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Loi de Finances 2024 : les impacts sur la location meublée, les donations en quasi-usufruit,  l’IFI et le pacte Dutreil

Loi de Finances 2024 : les impacts sur la location meublée, les donations en quasi-usufruit, l’IFI et le pacte Dutreil

Temps de lecture estimé : 8 min

Rédaction WEB : JUST DEEP CONTENT

La Loi de finances 2024 comporte des conséquences patrimoniales importantes : la modification du régime micro-BIC de la location meublée, les restrictions des effets fiscaux des donations de sommes d’argent démembrée, la déduction de certaines dettes à l’IFI, et des précisions sur les activités éligibles au dispositif Dutreil. Explications.

 

Parmi les mesures habituelles d’actualisation du barème de l’IR et de modifications de certains crédits d’impôt, plusieurs décisions de la Loi de finances 2024 ont des impacts nouveaux et conséquents sur les stratégies patrimoniales.

Elles concernent le régime fiscal de la location meublée et plus particulièrement du régime micro-BIC, le traitement fiscal de la créance de restitution suite à une donation de sommes d’argent avec réserve d’usufruit, la déduction de certaines dettes à l’IFI et des précisions attendues sur l’éligibilité de certaines activités au pacte Dutreil.

SOMMAIRE

  • Location meublée : un régime micro-Bic sérieusement écorné et par erreur
  • La donation démembrée de somme d’argent : fin de la déductibilité de la créance de restitution
  • IFI 2024 : certaines dettes ne sont plus déductibles en société
  • Loi de finances 2024 et Dutreil : des précisions sur les activités éligibles

Location meublée : un régime micro-Bic sérieusement écorné et par erreur

Fortement remis en cause, le régime fiscal de la location meublée est finalement revu sur son seul dispositif micro-BIC. Celui-ci est néanmoins fortement restreint et par erreur de rédaction de la loi.

 

 

Location meublée : un régime fiscal fortement discuté

Le régime fiscal de la location meublée a été largement discuté en préparation de la Loi de finances, l’attractivité fiscale de ce dispositif étant considéré comme favorisant les locations saisonnières de type « AirBnB » au détriment des locations d’habitation longue durée.

Les amendements proposés visaient à réduire les avantages du régime micro-BIC de la location meublée de courte durée et à l’aligner sur celui du régime micro-foncier de la location nue.

Certains amendements allaient plus loin et proposaient de réduire les avantages d’imposition de la plus-value de cession pour les loueurs en LMNP (Location Meublée Non Professionnelle). Sous ce statut en effet, la plus-value lors de la cession du bien relève du régime de la plus-value immobilière des particuliers (prix de revient majoré des frais d’acquisition et travaux non déduits (ou forfait sous conditions) et abattement pour durée de détention exonérant définitivement la plus-value au terme de 22 ans pour l’IR et 30 ans pour les prélèvements sociaux).

Un amendement proposait d’aligner le régime des plus-values de cession en LMNP avec celui de la LMP (Location Meublée Professionnelle), c’est-à-dire avec le régime des plus-values professionnelles. Dans ce régime, le prix de revient n’est pas majoré et est au contraire minoré des amortissements pratiqués, ce qui augmente la plus-value imposable dite à court terme.

Cette proposition de modification du calcul des plus-values de cession en LMNP n’a finalement pas été retenue et seules les modifications du régime micro-BIC ont été votées.

Ces modifications ont-elles-mêmes donné lieu à de nombreuses discussions sur le type de location meublée concernée, les plafonds et les taux d’abattement retenus.

Fin décembre, dans le cadre de la navette parlementaire, le Sénat a revu la proposition adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, en réduisant significativement les avantages du micro-BIC.

Bien que le gouvernement ne soutenait pas l’amendement du Sénat, cette proposition a néanmoins été incluse dans le projet définitif de Loi de Finances pour 2024. Il s’agit selon le gouvernement d’une « erreur » et des mesures devraient être prises d’ici la déclaration d’IR (Impôt sur le Revenu) 2024 pour rectifier ces règles.

Il n’en demeure pas moins qu’en l’état, la loi étant promulguée, c’est ce nouveau régime micro-Bic particulièrement défavorable qui s’applique et ceci sur les revenus déjà réalisés en 2023 puisque la Loi de finances est rétroactive.

 

 

Un nouveau régime micro-BIC pour la location meublée applicable dès 2023

Quelle est la teneur de ce nouveau régime micro-BIC ?

Jusqu’en 2022, les revenus des activités de location meublée, qu’il s’agisse de LMP ou de LMNP, pouvaient relever du régime micro-BIC sous certaines conditions de seuil de chiffre d’affaires. Les locations meublées de courte durée classées bénéficiaient également d’un abattement majoré de 71 %. Les principes peuvent être résumés dans le tableau suivant :

Régime micro-BIC de la location meublée avant la Loi de finances pour 2024 :

  Conditions de Chiffre d’affaires HT Abattement sur le Chiffre d’affaires
Location meublée d’habitation ou de courte durée non classée CA < 77.700 € 50 %
Location meublée de tourisme classées* CA < 188.700 € 71 %

*ainsi que chambre d’hôtes et gîtes

Source : JUST DEEP CONTENT

La Loi de finances 2024, tel que le prévoit son texte à ce jour, réduit le seuil de chiffre d’affaires pour bénéficier du régime micro-BIC à 15.000 €, ceci pour les locations meublées de courte durée, c’est-à-dire les locations saisonnières à la journée, à la semaine ou au mois (avec un maximum de 6 mois), autrement nommée location de tourisme. Concernant ce seuil, le texte ne précise pas quel type de location meublée de courte durée est concernée, classée ou non classée.

Parallèlement, le taux d’abattement est réduit à 30 % s’alignant ainsi sur le régime micro-foncier de la location nue.

Les meublés de tourisme classés peuvent bénéficier d’un taux d’abattement de 51 %, au lieu de 71 % auparavant, sous deux conditions cumulatives :

  • Le bien n’est pas situé dans une zone de déséquilibre d’offres et de demandes de logements. Il doit donc se situer dans les zones non tendues.
  • Le chiffre d’affaires HT de l’année précédente doit être inférieur à 15.000 €

Dans tous les cas, les locations meublées d’habitation de longue durée (bail étudiant, bail mobilité, bail meublé d’habitation) ne sont pas concernées et continuent donc de bénéficier des règles du micro BIC telles que définies antérieurement.

Régime micro BIC de la location meublée de courte durée depuis la Loi de Finances 2024, rétroactive aux revenus de 2023 :

  Conditions de Chiffre d’affaires HT Abattement sur le Chiffre d’affaires
Location meublée de courte durée non classée CA < 15.000 € 30 %
Location meublée de tourisme classées* CA < 15.000 €

51 %

Sous condition de situation en zone non tendue.

