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Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

La gestion de la trésorerie d’entreprise est un sujet complexe et central pour tout associé-dirigeant.

La question se pose tout d’abord au titre de l’activité : quelle trésorerie minimum pour assurer son besoin en fonds de roulement (BFR), pour préparer les prochains investissements, pour rassurer les partenaires financiers ?

Mais la trésorerie d’entreprise comporte également une dimension patrimoniale :

  • Comment gérer cette trésorerie ?
  • Quelles sont les solutions de placement possibles au regard des objectifs ?
  • Cette trésorerie doit-elle être conservée dans la société ou être sortie ?
  • Quelles options juridiques et quelle fiscalité pour appréhender cette trésorerie à titre personnel ?

Nous nous attacherons ici à traiter de la partie patrimoniale et nous nous intéresserons à la trésorerie dite stable, c’est-à-dire la trésorerie, placée ou non, non essentielle aux besoins courants de l’entreprise, présente de manière stable sur plusieurs exercices.

Ces dernières années, la trésorerie logée et conservée au sein des sociétés n’a cessé de croître. En cause, des raisons fiscales notamment avec des tendances inversées des fiscalités des personnes physiques et des sociétés.

Alors que depuis une dizaine d’années, la fiscalité à titre personnel s’est fortement alourdie (augmentation des prélèvements sociaux, création de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), tranche marginale de l’impôt sur le revenu à 45 %), le taux d’imposition des bénéfices des entreprises (IS, Impôt sur les sociétés) a suivi une trajectoire descendante, passant en quelques années de 33 1/3 à 25 % (en notant également une imposition à 15 % pour les 42.500 premiers euros de bénéfices, sous conditions ; article 219 I du CGI).

Ce contexte fiscal a conduit les associés-dirigeants à « encapsuler » leurs revenus et à se structurer, le plus souvent via une société holding.

Depuis 2018, la flat tax ou Prélèvement forfaitaire unique à 30 % (prélèvements sociaux inclus), applicable à tous les revenus et plus-values financiers, est venue « rebattre les cartes » de ces stratégies fiscales et conduit dans un premier temps à s’interroger : est-il plus intéressant de conserver la trésorerie dans la société ou de la distribuer ? Au-delà des calculs purement fiscaux, ce choix dépend surtout des objectifs patrimoniaux de l’entrepreneur et de ses souhaits de placements.

 

SOMMAIRE

  • Trésorerie : distribution ou conservation dans la société ?
  • Sortir la trésorerie, quel intérêt patrimonial ?
  • Quelles solutions financières pour la gestion de la trésorerie ?

 

Trésorerie : distribution ou conservation dans la société ?

 

La question du devenir de la trésorerie doit s’analyser forcément sous un angle fiscal mais pas uniquement et pas en première approche. En premier lieu, naturellement, se pose la question des objectifs et projets personnels.

 

 

Existe-t-il un besoin de trésorerie à titre personnel ?

 

L’accompagnement d’un conseiller patrimonial est souvent pour cela essentiel. En effet, nous pouvons à ce stade distinguer :

  • Les projets identifiés, c’est-à-dire perçus immédiatement par l’associé-dirigeant : la conservation de la trésorerie dans l’entreprise s’impose si un projet d’investissement est prévu. La distribution peut être quant à elle nécessaire pour financer une dépense personnelle.
  • Les projets identifiables qui sont quant à eux des objectifs à plus long terme, qu’il peut être utile de travailler dans le cadre d’un bilan patrimonial, telles que la préparation de la retraite ou encore l’anticipation de la transmission.

Il peut être également opportun de rééquilibrer les patrimoines personnels et professionnels afin, notamment, de protéger l’épargne acquise en cas de difficultés ultérieures de l’entreprise ou encore afin d’alléger la structure d’une trésorerie excédentaire afin de faciliter la cession.

Lorsque la sortie de la trésorerie de la société est nécessaire et décidée, reste la question de savoir sous quelle forme et selon quelle fiscalité.

 

 

Comment sortir la trésorerie de l’entreprise et à quel coût, pour l’entreprise et pour le dirigeant ?

 

On peut distinguer trois modes de sortie de trésorerie différents : revenus professionnels, distribution de dividendes ou réduction de capital.

