiales. On parle alors d’une cession « par le bas ».

Le traitement fiscal propre à une telle opération dépend du fait de savoir si les droits sociaux représentatifs du capital de la filiale répondent ou non à la qualification comptable et fiscale de titres de participation et s’ils sont détenus depuis au moins deux ans.

 

Les titres de participation sont, au sein du bilan d’une structure, des immobilisations financières. Elles représentent des actifs à vocation de détention durable par opposition aux valeurs mobilières de placement acquises dans la perspective d’une conservation plutôt courte. Cette qualification suppose par ailleurs une comptabilisation au sein d’un compte spécifique.

 

Si ces deux conditions sont réunies, les gains générés sont en principe en majeure partie exonérés d’IS.

En effet, en situation de cession de titres de participation, seule une quote-part de frais et charges doit être réintégrée dans le résultat imposable du holding cédant.

Elle est fixée à 12 % du montant brut de la plus-value réalisée, ce qui limite à 3,72% maximum le frottement fiscal pour une cession opérée en 2019.

C’est donc d’un capital in fine peu impacté par la fiscalité dont il va falloir flécher la destination. A cet égard, deux options existent :

  • maintenir les liquidités au sein de la structure ou inversement
  • externaliser les capitaux

 

In or out : quelles opportunités pour les liquidités surabondantes détenues par une structure holding ?

L’exercice à mener sur cette base s’avère ambitieux et en réalité des plus complexe. Il suppose, en effet, de trancher entre les deux options suivantes :

  • conservation des liquidités au sein de la holding laquelle devient purement patrimoniale et gère ses actifs sous IS.
  • externalisation de tout ou partie de sa trésorerie au profit de ses actionnaires afin qu’ils l’investissent à titre direct et personnel.

Répondre à cette interrogation stratégique « in or out » n’est pas simple et trois critères principaux sont à prendre en considération :

  • La taxation cumulée à prendre en compte : de la perception du prix de cession, en passant par son éventuelle extériorisation au bénéfice du détenteur du capital, à la transmission par décès [IS + DMTG (Droits de mutation à titre gratuit ou droits de succession) versus IR, PS, CEHR + 990 I du CGI (fiscalité spécifique du dénouement par décès de l’assurance-vie)].
  • L’espérance de vie de l’associé.
  • La rentabilité espérée des supports retenus pour l’investissement des liquidités en dedans et en dehors de la holding.

Replaçons successivement ces critères dans chacune des situations. Arrêtons-nous tout d’abord sur l’option suivante : conservation du prix de cession net de fiscalité au sein de la holding.

Si l’on retient l’hypothèse de l’investissement des liquidités en VMP, la performance de celles-ci, si elle est positive, sera au titre de chaque exercice, amputée du taux normal de l’IS, pénalisant de fait significativement l’effet de capitalisation.

Ce frottement fiscal n’est malheureusement pas le seul à prendre en compte dans le scénario envisagé. En effet, en cas de décès de l’actionnaire du holding, la valeur de cette dernière sera comprise dans l’actif successoral et donc soumise aux droits de succession à un taux pouvant marginalement atteindre 45%.

Le cumul de ces deux fiscalités acquittées, l’une au fil du temps (IS) et l’autre à terme (droits de succession), représente une imposition globale des plus significatives mais permet aux héritiers ou légataires, s’ils devaient décider la dissolution de la holding immédiatement après la cession, de percevoir un boni de liquidation ne supposant aucun frottement supplémentaire en termes d’IR, de PS, ou de CEHR.

La seconde approche possible consiste à organiser la récupération du prix de cession net d’IS capté par le holding entre les mains du détenteur du capital de la structure.

Cette modalité pourra emprunter différentes formes : une distribution de dividendes, une réduction de capital ou encore une dissolution pure et simple.

La fiscalité propre à ces différents modes opératoires consistera dans de nombreux cas en un frottement global de 30 % (celui du PFU majoré des PS), éventuellement complété de 3 ou 4 % de CEHR. Il pourrait porter, pour peu que les capitaux propres investis initialement aient été modestes, sur des montants semblables dans les trois hypothèses visées.

