Sélectionner une page
LBO ou Leverage Buy Out : principes, types de montages et effet de levier

LBO ou Leverage Buy Out : principes, types de montages et effet de levier

Temps de lecture estimé : 9 min

Rédaction WEB : JUST DEEP CONTENT

En quoi consiste le LBO ? Quels sont les différentes formes de LBO ? Qu’est-ce que l’effet de levier et quels types de dettes sont utilisés ? Explications.

Le LBO (leverage buy out) est un montage financier qui consiste en un rachat d’entreprise ou société par le levier de l’endettement. Le rachat est effectué par une société holding créée à cet effet qui utilise l’endettement pour acquérir les titres d’une société et en prendre le contrôle.

Ce montage fait partie des opérations fréquemment privilégiées lors du rachat d’une société. Le point sur le fonctionnement du LBO, ses différentes formes et le principe de l’effet de levier.

SOMMAIRE

  • Le LBO : principe et effet de levier
  • Les différents types de LBO
  • Le principe du financement par le levier de l’endettement : les différents types de dettes

Le LBO : principe et effet de levier

 

L’investisseur, via le LBO, a deux objectifs : racheter une société cible dont il espère une plus-value à la revente et bénéficier de l’effet de levier de l’endettement.

 

Qu’est-ce que le LBO ?

Comme évoqué il s’agit du principe de rachat d’une société, qui peut être une PME (Petite et Moyenne Entreprise) comme un grand groupe international.

Le LBO permet, avec un apport limité, de prendre le contrôle de 100% du capital d’une société. Le montage repose sur une structuration entre apport en capital et recours à l’endettement.

Les investisseurs, intéressés par une société dont ils espèrent une forte croissance et une plus-value future à la revente, acquièrent la société cible via une holding de reprise.

Ils réalisent pour partie un apport en capital au sein de cette holding mais privilégient surtout l’endettement à taux fixe. La capacité de la société cible à distribuer des dividendes est cruciale. C’est en effet par ce moyen que la holding de reprise des investisseurs remboursera l’endettement. Les investisseurs sont souvent des fonds d’investissement seuls ou accompagnés d’un repreneur personne physique ou société.

Exemple de schéma de structuration de la holding de reprise :

Source : Sabine Petitgirard pour l’ESBanque

Dans cet exemple, les investisseurs en capital apportent 35 pour l’acquisition d’une société cible ayant une valeur de 100. La dette de financement bancaire ou permet le financement complémentaire de 65 pour acquérir la cible. L’acquisition de la société cible se fait donc à la fois par apport en capitaux propres et dettes. Investisseurs et banques de financement analysent la rentabilité de la société cible et sa capacité distributive afin de déterminer le montant maximal de la dette.

 

Qu’est-ce que l’effet de levier ?

L’effet de levier consiste à démultiplier les possibilités d’acquisition en recourant à la dette.

Le remboursement de la dette permet en effet un triple effet de levier :

  • Effet de levier juridique: l’apport en capital peut être plus efficace par l’utilisation d’actions particulières comme les actions dites de préférence Elles permettent aux investisseurs de détenir davantage de droits de vote ou de droits financiers.

 

  • Effet de levier financier: il provient de l’endettement qui finance une partie de l’acquisition. Il est important que la société cible qui sera rachetée soit économiquement rentable de telle sorte que le dividende qu’elle pourra distribuer puisse rembourser la dette constituée. Le principal de la dette sera ainsi remboursé par la cible au regard de sa capacité à générer du bénéfice. L’analyse de la société cible et de son business plan est donc fondamental pour déterminer le montant de l’endettement possible.

L’effet de levier financier repose sur la différence entre le taux de l’endettement, c’est-à-dire le coût du financement externe et la rentabilité de la société cible, c’est-à-dire sa capacité à générer des profits et à les distribuer. Si la rentabilité de la société cible est supérieure au coût de l’endettement, l’effet de levier financier est positif pour l’investisseur.

Parallèlement, l’actionnaire au fur et à mesure que l’endettement diminue, pour autant que la valorisation de la cible ne soit pour le moins identique sinon supérieur, voit la valorisation de son capital augmenter. Ainsi la dette est remboursée progressivement et le groupe de société (holding et société cible) prend de la valeur participant à la plus-value et la rentabilité attendue par les investisseurs (associés personnes physiques et fonds de private equity).

L’effet de levier juridique et financier se combine avec un effet de levier fiscal.