*ainsi que chambre d’hôtes et gîtes

Source : JUST DEEP CONTENT

Pour préciser la formule définitive du régime micro-BIC des locations meublées saisonnières et procéder à la « correction » du texte de loi, une instruction fiscale devrait être publiée au BOFIP (Bulletin Officiel des Finances Publiques) avant avril-mai 2024 et le dépôt des déclarations sur les revenus 2023.

Dans l’état actuel du texte de la Loi de finances 2024,  applicable aux revenus perçus en 2023, un grand nombre de contribuables risquent d’avoir dépassé le seuil de CA de 15.000 € en 2023 et de basculer au régime réel.

Ce passage au régime réel est-il nécessairement un inconvénient ?

Le passage au régime réel suppose une comptabilité et des déclarations fiscales plus lourdes, et donc en général le recours à un expert-comptable. Ce régime permet néanmoins d’amortir le bien et les meubles, de déduire davantage de charges et de réduire significativement le bénéfice net imposable, voire de l’annuler ou créer un déficit (les charges d’amortissements ne peuvent pas cependant contribuer au déficit).

En cas de cession sous le statut LMP au régime réel, la plus-value relève du régime des plus-values professionnelles plus lourdes que celles des particuliers dont relève les LMNP à ce jour, mais pouvant bénéficier d’exonérations sous conditions au titre de l’IR (pas d’exonération néanmoins au titre des cotisations sociales).

 

La donation démembrée de somme d’argent : fin de la déductibilité de la créance de restitution

Il est possible de donner une somme d’argent, non pas en pleine propriété mais en nue-propriété. Le donateur conserve alors l’usufruit. S’agissant d’une somme d’argent, cet usufruit est en fait un quasi-usufruit.

Le donateur quasi-usufruitier garde la libre disposition de ces fonds et doit en restituer l’équivalent au terme de l’usufruit, c’est-à-dire à son décès.

Au décès de l’usufruitier, son patrimoine successoral comprend alors une dette dite de restitution correspondant à la valeur en pleine propriété de la somme d’argent initialement donnée en faveur du ou des nus-propriétaires. Ce ou ces derniers détiennent une créance sur la succession de l’usufruitier défunt, dite créance de restitution.

Jusqu’à la Loi de finances pour 2024, la dette de restitution était fiscalement déductible du patrimoine successoral de l’usufruitier décédé.

La Loi de finances met fin à cette déductibilité fiscale par un nouvel article 774 bis du CGI.

L’objet de cet article est de mettre fin à une pratique qui serait principalement menée dans un objectif d’optimisation fiscale :

  • Lors de la donation de la somme d’argent avec réserve d’usufruit, les droits de donation ne portent que sur la valeur en nue-propriété.
  • Au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient plein propriétaire de la somme d’argent sans payer de droits de succession (article 1133 du CGI) et la valeur en pleine propriété de cette somme d’argent est également déduite du patrimoine successoral imposable.

Pour les successions ouvertes à partir du 01/01/2024, la dette de restitution n’est donc plus déductible dans le cas d’une donation en nue-propriété d’une somme d’argent.

Ceci suppose que le nu-propriétaire héritier paie des droits de succession sur la valeur de la créance de restitution. Il lui est néanmoins possible de déduire de ces droits de succession les droits payés sur la nue-propriété lors de la donation initiale, sans que cela puisse donner lieu à restitution.

Il est à noter que :

  • Le quasi-usufruit légal, notamment celui du conjoint survivant usufruitier légal de la succession (article 757 du Code civil), n’est pas concerné par cette non-déductibilité fiscale de la dette de restitution en faveur des nus-propriétaires
  • De même, le quasi-usufruit provenant d’une donation au dernier vivant (article 1094-1 du Code civil).
  • Les quasi-usufruits provenant de la cession d’un bien préalablement démembré entre usufruitier et nu-propriétaire n’entre pas dans ces nouvelles dispositions, à condition que la dette de restitution ne participe pas à la poursuite d’un objectif principalement fiscal.
  • Concernant le quasi-usufruit né d’une clause bénéficiaire démembrée, le principe de l’assurance-vie étant distinct de celui de la donation, cette situation ne devrait pas être concernée. Mais la loi ne précise rien sur ce point et il convient donc de rester prudent sur ce point.

 

 

IFI 2024 : certaines dettes ne sont plus déductibles en société

Les biens immobiliers détenus en société sont imposables à l’IFI (sauf situations spécifiques comme les biens affectés à l’activité professionnelle).

Dans le cas d’une détention en société, ce sont les parts sociales qui sont imposables pour leur valeur représentative des actifs immobiliers en déduisant le passif de la société.

Pour éviter les situations d’abus consistant à loger les biens immobiliers dans des sociétés fortement endettées, la Loi de finances 2024 instaure une nouvelle règle de déductibilité du passif social de la valeur imposable des parts à l’IFI.

Seules les dettes afférentes à l’actif imposable, c’est-à-dire aux biens immobiliers, sont déductibles.

Pour éviter que la valeur imposable ainsi calculée devienne supérieure à la valeur réelle des parts, le texte de loi instaure un dispositif de plafonnement de la valeur imposable à la valeur vénale des parts.

 

Loi de finances 2024 et Dutreil : des précisions sur les activités éligibles

La Loi de finances 2024 vient préciser l’éligibilité du pacte Dutreil à certaines activités, confortant la position de la doctrine administrative et contredisant les récents arrêts de jurisprudence sur ce sujet.

La loi prévoit ainsi que :

  • Les activités de gestion de son propre patrimoine immobilier ou mobilier ne sont pas considérées comme des activités commerciales au regard du pacte Dutreil et ne sont donc pas éligibles. La location meublée ou les locations de biens commerciaux ou industriels équipés ne peuvent donc pas bénéficier du régime Dutreil.
  • En cas d’activité mixte, le pacte Dutreil n’est applicable que si l’activité opérationnelle est prépondérante.
  • Les sociétés Holding animatrices de groupe exercent bien une activité opérationnelle et sont donc clairement éligible au pacte Dutreil.

Ces nouvelles dispositions Dutreil sont applicables aux transmissions intervenues à partir du 17/10/2023.

Auteur 

Anne Brouard

Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisé en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7

SCPI, OPCI, SCI : principes et conjoncture de la « pierre papier »

SCPI, OPCI, SCI : principes et conjoncture de la « pierre papier »

Temps de lecture estimé : 11 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Les SCPI, OPCI, SCI, encore connues sous le nom de « pierre papier », font face à un environnement difficile en 2023 : le point sur ces supports d’investissement.    