Dans le cas d’un placement en VMP opéré par l’investisseur via la souscription d’un contrat d’assurance-vie, la performance de celles-ci sera, dans l’hypothèse d’un dénouement du contrat par décès, fiscalisée au taux de 17,2% au seul titre des PS (à l’exception de ceux prélevés au fil de l’eau sur la partie placée en fonds en euros).

Le capital net transmis au(x) bénéficiaire(s) désigné(s) par le souscripteur s’effectuera moyennant une imposition maximum de 31,25% s’agissant des capitaux versés avant les 70 ans du souscripteur.

Le choix de la pondération à retenir entre ces deux schémas d’investissement relève de paramètres multiples et nécessairement variables d’une situation à une autre. Il peut être facilité par le recours à des modélisations. Ces dernières reposent sur différents postulats lesquels devront parfois être simplifiés.

On se limitera ainsi, dans une première approche, à l’idée d’un investisseur unique transmettant son patrimoine, quelle que soit la forme empruntée par la transmission (succession ou bénéfice d’un contrat d’assurance-vie) à destinataire unique.

Ci-après figure un exemple d’une telle simulation reposant sur les scenarii suivants :

  • Trésorerie disponible dans la société IS : 1 000 000€.
  • Trésorerie externalisée (via une distribution ou une réduction de capital) : 660 000€ (PFU de 12,8% + PS de 17,2% + CEHR au taux de 4 %).
  • Hypothèses de rendement des supports d’investissement :
    • H1 : 3 %,
    • H2 : 6 %,
    • H3 : 9 %.
  • Fiscalité durant la détention :
    • Taux de l’IS : 25%,
    • PS prélevés lors du dénouement du contrat au taux global de 17,2%.
  • Fiscalité de la transmission :
    • Droits de succession : TMI de 45 %,
    • Fiscalité de l’assurance-vie (CGI, art. 990 I) : TMI de 31,25 %.

Remarque :

  • Les taux d’imposition sont retenus pour leur valeur marginale et constante dans le temps

Les graphiques ci-après permettent de visualiser l’impact des données retenues ci-dessus sur l’évolution comparée des deux hypothèses de travail. En abscisse figure le temps qui passe et en ordonnée la valeur des capitaux nets transmis.

 

Hypothèses de rendement :

 

Comme nous pouvons le constater, l’option d’externaliser les fonds de la structure IS pour les investir en assurance-vie s’avère plus pertinente au-delà d’une durée d’investissement de :

  • 45 ans dans l’hypothèse d’un taux de rendement annuel moyen de 3%,
  • 24 ans si ce même taux est de 6%,
  • 16 ans s’il est de 9%.

 

Les différentes observations

  • La solution d’externaliser les capitaux de la holding accuse dans un premier temps un retard significatif par rapport à celle du maintien de cette trésorerie à l’actif de la société.
  • La mise à disposition de revenus complémentaires (via des rachats opérés sur des contrats d’assurance-vie ou via une distribution de dividende initiée à partir d’une structure soumise à l’IS) est un facteur pouvant influer sur le résultat de l’approche modélisée.
  • Les caractéristiques propres à la fiscalité de l’assurance-vie permettent de réduire progressivement le retard lié à la sortir précoce de la trésorerie de la structure holding.
  • L’importance du rendement net de fiscalité avant transmission du placement renforce cette analyse : plus la rentabilité nette est forte, plus le point de convergence des courbes interviendra tôt.
  • La fiscalité relative à la transmission par décès des capitaux placés en assurance-vie joue aussi un rôle. Sous réserve d’avoir investi son épargne avant l’âge de 70 ans, le taux marginal de fiscalité prévu par l’article 990 I du CGI (soit 31,25 %) sera moins élevé dans le contexte de l’assurance-vie que dans le cadre des droits de succession (DMTG au taux marginal de (45 %).
  • L’investissement financier réalisé dans chacun des scénarios étudiés prenant fin, dans notre hypothèse de travail, au décès de l’investisseur, l’espérance de vie de ce dernier est, de fait, un paramètre important de la modélisation.
  • En fonction de la durée de vie moyenne indiquée par les tables de mortalité, le croisement des deux courbes peut donc, en toute probabilité, ne pas avoir lieu du vivant de l’investisseur. Ces dernières sont, par exemple, sensées se rejoindre en N + 45 pour une rentabilité moyenne de 3%, alors que l’espérance de vie, selon l’INSEE d’une personne de 69 ans se limite à 19 ans et 8 mois pour une femme et 16 ans et 2 mois pour un homme.