 

  • Effet de levier fiscal :

Il est lié notamment au fait de pouvoir recourir à l’intégration fiscale, conditionné entre autres à ce que la holding détienne au moins 95% du capital de la société cible.

 

Intégration fiscale et régime mère-fille : quelles différences ?

L’intégration fiscale impose de remplir certaines conditions (article 223 A du CGI) :

  • Assujettissement à l’IS pour la société mère et fille
  • Concordance des exercices comptables
  • Au moins 95 % du capital de la filiale doit être détenu directement ou indirectement par la société mère. Cette condition garantit que le groupe a un contrôle substantiel sur sa ou ses filiales.
  • Aucune société domiciliée en France et assujettie à l’IS ne doit détenir plus de 95 % de la société mère.

L’intégration fiscale désigne une société dite mère qui se trouve seule redevable pour elle et sa ou ses filiales de l’impôt sur les sociétés, cette option impose la conclusion d’une convention d’intégration fiscale.

Ce régime fiscal permet de remonter le résultat de la cible dans la holding. Cela permet de consolider les résultats fiscaux au niveau de la holding considérant uniquement une quote-part de frais et charges de 1% (depuis la Loi de Finances rectificative de 2015). La Loi de Finances pour 2024 subordonne le bénéfice en cas d’intégration fiscale au fait que la société distributrice soit membre de ce même groupe depuis plus d’un exercice (filiale française).

Ainsi l’impôt sur les sociétés sera diminué des frais puisque ce résultat sera déterminé au niveau de la holding.

L’intégration fiscale permet ainsi de considérer un résultat à un seul niveau, celui de la holding, permettant par la même de déduire le déficit lié au frais générés par le remboursement de la dette.

A noter que les charges financières nettes déductibles du résultat fiscal de l’entreprise sont soumises à une limite ou plafond (à savoir, dans la limite du plus élevé des deux montants suivants 3 millions d’euros ou 30% de son résultat fiscal avant impôts, intérêts, dépréciations et amortissements (EBITDA fiscal (Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation and Amortization)) applicable notamment en cas d’intégration fiscale (article 223 bis du CGI).

Par comparaison, si la cible est détenue à moins de 95 % par la société mère mais à plus de 5 %, elle peut opter pour le régime mère et filiale. Ce régime permet à la société cible de remonter le résultat en quasi-franchise d’imposition mais elle doit payer l’impôt sur les sociétés. Le régime mère-fille permet d’exonérer d’IS les produits versés par la société fille. Fiscalement, la société mère déduit 100 % des produits reçus puis réintègre une quote-part de 5 % de frais et charges.

L’IS supplémentaire est faible, mais le régime reste moins pertinent que l’intégration fiscale. Les frais financiers relativement lourds de la holding génèrent un déficit, et ce déficit ne peut être transmis à la société fille qui paie toujours l’IS. Aussi, dans le schéma et puisque la holding ne génère pas de résultat ou peu (management fees), les frais financiers ne peuvent être déduits qu’à hauteur de la quote-part remontée. A noter qu’il existe un plafond de déductibilité des frais.

 

Le schéma de LBO recourt donc principalement à l’intégration fiscale.

Schéma avec intégration fiscale :

Source : Sabine Petitgirard pour l’ESBanque

 

Les différents types de LBO

 

Selon la nature de l’acheteur, le LBO aura un nom différent :

  • Lorsque les repreneurs sont des cadres dirigeants de l’entreprise rachetée, on parle de Leveraged Management buy-out (LMBO, RES Rachat d’Entreprise par les salariés en France)
  • Lorsque les repreneurs (investisseurs) proviennent uniquement de l’extérieur, on parle de Leveraged Buy-In (LBI)
  • Lorsque les acheteurs sont à la fois des investisseurs extérieurs et des cadres internes à l’entreprise rachetée, on parle de Buy-In Management Buy-Out (BIMBO)
  • Lorsque les actionnaires veulent à terme fusionner l’entreprise avec une autre, on parle de Leveraged Build-Up (LBU)
  • Lorsque les acheteurs sont des investisseurs extérieurs et qu’ils apportent une nouvelle équipe de management, on parle de Leveraged Management Buy-In (LMBI)
  • Lorsque le propriétaire de la société est lui-même acheteur, on parle de Owner Buy-Out (OBO)

Selon le schéma, la répartition capitalistique peut être différente. Très souvent les fonds d’investissements sont des associés participant à l’apport en capital. On peut ainsi retrouver lors de la structuration des « pools » d’investisseurs.