 

Les SCPI, OPCI et SCI permettent d’investir en immobilier sans acquérir directement des immeubles physiques mais en devenant associé ou détenteur de parts d’une structure qui va elle-même procéder à ces acquisitions et gérer les biens. Ces investissements sont ainsi qualifiés de « pierre papier » : « pierre » car in fine les fonds sont investis dans de l’immobilier physique et « papier » car les investisseurs acquièrent des parts sociales et non l’immobilier directement. Les avantages de ces supports sont nombreux : ticket d’entrée relativement faible comparativement à l’immobilier en direct, forte diversification des investissements, gestion totalement déléguée, et rendements réguliers et plus élevés que les taux d’intérêt obligataires ces dix dernières années. Ces atouts ont fait de la « pierre papier » un investissement privilégié des investisseurs recherchant principalement des revenus réguliers. L’univers de taux bas que nous avons connu ces dernières années a néanmoins fait oublier les risques et inconvénients de ce type d’investissement, avant que ce début d’année 2023 ne nous les rappelle. Explications.

SOMMAIRE

  • Qu’est-ce que la pierre-papier non cotée : SCPI, OPCI, SCI ?
  • SCPI, OPCI, SCI : comparaison avec l’immobilier en direct
  • Quels rendements et quels risques dans l’environnement actuel ?

Qu’est-ce que la pierre-papier non cotée : SCPI, OPCI, SCI ?

SCPI, OPCI, SCI, voyons les principales différences de ces supports.

Les SCPI, l’investissement « pierre papier » le plus connu

Premiers supports types « pierre papier » créés, les SCPI sont aujourd’hui largement développées et représentent plus de 89 milliards d’euros au 31/12/2022. Mais de quoi s ‘agit-il exactement et comment fonctionnent-elles ?

 

Qu’est-ce que les SCPI ?

Juridiquement la SCPI est régie par les articles 1845 du code civil et suivants, tout comme les sociétés civiles dans leur ensemble. Au sens de la  Directive AIFM (directive 2011/61/UE sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs), la SCPI entre dans la catégorie des FIA (fond d’investissement alternatif), c’est-à-dire des fonds autres que les OPCVM (Organismes de Placements Collectifs en Valeurs Mobilières) conformes à la Directive 2009/65/CE (Directive OPCVM IV).

Une société civile de placement immobilier (SCPI) est donc un véhicule de placement collectif qui collecte des fonds auprès des particuliers afin d’acquérir un patrimoine immobilier et de gérer sa mise en location (revenus). Le capital social d’une SCPI est au minimum de 760.000 €.

Dans le cadre de sa gestion immobilière, la SCPI peut ponctuellement céder une partie de ses actifs mais n’a pas le statut juridique pour s’orienter vers une activité de marchands de bien et ne peut réaliser des opérations de promotion immobilière. En contrepartie de son investissement, les épargnants reçoivent des parts sociales.

Les typologies d’actifs gérés par les SCPI sont variées (bureaux, commerces, résidentiels) mais peuvent aussi concernés des secteurs plus spécifiques (santé, éducation, logistique ou encore hôtels, tourisme et loisirs). Les SCPI peuvent investir en France mais se sont de plus en plus ouvertes ces dernières années au marché européen et britannique.

Les SCPI de bureaux représentent 65% des SCPI hors résidentiel, tandis qu’à l’opposé les SCPI de logistique et locaux d’activité représentent environ 1% des SCPI.

Certaines SCPI sont diversifiées sur plusieurs thématiques (principalement bureaux et commerces), elles représentent 15,60% des SCPI. Élément clé pour les investisseurs, le TDVM (taux de distribution sur valeur de marché) en 2022 est de 4,53% pour la moyenne du marché.

Qu’est-ce que le TDVM ? Le TDVM (Taux de Distribution sur Valeur de Marché) correspond au montant des dividendes bruts avant fiscalité distribué par la SCPI l’année N rapporté à la valeur de marché de la part de SCPI pour cette même année.

Comment souscrire ou vendre des parts de SCPI ?

Les parts de SCPI sont le reflet du capital de la SCPI divisé en nombre de parts (montant minimal d’une part fixé à 150 € par la règlementation). La part de SCPI est un titre financier inscrit en nominatif (par opposition aux actions par exemple qui sont par défaut « au porteur » sauf exceptions). Ainsi la SCPI tient un registre et connait ses investisseurs. Il existe 2 catégories principales de SCPI :

  • celles à capital fixe (fermées à la commercialisation) pour lesquelles il est possible de souscrire sur le marché primaire (à l’émission ou lors d’une augmentation de capital) et sur le marché secondaire (prix de la part fonction du carnet d’ordre d’achat-vente).
  • celles à capital variable prévoyant pour le retrait d’un associé, un prix de part fixé par la société de gestion en fonction de la valeur réelle des actifs détenus (valeur de retrait).

Différentes valeurs interviennent donc :

  • La valeur de réalisation dépend de la valeur vénale du patrimoine immobilier détenu par la SCI et des autres actifs financiers.
  • La valeur de reconstitution correspond à la valeur de réalisation augmentée des frais d’acquisition s’il fallait reconstituer le patrimoine de la SCPI (droits de mutation …).
  • Le prix de souscription TTC composé de la valeur de souscription de la part, fixée par la société de gestion en fonction de l’offre et de la demande mais aussi de la valeur de réalisation. Cette valeur de souscription est augmentée des frais de souscription.

Par principe, la valeur de souscription est égale à la valeur de réalisation (somme des actifs) toutefois les SCPI ont une marge de valorisation de leur part de 10% à la hausse comme à la baisse.

  • Le prix de retrait d’une part correspond au prix de souscription de la part à la date du retrait diminué des frais de souscription.

La liquidité des parts de SCPI est donc fonction de la possibilité de la société de gestion de compenser les demandes de retrait par les nouvelles souscriptions (ou du carnet d’ordre pour les SCPI à capital fixe).  La liquidité des parts de SCPI dépend donc du marché de l’offre et de la demande de parts.

Qu’est-ce que les OPCI ?

Les OPCI ont été lancés en 2008 pour offrir aux épargnants une alternative aux SCPI :

Les OPCI (organisme de placement collectif en immobilier) sont donc une forme hybride de placement investi à la fois en actifs immobiliers mais aussi en actifs financiers. L’OPCI doit respecter deux bornes minimales sur chaque poche d’investissement à raison d’au moins 60% d’actifs immobiliers et 5% d’actifs liquides pour assurer les retraits. Le solde de 35% est librement investi par le gestionnaire de l’OPCI (actions, obligations ou autres instruments financiers).

 

Qu’est-ce que les SCI (société civile immobilière) ?

Classées également dans la catégorie des FIA, elles trouvent majoritairement leur place au sein des contrats d’assurance vie. Les SC ou plus précisément SCI (Sociétés Civiles Immobilières) fonctionnent sur le même modèle que les SCI familiales mais sont ici créées par des sociétés de gestion et les associés en sont les compagnies d’assurances pour le compte des souscripteurs.

Elles sont assimilables à des « fonds des fonds » et peuvent investir dans tout type d’actifs immobiliers y compris en parts de SCPI. Cette souplesse permet notamment des thématiques très précises comme l’investissement sur la thématique du viager par exemple.

Les SCI ont également pour avantage de ne pas avoir d’obligation de distribution de leurs revenus. Elles peuvent donc les capitaliser augmentant ainsi leur valeur.