 

Conclusion

Ces constats nous orientent vers les éléments de conclusion suivants :

  • Eu égard à la volatilité des marchés financiers, il peut parfois s’avérer déraisonnable d’escompter un taux de rendement moyen conséquent sur le long terme.
  • S’agissant d’une personne âgée de moins de 70 ans, l’opportunité d’une sortie des capitaux et un investissement en assurance-vie sera d’autant plus à privilégier que son espérance de vie statistique est longue.

Toutefois, compte tenu de l’instabilité de notre droit fiscal, cette appréciation doit être tempérée.

Il semble en effet clair que la possibilité d’aménagements et autres changements de cap pouvant intervenir sur la période considérée doivent nous inciter à pondérer les conclusions mathématiques obtenues par les simulations.

Ainsi l’idée est ainsi de suivre pour l’essentiel la conclusion démontrée par le calcul. La solution globale devra sans doute, à titre de diversification, laisser une place à la piste alternative étudiée.

 

Auteur

Pascal PREVOT

Directeur de l’Ingénierie Patrimoniale de Natixis Wealth Management – Intervenant à l’ESBanque lors des sessions de Travaux collaboratifs et Président de jury du Grand Oral

Société à l’IS : comment optimiser la plus-value de cession ?

Société à l’IS : comment optimiser la plus-value de cession ?

Temps de lecture estimé : 8 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Deux principaux schémas patrimoniaux permettent d’optimiser la plus-value de cession de titres de société à l’IS mais ne sont pas sans risques fiscaux et patrimoniaux. Explications !

 

Nous avons présenté dans notre précédent article les régimes d’imposition de la plus-value de cession de titres de société à l’IS. Ces régimes concernent les titres de sociétés cotées, détenus en portefeuille-titres, mais également la cession d’actions ou de parts sociales du chef d’entreprise.

Dans certains cas, et principalement lorsque les titres ont été acquis avant la 01/01/2018, il est possible de bénéficier d’abattement pour durée de détention lorsque l’on opte pour l’imposition de la plus-value de cession au barème de l’IR. Comme nous l’avons vu, ces abattements sont plus intéressants que le choix de l’imposition au PFU (Prélèvement forfaitaire unique) en cas de durée de détention longue (supérieure à 8 ans) et de possibilité de déduction de la CSG l’année suivant la cession.

Est-il possible d’aller plus loin afin de réduire l’imposition sur plus-value de cession de titres de société à l’IS ?

Les régimes d’imposition n’offrent pas plus de possibilité mais des schémas patrimoniaux de cession permettent d’optimiser cette imposition. Il s’agit principalement de l’apport-cession de titres à une holding à l’IS et de la donation avant cession.

Ces opérations ne sont pas sans risque et peuvent être requalifiées en abus de droit s’il était démontré qu’elles ont été réalisées dans un objectif exclusivement ou principalement fiscal.

Au-delà de ce risque fiscal, ces schémas doivent dans tous les cas correspondre à des objectifs patrimoniaux précis. Ils supposent en effet des contraintes significatives et les mettre en place pour des raisons uniquement fiscales serait une grave erreur patrimoniale. Le point sur ces méthodes d’optimisation de l’imposition sur plus-value.

 

SOMMAIRE

  • L’apport-cession et impôt sur plus-value
  • Donation avant cession de la société à l’IS

 

L’apport-cession et impôt sur plus-value

 

L’apport-cession est un schéma souvent proposé pour réduire l’imposition sur plus-value de cession.