Par ailleurs pour certaines structurations de capital, il est possible d’intéresser les managers en leur permettant de devenir associé minoritaire, directement dans la holding ou par des holdings intermédiées, communément appelées MANCO (pour « Managers Company ») permettant au cercle managérial de monter au capital. Il y a de forts enjeux sur la nature des actions accordées, comme sur le volume de prise de participation et enfin sur la nature du pouvoir décisionnaire dans le cadre de ces prises de participations. La structuration se fait ainsi par la nature des droits de vote, la quote-part de détention directe ou indirecte, la nature des actions par exemple de préférence, des BSA (Bons de souscription d’Actions) ou autres actions spécifiques.

Les associés de la holding de reprise se répartissent ainsi souvent entre les dirigeants de la cible, éventuellement des cadres (MANCO ou non) pour les intéresser au travers d’une montée au capital et des fonds de private equity ou fonds d’investissements.

Il est fondamental de bien structurer le capital de la holding, tant sur le plan de la prise de pouvoir que sur celle de la valorisation à terme pour l’investisseur. La nature de l’investisseur (fonds, dirigeant ou cadre) est également déterminante.

Souvent, la société holding et la société cible fusionnent à la fin du remboursement de l’emprunt. Il est aussi possible de réaliser cette fusion pendant le remboursement. Cette fusion permet à la société de déduire la charge de l’emprunt de ses résultats sans avoir à faire une distribution de dividendes.

 

Le principe du financement par le levier de l’endettement : les différents types de dettes

 

Les fonds empruntés pour la reprise de la société cible correspondent en moyenne à 70 % de la mise initiale. Ces fonds sont le plus souvent apportés par des banques classiques.

Il existe trois types de dettes, mais on retient principalement la dette senior et la dette mezzanine. L’endettement de la holding d’acquisition prend d’abord la forme d’une dette bancaire senior et d’une dette mezzanine, le remboursement de la seconde dette dépend directement du remboursement de la première.

La dette senior : lors d’une opération de LBO, une dette senior correspond à la dette que l’entreprise contracte auprès des banques. Notons qu’un financement par LBO s’accompagne de clauses contractuelles qui imposent au repreneur des contraintes dans la gestion de l’entreprise. Elle prend la forme d’un prêt moyen terme (entre 5 et 8 ans) et couvre plus de 50% à 55% de l’endettement global du LBO.

La dette mezzanine : elle prend la forme d’un prêt subordonné, c’est-à-dire dépendant du remboursement préalable des prêts bancaires, ou d’une émission obligataire assortie de bons de souscription en action ou convertible en actions.

 

Très souvent, le financement est partagé entre plusieurs banques, il s’agit de «pool bancaire ». Une des banques aura le rôle d’agent arrangeur. C’est elle qui va structurer, négocier et mettre en œuvre un financement en dette sénior.

Notons que les fonds d’investissement, tout comme l’investisseur personne physique, peuvent venir en concours sur la partie dette, puisqu’ils peuvent souscrire des obligations (comportant des primes de non-conversion au capital) finançant le rachat de la société cible.

La dette peut prendre deux formes :

  • amortissable : en général sur 6 ou 7 ans. Elles sont remboursées à hauteur de 1/6 ou 1/7 à chaque date anniversaire de la libération de la dette.
  • in fine: ce type de dette se rembourse intégralement à la maturité finale et est bien sûr plus risqué (le risque de la banque ne baisse pas chaque année) et donc plus cher.

 

Comme on peut le constater, le LBO repose sur plusieurs paramètres : une structuration du rachat constituée par une combinaison de fonds propres et crédit, une structuration juridique de la holding lors de la création et l’analyse du business plan de la société cible.

 

Rappelons que le montage est encadré d’un point de vue juridique par plusieurs textes et notamment par l’article L225-216 du code de commerce : « une société ne peut avancer des fonds, accorder des prêts ou consentir une sûreté en vue de la souscription ou de l’achat de ses propres actions par un tiers ». L’enjeux est d’éviter que tout ne repose sur la profitabilité de la cible et donc sur un montage artificiel.

 

Après une forte baisse depuis deux ans, on note une reprise du volume global des LBO. Les opérations de fusions-acquisitions, nommées en anglais « Mergers and Acquisitions (M&A) », désignant plus globalement l’achat d’une ou plusieurs sociétés par une ou plusieurs autres, sont considérées à l’échelle mondiale comme de retour en ce premier trimestre 2024, et notamment dans le domaine de la biotech. Cela laisse présager de beaux jours pour les LBO.

