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Rédaction Web : JUST DEEP CONTENT

Arrêts « Finarea » et notion de holding animatrice, mise à jour de la base BOFIP en consultation publique, l’actualité 2021 à connaitre sur le pacte Dutreil.

 

Ce début d’année nous offre une actualité abondante sur le Pacte Dutreil, tout d’abord par les nouveaux commentaires en consultation que vient de proposer l’administration fiscale.

Nous avions évoqué dans un précédent article la thématique de la transmission au travers du Pacte Dutreil et de ses évolutions.

Dans une mise à jour de sa base Bofip du 6 avril 2021, l’administration commente ces ajustements et met en consultation publique une partie de ces commentaires (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 à BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40).

Précisons que ces commentaires sont opposables dès leur publication, jusqu’à leur éventuelle révision à l’issue de la consultation.

Par ailleurs, une jurisprudence récente est venue étayer la notion de holding animatrice, dans le cadre de l’affaire « Finarea ».

Synthèse des points à retenir de ces actualités.

concernant la nature de l’activité et l’éligibilité du dutreil

Concernant la définition des activités éligibles au pacte Dutreil, devant être de nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, l’administration faisait référence aux précisions retenues en matière d’ISF. Elle renvoie désormais aux indications données en matière d’IFI (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 n° 15).

Ce renvoi aux dispositions de l’IFI a des conséquences directes sur le sujet de la location meublée, pour laquelle la question de l’éligibilité restait posée. Ces activités sont désormais clairement exclues. Les titres de sociétés ayant une activité de location de locaux meublés à usage d’habitation ou de d’établissements commerciaux ou industriels munis du mobilier ou du matériel nécessaires à leur exploitation ne peuvent pas bénéficier de l’exonération partielle.

Des précisions sont également apportées sur le changement d’activité pendant la durée de l’engagement collectif. Ce changement est possible lorsque l’activité nouvelle est exercée immédiatement après ou concomitamment avec l’ancienne et revêt une nature industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 n° 17).

sur la notion de holding animatrice et son appréciation

Nous avions évoqué dans notre précédent article sur le Pacte Dutreil-Transmission l’annulation par le Conseil d’Etat de la doctrine relative aux critères d’appréciation de la prépondérance de l’activité opérationnelle en cas d’activité mixte (CE 23-1-2020 n° 435562).

Tirant les conséquences de cette jurisprudence reprise en référence, l’administration précise désormais que, à titre de règle pratique, il est admis qu’une société exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de façon prépondérante lorsque le chiffre d’affaires procuré par cette activité représente au moins 50 % du montant de son chiffre d’affaires total et que la valeur vénale de l’actif brut immobilisé et circulant affecté à cette activité représente au moins 50 % de la valeur vénale de son actif brut total.

S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. com. 14-10-2020 n 18-17.955), l’administration précise que le caractère principal de l’activité d’animation de groupe d’une société holding doit être retenu notamment lorsque la valeur vénale, au jour du fait générateur de l’imposition, des titres de ses filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale représente plus de la moitié de son actif total.

Enfin, Il est repris et précisé que le caractère animateur d’une holding de groupe doit exister durant toute la durée des engagements. Il s’apprécie au moment de la conclusion du pacte Dutreil, donc de l’engagement collectif (ou de la transmission en cas d’engagement réputé acquis) et doit être respecté jusqu’au terme des engagements collectif et individuel de conservation.

 

Fin mars, la Cour de Cassation précise que la holding animatrice doit avoir le contrôle des filiales qu’elle anime et donne raison à l’administration fiscale sur le sujet de l’affaire « Finarea » (Cass. Com. 03-03-2021 19-22-397 Arrêt n°250).

L’affaire « Finarea »

  • Une procédure contentieuse longue de plus de 10 ans
  • Concernant plus de 1 000 contribuables
  • Un contentieux fiscal de plus de 25 millions d’euros

Contexte : La loi TEPA avait étendu à l’ISF le dispositif de réduction d’IR (réduction d’ISF de 75% du montant de l’investissement dans des PME non côtées dans la limite de 50 000 euros). La réduction pouvait s’obtenir par un investissement en direct dans une société opérationnelle ou au travers de holding si elle est animatrice.

Le Groupe FINAREA a ainsi proposé une structuration permettant aux contribuables d’investir au travers de holding et de revendiquer l’application du dispositif.

Outre le sujet de la portée à donner à l’attestation fiscale délivrée par la société, s’avérant comme une condition nécessaire mais non suffisante d’obtention de la réduction d’ISF, cet arrêt revient sur la problématique de la définition de la holding animatrice, par opposition à la holding passive.

La Cour de Cassation rappelle ainsi récemment « qu’une société holding qui ne contrôle aucune filiale opérationnelle ne peut être qualifiée de holding animatrice ». Elle ne valide pas le montage, considérant qu’en dépit des amorçages, il n’y aurait pas de réalité de prise de participation dans les PME opérationnelle permettant de qualifier la holding d’animatrice et partant de répondre des conditions du dispositif de faveur.

Il conviendra de suivre les décisions à venir pour certaines et les renvois après cassation partielle en appel pour des jugements sur le fond.

sur l’engagement réputé acquis

L’administration précise que l’engagement réputé acquis peut s’appliquer en présence de deux niveaux d’interposition.

Elle précise par ailleurs que, par mesure de tolérance, les seuils de détention applicables aux engagements souscrits à compter du 1er janvier 2019 s’appliquent aux engagements réputés acquis à compter de la même date.

Elle considère enfin que l’engagement ne peut pas être réputé acquis lorsque la fonction de direction dans la société cible est exercée par une société interposée.

sur la fonction de direction après la transmission

Après la transmission, la direction de la société cible ne peut être assurée par un associé signataire de l’engagement collectif (y compris le donateur) que s’il possède encore des titres soumis à l’engagement de conservation.

Si, en revanche, tous les titres soumis à engagement ont été transmis, la direction de la société ne peut être assurée que par l’un des héritiers, légataires ou donataires, signataire de l’engagement individuel.

En cas d’engagement réputé acquis, l’exonération Dutreil ne peut donc pas s’appliquer lorsque le donateur continue d’exercer son activité professionnelle principale ou la fonction de direction dans la société après la transmission.

sur les opérations de restructuration pendant l’engagement dutreil

La fusion entre une société interposée et la société cible n’est pas de nature à remettre en cause le bénéfice de l’exonération partielle, même si la société cible disparaît à l’issue de l’opération de fusion, dès lors que les titres reçus en contrepartie de la fusion sont conservés jusqu’au terme de l’engagement de conservation.

Il est également admis que les fusions entre sociétés interposées situées au sein de la même chaîne de participations n’entraînent pas la remise en cause de l’exonération partielle, si les signataires de l’engagement collectif respectent l’engagement jusqu’à son terme et si les titres reçus en contrepartie de la fusion sont conservés jusqu’au terme de l’engagement individuel.

sur l’apport des titres à une société holding

Seuls les titres couverts par un engagement de conservation doivent être retenus pour apprécier le seuil minimal de 50 % de l’actif brut composé de participations dans la société cible.

Pour le surplus, la holding peut détenir des participations dans d’autres sociétés, contrôlées ou non, ou des liquidités. En cas d’apport de participations directes et indirectes soumises à un même engagement de conservation, l’administration admet de tenir compte de l’ensemble de ces participations pour l’appréciation du respect de ce seuil de 50 %.

L’administration considère que la condition de détention de 75 % du capital et des droits de vote de la holding s’apprécie au cours de l’engagement individuel, en ne retenant que les seuls droits des personnes tenues par un engagement individuel de conservation, à l’exclusion de ceux détenus par les donateurs initiaux ou les signataires de l’engagement collectif.

En cas d’apport à une même holding de titres issus de plusieurs engagements collectifs de conservation, le seuil minimal de 75 % s’apprécie engagement par engagement, que les titres transmis proviennent d’une même société sur laquelle plusieurs engagements ont été conclus ou de plusieurs sociétés différentes.

L’apport n’a pas pour effet de prolonger la durée exigée pour l’exercice de la fonction de direction dans la société objet du pacte.

Enfin, l’administration fiscale précise également les modalités de prise en compte des titres sous engagement Dutreil pour le calcul du forfait mobilier dans le cadre d’une succession.

Le forfait mobilier se calcule en effet sur l’ensemble des valeurs mobilières, autres que les meubles meublants, et immobilières composant l’actif héréditaire et avant déduction du passif. Il n’est pas tenu compte, pour la détermination de ce forfait, des biens exonérés de droits soit totalement, soit partiellement, à concurrence de la partie exonérée. L’administration indique, en toute fin des commentaires, que cette exclusion vaut pour le dispositif de l’article 787 B du CGI (Pacte Dutreil sur des titres de sociétés). Une précision qui mérite d’être rappelée.

 

Ces nombreuses précisions permettent, sous réserve d’éventuelles modifications car il s’agit d’une consultation publique jusqu’au 6 juin, d’apporter des clarifications bienvenues sur l’application du Pacte Dutreil, outil d’importance pour favoriser la transmission de l’entreprise entre générations.

Auteur
Sabine Petitgirard
 

Juriste fiscaliste patrimonial private banking et intervenante-formatrice à l’ESBanque pour le CESB EGP (diplôme RNCP Niveau 1, spécialisé en gestion de patrimoine).