Il est néanmoins important de rappeler que tout schéma d’optimisation fiscale doit répondre à un objectif patrimonial précis, pour deux raisons :

  • éviter le risque de requalification en abus de droit si l’opération était considérée comme poursuivant un objectif exclusivement fiscal et depuis 2021 celui dit du « mini-abus de droit » en cas de poursuite d’un objectif principalement fiscal.
  • permettre la réalisation des objectifs personnels de l’entrepreneur après cession. Créer une nouvelle holding pour des raisons uniquement fiscales peut être une erreur si elle ne correspond pas aux objectifs de vie de l’entrepreneur après cession, voire pire si elle empêche de les accomplir.

L’apport-cession consiste à apporter les titres de la société à l’IS à une société holding à l’IS, souvent créée à cet effet, puis à ce que cette holding vende les titres ainsi reçus. L’apport ne générera pas d’imposition immédiate car il sera placé soit sous :

  • le régime du sursis d’imposition (article 150-0 B du CGI) si l’apporteur ne contrôle pas la société qui reçoit les titres
  • le régime du report d’imposition si l’apporteur contrôle cette société holding bénéficiaire de l’apport (article 150-0 B ter du CGI).

A noter que s’il y a paiement d’une soulte en numéraire lors de l’apport, elle ne doit pas dépasser 10 % de la valeur nominale des titres de la holding reçus en échange.

 

 

Dans le cadre d’une cession d’entreprise, compte tenu de l’importance de la valeur d’apport, il est difficile d’apporter les titres à une société que l’on ne contrôlerait pas après apport.

Les opérations d’apport-cession se font donc en général dans le cadre du régime du report d’imposition, de l’article 150-0 B ter du CGI.

L’opération de cession des titres reçus par la holding à l’IS ne génère logiquement pas de plus-value imposable au niveau de cette holding, le prix de cession étant proche du prix d’apport.

Cette cession des titres par la holding peut néanmoins remettre en cause la plus-value d’apport jusqu’ici en report d’imposition, sauf si certaines conditions bien précises sont respectées.

Depuis 2012, le régime de l’article 150-0 B ter prévoit en effet qu’en cas de cession des titres apportés, le régime de report tombe et l’imposition sur plus-value devient imposable sauf dans certaines situations :

  • si la cession des titres apportés a lieu plus de trois ans après l’apport à la holding, le report ne tombe pas et cette cession n’entraîne pas l’imposition de la plus-value en report. Ceci nécessite néanmoins d’attendre ce délai. Il est dans ce cas nécessaire d’anticiper l’opération de cession par la création de la holding et l’apport à cette holding au moins trois avant.

Par ailleurs, en trois ans, les titres apportés peuvent prendre de la valeur, auquel cas la holding dégagera une plus-value sur ces titres lors de leur cession. Si les titres apportés peuvent être considérés comme des titres de participation (inscrits comme tel à l’actif, représentant au moins 10 % de la société apportée et détenus dans un objectif durable par la holding qui exerce une influence sur la société filiale), leur cession après 2 ans de détention par la holding relève du régime des plus-values à long terme. La plus-value n’est pas imposable mais une quote-part de 12 % de cette plus-value brute est réintégrée dans le bénéfice imposable. Si les titres apportés étaient qualifiés de titres de placement, la plus-value est alors intégralement imposable à l’IS.

  • Si les titres apportés sont cédés moins de trois ans après l’apport, la plus-value en report devient imposable sauf à ce que la holding réinvestisse au moins 60 % du prix de cession dans des activités économiques éligibles et ce dans un délai de 2 ans. Il peut s’agir :
    • d’investir dans une activité commerciale, industrielle, agricole, libérale ou financière et dans les actifs et moyens de production nécessaires.
    • d’acquérir une fraction du capital d’une société exerçant ce type d’activité économique et d’en détenir par là le contrôle.
    • de souscrire en numéraire au capital initial ou à l’augmentation du capital d’une société ayant une activité économique.
    • de souscrire à des parts de fonds de capital investissement investissant dans des PME opérationnelles (FCPR (Fonds Commun de Placement à Risque), FCPI (Fonds Professionnels de Capital Investissement), SCR (Société de Capital-Risque) …). Depuis le 01/01/2020, seule la date de souscription aux fonds de réinvestissement est prise en compte, quelles que soient les dates de libération successives de capital des fonds (celles-ci devant néanmoins intervenir dans un délai maximal de 5 ans). Il est donc nécessaire de souscrire aux parts de ces fonds dans un délai de 2 ans après la cession des titres apportés pour ne pas remettre en cause le report de plus-value.