Enfin, les parts des SCI sont la propriété de l’assureur. Selon les caractéristiques du contrat d’assurance, le client souscripteur peut plus facilement procéder à un désinvestissement, soit par arbitrage, soit par rachat partiel. Le client investisseur peut bénéficier ainsi d’une meilleure liquidité, sous réserve des conditions de fonctionnement du contrat concernant ce type d’unité de compte.

Quelques chiffres au 31/12/2022 :

Source : ASPIM

SCPI, OPCI, SCI : comparaison avec l’immobilier en direct

L’immobilier « papier » ou indirect est une alternative à un investissement immobilier en direct. Quels sont les points communs et les différences de ces deux types d’investissement ?

Comparaison en termes de gestion

Outre la possibilité d’investir sur de l’immobilier avec des montants plus faibles qu’un investissement en direct (il suffit en général de quelques milliers d’euros), les avantages principaux de la « pierre papier » se situent dans la diversification des investissements et la facilité de gestion. Les SCPI, OPCI, SCI permettent aux investisseurs d’accéder au marché immobilier avec :

  • une multiplication et mutualisation des investissements diluant le risque locatif sur un grand nombre d’actifs immobiliers.
  • une gestion totalement déléguée à la société de gestion ce qui permet d’éviter la lourdeur et le temps passé à la gestion de l’immobilier en direct.
  • des frais compris dans les frais de gestion de la société gérante alors que l’immobilier en direct demande à budgéter les charges annuelles (taxes foncières …) et les travaux à prévoir.

Chaque société de gestion est tenue de remettre un rapport annuel de gestion à ses associés. Ce rapport offre une transparence totale de l’information (biens détenus avec adresse, nombre d’associés et données comptables). Ce rapport permet également d’accéder à des indicateurs clés, indispensables à vérifier avant tout investissement :

  • Le taux d’occupation financière (loyers réellement encaissés / potentiel de location à 100% du patrimoine de la SCPI).
  • La durée des baux.
  • La capitalisation de la SCPI.
  • Le montant de report à nouveau.

Comparaison en termes de fiscalité

La fiscalité est différente selon le type de supports : SCPI, OPCI, SCI.

Une fiscalité des SCPI et des SCI comparable à la détention immobilière en direct

Par principe, les SCPI et SCI sont soumises au même régime d’imposition que l’immobilier détenu en direct. Elles sont ainsi imposables :

  • à l’IR dans la catégorie des revenus fonciers au réel (pas de possibilité d’application du régime micro foncier sauf si des revenus fonciers sont déjà perçus sur des actifs en direct et que le seuil global de 15.000 € est respecté). Le revenu foncier net distribué est soumis à :
    • la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu (tranche marginale d’imposition de 11 % à 45%). L’IR s’applique après déduction de la CSG déductible de l’année précédente (taux de 6,8 %).
    • la CEHR (contribution exceptionnelle aux hauts revenus).
  • aux prélèvements sociaux : Le revenu net foncier est soumis aux prélèvements sociaux de 17,20% (CSG, CRDS et Prélèvements sociaux).
  • au régime des plus-values immobilières des particuliers en cas de plus-value de cession (IR au taux de 19 % et prélèvements sociaux à 17,2 % sur la plus-value nette après abattements pour durée de détention ; taxe supplémentaire pour les plus-values excédant 50.000 €).
  • à l’IFI : La valeur des parts de SCPI est déclarée à l’actif de l’IFI et est soumise au calcul de l’IFI selon le barème en vigueur.

Certaines stratégies de détention des parts peuvent permettre de répondre aux contraintes fiscales des épargnants (financement à crédit, détention en assurance vie ou encore achat en nue-propriété). Chacune de ses formes d’acquisition comprend des avantages et des inconvénients qu’il convient d’expliquer à l’investisseur.

A noter : La SCPI dite « européenne » permet d’atténuer l’effet de la fiscalité de la SCPI détenue en direct notamment par l’application des conventions internationales.

Une fiscalité des OPCI comparable à celle des valeurs mobilières de placement

Par principe, les OPCI du type SPPICAV relèvent du régime des valeurs mobilières. Les revenus et plus-values sont imposables à la flat tax au taux de 30 % (12,8 % au titre de l’IR et 17,2 % de prélèvements sociaux) ou sur option du contribuable pour l’ensemble de ses revenus de capitaux mobiliers, revenus et plus-values peuvent être imposés au barème de l’IR (auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux à 17,2 %). La fiscalité dépend également du mode de détention, soit en assurance vie (fiscalité propre à l’assurance-vie), soit en compte-titres ordinaire (flat tax ou option pour le barème de l’IR). Les OPCI revêtant la forme de FPI sont imposables :

  • dans la catégorie des revenus fonciers pour la partie du revenu distribué correspondant aux loyers
  • au titre du revenus de capitaux mobiliers pour la partie de revenu distribué provenant de la gestion des actifs financiers.

En termes de plus-value, les OPCI sous forme de SPPICAV sont imposées à la flat tax au taux de 30 % (prélèvements sociaux inclus). Les OPCI sous forme de FPI relèvent du régime des plus-values immobilières des particuliers. Les OPCI sont de manière générale imposables à l’IFI.

Quels rendements et quels risques dans l’environnement actuel ?

Depuis le début de l’année, la conjoncture économique ouvre une nouvelle période pour l’investissement en « pierre papier » dans laquelle les rendements sont sous pression et les risques renforcés.

Rendements de la pierre papier : le passé ne préjuge pas de l’avenir

La « pierre papier » offrait ces dernières années des rendements annuels nets de frais de gestion de l’ordre de 4 à 6 % selon le type de biens détenus et le type de supports, les OPCI affichant un rendement inférieur aux SCPI compte tenu de leur contrainte d’investissement. Ces rendements sont néanmoins en baisse constante depuis une vingtaine d’année, passant de 8 % en 1999 à une moyenne de 4 % en 2020. En cause, la baisse de l’inflation et des taux d’intérêt. Un rendement de 4 % ces dernières années plaçait néanmoins ces supports nettement au-dessus des taux d’intérêt obligataires ou de ceux des livrets, du moins jusqu’en 2022.

Le retour de l’inflation en 2022, conjuguée à des politiques de fortes remontées des taux par les banquiers centraux, ont rebattu le paysage des placements. Dépôt à terme, sicav monétaire, obligations retrouvent des rémunérations perdues de vue depuis plusieurs années. L’OAT 10 ans rémunère ainsi au 6 octobre au taux de 3,49% quand il y a encore 18 mois son taux était négatif.

Les rendements de la « pierre papier » souffrent par ailleurs de la crise du secteur de l’immobilier de bureau et de la montée des coûts d’investissement liés à la hausse des taux d’intérêt et aux nouvelles normes environnementales. Les fonds immobiliers ont la possibilité de puiser dans leurs réserves (report à nouveau) pour accroître leurs revenus de distribution lorsque le rendement purement immobilier baisse mais cela n’a qu’un temps et impacte dans tous les cas la valeur de la part à terme.