 

Sortie de trésorerie via le revenu professionnel

Le premier vecteur de perception à titre personnel des fonds de l’entreprise est naturellement le revenu professionnel : salaire, rémunération de gérance et autres avantages, tels que les actions gratuites, bons de souscription …

Sous la double réserve de la présence d’un mandat social dans l’entreprise (cela peut ne pas être le cas en présence d’une holding par exemple) ou d’un contrat de travail et du versement d’une rémunération « normale » au regard des prestations fournies, un accroissement ponctuel, sous forme de prime par exemple, peut être envisagé.

Cette solution a l’avantage d’être une charge d’exploitation venant minorer l’impôt sur les sociétés (IS).

Dans ce cas, le dirigeant supporte une fiscalité et des cotisations sociales liées à la forme de la société et à son statut. Le dirigeant d’une SARL, gérant majoritaire, voit ses revenus soumis à des charges sociales plus faibles et donc à un coût global pour l’entreprise plus réduit, que le dirigeant d’une SAS, Président ou Directeur Général, qui est assimilé salarié au regard des cotisations sociales.

Le montant net perçu sera quant à lui imposé au barème de l’impôt sur le revenu après un abattement de 10 % (pour frais professionnels et sous conditions de plafond).

 

Sortie de trésorerie via la distribution de dividendes

Plus classiquement, en présence d’un associé-dirigeant, la sortie de trésorerie s’effectue via une distribution de dividendes.

Sauf rédaction spécifique des statuts ou décision contraire des associés, la distribution se réalise au prorata des parts détenues. Il est donc nécessaire de faire attention à l’efficacité finale de la distribution en cas de présence d’autres associés.

La fiscalité sur les dividendes a longtemps été assez lourde, puisque soumis au barème de l’impôt sur le revenu (néanmoins après un abattement de 40 % , article 158 3 – 2° du CGI) visant à compenser l’impôt sur les sociétés payé par l’entreprise distributrice) et assujettis aux prélèvements sociaux.

Depuis 2018, les dividendes sont imposés par principe à la flat tax au taux global de 30 %, à savoir 12,8 % d’impôt, et 17,2 % de prélèvements sociaux (et/ou charges sociales au-delà d’un seuil selon la forme de la société et le statut de l’associé).

Les distributions sont ainsi plus attractives pour les contribuables imposés aux tranches supérieures du barème de l’impôt sur le revenu.

 

Sortie de trésorerie via la réduction de capital

Il peut également être intéressant de recourir à la réduction de capital, si la situation s’y prête d’un point de vue économique et financier.

Une société peut procéder à une réduction de capital non motivée par des pertes. Concrètement, la société rachète ses propres titres à un ou plusieurs associés et vient corrélativement réduire son capital par annulation desdits titres.

Fiscalement, cette opération est considérée comme une cession au profit de l’associé : il sera donc taxable selon le régime des plus-values mobilières.

Celle-ci sont, depuis 2018, soumises à la flat tax par principe et sur option au barème de l’impôt sur le revenu. Cette dernière option peut s’avérer intéressante lorsque les titres sont acquis avant le 01/01/2018, la plus-value imposable pouvant alors faire l’objet d’un abattement pour durée de détention au taux normal ou majoré sous certaines conditions (article 150-0 D 1 Ter A du CGI) (notamment société créée depuis moins de 10 ans lors de la souscription des titres). Un abattement en cas de départ à la retraite (article 150-0 D Ter I-1 et 2 du CGI) est également applicable sous certaines conditions et pour les deux options (flat tax ou barème de l’IR).

Néanmoins, cette réduction de capital doit être envisagée avec précaution afin de ne pas être considérée fiscalement comme une distribution déguisée et risquer une requalification. Il est important pour cela de s’entourer de conseils professionnels.

 

Source : Ingénierie Patrimoniale Le Conservateur

 

Sortir la trésorerie, quel intérêt patrimonial ?

 

Comme nous l’avons évoqué ci-avant, le rééquilibrage entre le patrimoine privé et professionnel peut être guidé par des considérations liées à l’entreprise ou à sa situation personnelle.

 

Sortir la trésorerie : quel intérêt pour l’entreprise ?

 

Pour l’entreprise, la sortie de trésorerie présente deux avantages principaux :

  • sécuriser les gains réalisés en cas de retournement de conjoncture économique ou de difficultés futures de l’entreprise.
  • préparer la cession et/ou la transmission en allégeant la valeur de l’entreprise.

La cession serait en effet plus lourde pour un potentiel repreneur si la société conserve en son sein une trésorerie abondante excédant son BFR et viendrait ainsi limiter le nombre de candidats.