Avant 2012, ces conditions de réinvestissement n’existaient pas pour les apports-cessions. Il était donc possible que la holding cède les titres apportés sans remettre en cause le report d’imposition. La holding avait alors toute latitude pour réinvestir librement les fonds, y compris dans une gestion patrimoniale (placement immobilier ou financier).

Dans tous les cas et même si les titres apportés ont été cédés dans les conditions permettant de ne pas rendre imposable la plus-value en report, celle-ci existe toujours et n’est pas purgée. La plus-value d’apport sera imposable notamment en cas de cession des titres de la holding (mais aussi en cas de rachat, d’annulation ou de remboursement de ces titres).

La plus-value d’apport en report peut néanmoins être purgée, sous conditions, en cas de donation des titres de la holding reçus en rémunération de l’apport. Le report de plus-value est transféré au bénéficiaire de la donation. Si ce donataire vend les titres de la holding au-delà d’un délai de 5 ans après la donation (ou 10 ans si la holding avait réinvesti dans des parts de fonds (FCPR …)), la plus-value en report est purgée et n’est pas due. Avant 2020, ce délai était de 18 mois.

 

 

Depuis 2012, et la nouvelle version de l’article 150-0 B ter du CGI, l’apport-cession a perdu de son pur intérêt fiscal. Il doit correspondre à un projet patrimonial précis de l’entrepreneur, celui de poursuivre des investissements dans des sociétés à l’IS relevant d’une activité économique.

Cette nécessité de réinvestissement dans les activités économiques permet néanmoins d’appliquer l’apport-cession dans les véritables situations patrimoniales où il a lieu d’être, c’est-à-dire lorsque l’entrepreneur a cet objectif personnel de réinvestissement.

Ceci évite également les situations inadaptées qui ont pu se présenter avant 2012 dans lesquelles le produit de la cession des titres était in fine détenu dans une holding à l’IS n’ayant pas vocation à réinvestir dans l’économie et devenant un outil patrimonial mal adapté (surcoût de la distribution pour percevoir des revenus, investissements patrimoniaux (immobilier par exemple) dans un régime, celui de l’IS, pas nécessairement adéquat).

 

Donation avant cession de la société à l’IS

 

Une deuxième stratégie d’optimisation de l’imposition sur plus-value consiste à donner les titres de la société avant leur cession.

La donation est imposée aux droits de mutation à titre gratuit mais ce coût fiscal permet d’anticiper la transmission successorale.

Les enfants donataires cèdent ensuite les titres de la société reçus par donation. Si le prix de cession est proche de celui de la donation, la plus-value imposable n’est pas significative.

Là encore, ces opérations doivent correspondre aux objectifs patrimoniaux de l’entrepreneur pour deux raisons :

  • éviter le risque de requalification en abus de droit et depuis 2021 le risque de « mini-abus de droit » comme nous l’avons mentionné précédemment. A ce sujet, si l’administration fiscale est venue préciser que la donation avec réserve d’usufruit ne serait pas considérée comme un objectif principalement fiscal, elle ne s‘est pas prononcée sur les opérations de donation avant cession. Il conviendra également d’être vigilant sur l’échéancier des opérations. Une donation réalisée alors que la cession est engagée (proposition d’achat des titres reçue avant la donation par exemple) pourrait relever d’une procédure d’abus de droit.