 

SCPI, OPCI, SCI : des risques de valorisation et de liquidité plus prononcés

La pression sur les rendements engendre la montée de deux autres risques, souvent liés, et qui avait ces dernières années tendance à s’oublier : celui de la baisse de la valorisation et celui de la liquidité. La revente des parts de SCPI suppose :

  • la présence d’investisseur se positionnant à l’achat pour les SCPI à capital fixe. La revente pour ce type de SCPI ne s’effectue que via le marché secondaire et dépend donc de l’offre et de la demande. Si les acquéreurs étaient nombreux ces dernières années compte tenu de l’attrait de la « pierre papier », ils se font nettement plus rares depuis début 2023.
  • Le rachat des parts par la SCPI elle-même pour les SCPI à capital variable. Ceci suppose que la SCPI ait les liquidités nécessaires. Si les demandes de rachat deviennent particulièrement nombreuses, la SCPI crée un fonds de remboursement en vendant ces biens immobiliers les plus liquides. Les SCPI à capital variable peuvent également organiser un marché secondaire.

Dans les deux cas, l’arrivée importante de vendeurs a un fort impact sur la valeur des parts. Les SCI subissent le même phénomène en cas de mouvement vendeur et les OPCI n’en sont pas préservés non plus car leurs réserves obligatoires de liquidités restent limitées.

Parallèlement, les acquéreurs se font moins nombreux. Sur le premier semestre 2023, la collecte nette sur les SCPI a baissé de 23 % par rapport au premier trimestre 2022, selon les chiffres de l’ASPIM (Association française des sociétés de placement immobilier). Au deuxième trimestre 2023, la collecte est encore en repli de 28 % par rapport au premier trimestre de l’année. Si les demandes de retrait s’intensifient, le risque est une absence de liquidité et un délai de réalisation de la vente plus ou moins long.

Les fonds immobiliers commencent à ajuster la valeur de leur part à la baisse. Un grand nombre de SCPI commencent à diligenter des expertises de leur patrimoine immobilier en ce sens. Dans la conjoncture, l’AMF exige des sociétés de gestion immobilière une transparence sur la valeur de leur bilan.

Lors de la crise immobilière des années 1990, la valeur des parts de SCPI avaient baissé de plus de 40 %. Des données que les investisseurs ont souvent oublié ces dernières années. Espérons que les tensions actuelles du marché ne riment pas avec le retour de ces mauvais souvenirs.

Auteurs

Anne Brouard et Guillaume Thierry 

 Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisée en gestion de patrimoine

Guillaume Thierry est conseiller patrimonial, diplômé du CESB-CGP

COVID 19 : Quels impacts sur l’immobilier patrimonial ?

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Temps de lecture estimé : 15 min

Conséquences de la crise du Covid-19, la baisse prévisible du pouvoir d’achat des acquéreurs et des locataires tendent au fléchissement des prix de l’immobilier patrimonial. Mais les impacts sont différents selon le type de biens et leur emplacement. Quelles stratégies d’investissement immobilier adopter pour l’après-crise ?

Premier impact de la crise du coronavirus, les transactions immobilières sont à l’arrêt. Le déconfinement du 11 mai permet une reprise des opérations en cours mais celle-ci n’est pas suffisante pour maintenir la tendance haussière du marché immobilier.

L’immobilier est très présent dans le patrimoine des Français (61,6 % des ménages possèdent un bien immobilier en 2018, 57,7 % sont propriétaires de leur résidence principale et 17,7 % possèdent un autre bien tel qu’une résidence locative ou secondaire, selon les données Insee).

Malgré une fiscalité de plus en plus lourde, l’appétence des français pour l’immobilier ne se dément pas.

2019 fut une année de records. Ainsi le fameux cap du million de transactions de biens vendus dans le marché résidentiel a été atteint (1 059 000 transactions sur 12 mois à fin octobre, selon les actes de vente des notaires). Le marché immobilier a été fortement porté par des taux d’emprunt très bas ainsi que par une demande des investisseurs particuliers et institutionnels n’ayant que peu d’alternative quant à la recherche d’un rendement minimum.

Avec les mesures de confinement liées au COVID-19 et l’arrêt de l’activité économique mondiale, ces moteurs se grippent brutalement. Perçu traditionnellement comme un actif refuge, l’immobilier patrimonial est fortement impacté par la crise économique et sanitaire que nous traversons.

la crise actuelle et ses impacts sur l’immobilier patrimonial

En réponse au risque pandémique du Coronavirus, le confinement de la population française a été décidé le 17 mars dernier avec des conséquences économiques fortes, immédiates (arrêt total de l’activité économique non essentielle à la survie de la population) et futures dont nous ignorons encore la portée. Des mesures significatives de soutien économique sont également prises dans le même temps pour les particuliers et pour les entreprises.

Grâce à ces mesures, les ménages endettés pour leur résidence principale ne sont pas immédiatement impactés (chômage partiel, possibilité de négocier une modularité ou un report avec son banquier selon le contrat de crédit). Mais qu’en est-il de l’immobilier locatif notamment professionnel (bureaux, commerces) détenus parfois en direct par les particuliers ou via des SCPI ?

immobilier résidentiel : quels impacts sur le marché de l’ancien et le marché du neuf ?

Immobilier neuf ou ancien, la mise à l’arrêt brutal de l’activité économique a suspendu à court terme toute transaction.

Arrêt du marché immobilier dans son ensemble, quelle reprise à moyen et long terme ?

Le déconfinement et la reprise graduelle de l’activité vont permettre de finaliser les opérations en cours pour lesquels les financements sont accordés.

D’un point de vue conjoncturel, les notaires estiment que le marché immobilier subit des impacts immédiats (report des déménagements, des actes) puis mécaniquement un rebond « technique » au sortir du confinement par la réalisation des actes non enregistrés avant l’isolement de la population.

A moyen terme néanmoins, les délais des nouvelles transactions (recherche de bien, mise en vente) risquent de se rallonger. Un nouveau « trou d’air » devrait alors se faire ressentir.

La situation de long terme pose davantage d’incertitudes. Les notaires pensent que le marché pourrait redémarrer au 4ème trimestre 2020 voire au 1er trimestre 2021 mais il n’est pas attendu de niveaux de transactions records comme en 2019.

Selon les professionnels du secteur, l’immobilier devrait continuer à être résilient.
Du côté de la demande tout d’abord, qu’il s’agisse d’immobilier résidentiel ou d’immobilier locatif, la pierre inspire toujours confiance aux investisseurs. Certains peuvent être tentés de reporter leur décision, attendant plus d’informations sur la reprise d’après crise ou espérant une baisse des prix. Le marché resterait alors uniquement porté par les primo-accédants ne souhaitant pas différer leur décision.