 

Auteur

Sabine Petitgirard  

Juriste Fiscaliste en Banque privée, Intervenante-formatrice à l’ESBanque pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine (diplôme RNCP Niveau 7, spécialisé en gestion de patrimoine).

ISR, ESG : comment investir dans le développement durable ?

ISR, ESG : comment investir dans le développement durable ?

Temps de lecture estimé : 13 min

Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

L’investissement ISR et les critères ESG connaissent un fort engouement : de quoi s’agit-il ? Comment investir ? Quels résultats et quels impacts ?

 

Depuis la pandémie de la Covid-19, le monde évolue dans une situation instable d’incertitudes sanitaires, économiques et sociales.

Dans ce contexte, la protection de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique, sujets présents depuis de nombreuses années, ont pris une importance nouvelle. Le climat est un facteur important de la continuité de l’activité humaine. La trajectoire promise à notre planète quant au réchauffement climatique est suivie de près puisqu’elle aura in fine des impacts certains sur nos vies.

Le sujet environnemental est porté par l’ensemble des acteurs de la planète. Différents accords internationaux ont été mis en place afin de lutter contre le réchauffement climatique, un des plus connus étant l’accord de Paris adopté en 2015 lors de la « COP 21 » ( 21e opus de la Conférence des parties dites COP initiée en 1995 à Berlin).

Cette approche vise à accélérer et intensifier les actions et les investissements nécessaires à un avenir durable, en diminuant l’empreinte carbone.

Les actions menées, décidées régulièrement, doivent permettre de contrôler l’augmentation de la température à 1.5° C d’ici à 2100.

La dernière convention internationale « COP 26 » s’est déroulée à Glasgow en novembre 2021. Son objectif est d’accélérer cette transition et mettre en œuvre des plans d’actions concrets, à plus court-terme.

Aujourd’hui ces thématiques concernent l’intégralité des acteurs économiques et de la population. La planète financière a pleinement intégré cet aspect en orientant sa collecte de fonds vers des entreprises agissant sur les sujets environnementaux.

En parallèle, les  investisseurs, institutionnels ou particuliers, sont à la recherche de diversification et d’une manière différente de placer leurs capitaux, via une approche de conviction et de sens.

Mais que recouvre la thématique d’investissement dans le développement durable, dite ISR (Investissement Socialement Responsable) ou ESG (critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) ? Quels sont les supports ? Quels en sont les résultats et impacts ?

qu’est-ce que la gestion isr et l’esg ?

L’Investissement Socialement Responsable (ISR) regroupe différentes approches intégrant les enjeux Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) dans la gestion financière. On parle plus couramment de finance responsable.

Les gestions ISR ont pour objetcif d’allier performance économique et implications sociales et environnementales.

comment fonctionne la gestion isr ?

Le Gestion ISR sélectionne les entreprises dans lesquelles investir sur la base de deux analyses différentes, financière et extra-financière.

 

Le pilier financier 

Dans cette analyse, les critères financiers sont pris en compte prioritairement, la structure du bilan, l’analyse fondamentale et comparative sont appliquées à l’étude de l’entreprise.

Il s’agit de vérifier la solvabilité, la valorisation potentielle de l’entreprise et sa pérennité économique quant à son business model.

 

Le pilier extra-financier 

A cette analyse financière vient ensuite s’ajouter un autre filtre, celui de l’approche extra-financière.

Celle-ci s’appuie sur les critères dits ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance).

Une entité qui applique l’investissement socialement responsable (ISR) met ainsi en œuvre une grille d’analyse extra-financière (ESG) dans sa sélection. Elle sera ainsi attentive dans ses choix d’investissement :

  • au respect et à la défense de l’environnement
  • au climat social de l’entreprise
  • et à l’application d’une organisation dite « de bonne gouvernance » intégrant la transparence des décisions, des rémunérations, des comptes, l’indépendance des organes de direction et de surveillance et l’abence de conflits d’intérêt.

L’objectif de cette analyse n’est pas uniquement de répondre aux critères ESG. Le respect de ces éléments permet également :

  • de privilégier des entreprises développant des technologies d’avenir consacrant un budget important à l’innovation.
  • d’anticiper les risques potentiels d’image de la société, de discontinuité d’activité, pénalisant de facto, son modèle économique.
  • d’intégrer des entreprises orientant leur stratégie à plus long terme, via la prise en compte d’un développement durable.

ESG pour quelles définitions ?

Environnement :

Il s’agit de prévenir les risques environnementaux, aider à réduire la production de déchets et améliorer l’empreinte carbone planétaire.

En 2005, l’union européenne fixe un plafond d’émission de gaz à effet de serre (GES). La réduction de l’empreinte carbone se fait essentiellement par deux moyens :

  • une imposition dite taxe carbone due par les entités ou entreprises sur leurs émissions de CO2. Le montant de cette taxe va croissant. Elle s’élève en France à 56 € la tonne en 2020 et atteindra 100 € en 2030.
  • des quotas de CO2 négociables sur un marché : les entreprises émettant plus que le plafond de CO2 qui leur est attribué doivent acheter des quotas sur le marché. Celles qui en émettent moins peuvent vendre leurs quotas. Ce marché concerne principalement les secteurs de l’industrie et de l’énergie. Il a été mise en place en 2005 en Europe (Emission Trading Scheme).
    Le prix de la tonne de CO2 sur le marché européen est passé de 25 € en 2019 à plus de 65 € en octobre dernier.
  • La compensation carbone : consistant à compenser les émissions de CO2 d’une société par des investissements dans des projets de réduction de ces émissions. Les émissions ainsi compensées sont considérées comme des « crédits carbone » eux-mêmes échangeables sur le marché du carbone.

Social :

Le critère social cible le dialogue social dans l’entreprise, la préservation et l’amélioration des conditions de travail, le respect du droit du travail et l’aide à la prévention des accidents.

La formation des collaborateurs et leur épanouissement fait partie intégrante de cette thématique.

Gouvernance :

Le thème gouvernance prend en compte les sujets d’indépendance du conseil d’administration, la transparence, la vérification et la sincérité des comptes de l’entreprise ainsi que la qualité de la gestion.

les différentes formes d’investissement isr

On peut distinguer six méthodes de gestion ISR.

 

Approche Best in class

Un fonds best in class sélectionne les meilleures sociétés via un système de notation, selon les critères ESG en distinguant chaque secteur économique, sans n’en exclure aucun.

 

Approche Best in Universe

Il s’agit là encore de viser les sociétés selon leurs critères ESG mais en ne retenant pour chaque facteur que les « meilleurs élèves » quelque soit leur secteur d’activité. Certains secteurs peuvent donc ne pas être représentés.

 

Approche par exclusion

Un fonds d’exclusion exclut les secteurs controversés.

Très souvent, il s’agit d’exclusions d’ordre éthique, en lien avec les secteurs  les plus concernés comme l’alcool, le tabac, l’armement, les jeux d’argent les OGM (organismes génétiquement modifiés), le nucléaire ou les énergies fossiles.

 

Approche Best Efforts

Un fonds Best Effort vise à accompagner les entreprises ayant progressé le plus rapidement dans leurs critères en réalisant les plus gros efforts. Elles seront retenues pour leur dynamique d’amélioration de leurs pratiques ESG.

 

Approche thématique

Un fonds thématique se concentre sur des thématiques dites de mégatendances ou d’avenir, en lien avec le développement durable tels que les énergies renouvelables, l’eau, la santé.

 

Approche d’impact

Ce type de gestion privilégie les entreprises ayant un impact social positif, tout en offrant une rentabilité financière mais ce critère est secondaire au premier.

les différents labels de l’investissement socialement responsable en france

Il existe 9 labels en Europe permettant d’identifier et d’encourager les entreprises engagées dans l’investissement socialement responsable. Nous décrirons ici les quatre labels français.

 

La labellisation ISR

Le Label ISR est le plus connu avec 508 fonds labellisés en 2021. Il a été créé en 2016 par le ministère de l’écologie et des finances et constitue donc un label d’État. Il permet aux épargnants ainsi qu’aux investisseurs professionnels de flécher leurs fonds vers des thématiques durables.

Pour être labellisé ISR, il est nécessaire d’obtenir une certification basée sur six thématiques financières et extra-financières.

L’analyse extra-financière est basée  sur les critères ESG en appliquant les référentiels suivants :

  • prouver la rigueur et le respect du cahier des charges de l’analyse ESG
  • anticiper l’impact environnemental de l’investissement au moyen d’une analyse basée sur les bénéfices de leurs actions
  • mettre en œuvre une politique d’engagement et un dialogue vertueux avec les émetteurs de fonds
  • être systématiquement contrôlé au moyen de tests réguliers

Trois organismes accrédités par le Comité Français d’Accréditation (COFRAC) auditent les entreprises pour le label ISR :

  • L’AFNOR Certification
  • EY France
  • Deloitte

Les organismes d’accréditation portent leurs études sur :

  • les objectifs recherchés par le fonds en termes d’ESG
  • les méthodes d’analyse et de suivi des critères ESG mises en place dans les entreprises sélectionnées par le fonds
  • la construction et la gestion du portefeuille aux regards des critères ESG
  • l’engagement ESG des entreprises sélectionnées par le fonds
  • la transparence de l’information du fonds vers les épargnants et les investisseurs
  • l’évaluation des impacts positifs de la démarche ESG sur l’investissement durable.

Le label ISR est valable trois ans et est renouvelable. Des contrôles de suivi sont prévus pendant cette durée.

 

Le label Greenfin

Egalement label d’État puisque créé en 2015 par le Ministère pour le financement de la transition énergétique et écologique, le Label Greenfin retient des critères ESG mais également des facteurs environnementaux plus marqués. Les secteurs du nucléaire ou des énergies fossiles sont par exemple exclus.

Greenfin a pour objet de garantir :

  • l’exécution d’une taxonomie d’activités dites durables : l’alllocation du fonds doit être majoritairement dédiée à 8 catégories d’activité liées à la transition énérgétique et climatique (Energie, Bâtiment, Gestion des déchets et de la pollution, Industrie, Transport dit « propre », Technologies de l’information et de la communication, Agriculture et forêt, Techniques d’adaptation au changemet climatique). Certains secteurs font l’objet d’une exclusion totale (nucléaire, énergies fossiles) ou partielle.
  • le respect des critères ESG (Environnementaux, Sociaux, Gouvernance)
  • la mesure de l’impact des investissements du fonds en matière de développement durable ainsi que communication et le reporting aux investisseurs
  • la transparence financière de gestion du fonds

Novethic, EY France et AFnor Certification sont les entités habilitées à auditer les fonds souhaitant obtenir ce label. Celui-ci est accordé pour un an, renouvelable et soumis à contrôles réguliers.

En 2021, 73 fonds de gestion sont labellisés Greenfin.

 

Finansol

Créé en 1997, le Label Finansol retient principalement :

  • le critère de solidarité : le financement de projets solidaires, l’affectation de tout ou partie des fonds au financement d’entités qui favorisent l’accès au monde du travail, à l’entreprenariat dans les pays en développement, au financement des améliorations écologiques.
  • l’information et sa transparence auprès des investisseurs. Les produits labellisés doivent être facilement accessibles aux investisseurs en termes de communication.

Les fonds retenus recherchent ainsi des entreprises développant une politique sociale dite juste et solidaire, afin de favoriser l’emploi, contribuer au développement durable de par leurs actions, agir sur le plan environnemental.

Ce label est délivré par un comité d’experts indépendants. Il n’est donc pas accordé par l’État.

159 fonds ont reçu ce label en 2020.

 

Le label du Comité intersyndical de l’épargne salariale (CIES)

Ce label concerne uniquement l’épargne salariale. Il est délivré par un comité représentatif de quatre syndicats sur la base de l’analyse du rapport qualité / prix de l’offre de gestion, des critères socialement responsable et de gouvernance.

15 fonds ont été labellisés en 2016.

vers une taxonomie européenne et des critères isr harmonisés

La lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodoversité ne peuvent se mener qu’à l’échelle internationale.

Il est indispensable que les différents pays s’accordent sur les critères exigées pour la qualification d’investissement socialement responsable et d’ESG. Parallèlement, les entreprises investies dans cette démarche doivent faire preuve de transparence et permettre un contrôle fiable du respect de leurs engagements.

A cet effet, une règlementation spécifique, dite taxonomie, a été adoptée en 2020 en Europe permettant de déterminer ce qu’est une activité durable.

 

Pour revêtir cette nature, l’activité doit contribuer fortement à  l’un des six objectifs de l’Union Européenne en termes de développement durable, sans nuire à l’un quelconque des autres objectifs. A l’heure actuelle, seuls les objectfis d’atténuation et d’adaptation au changement climatique ont été définis.

La taxonomie européenne s’appuie également sur les Règlements SFDR (Sustainable Finace Disclosure) et CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).

Cette règlementation vise à harmoniser les critères ISR mais également à mieux les contrôler et éviter le « greenwasing » dont nous parelrons un peu plus loin.

a qui s’adresse l’investissement isr ?

L’ISR s’adresse à tout investisseur, particulier, professionnel, institutionnel souhaitant donner du sens à son épargne. Il est question de favoriser une approche éthique, durable et responsable quant à la destination des fonds placés.

Cette approche suppose néanmoins d’accepter une stratégie de valorisation à long terme, sans qu’il soit pour autant question de faire une croix sur les rendements escomptés mais en les évaluant sur un horizon long.

Ces éléments doivent être clairement établis au moment du choix de l’investissement et correspondre au profil de risque de l’investisseur.

La finance durable a subi une forte mutation et un important développement ces dernières années. Elle constitue aujourd’hui un domaine à part entière de la gestion d’actifs.

Les moyens d’y investir sont nombreux, via plusieurs types de supports d’investissement.

quels supports financiers pour l’investissement isr ou esg?

Il est possible d’investir en ISR par des supports actions, des obligations, des fonds OPC (Organismes de Placement Collectif) thématiques, des ETF (Exchange Traded Funds) spécifiques ou bien encore via des parts de groupements forestiers.

les supports actions

Au travers de la classe d’actifs actions, nous retrouvons la possibilité d’accéder directement au capital de sociétés développant une approche ISR.

Ces entreprises sont alors sélectionnées pour leur politique RSE (Responsabilité sociétale et environnementale), leur vocation à alléger leur empreinte carbone, à veiller au bien-être des collaborateurs ou encore favoriser l’inclusion sociale au moyen de l’embauche de personnes en situations de handicap par exemple.

Il peut s’agir de sociétés cotées, y compris des sociétés à forte capitalisation comme celles du CAC 40, beaucoup d’entre elles développant une politique de développement durable, avec des degrés différents d’implication sur ces sujets.

Dans une approche ISR plus « puriste », on privilégiera des sociétés dont l’activité même a un objectif environnemental, quelque soit la taille de cette société.

Il est possible également de retenir des sociétés non cotées et d’investir en ISR via le Private Equity.

les obligations ou greenbonds

Très en vogue depuis la crise de la COVID-19, nombre de gestionnaires d’actifs ou d’institutionnels émettent sur les marchés des titres de créances représentatifs de projet dédiés au fnancement de projets « verts ».

L’investissement est alors réalisé sous forme d’obligations, encore appelées «  greenbonds ». Les capitaux levés sont utilisés au financement de la transition énergétique menés par l’entreprise ou l’entité publique en charge du projet.

La Commission européenne a ainsi lancé une émission de greenbond en 2020, dans le cadre du financement des différents plans d’urgences, pour lutter contre l’impact de la pandémie sur les économies des pays de la zone euro. Elle prévoit d’émettre plus de 200 milliards d’euros de grennbonds pour financer la transition écologique.

Il peut aussi s’agir de titres de créance dits EMTN (Euro Medium Term Note) ou de fonds à formule. Ces produits structurés sont composés d’un produit obligataire, de swap et d’option permettant d’indexer leur performance sur un sous-jacent représentatif d’un indice ou d’un panier d’actions de sociétés ISR.

Ces supports visent un rendement lié au secteur ISR, tout en protégeant le capital investi si les ambitions de valorisation du placement initial sont atteintes, à une date de constatation fixée d’avance.

les opc thématiques

Investir sur des fonds sectoriels et thématiques permet de se concentrer sur un secteur économique et de diversifier l’investissement.

Ces OPC (Organisme de Placement Collectifs) thématiques ont une orientation de  conviction forte. Il est question de favoriser par exemple un secteur d’activité ISR précis ou une zone géographique.

Visant un secteur spécifique, ils présentent une relative décorrélation avec les indices boursiers mondiaux.

Ces OPC vont développer des domaines d’avenir, nécessaires au développement durable, comme par exemple la thématique de l’eau, la diminution de l’empreinte carbone ou les nouvelles technologies ayant pour but de capter les émissions de CO2.

les etf esg

Les ETF (Exchange Traded Funds) sont des fonds dont l’objectif est de répliquer le plus fidèlement possible un indice de marché.

Les ETF ISR appliquent à leurs investissements les critères ESG ou répliquent des indices ESG comme l’indice S&P 500 ESG ou le DAX 50 ESG, ou plus récemment le CAC 40 ESG créé en mars dernier.

Les ETF ESG connaissent un important succès et représentent plus de 17 milliards d’euros d’encours en 2020 et plus de la moitié de la collecte globale d’ETF en 2021.

Ils permettent d’investir facilement et avec des frais de gestion réduits dans la thématique ESG.

Ils ont néanmoins pour inconvénient de rester très corrélés aux grands indices, les indices ESG étant très proches de leur indice général de référence. Par ailleurs, la thématique ESG regroupe les critères que nous avons détaillés précédemment mais ne représente pas l’intégralité des sujets ISR, notamment en termes d’enjeux climatiques.

les groupements forestiers

Dans une optique de préserver les forêts et la biodiversité, de plus en plus d’acteurs de la finance s’intéressent aux parts de groupements forestiers.

Le rôle des forêts est central en termes de biodiversité et de captation de CO2. Leur bonne gestion permet de prévenir des risques de dégradations liées à l’environnement, aux évènements climatiques, aux incendies ou encore aux maladies des différentes essences de bois, selon leur particularités géographiques ou biologiques.

Leur préservation s’inscrit naturellement dans un objectif de développement durable.

La sélection d’investissement est alors centrée sur la qualité de la gestion des groupements forestiers et la mise en œuvre de bonnes pratiques d’exploitation respectant le développement durable. Des labels spécifiques au secteur forestier ont été créés à cet effet, tels le Label FSC (Forest Stwardship Council).

Par ailleurs, les groupements forestiers offrent, sous conditions, des avantages en termes de fiscalité :

  • une transmission favorisée (abattement de 75% sur la valeur des parts en cas de donation ou succession sur respect de certaines conditions)
  • une réduction d’impôt sur le revenu de 25% dans la limite d’investissement de 50.000 € pour une personne célibataire, 100.000 € pour un couple, selon la législation actuelle et sous condition de plafonnement des niches fiscales.

l’investissement durable : quels résultats ? quels impacts ?

Investir ses fonds dans une optique de favoriser le climat, la biodiversité, le bien-être, la justice et l’équilibre social séduit de plus en plus d’épargnants et d’institutionnels.

L’année 2019 a été à ce titre un véritable tournant, les encours labellisés ISR passant de 46 milliards d’euros en 2018 à plus de 153 milliards fin 2019 en France. En 2021, l’encours des investissement ISR s’élève à 2.000 milliards d’euros en Europe.

Les OPC labellisés ISR en France sont des OPC actions pour plus de la moitié des encours, les fonds monétaire représentent 30 % et les fonds obligataires environ 15 % à fin 2020, le solde étant des fonds diversifiés ou fonds de fonds.

L’investissement ISR connaît donc une fort développement et la collecte croissante de fonds destinés à cette thématique fait espérer des impacts à venir, réels et positifs, sur le développement durable.

S’il est certainement trop tôt pour mesurer ces impacts, il est néanmoins nécessaire de pouvoir réaliser une évaluation régulière et fiable de ces investissements en termes de développement durable, même si cet exercice est difficile.

Le cas échéant, le risque serait celui d’une stratégie jugée sans effet réel, voire d’un objectif purement « marketing » destiné à la collecte massive de fonds, sans souci d’efficacité écologique. L’investissement ISR doit ainsi éviter ce que l’on nomme le « greenwashing ».

Une autre question se pose en termes de performance. Pour les personnes physiques comme les sociétés ou institutions, la question du rendement reste centrale. Les fonds ISR ont longtemps pâti d’une image d’investissement peu performants.

Une étude récente menée de 2016 à 2020 démontre que cela n’est pas nécessairement le cas et que 62 % des OPC labellisés ISR surperforment même le marché.

Il reste certain que de part la nature de leur investissement, la performance des fonds ISR doit s’apprécier sur un horizon long. Cette caractéristqiue ne doit pas être oubliée par l’investisseur au risque de déconvenues et d’inadaptation à son profil de risque.

La forte croissance des investissements ISR témoigne d’une prise de conscience de l’urgence des enjeux écologiques et environnementaux. Elle correspond également à une recherche de sens et de conviction qui traverse nos sociétés actuelles jusqu’au monde de la finance.

La question quant à la capacité des économies mondiales à tenir leurs engagements sur la neutralité carbone va se poser rapidement, d’ici 2040-50-60-70 pour les pays les plus en retards.

Les actions ne seront mesurables qu’à terme. Aucune évaluation ne permet à ce jour de connaître l’impact exact des mobilisations réalisées par tous les acteurs de la transition écologique.

Cette évolution sera certainement difficile pour les économies et les sociétés. Les investissements ISR doivent avoir un impact réel et un rôle central dans la réussite de cette transition.

Auteurs
Anne Brouard et Sébastien Bucher

Anne Brouard est Ingénieur patrimonial et fondateur de JUST DEEP CONTENT, agence de contenu spécialisée en gestion de patrimoine, Intervenante-formatrice pour le CESB Expert en Gestion de Patrimoine, diplôme RNCP Niveau 7 
Sébastien Bucher est Banquier Privé, diplômé du CESB-CGP