 

  • être certain de vouloir se dessaisir de la valeur des titres donnés avant leur cession: donner c’est donner. Si l’entrepreneur garde la pleine disposition du prix de cession des titres donnés, il en reprend la propriété et remet en cause la donation. Il est nécessaire également d’être vigilant sur ce point pour les donations de la seule nue-propriété. La cession des titres démembrés peut ensuite donner lieu à :
    • un remploi dans de nouveaux actifs démembrés. Dans ce cas, le prix de cession de ces titres démembrés doit être géré par l’usufruitier et le nu-propriétaire dans le cadre du démembrement. L’usufruiter ne doit pas se comporter comme un plein propriétaire.
    • un quasi-usufruit. Dans cette situation, l’entrepreneur cédant quasi-usufruiter dispose librement du prix de cession mais est redevable lors de sa succession d’une dette de restitution aux donataires nus-propriétaires. L’utilisation du quasi-usufruit dans le cadre des opérations de donation avant cession pourrait être néanmoins plus susceptible de requalification pour abus de droit, l’objectif patrimonial de pure transmission pouvant être fragilisé par la pleine disposition du prix de cession par l’usufruitier, quand bien même le nu-propriétaire dispose d’une créance de restitution. A moins d’être sécurisée (obligation de garantie), cette créance peut ne pas être remboursée si les actifs successoraux de l’usufruiter sont insuffisants.

Par ailleurs, l’imposition sur plus-value est spécifique pour les titres démembrés comme nous avons pu l’étudier dans un précédent article.

 

Dans tous les cas, il est important d’intégrer les enjeux de la cession le plus en amont possible. Les stratégies de ventes nécessitent d’être extrêmement bien préparées pour des raisons fiscales bien sûr mais également organisationnelles financières et patrimoniales.

L’optimisation fiscale de la cession, souvent recherchée, dépend avant tout des objectifs patrimoniaux de l’entrepreneur après cession. Cette optimisation doit par ailleurs être menée avec précaution pour éviter toute requalification en abus de droit.

Le choix de la stratégie de cession doit absolument être étudié avec les conseillers fiscaux et patrimoniaux de l’entrepreneur.

 

Auteurs

Anne Brouard

Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisé en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7

PLF 2020 : les nouvelles dispositions patrimoniales du Projet de Loi de Finances

PLF 2020 : les nouvelles dispositions patrimoniales du Projet de Loi de Finances

Temps de lecture estimé : 6 min

Présenté le 27 septembre en Conseil des Ministres, le Projet de Loi de Finances 2020 ne modifie pas en profondeur le cadre fiscal de la gestion de patrimoine comme ce fût le cas les années précédentes avec l’instauration du prélèvement à la source, du PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique) ou encore de l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière).
L’essentiel des dispositions visent à améliorer le pouvoir d’achat des ménages les plus modestes et à poursuivre la réduction de l’IS (Impôt sur les Sociétés) des entreprises françaises.
Baisse de l’IR, suppression de la taxe d’habitation mais revalorisation de la taxe foncière, CITE, AAH, APL et primes d’activité… Nous avons réalisé pour vous une synthèse des mesures patrimoniales du PLF 2020.

Ces dispositions ne seront définitives qu’après le vote de la Loi de Finances et sa promulgation au Journal Officiel le 31 décembre 2019.

impôt sur le revenu

réduction de l’ir pour les premières tranches du barème

Pour les revenus perçus en 2020, le taux d’imposition de la première tranche du barème passera de 14 % actuellement à 11 %.

Pour les autres tranches, les modifications concerneront les seuils. Les plafonds des trois premières tranches seront abaissés. Les contribuables imposés aux deux dernières tranches, au taux de 41 % et de 45 %, s’en trouveront de facto plus imposés.
Ces seuils seront revalorisés annuellement sur l’inflation.

Mais la modification du barème de l’IR n’est pas si simple dans son application car elle devra tenir compte du prélèvement à la source (PAS).

Le taux du prélèvement à la source déjà calculé à partir de la déclaration d’impôt réalisée en 2019 et applicable sur les revenus de septembre 2019 à août 2020 devra être recalculé sur un nouveau barème pour que la réduction de l’IR prévue puisse avoir son effet sur les revenus des contribuables concernés dès le mois de janvier 2020.