 

A noter :

Nous pouvons avoir le même raisonnement pour les locaux professionnels qui sont parfois inscrits au bilan de l’entreprise et pour lesquels une étude doit être menée dans le cadre du projet de cession.

 

La transmission d’entreprise à un enfant repreneur bénéficie d’un régime fiscal de faveur, avec le possible Pacte Dutreil (article 787 B du CGI), permettant, sous conditions, un abattement de 75 % sur la valeur de l’entreprise transmise pour le calcul des droits de donation. Néanmoins, la trésorerie pour sa part considérée comme excédentaire ne peut pas bénéficier de cet avantage (sauf exceptions en présence d’une holding animatrice).

 

Sortie de trésorerie : quel avantage à titre personnel ?

 

La gestion patrimoniale personnelle du dirigeant d’entreprise est souvent négligée, avec une attention tournée bien naturellement vers le développement de l’entreprise.

Un projet de cession est souvent l’occasion de se poser des questions : comment préparer au mieux la retraite, ou encore la transmission du patrimoine ?

L’établissement d’un bilan patrimonial permet d’appréhender les grands équilibres du patrimoine et de vérifier si sa constitution actuelle est conforme aux objectifs. Des arbitrages peuvent ainsi être proposés, ainsi que des solutions juridiques (donations par exemple) et enfin des préconisations en termes de placements financiers, telle l’assurance-vie permettant d’optimiser la gestion du patrimoine personnel :

  • financièrement : de nombreux supports financiers sont accessibles, du risque le plus faible au plus élevé. La gestion financière peut être extrêmement fine.
  • fiscalement, ses atouts sont nombreux, autant dans le cadre d’un besoin de revenus que de transmission : la capitalisation des revenus et plus-value et le mécanisme du rachat, conduisent à une fiscalité relativement faible en assurance-vie, comparée à celle d’autres investissements qu’ils soient immobiliers ou financiers. Et les capitaux non consommés seront transmis, en cas de décès, aux bénéficiaires désignés, sans taxes jusqu’à 152 500 € chacun (pour les versements avant les 70 ans du souscripteur, article 990 I du CGI).

Cette stratégie personnelle peut être complétée par d’autres supports financiers, tels que le Plan Épargne Retraite (PER) ou encore la tontine.

 

Sorties de trésorerie et stratégies patrimoniales spécifiques

 

La question de la distribution de la trésorerie peut aussi permettre de mettre en place des stratégies juridiques intéressantes et extrêmement efficaces. Citons deux exemples :

  • Pour un couple marié en communauté, lorsque l’entreprise est un bien propre (créée avant le mariage par l’un des époux par exemple, ou acquise par donation) : les dividendes distribués sont des biens communs permettant ainsi de rééquilibrer le patrimoine entre les deux époux. A contrario, le maintien de la trésorerie dans l’entreprise permet à ces fonds de rester en propre à l’époux associé, dans une logique de transmission familiale par exemple.
  • Dans le cadre d’une société détenue en démembrement entre les parents et les enfants (hypothèse d’une donation avec réserve d’usufruit réalisée par les parents associés, schéma courant de préparation de la transmission pour les sociétés patrimoniales) : les dividendes distribués appartiennent à l’usufruitier, sauf stipulation contraire des statuts. Dans notre hypothèse, ils peuvent ainsi être utilisés en guise de revenus complémentaire pour les parents.

Les réserves appartiennent néanmoins au nu-propriétaire : la mise en réserve des résultats en lieu et place de leur distribution permet ainsi d’accroitre la valeur du bien transmis aux enfants.

Il reste néanmoins conseiller de poursuivre une distribution minimale régulière en faveur de l’usufruitier afin de justifier de la réalité du droit d’usufruit et d’éviter une requalification en abus de droit.

Une vision globale de l’ensemble de la situation et des objectifs de l’entrepreneur se révèle donc essentielle afin d’opter pour les choix les plus efficients.

 

Quelles solutions financières pour la gestion de la trésorerie ?

 

Dans le cas où les besoins à titre personnel sont satisfaits, il est inutile de subir une pression fiscale sur une distribution. Mieux vaut alors gérer ses fonds au sein de la société dans le cadre d’une stratégie de capitalisation.

On constate en effet qu’en cas de distribution, il faudra un gain de 43 % pour rattraper le capital initial.  Le report d’imposition peut alors être véritablement générateur de richesse.