Ce mouvement d’attente devrait néanmoins s’effacer à moyen terme à deux conditions :

  • Si le contexte de taux bas persiste. Des niveaux de taux d’intérêt faible soutiennent les acquisitions immobilières et les prix.

Il est à noter que certaines banques viennent de rehausser leur grille de taux. Le taux d’emprunt sur 20 ans proche de 1% fin 2019 passe en mai 2020 à environ 1,30%.

Cette augmentation n’est pas liée à l’évolution des taux de financement mais à une volonté des banques, face à la crise, de reconstituer leurs marges financières déjà fortement érodées.
Cet accroissement récent mais relatif des taux d’intérêt n’est pas à ce jour de nature à réduire les possibilités d’acquisition.

Les banques peuvent également resserrer les conditions d’octroi de prêt, excluant ainsi certains investisseurs. Les recommandations du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) émises en janvier avant la crise vont déjà dans ce sens. Ce mouvement est certainement nécessaire et sain face à l’afflux de prêts auquel les banques font face depuis plusieurs années. Il ne devrait pas se durcir à court terme si les aides de soutien économique aux ménages et leurs conditions de solvabilité se maintiennent et surtout si la reprise économique se fait sentir.

A moyen terme, tout dépend de la durée de la crise mais l’octroi de crédit des banques, y compris aux ménages, reste l’outil d’injection économique des politiques monétaires de soutien et ne peuvent pas, tant que ces politiques sont menées, se réduire drastiquement.

  • Si le niveau des loyers ne fléchit pas. Dans ce cas, le différentiel entre le rendement locatif et le taux d’intérêt offre un effet de levier financier intéressant pour les investisseurs. Le rendement net est alors plus élevé sur l’immobilier que sur l’épargne bancaire et financière à taux fixe.

Le maintien du niveau des loyers est directement lié au pouvoir d’achat des ménages. Comparativement à la crise financière de 2008-2009 provoquée par des dérèglements économiques (dettes dites « subprimes »), la crise actuelle et les mesures gouvernementales permettent à court terme de préserver les ménages grâce au mécanisme exceptionnel et massif de chômage partiel.

Si la crise sanitaire perdure et si l’activité économique reste atone, ces mesures de soutien risquent de ne pas être suffisantes pour maintenir le niveau de vie des particuliers engendrant alors une pression baissière sur les loyers.

En résumé, les professionnels ne s’attendent pas à court ou moyen terme à un cataclysme sur l’immobilier sauf crise persistante. Le moteur peut être lent à repartir mais compte tenu du contexte de taux bas et de la demande, il n’est pas à priori envisageable que les prix chutent fortement à moyen terme.

Des disparités régionales et locales peuvent néanmoins apparaître en fonction des tissus économiques et également, comme nous le verrons plus loin, si les habitudes de vie sont profondément modifiées par la crise.

En savoir plus : Notaires de France  Note de conjoncture immobilière

Les locations meublées saisonnières en première ligne

La location meublée saisonnière paie un lourd tribut immédiat à la crise. Conséquences de la crise sanitaire, les séjours prévus pendant la période de confinement sont annulés. Les récentes annonces gouvernementales informant les ménages de la possibilité de réserver en France pour leurs vacances d’été sont de nature à rassurer. Néanmoins, avec le développement des plateformes de location, beaucoup de clients sont internationaux et reportent ou annulent d’ores et déjà leurs séjours d’été, les frontières restant fermées et les vols annulés.

Ce phénomène nous rappelle que l’immobilier n’est pas sans risque comme on l’entend trop souvent. La contrepartie d’un rendement plus élevé tel que celui de l’investissement locatif meublé de tourisme est nécessairement un risque supérieur.

La reprise de ce marché dépend du comportement des ménages au sortir du confinement et également de la flexibilité du marché, celui-ci devenant dans un premier temps plus local.

Point sur le traitement fiscal d’un loyer impayé/reporté en location nue et meublée

Le traitement d’un loyer non perçu au plan fiscal diffère selon le régime d’exploitation de l’investissement locatif détenu par l’investisseur.

Les revenus générés par la location d’un bien nu (encadrée par la loi de Juillet 1989 et plus récemment la loi ALLUR) sont soumis fiscalement à la catégorie des revenus fonciers. Selon ce régime, les revenus sont imposés pour leur montant réellement perçus au cours de l’exercice fiscal.

Ainsi dans le cadre de la situation actuelle, un propriétaire bailleur se trouvant en situation d’impayés ou de report de la part de son locataire voit le loyer impayé fiscalisé uniquement lors de sa future perception en compte (comptabilité de trésorerie). Des effets de seuil liés à la tranche marginale d’imposition ou d’application de la CEHR (Contribution Exceptionnelle sur les Hauts Revenus) peuvent alors devenir pénalisants sur le plan fiscal alors qu’ils se sont avérés opportuns en année N de la non-perception de ce même revenu locatif.

Source BOFIP (BOI-RFPI-BASE-10-10-20140214) :  article 140 pour le traitement des loyers impayés et article 110 pour les reports et arriérés perçus.

Les revenus tirés par la location meublée d’un bien (location étudiante, meublé à l’année ou saisonnier par exemple) entrent dans une autre catégorie, celles des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Le principe de ce régime est différent et se rapproche du traitement d’une comptabilité commerciale.
Ainsi tout loyer facturé (par défaut un bail commercial engendre une facturation annuelle des loyers) est considéré comme un produit au plan fiscal quand bien même le locataire ou l’exploitant n’a pas versé ce dernier à son bailleur. On parle de comptabilité d’engagement.
Le loyer facturé et non encaissé est alors imposable. Pour tenir compte de l’impayé, il est nécessaire de constater une provision spécifique venant en diminution du résultat imposable dans le cas d’un régime réel d’imposition.

Lorsqu’il ne s’agit pas d’un impayé mais d’une suspension volontaire de loyer, ce qui est le cas dans les actions solidaires du propriétaire vis-à-vis du bailleur encouragées par le gouvernement, le loyer non perçu devient alors un abandon de loyer normalement imposable dans le régime BIC.

Pour ne pas pénaliser fiscalement les propriétaires bailleurs, le gouvernement permet d’assimiler la suspension de loyer à un abandon de créance déductible fiscalement. Cette mesure est prévue dans la dernière loi de finances rectificative pour 2020, compte tenu des circonstances et de manière provisoire (du 15 avril au 31 décembre 2020).

Spécificités du marché du neuf 

Sur le marché du neuf, la situation de l’offre foncière avant le Covid-19 était déjà tendue avec des permis de construire distribués au compte goute dans un contexte d’élections municipales prochaines et d’échéances à venir du régime Pinel (décembre 2021).

Suite au confinement, les promoteurs se sont vite retrouvés bloqués dans leur campagne de commercialisation avec l’obligation de fermer les espaces de vente. Plusieurs d’entre eux mettent en place des systèmes digitaux tels que la signature à distance, des campagnes publicitaires, des conférences Web pour continuer d’assurer la commercialisation de logements. Certains chantiers sont suspendus et reprendrons avec un trimestre minimum de retard.

Face à cette situation, les pouvoirs publics marquent leur soutien au secteur immobilier et plus particulièrement de la construction, compte tenu de leur poids économique. La Caisse des Dépôts et Consignation investit dans le secteur de l’immobilier neuf afin de soutenir les programmes en cours.

Suivant les mêmes fondements que le marché de l’ancien, l’évolution du neuf est également suspendue à la reprise économique, au niveau des loyers et à l’évolution des taux d’intérêt. Il est encore trop tôt pour faire des constats mais le million de transactions de 2019 risque de rester un record pour quelques temps.

scpi de rendement : que disent les gérants ?

En phase avec la crise, les SCPI (Société Civile de Placement collectif en Immobilier), véhicules de placement immobilier de plus en plus prisés ces dernières années par les investisseurs, souffrent aussi des impacts économiques.

En effet, ce support d’investissement intègre principalement des actifs immobiliers dit « d’entreprises » tels que bureaux, commerces ou autres actifs de diversification (maisons de retraite, cliniques, résidences de tourisme …).

Les SCPI sont donc essentiellement rémunérées par des baux commerciaux. Les mesures de suspension ou de report de loyers professionnels accordées par le gouvernement en soutien à la crise du Covid-19 impactent à court terme le rendement annuel des SCPI.

En savoir plus : Legifrance Ordonnance 2020-316 du 25 mars 2020

Selon certaines sociétés de gestion de SCPI, 30% de leurs locataires auraient fait une demande de suspension ou de report de loyers. L’impact à court terme serait de l’ordre de 1% du rendement annuel de la part selon certains gestionnaires.

Les conséquences ne sont pas les mêmes pour toutes les SCPI. La qualité de la gestion, de la diversification et la sélectivité des investissements et des locataires permettent de diluer le risque. Des indicateurs initiaux solides, tels qu’un niveau de TOF (Taux d’Occupation Financière) supérieur à 90%, tout comme la qualité des emplacements et des solvabilités des locataires permettent de se forger une idée sur la qualité de la SCPI détenue.

TOF (Taux d’Occupation Financière) 

Rapport entre les loyers réellement facturés et le montant des loyers qui seraient facturés si tout le patrimoine de la SCPI était loué.

L’immobilier professionnel reste néanmoins le premier secteur immobilier à souffrir de la crise économique. Les SCPI fortement investies dans ce secteur sont concernées en premier lieu.

Ces supports d’investissement étant largement utilisés depuis plusieurs années, le patrimoine des particuliers est nécessairement impacté :

  • En terme de rendement, compte tenu des reports et baisses prévisibles de loyers professionnels.
  • En terme de valeur à moyen et long terme si la crise économique perdure.
  • En terme de liquidité également, si la crise s’installant, il devient difficile de vendre les actifs.

Pour ces raisons de liquidité, les professionnels de la gestion de patrimoine conseillent de détenir une part limitée de son patrimoine en parts de SCPI.

Le soutien de l’immobilier professionnel passe par celui des entreprises locataires et l’ensemble des mesures en leur faveur : mise en place du prêt garanti par l’État (PGE), suspension d’impôts et de cotisations, soutien des acteurs économiques les plus exposés (Tourisme, Restauration…).

L’évolution de ce marché dépend également du comportement des acteurs économiques après crise et de l’évolution possible des lieux de travail.

les stratégies pour résister à la crise

Dans un tel bouleversement de marché, l’investisseur et le détenteur d’immobilier patrimonial doivent adapter leurs stratégies.

choix de l’emplacement et nécessaire diversification : deux règles d’or toujours d’actualité

Ces deux principes sont bien connus : « l’emplacement, l’emplacement et enfin l’emplacement » et « ne pas mettre ses œufs dans le même panier, diversifier ». Mais ils ne sont pas toujours appliqués.

Un emplacement de qualité attire des profils de locataires stables aux garanties solides. Une diversification dans des zones géographiques différentes permet également de limiter l’aléa. En contrepartie, le risque étant réduit, le rendement est plus faible que sur d’autres biens moins bien placés ou que sur une concentration sur un même immeuble.

En période de crise, cette différence de qualité se fait ressentir et les propriétaires ne subissent pas les mêmes risques selon leur type d’investissement.

Jusqu’à maintenant, l’immobilier qualitatif se trouve principalement dans les hyper-centres de métropole ou encore des villes en première ceinture de la capitale. Ces lieux bénéficient d’infrastructures fortes (écoles, transports, hôpitaux) mais aussi d’un bassin d’emploi riche et dynamique favorisant la continuité d’un flux migratoire important.

Souvent ces actifs sont occupés également à titre de résidence principale par leurs propriétaires. L’entretien des parties communes et privatives s’en ressent ainsi que la valeur du bâtiment à terme.

L’emplacement à la revente et la raréfaction des transactions attirent également un public plus résidentiel et familial. Ce qui limite l’impact de baisse des prix en période de crise.

Immobilier à fort rendement, une catégorie qui exige un fort degré de vigilance

Dans un marché immobilier en pleine expansion, les investisseurs oublient le risque et se tournent progressivement vers la recherche accrue de rendement. Certains biens offrent ainsi des rendements locatifs annuels proches de 7 à 10 % mais au prix d’une moindre qualité d’emplacement et de bâti.

Ce fort rendement séduisant de prime abord ne doit pas masquer certains risques :

  • La nécessaire prise en compte des travaux à venir sur les parties privatives mais également sur les parties communes. Ces charges futures sont rarement comptabilisées par l’investisseur. Le prix de cession future étant lié au marché, il n’est pas certain de récupérer la somme investie en travaux lors de la revente.

Le seul taux de rendement locatif brut n’est donc pas suffisant pour la décision d’investissement et la crise actuelle nous le rappelle. Il est nécessaire de prendre en compte l’ensemble des charges à venir et l’évolution du marché conditionnant le prix de revente. Seul le Taux de Rendement Interne (TRI) tient compte de l’ensemble de ces éléments.

Notion de TRI 

Le choix d’investissement dans un bien immobilier est souvent motivé par la seule notion du rendement locatif. Ce dernier rapporte le revenu locatif annuel brut à la valeur d’acquisition du bien avec ou sans frais.

Le taux de rendement locatif apparait souvent sur les annonces de vente afin de donner une idée plus concrète à l’investisseur de la rémunération qu’il tirera de son placement.

Une autre approche, beaucoup plus pertinente, est celle du taux de rendement interne ou TRI.

Cette méthode de calcul permet de tenir compte de l’ensemble des flux de recettes et de charges annuelles en incluant le prix d’acquisition et de cession. Le TRI se définit comme le taux d’actualisation de l’ensemble des flux positifs et négatifs de l’investissement sur la durée.

Il permet une approche plus fine de la rentabilité de l’investissement. On peut ainsi inclure dans le calcul du TRI différents paramètres tel que les impacts des charges courantes, de la fiscalité liée au revenu perçu, de l’éventuelle réduction d’impôt associé au dispositif choisi mais aussi du mode de financement (quotité financée, taux, durée, type de prêt), de l’IFI ou encore des revalorisations de charges et de revenus (hausse du loyer mais aussi diminution).

L’investisseur mesure alors que la seule perception faciale d’un loyer n’est pas la finalité de l’investissement.

  • La dégradation ou l’absence d’activité économique dans ces zones à fort rendement augmentent également le risque locatif associé et obèrent souvent l’espoir de maintien du prix ou de plus-value à long terme.
  • Ces lieux concentrent une forte typologie de logement identiques (souvent de petites surfaces), ce qui augmente mécaniquement l’offre de revente face à une demande faible ou atone en période de crise, accentuant la tendance à la baisse des prix.

Après la précédente crise de 2008, les écarts de prix immobilier selon les zones géographiques se sont fortement creusés en faveur des grandes métropoles et au détriment de certaines villes régionales.

Dans un contexte de crise et par tout temps, s’intéresser à la valeur intrinsèque de son investissement peut s’avérer plus judicieux que de courir les « bonnes affaires » qui n’en sont pas toujours à long terme.

Mais si l’emplacement et la diversification restent les principes de base d’un bon investissement, les critères de qualité de l’emplacement sont susceptibles d’évoluer avec la crise que nous traversons. Les bons emplacements d’avant la crise sont-ils ceux de demain ?

s’adapter à l’émergence de nouveaux besoins

L’émergence du télétravail : de nouveaux critères immobiliers

L’émergence de la crise sanitaire et l’obligation de confinement accélèrent le développement du télétravail et de la digitalisation. La nécessité de se rendre quotidiennement à son bureau est de moins en moins nécessaire. Des villes se situant à 1 heure en LGV ou TER de Paris retrouvent de l’attrait avec une possibilité, pour certains salariés, de ne se rendre à l’entreprise que 1 à 2 journées par semaine ou encore moins souvent.

Déjà en progression, le télétravail expérimenté pendant la crise peut s’installer plus fortement.

Effets sur l’immobilier résidentiel

Ce nouvel état de fait pourrait relancer certains marchés moins urbains.  La demande en maison individuelle avec espace de bureau et jardin peut ainsi s’accroître.

Dans le même élan, le développement numérique de certaines régions (internet haut débit) devrait suivre avec les investissements réalisés par les pouvoirs publics en ce sens.

Mais le bureau reste malgré tout un lieu de vie commun, de socialisation et de création collective.

Les nouveaux investissements immobiliers peuvent donc s’éloigner des hyper-centres mais ils devraient rester proches des grandes métropoles et bassins d’emplois. Avec les moyens rapides de transport, cette proximité ne se mesure plus en distance mais en temps. Certaines villes régionales proches en durée de transport de grandes métropoles peuvent retrouver un certain attrait.

Effets sur l’immobilier professionnel

Cette modification des habitudes et lieux de travail a des répercussions également sur le marché immobilier de bureaux et de sociétés.

Les besoins en surface des entreprises peuvent avoir tendance à diminuer, entraînant des changements en termes de siège social ou d’établissements. Pour certaines activités, le choix de bureaux modulaires, type centre d’affaires, peut être privilégié.

Ces transformations de comportements de travail, si elles deviennent durables, modifient considérablement le marché de l’immobilier professionnel. Les SCPI fortement investies dans ce secteur doivent alors adapter leurs stratégies.

Location meublée : une remise en cause des locations saisonnières ?

Autre conséquence de la crise du Covid-19, une baisse attendue de la demande de location meublée saisonnière et des impacts financiers auprès des particuliers investisseurs qui se sont parfois endettés fortement sur ce type de logement.

La location saisonnière de plus en plus internationale, tant sur le tourisme que sur le voyage d’affaires, souffre à court terme de la limitation des déplacements et de la fermeture des frontières. A moyen terme, la reprise dépend de l’amélioration de la situation sanitaire, les risques dissuadant les souhaits de vacances à l’étranger.

Les statuts de loueur en meublé non professionnel, ou professionnel, associé à ce type d’activité offrent un cadre fiscal toujours pertinent à condition que l’activité se reprenne.

Une stratégie de recherche de locataires en provenance de zones géographiques plus proches est une première solution à l’impact de la crise.

Le report du caractère saisonnier des locations vers des locations meublées plus longue en durée est également motivé par les différentes plateformes de locations qui craignent pour leur modèle économique.

L’offre importante depuis ces dernières années de location meublée saisonnière risque dans tous les cas de souffrir. En cas de forte réduction de la demande, la transformation en location nue est alors l’ultime solution, remettant en cause les rendements et les choix fiscaux.

Cette situation nous rappelle que la diversification patrimoniale reste cruciale. Souvent motivé par des raisons fiscales et la recherche de rendement, le meublé saisonnier doit rester une diversification de l’immobilier patrimonial et venir en complément d’investissements en location nue moins risqués.

L’importance des critères environnementaux

En progression depuis plusieurs années, les critères environnementaux sont accentués par la crise que nous traversons.
Recherche d’économies d’énergie, participation à la protection environnementale par le choix de bâtiment optimisé, ces éléments pèsent de plus en plus dans les choix d’investissement.

Après le marché du neuf, la règlementation énergétique s’impose progressivement sur l’immobilier ancien.

On peut parler d’une véritable « valeur verte » qui compte maintenant dans le prix de revente.

conclusion

La crise du Covid-19 modifie brutalement la donne du marché immobilier. Certains types de biens sont impactés plus que d’autres, tels que les biens professionnels et les locations meublées saisonnières. A moyen terme, les biens situés en hyper-centres et relativement chers peuvent subir une baisse de prix, les grandes surfaces de bureaux également. Les biens situés dans des villes régionales jusqu’ici moins recherchées et proches de grands centres urbains peuvent mieux s’en sortir. La crise rebat donc les cartes de l’immobilier patrimonial et peut corriger certains excès. Elle accentue également des tendances qui étaient déjà à l’œuvre, tel que l’accroissement des mesures environnementales.

Dans un tel bouleversement des marchés, les règles de l’emplacement et de la diversification restent d’or même si ses critères doivent être revus si les habitudes de vie post-covid changent profondément.

La crise nous rappelle également que même en immobilier, comme pour tout marché, plus le rendement est élevé plus le risque l’est aussi. Dans les mois et années à venir, l’investisseur en immobilier patrimonial doit, encore plus qu’auparavant, s’entourer des études et avis des conseils en gestion de patrimoine.

Auteurs
Anne Brouard et Guillaume Thierry

Anne Brouard est Intervenante-formatrice pour le CESB CGP, diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine
Guillaume Thierry est diplômé du CESB-CGP