Le véritable barème de l’IR sur les revenus 2020 sera applicable pour la déclaration d’impôt qui sera déposée au printemps 2020 et produira ses effets sur le calcul du taux de PAS 2020 applicable sur les revenus de septembre 2020 à août 2021.

synthèse des barèmes applicables

Barème actuel servant de calcul au taux de PAS (prélèvement à la source) applicable sur les revenus perçus de septembre 2019 à décembre 2019

BAREME IR 2019 sur les revenus 2018
servant actuellement de calcul au taux du PAS 2019 applicable de septembre à décembre 2019
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 9 964 €0 %
De 9 964 € à 27 519 €14 %
De 27 519 € à 73 779 €30 %
De 73 779 € à 156 244 €41 %
Supérieurs à 156 244 €45 %

Barème 2019 revu pour recalculer le taux de PAS applicable sur les revenus perçus de janvier 2020 à août 2020

BAREME IR 2019 revu pour calculer le nouveau taux de PAS applicable sur les revenus de janvier à août 2020
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 9 964 €0 %
De 9 964 € à 25 405 €11 %
De 25 405 € à 72 643 €30 %
De 72 643 € à 156 244 €41 %
Supérieurs à 156 244 €45 %

Barème 2020 permettant de calculer le taux de PAS applicable sur les revenus perçus de septembre 2020 à août 2021

BAREME IR 2020 sur les revenus 2020
permettant le calcul du taux de PAS 2020 applicable de septembre à août 2021
Revenus pour une part de Quotient FamilialTaux d’imposition
Jusqu’à 10 064 €0 %
De 10 064 € à 25 659 €11 %
De 25 659 € à 73 369 €30 %
De 73 369 € à 157 806 €41 %
Supérieurs à 157 806 €45 %

L’économie d’impôt moyenne en 2020 est estimée à 350 € par an pour un foyer fiscal imposé à la première tranche, 180 € s’il est imposé à la deuxième tranche.
L’économie globale (ou le coût pour l’Etat) serait de l’ordre de 5 milliards d’euros.

nouveau calcul de la décote de l’ir

La décote permet d’effacer partiellement ou totalement l’impôt à payer pour les contribuables redevable d’un impôt sur le revenu faible (IR inférieur à 2627 € pour un couple et 1595 € pour une personne seule en 2019).

Le calcul actuel de la décote est le suivant :
1 970 € pour un couple marié (1 196 € pour une personne seule) – 75 % de l’IR calculé selon le barème.

Compte tenu de la baisse du taux de la première tranche du barème, le projet de Loi de Finances 2020 prévoit de revoir le calcul de la décote de la manière suivante :
1 286 € pour un couple marié (777 € pour une personne seule) – 45,25 % de l’IR calculé selon le barème.

modification du plafonnement du quotient familial

Le montant du plafonnement du quotient familial de 1 551 € en 2019 est porté à 1 567 €.

dispense de déclaration : déclaration tacite

Les contribuables qui n’auront pas de changement en terme de composition et de revenus seront dispensés d’établir une déclaration d’impôt annuel. L’absence de déclaration sera considérée comme une déclaration tacite du même type de revenus que l’année précédente.
Cette situation concernera les redevables percevant des revenus connus de l’administration et prélevés à la source tels que des salaires ou des pensions et retraites. La perception de bénéfices industriels ou commerciaux, de bénéfices non commerciaux, de bénéfices agricoles ou plus largement de revenus fonciers nécessiteront une déclaration annuelle, leur montant étant variable.
La déclaration tacite devrait concerner néanmoins selon le Ministère du Budget environ 12 millions de ménages.

exonération d’ir et de cotisations sociales reconduites pour 2020 sur :

  • les heures supplémentaires (même régime que 2019),
  • la prime exceptionnelle : instaurée en fin d’année 2019, cette prime peut être versée par l’employeur aux salariés en bénéficiant d’une exonération d’IR et de cotisations sociales (à condition que le montant de la prime individuelle soit au maximum de 1 000 € et la rémunération mensuelle du salarié concerné soit inférieur à 3 fois le SMIC, environ 3 600 €).
    Cette mesure est reconduite pour 2020 mais néanmoins subordonnée à la mise en place d’un accord d’intéressement dans l’entreprise.

suppression de la taxe d’habitation

Il est prévu en 2020 une suppression de la taxe d’habitation pour les foyers fiscaux dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 27 000 € pour une personne seule, 43 000 € pour un couple. 80 % des ménages seraient concernés. Pour les 20 % des foyers restants, la suppression de la taxe se fera par tiers de 2021 à 2023.