Comparaison : capitalisation au sein de la société / distribution et placement en assurance-vie pour un capital de départ de 500.000 € 

 

(hypothèses : Taux de rendement global net de frais/ an : 2,9%)
Source : Ingénierie Patrimoniale Le Conservateur

 

Dès lors, la gestion des fonds au sein de la société va dépendre en premier lieu de la nature et de l’activité de la société : est-ce une société d’exploitation, une holding, une société patrimoniale ?

Les solutions d’investissement peuvent en effet différer selon que la société est une structure d’exploitation (société opérationnelle) ou une structure de détention « passive » (holding, société patrimoniale familiale).

Conservation de la trésorerie dans l’entreprise : exemples de possibilités de placements

Source : Ingénierie Patrimoniale Le Conservateur

 

Très faiblement ou non rémunérée lorsqu’elle est laissée sur les comptes de l’entreprise, la trésorerie peut être optimisée à travers la souscription d’instruments financiers.

 

Quelle solution financière pour toute société ?

 

Au-delà de la solution du dépôt à terme (DAT), toute société (sous réserve d’une conformité à ses statuts) a accès à des placements financiers détenus en direct ou via un compte de titres.

Cela peut être, classiquement, des actions, des obligations, des OPCVM (Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières), ou encore des produits structurés pouvant répondre à des attentes précises (en termes de disponibilité des revenus, de rendement, de garantie) selon des conditions prédéfinies.

Il est ainsi possible de définir une stratégie d’investissement correspondant aux attentes du dirigeant et à son profil d’investisseur, avec plus ou moins de risque et plus ou moins de rendement.

 

Quelles solutions financières pour les sociétés patrimoniales et les holdings ?

 

Les sociétés patrimoniales se voient ouvrir d’autres options. Si la souscription d’un contrat d’assurance-vie est impossible pour une personne morale, le contrat de capitalisation peut s’avérer particulièrement adapté dans le respect des recommandations « France Assureurs » qui limitent son accès aux sociétés patrimoniales, sans activité commerciale ou moindre.

Le contrat de capitalisation permet dès lors aux holdings, sociétés patrimoniales (SCI par exemple), associations ou autres personne morales, d’avoir accès à de nombreux supports : parmi eux, le fonds euros qui offre une garantie de la compagnie sur le capital versé. Il est possible d’avoir accès également, selon les contrats, à des supports spécifiques, que ce soit en immobilier, produits structurés …

Enfin, la tontine peut être également pour ces structures, une solution d’investissement répondant à un double objectif de valorisation à long terme et de rentabilité en conservant un profil prudent.

 

Gestion de trésorerie au sein de société à l’IS : quelle fiscalité ?

 

Contrairement au compte-titres, où les revenus et plus-values s’ajoutent chaque année au bénéfice imposable à l’IS (15 % jusqu’à 42.500 € de bénéfices sous conditions, 25 % au-delà), la fiscalité du contrat de capitalisation et de la tontine est spécifique.

Les gains sur un contrat de capitalisation et sur la tontine, souscrit par une société imposée à l’IS, relèvent en principe de la fiscalité des primes de remboursement. L’imposition intervient annuellement selon des intérêts évalués forfaitairement (à 105 % du Taux moyen des Emprunts d’État (TME) connu au jour de la souscription). A l’échéance du contrat de capitalisation ou de la tontine, la base taxable sera constituée des gains sous déduction de ceux qui auront été taxés au fil de l’eau.

 

Quelle allocation et quelle répartition ?

 

Ensuite, naturellement, les diverses allocations d’actifs proposées tiendront compte des objectifs et du profil d’investisseur du dirigeant, et notamment :

  • la société a-t-elle vocation à être transmise aux enfants ? Auquel cas une gestion long terme est à privilégier.
  • des revenus seront-ils à percevoir à terme ? Auquel cas l’allocation sera déterminée en lien direct avec l’horizon d’investissement.

Un audit des objectifs mené avec un conseiller patrimonial s’avère utile pour répondre au mieux à la situation patrimoniale de l’entrepreneur.

 

Comme pour tout sujet patrimonial, la martingale n’existe pas. Il s’agit de rechercher des solutions adaptées à la situation et aux projets à court, moyen et long terme. Les conseils de l’entrepreneur (expert-comptable, avocat, notaire, conseiller patrimonial) sont les interlocuteurs privilégiés pour optimiser la stratégie patrimoniale et aider à faire les meilleurs choix.

 

Auteur

Hélène Collomb    et Maxime Roussel

Hélène Collomb est Ingénieur patrimonial
Maxime Roussel est Conseiller en gestion de patrimoine, Délégué régional, chargé d’enseignement à l’ESBanque