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Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Préparer la future retraite de ses enfants, transmettre son patrimoine dans de bonnes conditions fiscales, maitriser l’utilisation des fonds, préparer l’acquisition de la future résidence principale de ses enfants, baisser ses impôts autant d’atouts que présentent le Plan Epargne Retraite, souscrit par un enfant mineur. Nous vous expliquons pourquoi. 

 

SOMMAIRE

  • Souscription à un PER pour un mineur
  • Clause d’inaliénabilité en Assurance vie vs PER : le match
  • Origine des fonds
  • Les avantages d’ouvrir un PER pour un mineur
  • Pourquoi souscrire le plus tôt possible ? 
 

Souscription à un PER pour un mineur

 

Qui peut souscrire ?

La loi Pacte de mai 2019, qui a créé le Plan Epargne Retraite, n’a soumis à aucune condition d’âge, la souscription d’un PER. Toutefois, la pratique est toute autre, puisque les assureurs ont pu insérer dans leurs conditions générales des contrats, ce qui est tout à fait légal, une condition d’âge pour la souscription d’un Plan Epargne Retraite. 

Si à ce jour, certains assureurs le réservent uniquement aux personnes majeures de plus de 18 ans, d’autres l’ont ouvert aux mineurs soit sans aucune condition d’âge, conformément à l’esprit et au texte de la loi Pacte, soit sous condition d’âge de plus de 12 ans, voire de plus de 16 ans. 

 

Comment souscrire ?

C’est très simple. L’adhésion à un PER mineur nécessite l’accord des 2 représentants légaux qui signent alors les documents de souscription (acte de disposition) et peuvent gérer le contrat jusqu’à la majorité de leur enfant, en leur qualité de représentants légaux disposant de l’autorité parentale.  

Dès lors que l’enfant mineur dispose de ses deux parents, ces derniers doivent donner un accord commun à la souscription du PER, au même titre qu’un contrat d’assurance vie. En cas de désaccord entre eux, l’autorisation du juge des tutelles est nécessaire. 

Une seule exception existe à ce principe d’administration légale des parents : lorsqu’un bien fait l’objet d’une donation à un mineur sous condition qu’il soit administré par un tiers administrateur désigné par le donateur lui-même2. 

Par exemple, il serait possible à chacun des grands-parents de réaliser une donation de sommes d’argent à ses petits-enfants, bénéficiant chacun d’un abattement de 31 865 €, avec obligation de remploi des sommes données dans la souscription d’un PER par l’enfant mineur et désignation d’un tiers administrateur autre que le ou les parents. Dans ce cas, les signataires des documents de souscription PER seront les tiers administrateurs désignés dans l’acte de donation avec dérogation au principe de l’administration légale des parents. L’avantage fiscal ici réside notamment dans le fait que les primes versées sur le PER issues de la donation des grands-parents aux petits-enfants viendront réduire l’IR du foyer fiscal des parents auquel est rattaché le mineur. Une bonne combinaison pour répondre aux objectifs de constitution de droit retraite, transmission intergénérationnelle, protection et limitation du coût fiscal.  

 

Clause d’inaliénabilité en Assurance vie vs PER : le match

 

Il a souvent été reproché au PER, sa date de sortie à l’échéance, à savoir la retraite. D’où l’utilisation du terme de « contrat tunnel ». Sauf que cette indisponibilité peut constituer un point positif, notamment dans le cadre d’une souscription mineur.  

Car lorsque les parents ou les grands-parents réalisent une donation de sommes d’argent à leur(s) enfant(s)/petit(s)-enfant(s), ils souhaitent habituellement que le bénéficiaire mineur de cette donation utilise à bon escient les sommes transmises une fois devenu majeur, et notamment l’utilise à l’affectation d’un investissement immobilier par exemple. 

Il est alors possible de prévoir dans le cadre de la donation de sommes d’argent à son enfant, une condition de réinvestissement obligatoire des fonds dans un contrat d’assurance vie. C’est ce qu’on appelle une « donation avec charge ». 

Mais comment faire pour éviter que les fonds ne soient dilapidés dès la majorité du bénéficiaire de la donation, puisque le mineur devenu majeur retrouve sa capacité juridique de gérer seul son contrat et de réaliser les opérations de rachats le cas échéant.  

 

1ère Solution

Prévoir dans l’acte de donation, une clause d’inaliénabilité des fonds, même réemployés dans un contrat d’assurance vie. Le mineur devenu majeur devra alors attendre la date indiquée dans l’acte de donation pour pouvoir réaliser seul, les opérations de rachats sur le contrat d’assurance vie souscrit en remploi des sommes données, afin de pouvoir récupérer celles-ci. Cependant, cette clause d’inaliénabilité est limitée à ses 25 ans. Au-delà, il n’est pas possible de le priver de son droit au rachat sur le contrat d’assurance vie et de disposer librement des fonds.  

Pire, cette clause d’inaliénabilité pourrait être remise en cause judiciairement par le donataire lui-même, devenu majeur, en démontrant que cette indisponibilité lui cause un préjudice, le juge pouvant alors, selon les cas, lever cette indisponibilité avant ses 25 ans, notamment en cas de besoin de liquidités.   

 

Est-ce la meilleure solution ?

La souscription d’un PER, qui apparaît être aujourd’hui la seule solution permettant de limiter l’utilisation des fonds par le donataire, tout en lui permettant de débloquer les sommes de manière anticipée, et ce, pour leur pleine propriété, pour des cas strictement énoncés par la loi, et notamment pour l’acquisition de la résidence principale.  

Il ne faudra cependant pas occulter la fiscalité de sortie anticipée pour cause d’acquisition de la résidence principale, puisque dans ce cas, les primes rachetées seront intégrées à l’assiette taxable de l’IR du bénéficiaire du rachat et les intérêts, au PFU ou option IR + Prélèvements sociaux. Mais dès lors qu’il existe un écart de tranche d’IR entre celui des parents et l’enfant devenu majeur détaché fiscalement, un gain fiscal pourra être constaté. 

 

Existe-il d’autres solutions ?

Une donation démembrée avec réserve d’usufruit viager ne permet pas d’arriver strictement à la même solution (indisponibilité des sommes jusqu’à la retraite sauf sorties anticipées), même si on s’en rapproche sans toutefois l’égaler, puisque le nu-propriétaire devra attendre l’extinction de l’usufruit par décès (date non maitrisable) pour devenir plein propriétaire et commencer à percevoir les revenus. Sachant que l’usufruitier pourra dépenser les revenus, qui ne reviendront alors pas au nu-propriétaire à terme, contrairement à la stratégie PER Mineur.  

Même solution pour la donation à terme qui permet de transmettre sans se démunir, en retenant le bien objet de la donation jusqu’à une certaine date précisée dans l’acte de donation, dont la plus tardive est celle du décès du donateur. Mais cette solution ne permet pas au donataire de récupérer le bien de manière anticipée, sauf à le prévoir expressément dans l’acte de donation.   

 

Origine des fonds

 

Pour justifier qu’un enfant mineur dispose de 4 114 €4 sur son compte bancaire chaque année pour réaliser des versements sur son PER, il faut justifier soit d’un acte de donation, soit tout simplement de présent(s) d’usage5 

Le bénéficiaire de la donation de somme d’argent n’ayant pas plus de 18 ans car s’agissant d’un mineur, il ne sera pas possible d’utiliser l’abattement de 31 865 € applicable aux dons familiaux de sommes d’argent (art. 790 G CGI) puisque le bénéficiaire doit être majeur. Il sera cependant possible d’utiliser le don manuel (cerfa 2735) de biens (art. 757 CGI), en ce compris la donation d’une somme d’argent, et bénéficier de l’abattement de droit commun de 100 000 € en ligne directe, ou de 31 865 € lorsque le donateur est un grand-parent.  

PS : Attention à ne pas confondre l’abattement de 31 865 € applicable aux donations de somme d’argent de l’article 790 G du CGI soumis à condition d’âge (donataire > 18 ans, donateur < 80 ans), et l’abattement de droit commun de même montant en cas de don manuel entre grand-parent et petit-enfant, mais sans condition d’âge cette fois-ci (art. 757 CGI).  

Quant au présent usage, qui n’est soumis à aucune formalité déclarative, il s’agit de transmettre une somme modique pour un ou plusieurs événements particuliers dans l’année (anniversaire, fête religieuse, diplôme…). La jurisprudence a reconnu qu’il s’agissait d’un présent d’usage dès lors que le transfert des sommes ne représentait pas plus de 2.5% environ du patrimoine et/ou des revenus annuels pour un même foyer fiscal. Il serait donc possible, dès lors que l’événement particulier est justifié, de transmettre jusqu’à 2.5% de son patrimoine6 chaque année pour un même foyer fiscal, à ses enfants, sans réaliser de déclaration auprès de l’administration fiscale, et préserver les abattements disponibles pour les donations.  

 

 

Les avantages d’ouvrir un PER pour un mineur

 

Une baisse d’impôt pour tous

L’enfant mineur étant rattaché fiscalement au foyer de ses parents, ces derniers bénéficieront de la diminution de l’assiette taxable à l’IR, générée par le versement des primes de l’enfant mineur sur son PER issus d’un présent d’usage ou d’une donation des grands-parents par exemple.  

Le mineur rattaché fiscalement bénéficie de son propre disponible fiscal retraite. Lorsqu’il ne travaille pas ou peu, le minimum déductible correspond à 10% du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) de l’année précédente, soit 4 114 € pour les revenus 2022, et 4 399 € pour les revenus 2023 déclarés en 2024. 

Et comme tout contribuable, il est possible d’utiliser les plafonds non utilisés des 3 dernières années, soit un cumul possible de versement sur le PER Mineur, déductible de l’IR du foyer fiscal, de plus de 16 000 € en une seule fois la même année. Il faudra toutefois pouvoir justifier que le mineur dispose de 16 000 € sur son compte bancaire (voir point précédent « Origine des fonds »).  

 

Un encadrement des sommes pour l’acquisition de la résidence principale

Lorsque le mineur devenu majeur souhaitera acquérir sa résidence principale, il pourra déloquer son PER de manière anticipée, sans attendre la retraite, et récupérer les primes versées et les intérêts générés pour les affecter à l’opération immobilière. Avec l’augmentation des taux de crédit et les besoins d’apport personnel de plus en plus élevés demandés par les banques dans le cadre d’un prêt immobilier, la souscription d’un PER apparait être une bonne solution pour l’acquisition future de la résidence principale du mineur, qui deviendra majeur.  

Les primes débloquées seront certes réintégrées dans la base taxable à l’IR du majeur. Mais si ce dernier est détaché fiscalement du foyer fiscal de ses parents et qu’il commence tout juste à travailler, sa tranche marginale d’imposition devrait être inférieure à celle de ses parents, ce qui constitue un gain fiscal non négligeable : les parents ayant défiscalisé les primes (par exemple sur une TMI à 30%, 41% ou 45 %), et le mineur devenu majeur pourra être soumis lors du rachat des primes à une TMI à 0% ou 11% (tout du moins au début d’activité).  

 

Une sortie en capital ou en rentes

En l’absence de déblocage anticipé, le mineur devenu majeur pourra, au moment de sa retraite, sortir en rentes ou en capital, fractionné ou non, ou réaliser un mix des deux. Et s’il ne le débloque pas à la retraite (puisque ce n’est pas une obligation), alors les capitaux décès seront versés aux bénéficiaires désignés dans le cadre du PER Assurance, sans reprise de la défiscalisation des primes à l’entrée.  

 

Un avantage fiscal supplémentaire sous réserve de versement régulier des primes pendant 15 ans

Mieux encore, si les primes ont été versées de manière régulière tant en termes de fréquence qu’en terme de montant durant les 15 ans avant le départ retraite du mineur devenu majeur, en cas de décès en phase d’épargne, avant son 70ème anniversaire, les capitaux décès transmis aux bénéficiaires désignés du PER Assurance seront totalement exonérés de fiscalité de l’article 990 I du CGI, et ce, quel que soit le bénéficiaire. Un argument supplémentaire pour verser de manière régulière chaque année sur son PER, y compris pour une souscription mineure 

 

Pourquoi souscrire le plus tôt possible ?

 

Même si l’horizon de la retraite peut être très lointain pour un enfant mineur, l’application de la formule des intérêts composés sur le fonds euros, ou une stratégie d’investissements UC diversifiées long terme… permettra, selon les investissements réalisés et supports choisis, de doubler voire de tripler les sommes disponibles une fois la retraite venue. Car comme l’affirment certains, « Les intérêts composés sont la huitième merveille du monde. Celui qui le comprend s’enrichit, celui qui ne le comprend pas, le paie ».  

Commencer le plus tôt possible, pour se constituer des droits retraites, même lorsque l’on est mineur, peut être utile et pertinent, notamment lorsque l’on sait que les futures générations percevront un niveau de pension inférieur à celui de leurs ainés.  Se constituer une retraite par capitalisation prend alors tout son sens, sans occulter bien entendu la fiscalité de sortie, avec une combinaison possible via l’assurance vie classique pour bénéficier cette fois-ci de la disponibilité des sommes sans possible défiscalisation des primes. 

On évitera cependant d’ouvrir un PER mineur dans le seul but de défiscaliser l’IR des parents car dans ce cas, l’objectif principal est fiscal et l’administration pourrait avoir des choses à redire. Il est de la responsabilité du professionnel de la gestion de patrimoine d’en informer son client.

Ainsi, proposer l’ouverture d’un contrat PER à un mineur, en parallèle d’un contrat d’assurance vie, pour lui permettre de se constituer, en premier lieu, des futures droites retraites est donc tout à fait possible, et apparait être une bonne stratégie et un bon conseil.  

 

Auteur

Benoît BERCHEBRU

Directeur de l’Ingénierie Patrimoniale chez Nortia groupe DLPK, intervenant en Master 2 Gestion du Patrimoine diplôme RNCP Niveau 7 à l’ESBanque

Sources:

  • article 382 du code civil 
  • article 384 du code civil 
  • article 790 G CGI (Don familiale de sommes d’argent sous conditions d’âge : donateur < 80 ans ; donataire > 18 ans)
  • article 757 CGI (Don entre grand(s)-parent(s) et petit(s)-enfant(s))