Attention néanmoins, cette suppression ne concerne que la résidence principale. Les résidences secondaires restent imposables.

Le gain moyen par foyer fiscal serait évalué à 723 € par an.

Parallèlement, l’Etat prévoit de lancer à partir de 2020 la révision des valeurs cadastrales servant de base de calcul à la taxe foncière, ces valeurs datant de 1970.
Déjà intervenue ponctuellement en 2019 pour certains contribuables, cette réévaluation se poursuivra progressivement jusqu’en 2026.
On peut donc s’attendre à une augmentation de la taxe foncière.

revalorisation des retraites et de certaines prestations sociales

  • La retraite de base sera revalorisée en 2020 sur la base de l’inflation pour les retraités dont la retraite brute globale (retraite de base + retraite complémentaire) est inférieure à 2 000 € par mois. Dans les autres cas, la retraite de base sera revalorisée de 0,3 %,
  • L’AAH (Allocation Adulte Handicapée) sera revalorisée de 0,3 %, son plafond étant de 900 € par mois.
  • L’APL (Aide Personnalisée aux Logements) sera également revalorisée de 0,3 % et les conditions de revenus pour en bénéficier seront prises en compte sur la base des revenus de l’année en cours et non plus des deux dernières années.
  • La prime d’activité (remplaçant depuis le 1er janvier 2016 le RSA (Revenu de Solidarité Active) et la prime pour l’emploi) sera revalorisée de 0,3 %.

mesures en faveur de la transition énergétique

refonte du cite (crédit d’impôt pour la transition énergétique)

Ce crédit d’impôt permet actuellement de bénéficier d’une réduction d’IR égale à 30 % des dépenses énergétiques réalisées prises en compte dans la limite de 8 000 € pour une personne seule, 16 000 € pour un couple, plafond apprécié sur une période de 5 années consécutives.

Ce crédit d’impôt sera conditionné à des montants de revenus et transformé progressivement en 2020 et 2021 en prime forfaitaire (distribuée par l’ANAH – Agence Nationale de l’Habitat). Cette prime sera recentrée afin de bénéficier pour 40 % aux ménages les plus modestes. 20 % des ménages les plus aisés seront exclus du dispositif.

primes de conversion et bonus automobile pour véhicules électriques

La prime de conversion sera recentrée sur les véhicules les moins polluants avec conditions de revenus des ménages pouvant en bénéficier.

Le bonus automobile visant à développer le parc de véhicules électriques devrait bénéficier d’une augmentation de 50 % des ressources allouées.

En savoir plus :

baisse de l’is pour les sociétés

L’Impôt sur les Sociétés baissera progressivement, de manière différenciée pour les grandes entreprises (Chiffre d’affaires supérieur à 25 milliards €) et pour les petites et moyennes entreprises (PME), mais avec un objectif de taux d’IS unique abaissé à 25 % en 2022.

evolution du taux d’is

2019202020212022
Grandes entreprises
CA > 25 Milliards €

33,33 %28 % jusqu’à 500 000 € de bénéfice

31 % au-delà
27,5 %25 %
PME31 %28 %26,5 %25 %

En savoir plus :

Pas de réforme en profondeur donc pour le PLF 2020 concernant la fiscalité des ménages et des sociétés mais une poursuite des mesures fiscales visant à améliorer le pouvoir d’achat des ménages modestes et à réduire l’IS des entreprises.
Il faut dire que de grandes réformes patrimoniales ont déjà été réalisées en 2018 et 2019 avec l’instauration du PFU (Prélèvement Forfaitaire Unique), du PAS (Prélèvement A la Source), de l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière), la modification de la fiscalité des retraits d’assurance-vie ou avec la loi PACTE (création du PER, modification du PEA).
Ceci n’exclut pas que les futures réformes de fonds (système de retraites, adaptation du régime des transmissions à titre gratuit à l’augmentation de l’espérance de vie, financement de la dépendance …) restent toujours d’actualité et les futurs chantiers à venir.

 

Sources :

Auteur

Anne Brouard  

Formateur intervenant au CFPB pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine.