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Les règles matrimoniales et successorales internationales, revues par les règlements européens de 2015 et 2019, restent complexes surtout au niveau fiscal. Analyse.

 

Dans un contexte croissant de mondialisation, il est fréquent que les situations patrimoniales et familiales présentent un élément d’externalité : investissements à l’étranger, expatriation de tout ou partie de la famille par exemple. Cette situation est accentuée dans des familles dites fortunées.

On estime à 2,5 millions le nombre de Français vivant à l’étranger tandis que 4,8 millions d’étrangers résident en France. Lorsqu’une personne décède dans un Etat de résidence différent de l’État dont elle a la nationalité ou lorsqu’elle possède des biens situés dans plusieurs États, la succession qui s’ouvre est internationale. Comme dans le cadre d’une succession nationale, il convient dans un contexte transfrontalier de déterminer tout d’abord le régime matrimonial puis de liquider la succession tant au niveau civil que fiscal.

 

quel régime matrimonial à l’international ?

Le régime matrimonial est l’ensemble des règles relatives aux rapports patrimoniaux entre époux et avec les tiers, du mariage à sa dissolution. Lors de l’ouverture d’une succession, l’identification du régime matrimonial du défunt permet de connaître la masse de biens sur laquelle s’appliqueront les règles successorales.

Au niveau transnational, il convient de distinguer entre les couples mariés avant ou après le 26/01/2019, date d’entrée en application du Règlement Européen N°2016/1103 sur les régimes matrimoniaux.

mariage international avant l’entrée en vigueur du Règlement Européen sur les régimes matrimoniaux (26/01/2019)

Pour les couples mariés avant le Règlement Européen sur les régimes matrimoniaux N°2016/1103 ou n’ayant pas modifié leur régime matrimonial depuis cette date, on distingue :

Mariage avant le 01/09/1992 : Jurisprudence et droit international privé                    

La jurisprudence et le droit international français se basent sur le principe dit d’autonomie de volonté des époux, le critère prédominant étant le lieu de fixation de leur premier domicile matrimonial. Ce critère de rattachement est permanent, la loi du premier domicile matrimonial s’applique pendant toute la durée du mariage (même si les époux déménagent) et quel que soit le lieu de situation de leurs biens.

Ex : Couple de Français marié en 1989 à Paris, leur premier domicile est en Espagne. Pendant toute la durée du mariage, ils relèvent du régime matrimonial espagnol.

Régime matrimonial international après le 01/09/1992 : la Convention de La Haye du 14/03/1978

Les couples mariés après le 01/09/1992 et jusqu’au 26/01/2019 relèvent de l’application de la Convention de La Haye du 14/03/1978.

L’avancée principale de cette convention est de permettre aux couples de choisir la loi applicable :

>> Choix avant le mariage :

L’article 3 de la Convention offre 3 options :

  • La loi de l’État dont l’un des époux a la nationalité au moment de la désignation
  • La loi de l’État sur le territoire duquel l’un des époux a sa résidence habituelle
  • La loi de l’État sur le territoire duquel l’un des époux établit une nouvelle résidence habituelle après le mariage.

Cette loi s’applique à tous les biens des époux sauf à ce que ces derniers choisissent pour les immeubles la loi du lieu de leur situation.

Exemple

Monsieur est français, Madame est luxembourgeoise. Ils résident en Suisse. La loi applicable à leur régime matrimonial pouvait être la loi française ou luxembourgeoise (loi de nationalité des époux) ou la loi suisse (résidence habituelle au moment du mariage).

>> Choix de changement après le mariage :

La Convention de La Haye prévoit dans son article 6 la mutabilité volontaire du régime matrimonial : les époux peuvent alors décider d’eux-mêmes de changer de loi applicable en choisissant l’une des deux premières options définies à l’article 3 :

  • la loi de l’État dont l’un des époux a la nationalité au moment du choix de changement
  • la loi de l’État où l’un des époux a sa résidence habituelle

Le caractère rétroactif de ce changement n’étant pas certain, les époux ont intérêt à le préciser dans la modification.

Ce changement de loi applicable permis par la Convention de La Haye est également ouvert aux couples mariés avant le 01/09/1992.

>> Absence de choix des époux :

Dans cette hypothèse, la loi applicable est la loi interne de l’État de première résidence habituelle des époux ou, à défaut, la loi nationale commune des époux ou, à défaut, la loi de l’État avec lequel ils entretiennent les liens les plus étroits.

Au cours du mariage, les époux sont soumis à une mutabilité automatique. Il s’agit là d’un lourd inconvénient institué par la Convention de La Haye dans son article 7.

Ce changement automatique de loi advient dans 3 cas :

  • Lorsque les époux installent leur résidence dans l’État de leur nationalité commune
  • S’ils résident plus de 10 ans dans un État après le mariage
  • Pour les époux qui n’avaient pas de résidence commune dans le même Etat après le mariage, lorsqu’ils fixent leur résidence dans un même État.

Exemple

Couple de Français marié en 1995 à Paris mais domiciliés au Royaume-Uni. A défaut de choix, la loi applicable est la loi de première résidence habituelle des époux, soit la loi anglaise (régime de séparation des biens). De retour en France en 1998 (Etat de nationalité commune), leur régime matrimonial mute automatiquement en régime légal française (communauté réduite aux acquêts).

Cette mutabilité automatique du régime matrimonial a des conséquences importantes.

Elle est de portée universelle, la Convention de La Haye bien que ratifiée par 3 pays (France, Luxembourg, Pays Bas), s’appliquant également pour les États tiers.

Elle est le plus souvent découverte au décès.

En principe, cette mutabilité automatique n’est pas rétroactive, ce qui suppose de liquider plusieurs régimes matrimoniaux différents selon les périodes du mariage.

Exemple

Couple d’autrichiens mariés en 1998 à Vienne (régime légal autrichien de la séparation de biens). Domiciliés en France, à partir de 2008 et quand bien même l’Autriche n’a pas ratifié la Convention de La Haye, la Convention s’applique en France et le régime matrimonial des époux devient le régime légal français de la communauté réduite aux acquêts.

couples mariés après l’entrée en vigueur du règlement européen sur les régimes matrimoniaux

Entrée en application le 29/01/2019, le Règlement Européen sur les régimes matrimoniaux (Règlement RM) a pour objectif d’assurer une plus grande sécurité juridique des rapports patrimoniaux pour les ressortissants de Etats membre signataires. A ce jour, 18 États sur les 28 de l’UE ont mis en application ce Règlement : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Chypre, Espagne, Finlande, France, Grèce, Italie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, République Tchèque, Suède et Slovénie. Le Règlement RM s’applique aux couples mariés ou au changement de régime matrimonial à compter du 29/01/2019. Les époux peuvent choisir :

  • Soit la loi de l’État de résidence habituelle de l’un des époux au moment du choix
  • Soit la loi de l’État de nationalité de l’un des époux au moment du choix

Le choix peut intervenir avant ou après le mariage mais n’a pas d’effet rétroactif (sauf convention contraire et dans la mesure où cette rétroactivité ne porte pas atteinte aux droits des tiers).

A défaut de choix, la loi applicable est déterminée selon 3 critères hiérarchisés :

  • Loi de première résidence habituelle commune des époux après le mariage
  • Loi de l’État de nationalité commune des époux au mariage
  • Loi de l’État avec lequel les époux ont ensemble des liens les plus étroits au moment du mariage

Le Règlement est d’application universelle et s’applique même si la loi n’est pas celle d’un État signataire :

Exemple

Couple de Français mariés en 2020 à Paris qui s’installent immédiatement après leur mariage au Japon. La loi japonaise sera applicable à leur régime matrimonial à défaut de choix.

Le Règlement instaure surtout un principe d’immutabilité de la loi applicable, le régime matrimonial est fixé par choix ou à défaut au moment de l’union mais n’est pas modifié par la suite sauf volonté des époux : la mutabilité automatique est supprimée.

Exemple

Couple de français mariés en 2020 à Paris qui s’installent en Allemagne : à défaut de choix la loi applicable est le régime allemand de « participation aux acquêts ». Quelques années plus tard, il décide de revenir en France : le retour est sans incidence sur leur régime matrimonial qui reste le régime allemand.

Si le couple s’était marié en 2018, lors de leur impatriation les époux auraient été soumis à la loi française du fait de leur nationalité commune, et ce sans rétroactivité. En conséquence 2 régimes matrimoniaux se seraient succédés compliquant la liquidation en cas de décès ou de divorce.

Dans certaines hypothèses, le Règlement RM ne trouve pas à s’appliquer :

  • en cas de contrariété de la loi désignée à une loi dite de police (dont l’observation est jugée cruciale pour la sauvegarde de l’organisation politique ou sociale de l’État au point d’en imposer le respect à toute personne se trouvant sur le territoire) ou en cas de contrariété à l’ordre public international.Par exemple, la loi étrangère désignée refuse à l’épouse d’exercer librement une profession : le juge français peut considérer cette loi comme une atteinte à l’ordre public et l’écarter.
  • A titre exceptionnel, un des époux peut demander auprès des autorités judiciaires l’application de la loi de l’État de la dernière résidence habituelle commune des époux, ce qui crée une insécurité juridique.

En synthèse

Date du mariageAvant le 01/09/1992Entre le 01/09/1992 et le 26/01/2019Après le 26/01/2019 (ou modification du régime après
cette date)
Loi applicableJurisprudence et Droit International PrivéConvention de La Haye du 14/03/1978Règlement européen sur les régimes matrimoniaux du 26/01/2019
Loi applicableRecherche de la volonté du couple : critère prédominant : lieu de fixation du 1er domicile matrimonial Choix possibles :
Avant le mariage (Art. 3) :
- Loi de l’État dont l’un des époux a la nationalité
- Loi de l’État où l’un des époux a sa résidence habituelle
- Loi de l’État où l’un des époux établit une nouvelle résidence commune après le mariage.

Après le mariage (Art. 6) : Mutabilité volontaire
- Loi de l’État dont l’un des époux a la nationalité au moment du choix de changement
- Loi de l’État où l’un des époux a sa résidence habituelle

Choix possibles avant ou après le mariage :

- Loi de l’État de résidence habituelle de l’un des époux au moment du choix
- Soit la loi de l’État de nationalité de l’un des époux au moment du choix


Loi applicableRecherche de la volonté du couple : critère prédominant : lieu de fixation du 1er domicile matrimonial Absence de choix :
Par ordre :
- Loi interne de l’État de première résidence habituelle des époux
- Loi de nationalité commune des époux
- Loi de l’État avec lequel ils entretiennent les liens les plus étroits.
Absence de choix :
Par ordre :
- Loi de première résidence habituelle commune des époux après le mariage
- Loi de l’État de nationalité commune des époux au mariage
- Loi de l’État avec lequel les époux ont ensemble des liens les plus étroits au moment du mariage
Loi applicableRecherche de la volonté du couple : critère prédominant : lieu de fixation du 1er domicile matrimonial 3 cas de mutabilité automatique (art. 7) :
- Lorsque les époux installent leur résidence dans l’État de leur nationalité commune
- S’ils résident plus de 10 ans dans un État après le mariage
- Pour les époux qui n’avaient pas de résidence commune dans le même État après le mariage, lorsqu’ils fixent leur résidence dans un même État.
Fin de la mutabilité automatique

Afin de réduire l’incertitude concernant la détermination de la loi applicable à leur régime matrimonial, les époux ont ainsi tout intérêt à bénéficier du règlement RM et à choisir leur régime matrimonial.

Une fois déterminé ce dernier, comment est liquidée, civilement et fiscalement, la succession internationale ?

quelles règles civiles et fiscales pour les successions internationales ?

Depuis le 17/08/2015, le Règlement Européen N°650/2012 a simplifié le traitement des successions ayant un caractère d’extranéité. Néanmoins ce Règlement n’intervient pas dans le domaine fiscal.

au niveau civil : Règlement Européen sur les successions internationales à compter du 17/08/2015

Avant la réforme sur les successions internationales de 2015 

Pour les successions internationales ouvertes avant le 17/08/2015, la loi française distingue :

  • Les biens immeubles pour lesquels la loi applicable est celle de l’État de leur situation
  • Les autres biens meubles régis par la loi de l’État du dernier domicile du défunt

Depuis le règlement sur les successions internationales du 17/08/2015 

Le Règlement européen sur les successions prévoit un critère unique de détermination de la loi applicable à l’ensemble de la succession :

  • En premier lieu, la loi applicable est celle de la résidence habituelle du défunt à son décès.

Exemple

Un ressortissant français décède au Portugal où il résidait. La succession s’ouvrira selon les règles civiles portugaises.

  • Si la résidence habituelle est difficile à déterminer (cas des expatriés qui vivent de façon alternée dans plusieurs États), le droit successoral applicable dépend alors de l’État avec lequel le défunt présente des liens les plus étroits, tels que la localisation de sa famille ou de son patrimoine.
  • La personne peut également choisir de soumettre sa succession à la loi de l’État dont elle a la nationalité.

Un Français peut donc en application du Règlement Européen faire régir sa succession selon le Code Civil français, peu importe son lieu de résidence à son décès. La désignation de la loi nationale comme loi successorale applicable est nommée professio juris. Cette désignation s’effectue par testament.

En savoir plus : 

Pour les personnes amenées à changer de résidence ou qui réalisent des investissements dans différents Etats, la professio juris permet d’assurer le maintien de la loi successorale applicable nonobstant le lieu de résidence ou des investissements. La professio juris permet également de faciliter le règlement successoral lorsque des spécificités françaises sont difficilement appréhendées à l’étranger.

Exemple

Un couple de Français mariés en régime de communauté universelle avec clause d’attribution intégrale s’installe en Suisse : le droit successoral suisse ne reconnait pas la possibilité pour le conjoint survivant de recueillir l’intégralité de la communauté par contrat de mariage. S’il y a établissement d’une professio juris, la loi applicable au décès est la loi française, évitant ainsi toute difficulté.

Combiner les règlements sur les régimes matrimoniaux du 29/01/2019 et le règlement succession du 17/08/2015 

Par ces deux règlements, les couples expatriés peuvent choisir la même loi applicable à leur régime matrimonial et à leur succession, en l’occurrence celle de la nationalité.

La liquidation du régime matrimonial et le traitement civil de la succession sont alors grandement simplifiés.

Le principe d’application de la loi de dernière résidence du défunt, à défaut de professio juris, est écarté dans l’hypothèse où la loi étrangère est incompatible avec l’ordre public international. Il en est ainsi lorsque la loi désignée porte des règles discriminatoires d’ordres racial, social, sexuel ou religieux par exemple.

La question s’est posée dans le cas où la loi étrangère applicable permettrait une atteinte à la réserve héréditaire et donc la possibilité de déshériter ses enfants.

La médiatique affaire du musicien Maurice Jarre a permis à la Cour de Cassation de prendre position sur la question. En l’espèce, le compositeur qui vivait aux Etats-Unis avait institué sa seconde épouse légataire universel de son patrimoine et bénéficiaire d’un trust. Les enfants déshérités ont contesté la succession. Dans un arrêt du 27/09/2017, la Cour de Cassation a confirmé la décision de Cour d’Appel considérant qu’« une loi étrangère qui ignore la réserve héréditaire n’est pas en soi contraire à l’ordre public international français. »

La Cour de Cassation relève le caractère ancien et durable du domicile du défunt aux États-Unis et le fait que les enfants ne se trouvaient pas dans une situation de précarité économique.

Nul doute que le contentieux en cours sur la succession de Johny Halliday apportera de nouvelles précisions sur cette question qui nécessite sans doute une appréciation au cas par cas, en recherchant notamment la volonté du défunt.

 

En synthèse

Date du décèsAvant le 17/08/2015Après le 17/08/2015
Loi applicableLoi de chaque ÉtatRèglement européen N°650/2012 sur les successions
Pour la loi française :

- Bien immeuble : loi de l’État de situation
- Bien meuble : loi de l’État du dernier domicile du défunt
Par ordre :

- Loi de la résidence habituelle du défunt à son décès

- Loi de l’État avec lequel le défunt présente des liens les plus étroits

- Possibilité de choisir loi de l’État de sa nationalité : professio juris

L’entrée en vigueur du Règlement Européen a facilité la liquidation civile des successions internationales mais n’intervient nullement dans le domaine fiscal où la compétence demeure encore quasi-exclusivement celle des Etats.

fiscalité des successions internationales : convention fiscale ou article 750 ter du CGI

Présence d’une convention fiscale internationale

Les conflits de détermination de la résidence fiscale du défunt entre la France et le pays étranger sont généralement résolus en présence d’une convention fiscale internationale qui, par l’application de critères successifs (foyer permanent d’habitation, centre des intérêts vitaux, lieu de séjour du défunt) fixe la compétence fiscale d’un des deux Etats signataires.

Généralement, le droit d’imposer les biens immobiliers est attribué au pays de leur situation et les biens mobiliers sont imposés selon les règles du pays de résidence du défunt au sens de la convention

Exemple

Ressortissant français domicilié en Belgique. A son décès, l’actif successoral est composé d’un compte bancaire en Belgique et d’une résidence en France.

Application de la Convention entre la France et la Belgique signé le 20/01/1959.

Si le défunt résidait en Belgique au sens de la Convention, il relève de ladite Convention qui prévoit une imposition de l’immeuble là où il est situé (Art.4) et du compte bancaire dans l’Etat de domicile du défunt (Art.8). L’immeuble est imposable en France, les avoirs en Belgique.

Les conventions prévoient également le mécanisme de suppression des doubles impositions via l’imputation d’un crédit d’impôt égal, selon le cas à l’impôt français ou étranger ou une exonération de l’impôt français.

La France a signé une Convention portant sur les successions avec à peine 8 pays de l’UE (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, Italie, Royaume-Uni, Suède) et 25 pays hors UE (dont les Etats-Unis).

La Convention sur les successions avec la Suisse a été dénoncée en 2015.

Absence de convention fiscale 

Dans cette hypothèse, l’article 750 ter du CGI définit les situations dans lesquelles une succession est taxable en France. L’impôt est ainsi dû lorsque :

  • Le défunt est fiscalement domicilié en France : les droits de succession s’appliquent alors à l’ensemble de ses biens situés en France ou à l’étranger.
  • Le défunt et l’héritier sont domiciliés hors de France mais la succession porte sur des biens français ou situés en France.Exemple : Le défunt réside avec sa famille en Russie. Il possède une résidence en France. A son décès, le bien immobilier sera soumis aux droits de succession français.
  • Le défunt est fiscalement domicilié hors de France mais l’héritier est fiscalement domicilié en France ou l’a été pendant au moins 6 ans au cours des dix dernières années: sont alors taxés les biens en France ou à l’étranger.
    Exemple : Le défunt résidait au Luxembourg, les héritiers en France. Quand bien même il n’existe pas de droits de succession au Grand-Duché, la France est compétente pour taxer la part successorale des héritiers domiciliés en France.

La notion de biens français est entendue dans un sens très large et concerne :

  • les immeubles situés en France, détenus de manière directe ou indirectes par des sociétés françaises ou étrangères
  • les biens meubles « français » au sens de ce texte : les capitaux déposés auprès d’une banque française mais également les obligations émises par l’État français, les valeurs mobilières émises par une société française même en dépôt auprès d’une banque à l’étranger.

Le critère de taxation par la résidence de l’héritier est une particularité française, la majorité des pays appliquant uniquement le critère de résidence du défunt et de localisation des biens.

Exemple

Le défunt résidait en Espagne, l’héritier est en Belgique. Taxation aux droits de successions suivant les règles espagnoles uniquement. Sauf si un immeuble appartenant au défunt est situé en Belgique, cette dernière n’est pas compétente, nonobstant la résidence de l’héritier.

Cette problématique de la territorialité des droits de mutation à titre gratuit est vivement ressentie par les ressortissants étrangers qui ne connaissent pas de droits de successions dans leurs pays (Portugal, Suède, Israël, Suisse, Dubai, Luxembourg…) et ce d’autant plus que le seuil de déclenchement de la taxation est relativement bas en France et à des taux rapidement élevés.

L’absence de convention fiscale peut également conduire à une double taxation.

L’article 784 A du CGI prévoit la possibilité d’imputer l’impôt de succession étranger sur l’impôt de succession français dans les situations relevant du 1) et 3) de l’article 750 ter du CGI vu précédemment.

Exemple

Succession d’un résident français détenant un bien immobilier en Thaïlande : taxation en France et en Thailande sur ce bien immobilier.

Possibilité d’imputer les droits payés en Thaïlande sur les droits de mutation dus en France

Bien que simplifié au niveau civil par l’entrée en vigueur de règlements européens, le traitement des successions à caractère international reste encore peu uniformisé au niveau fiscal. L’intervention et le conseil d’un professionnel du patrimoine sont donc plus que jamais indispensables.

Auteur
Julien Milinkiewicz  

Formateur intervenant à L’École supérieure de la banque – Ingénieur patrimonial Luxembourg